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JOURNAL SPIRITUEL

1945

TÉNÈBRES ET LUMIÈRE
2

« Que l’on comprenne ma vie... »

(...) Jésus est venu me dire :

— Les hommes sont loin, très loin de comprendre ma vie divine dans les âmes, et ceci est cause d’une grande douleur pour mon divin Cœur. Voilà pourquoi le nombre des âmes réparatrices, le nombre de ceux qui arrivent à la sainteté dans sa perfection est très petit.

Le nombre des âmes appelées est grand, mais très petit le nombre de celles qui persévèrent et restent fidèles à l’invitation divine.[1] Sais-tu pourquoi ? Parce que le nombre de ceux de mes disciples qui comprennent cette vie divine dans les âmes est très restreint. Le nombre de ceux qui savent soutenir et guider les âmes vers moi est très petit.

À quelques-unes ils coupent les racines, les jettent par terre et souvent ont des chutes graves...

D’autres, par leur malice sont conduites par des voies erronées.

D’autres encore les condamnent, appelant faux ce qui est vrai, ou que c’est humain ce qui en réalité est divin.

(...)

Comment pourront les pécheurs être sauvés ? Comment l’humanité pourra-t-elle être sauvée ?

— Mon Jésus, vous seul le savez. Trouvez-en, vous même la solution et ayez compassion des uns et des autres.

— Ô victime des âmes, le grand remède, le plus grand remède est entre tes mains et non pas entre les miennes : acceptes-tu les souffrances que je vais t’envoyer ?...

— J’accepte tout, mais je désire entendre de vous la promesse que vous ne m’abandonnerez pas un seul instant et que vous ne permettrez pas que je vous offense, soit par faiblesse, soit par découragement...

(...).

— Je ne viendrai pas te parler, ni le vendredi ni les premiers samedis. Ta passion ne s’arrêtera pas ; elle sera même davantage douloureuse ; elle sera même plus complète. Tu deviendras pire que les aveugles qui n’ont jamais connu la lumière : ils ne l’ont jamais vue, mais ils croient qu’elle existe. Toi, tu deviendras comme si tu ne croyais en rien. Tu auras besoin d’assistance et de quelqu’un qui t’affirme que la lumière existe, que tes chemins sont les miens... Moi, même si caché, ainsi que ma Mère bénie, nous ne t’abandonnerons jamais...

C’est ta dernière phase, et aussi la plus douloureuse. Oh, quelle agonie sera la tienne !...

Immédiatement après ceci, tu iras au ciel.

Combien ta mort sera merveilleuse ! Elle se déroulera dans la plus grande agonie, mais aussi remplie du plus grand amour...

Pour qui m’offres-tu les dernières souffrances ?

— Pour tout ce qui est de la divine Volonté : je ne veux que cela.

— Ô mon aimée, je veux que tu m’offres une partie de celles-ci pour les prêtres, afin qu’ils aient la divine lumière et comprennent ma Vie divine dans les âmes, qu’ils la possèdent toujours davantage, afin de mieux la communiquer toujours ; afin qu’ils n’aient pas d’autre vie que la mienne ! Je veux que tu m’offres une partie de tes souffrances pour ceux qui, n’ayant pas compris ni étudié ma vie dans les âmes, ils n’essaient pas d’éteindre la lumière en y anéantissant ma Vie.

Je veux encore que tu m’offres une partie de tes souffrances pour ceux qui m’offensent gravement.

L’autre partie de tes souffrances, offre-la pour le monde entier, afin qu’il t’appartienne : je te l’ai confié...[2]

« Je suis seule, sans personne... »

(...) Je sens la perte de Jésus et de toutes les créatures. Je suis seule, sans personne, personne pour moi...

Je ne peux pas me consoler que Jésus ait arrêté de me parler : je ne puis y résister. Le devoir d’écrire tout ce qui se passe en mon âme est un tourment pour mon âme. Les colloques avec Jésus, craignant que moi-même, je puisse y ajouter quelque chose de moi, sont aussi des tourments pour moi. Mais qu’en sera-t-il de moi quand Jésus se cachera pour de bon ? Si j’avais la possibilité de choisir, je préférerais les colloques et l devoir de tout écrire, même jour et nuit, sans aucune trêve, s’il en était possible. Je souffre de ce que Jésus vienne me parler et je souffre aussi horriblement du fait qu’il ne le fasse plus. Quand ne viendra-t-il plus ? Je l’ignore : voici l’esclave du Seigneur ! Mon Dieu, quand et de la façon que vous voudrez ! Soyez avec moi !

(...)

Aujourd’hui ce fut un jour de grands souvenirs, d’un triste anniversaire : trois ans de jeûne et sans ma bien-aimée crucifixion [physique]. J’ai pleuré de nostalgie pour les deux choses. Mon âme était en paix, contente des tendres dispositions et attentions de Jésus... Des larmes ont coulé le long de mes joues. Celles-ci ont augmenté ma peine, car je craignais par celles-ci avoir attristé mon Jésus.

Mon Dieu, mes larmes ne sont pas des larmes de désespoir ; ce sont des larmes d’amour et de résignation. Je me conforme tout à fait à votre volonté. Par cette douleur et par cette nostalgie je peux comprendre et ressentir plus au vif ce que sont vos anxiétés, votre faim des âmes et la grande peine que vous cause leur perte...[3]

« Quelle belle nuit !... »

Le monde me fuit ; je ne sais pas comment l’attirer. Je meurs de faim et de soif pour lui... J’aimerais expliquer et démontrer l’amour de Jésus pour ses enfants : mais je ne sais pas, ni le démontrer ni l’expliquer, je sais par contre le ressentir et le comprendre... Le monde me fuit, le monde se perd et je ne peux pas l’empêcher. Le voyant courir vers l’abîme, vers la perdition, je tombe les bras en croix, je tombe épuisée.

J’ai tout donné et je n’ai pas pu éviter sa perte. Je me sens en lutte contre la mort, mais l’heure n’est pas encore venue. Les souffrances auraient déjà du me faire mourir.

Il fait nuit et mon âme sent comme jamais que c’est une nuit d’amour : la sainte nuit. Jésus s’apprête à partir, mais il veut rester avec nous. Quels liens d’amour partent de son Cœur vers les cœurs de ceux qui lui sont chers ! Quelle anxiété de partir mais aussi de rester !

Mon cœur ressent tout cela : je suis le pain, je suis le vin, je suis l’hostie, je suis le tabernacle. Quelle nuit féconde, quelle belle nuit ! Les anges sont descendus pour adorer ce grand mystère...[4]

« Je te loue pour ta fidélité… »

(...) Mon âme et mon corps m’ont avertie que l’on me conduisait, attachée, et que certains, poussés par une foule composée de la lie la plus vile du peuple, se moquaient de moi et me condamnaient à mort.

Mes oreilles entendaient les paroles « qu’il meure, qu’il soit condamné ! », scandées à l’unisson. Quels hurlements !

Je pris la croix, et je suis ensuite tombée bien souvent. À chaque moment il me semblait que j’allais expirer. Je tombais et la croix tombait sur moi.

Non point par compassion, mais par crainte ils voulaient que quelqu’un la porte à ma place. Quelqu’un l’a prise, non pas par amour, mais à la suite d’un ordre reçu.[5] Malgré cela, j’ai senti que mon cœur le rétribuait par beaucoup d’amour. Quelle grande récompense !

Mon corps était confié aux malfaiteurs, mais mon esprit était tout concentré en Dieu.

Sur le Calvaire le sang coulait de toutes les plaies de mon corps. Quelles heures de grande agonie. Je sentais dans mon âme tous les soupirs de Jésus. Tous les regards qu’il levait vers le ciel ont été imprimés dans mon âme. Juste avant d’expirer, ce n’était que de temps un temps qu’il soupirait, et dans l’intervalle, entre un soupir et un autre, il restait comme s’il n’avait plus de vie. Et mon âme ressentait tout ceci.

Combien c’était beau ! Quelle merveilleuse leçon Jésus nous a donné ; lui qui a été si maltraité alors qu’il était rempli de tant de tendresse et d’amour !

(...)

Jésus est venu. Il m’a fait oublier, pendant un court instant, la souffrance. Mon cœur s’est dilaté et s’est incendié.

— Je viens, ma fille, te féliciter pour ton anniversaire, pour ta vie pleine de merveilles, si riche de vertus et d’amour.

— Elles sont pour vous, mon Jésus, les félicitations et les louanges. Que puis-je faire sans mon Jésus  ? Que suis-je sans vous  ? La grandeur est pour vous, la misère pour moi.

— Je te loue pour ta fidélité et correspondance à mes grâces divines je te loue pour ta réparation. Combien de victimes je me suis choisi et qui se sont refusées ! Combien j'en ai appelé et qui ne m’ont pas entendu ! Combien j’ai invitées à une grande élévation vers moi et desquelles je n’ai rien obtenu. En toi je me suis consolé, de toi j’ai tout reçu...

Ta vie est une vie de merveilles ! Si tu voyais les âmes qui par ton intermédiaire se sont sauvées, et particulièrement en ces trois dernières années de ton jeûne ! Quel grand moyen pour secourir les pécheurs ! Je manifeste en toi mon pouvoir, mes soucis et mon amour pour elles...

Ton martyre arrivera à son apogée et ton amour à la plus grande hauteur, par une réparation sans égale.

Reçois maintenant, ma fille, le Sang de mon divin Cœur : c’est la vie dont tu as besoin, c’est la vie que tu donnes aux âmes.

J’ai vu le Cœur de Jésus en embrasé et débordant d’amour...[6]

« Qu’est-ce que cela peut être de perdre Jésus éternellement  ?... »

C’est avec un grand sacrifice, parce que privée de forces, que je vous écris pour vous remercier de la lettre qui si charitablement vous m’avez envoyée. Que le Seigneur vous en récompense.

Pour moi, ce n’est pas une consolation recevoir des lettres ou des nouvelles concernant des personnes que j’estime beaucoup et qui sont le soutien et le guide de mon âme ; c’est à peine un soulagement qui fait revivre ma vie plus que morte. Comme je ne veux que ce Jésus veut, ma volonté reste toujours soumise à la sienne. Je le remercie et le loue pour tout. Je m’abandonne à sa divine Providence et je reçois les épines comme des caresses délicieuses du ciel. Jésus le veut. Par amour pour lui et pour les âmes, je souris à tout.

La peur, lors des assauts du démon, continue, même si ce mois-ci j’en ai été un peu épargnée. Mais quand il vient... O combien de malice !

Que je le désire ou non, quelquefois je dois comparaître en la présence de Jésus. D’autres fois je ne le sens pas, j’éprouve sa perte. Si vous saviez, mon Père, l’horreur que tout ceci me cause ! Qu’est-ce que cela peut être de perdre Jésus éternellement ? J’éprouve sa souffrance pour la perte des âmes ; j’éprouve les sentiments et l’amour qu’il a pour elles : il n’existe pas, ni paroles ni intelligence humaine capable de l’expliquer.

L’image ci-jointe avec la phrase qui parle d’épines est pour vous. Sur l’autre [image], étant donné que je ne peux en envoyer pour chacun des novices et confrères de cette sainte Maison, j’ai écrit une pensée qui intéresse tous : c’est mon désir que tous le pratiquent.[7]

Deolinda et toute la famille vous remercie pour vos salutations et vous les rétribuent avec les vœux d’une bonne fête de Pâques. De ma part, je vous souhaite, à vous et à toute la communauté les tendresses, les bénédictions et l’amour de Jésus ressuscité.

Et vous, quand reviendrez-vous ? En vérité, je vous ai préparé un grand calvaire. Pardonnez-moi, et par charité, ne m’oubliez pas dans vos prières. Je vous recommande tous à Jésus et à la Maman du ciel...[8]

« Que ma mort soit vie pour le monde »

Je n’ai pas vécu, je ne suis pas ressuscitée avec Jésus. Mes yeux n'ont pas vu ; mes oreilles n'ont pas entendu ; mon cœur n’a pas aimé ; mon corps n’a ressenti que souffrance.

Le regard de mes yeux n’était pas le mien, ni l’ouï de mes oreilles était le mien, ni le sentir de mon corps, ni l’amour de mon cœur, ni le sourire qui couvrait tout ceci n’était le mien. A qui appartenais-je ? Jésus le sait, moi je ne sais rien en dire.

Les joies sont pour qui Jésus le veut, excepté pour moi. Mais je suis contente : je ne vis pas, mais que Jésus vive de sa vie divine dans les âmes. Je ne suis pas ressuscitée, que les âmes ressuscitent pour Jésus. Je n’ai pas d’amour, je n’ai rien pour offrir à mon Seigneur ; que l’amour de tous les cœurs, et l’offrande totale de toutes ses créatures lui soit agréable.

Je n’ai pas de langue pour le louer ; que lui soient agréables les louanges de la terre et du ciel. Toute la terre et le ciel le louent ; moi par contre, j’en suis exclue, je suis mise à part.

Je ne peux pas me joindre aux bienheureux du ciel ni aux justes de la terre. Toute la méchanceté et toute la misère du monde sont miennes ; quelle honte ! Quelle horreur !

J’ai perdu Jésus ! Quelle perte éternelle ! Jamais plus je ne pourrai le voir. Il n’y a pas de solution pour une telle perte. Je ne peux pas y penser. Mon âme ne résiste pas à une telle souffrance : perdre Jésus et le perdre pour toujours ![9]

(...)

Jésus est venu :

— Ma fille, (...) je t’accompagne dans la souffrance, dans l’amour, dans les luttes contre le démon. Je suis avec toi dans cette mer immense de martyre dans laquelle tu es plongée. Souris de tes lèvres, cachant ainsi la souffrance et l’amertume dans lesquels tu es ensevelie...

— O mon Jésus, j’ai confiance que vous m’accompagnez, que vous vaincrez toujours en moi, mais pourquoi en même temps, je sens tant de souffrance en parlant avec vous ?

— Afin que ma consolation soit complète,[10] afin que ton martyre et ta réparation soient complets eux aussi...

— S’il en est ainsi, ô Jésus, réjouissez-vous dans ma douleur ! Je ne veux pas la mienne, mais votre joie ; je ne veux pas mon triomphe, mais celui des âmes.

Acceptez mon martyre et faites que ma mort soit vie pour le monde que ma cécité soit lumière pour les cœurs. Je veux que le pauvre monde vive uniquement pour vous, qu’il vous aime et qu’il vous bénisse...[11]

Un édifice mondial d’amour et de pureté en construction...

Je continue à ressentir deux choses en même temps : la perte de Jésus et celle des âmes. La première me cause une telle horreur et révolte que je ne sais pas expliquer : envie de maudire cette perte et de maudire la terre. On dirait que toutes les peines et horreurs de l’enfer me tourmentent. Je sens qu’il serait préférable de tout souffrir et de tout perdre, plutôt que de perdre Jésus. Cette pensée me suffit pour vivre le plus grand martyre dans mon corps et dans mon âme. Mon Jésus, vous perdre !

Et sur cette grande douleur, tombe le poids de la justice divine. Tourment et douleur sans pareille.

Et la perte des âmes, ô combien cela coûte ! Mon cœur les poursuit, leur dispense tendresse et amour. Mon âme en constate la fuite et agonise. Aucun amour ne les retient, aucune parole ne les émeut : elles courent, courent vers la perdition. Quelle douleur pour Jésus et pour moi qui ressens tout cela ! Je ne peux pas me résigner de la perte des âmes.

Ce matin, avec la venue de Jésus eucharistique, de nouvelles anxiétés sont apparues en moi. Ces anxiétés sont à l’origine de la formation d’un nouveau monde dans mon cœur. C’est un édifice mondial en construction. Les anxiétés sont de pureté et d’amour ; l’édifice doit être construit avec ceux-ci.

Quelles flammes ardentes, quel feu brûlant !

Cette pureté et cet amour ne sont pas les miens ; ils sont pour l’édifice, pour le monde. Mon Dieu, quelles anxiétés qui me consument ! J’aimerais parler au monde entier ; j’aimerais lui parler uniquement d’amour et de pureté ; j’aimerais que le monde ne vive que de ces richesses...[12]

« Jésus l’artiste divin... »

L’édifice mondial, ainsi que les désirs et les anxiétés d’amour et de pureté, continuent de m’habiter. Je veux voir le monde brûler d’amour, de pureté de corps d’âme et de cœur.

Je lève les yeux au ciel et je crie souvent :

Que puis-je faire pour que le monde se purifie, s’incendie et ne vive que de votre amour ?

Animée de ces inquiétudes, je suis sortie de la prison ; j’ai parcouru beaucoup de routes serrant bien fort ma croix. J’aimais de tout mon amour les épines qui entouraient ma tête. Du casque[13] fait d’épines coulaient des filets de sang sur tout mon corps et tombaient à terre.

Je sentais que la Petite-Maman venait, folle de douleur, à ma rencontre, ou mieux, à la rencontre de son Jésus. Elle s’ouvrait un passage parmi la foule afin de pouvoir le rencontrer. Son très saint Cœur éclatait, se répandait en douleur et faisait éclater et se répandre celui de Jésus.

Pendant les moments de cette souffrance, le démon est venu l’augmenter davantage ; il m’a tourmentée à l’extrême...

Il me paraissait perdre la vie, mais Jésus est venu me la redonner :

— Courage, ma fille, tu n’as pas péché... Uni ta souffrance à la mienne et à celle de ma Mère bénie...

Sur le Calvaire j’ai senti la vie du bon larron expirer dans mon cœur. Avec quelle paix il remettait son âme à Jésus !

L’obscurité est descendue sur le Calvaire ; toute la terre a tremblé et a fait trembler la croix. Jésus confiait son Esprit au Père éternel, pendant qu’un très grand nombre de curieux atterrés, dévalaient, comme des fourmis, les pentes de la montagne.

Jésus est venu adoucir ma souffrance et faire disparaître la crainte que tout ceci me causait :

— Courage, ma fille, univers de souffrance, de pureté et d’amour !

Ce que j’opère en toi je l’ai destiné aux âmes ! Ta vie observée, lue et divulguée sera une manne céleste, féconde d’une immensité d’amour, de vie et de salut. C’est celui-ci l’édifice que j’ai élevé en toi...

C’est à ton imitation que le monde, à l’avenir, m’aimera ; c’est par ta pureté qu’il se purifiera.

Les hommes empêchent que soit dispensée aux âmes la médecine que je leur ai destinée. Ce qu’ils n’interdisent pas, parce qu’ils ne le peuvent pas, c’est que je continue mes merveilles en toi... Je suis l’artiste divin : je travaille en toi et j’opère les plus grands prodiges. Celui qui t’admire, admire Jésus ; celui qui t’aime, aime Jésus ; celui qui t’imite, imite Jésus.

J’ai reproduit mes traits en toi : tu es la copie la plus fidèle du Christ crucifié. Le monde exultera de joie quand il connaîtra ce qu’a été ta vie sur la terre.

— Ô Jésus, si me parlaient ainsi ceux qui ne me connaissent pas et ne savent pas combien je vous ai offensé, (...) mais que ce soit vous-même, vous qui connaissez tout et à qui rien de ma vie n’est caché... Quelle honte, quelle confusion je sens ! Remédiez vous-même à tout mal, purifiez-moi, comblez-moi d’amour, couvrez-moi de votre grâce, afin que je puisse être pour les âmes la médecine que vous voulez... (...).[14]

« L’heure de la paix est toute proche »

J’ai tant de nostalgie du Ciel ! Je fais un grand sacrifice en ne demandant pas à Jésus de m’y mener immédiatement. Combien de fois, entre autres choses j’ai envie de lui demander : “Après ceci, venez me chercher pour le ciel”, mais, me souvenant de ma promesse de ne pas le lui demander, je me fais violence et je lui dis : “Accomplissez en moi vos divins desseins.”

Il me semble que cela sera un soulagement pour moi si je pouvais demander à Jésus d’accélérer mon départ pour ma Patrie. Quoi qu’il en soit, je ne le demande pas, je ne veux pas manquer à ma promesse...

Après la Communion, la voix de Jésus s’est fait entendre, plus suave que la musique des anges :

— Ce sont un baume salutaire, ce sont la médecine de ton âme si sacrifiée pour moi et pour les âmes.

Pendant qu’il parlait, mon cœur se dilatait, il semblait sortir de ma poitrine et s’élever très haut : comme il était grand !

— Qu’est-ce que ceci, mon Jésus ? Quelle est cette grandeur que je sens en moi ?

— Ma fille aimée, c’est l’édifice de l’amour ; c’est la grandeur de ton amour pour mon divin Cœur et pour les âmes. C’est de cet amour que je veux être aimé ; c’est avec cet amour que le monde sera sauvé.

L’heure de la paix est toute proche.[15] Si le monde, je répète, et encore davantage le Portugal,[16] saura remercier pour la grâce qui lui aura été accordée, la paix sera de longue durée... Si [les hommes] ne me remercient pas, s’ils ne prient pas et ne font pas pénitence, s’ils ne se repentent pas de leurs grands crimes, bientôt tombera sur le monde non plus le feu des armes, mais le feu de la justice divine...

— O Jésus, je suis restée si triste quand je vous ai demandé de rester en vie jusqu’à la fin de la guerre, mais vous savez que je ne veux qu’accomplir votre divine volonté.

— Ce fut moi, ma fille, qui t’ai inspiré de me demander de prolonger ton existence sur la terre pour donner une preuve plus claire à ceux qui se sont opposés à ma divine volonté... (...).[17]

« Ne penser qu’à Lui, ne parler que de Lui,
tout souffrir pour Lui... »

J’aimerais vous tant de choses, mais je ne le peux pas. Jésus et la Petite-Maman vous le diront pour moi. Ils vous feront comprendre combien mon âme souffre, afin que vous ayez compassion de moi. Demandez et faites demander que du ciel me vienne toute la grâce et la force dont j’ai besoin.

Combien d’anxiétés, de tristesses, d’amertumes ; combien d’abattement dans ma pauvre âme ! Tout ce que je fais qui puisse déplaire à Jésus, je le fais involontairement. J’aimerais tout souffrir avec la plus grande perfection et avec le plus grand amour ; je n’aimerais pas blesser Jésus. Plutôt l’enfer, mille et mille fois.

Mais, mon Père, je vous le dis avec la plus grande franchise et vérité : je veux et je ne le peux pas ; je ne trouve rien de bien en moi, rien de vertueux, aucun amour pour Jésus ; je ne suis que misère, rien que misère.

Comme je serais contente si j’aimais mon Jésus et si je pouvais lui donner que de l’amour !

Dans toute cette misère que je sens en moi ne restent que le désir et une volonté très forte de ne vouloir vivre que pour Jésus, ne parler que de Lui, ne penser qu’à Lui, tout souffrir pour Lui.

Croyez, mon Père, que ceci est la réalité ; ne faites pas comme moi qui semble ne pas croire à ce que je dis.

Le démon m’en fait des bonnes !... Combien il me fait souffrir ! Combien il est méchant !

Je ne sais rien de vous, mais je sens que vous souffrez, et pas seulement pour l’interdiction de me confesser. Cette souffrance et toutes les autres dont je suis la cause, même si involontairement, forment le calvaire auquel vous avez fait allusion...

À toute la communauté mon remerciement et mes salutations. Merci pour la lettre écrite avec tant de bonté et pleine de paroles de réconfort pour me stimuler. Quand pourrez-vous venir à Balasar ? J’ai plusieurs lettres auxquelles je dois répondre, mais je ne le ferai pas sans un conseil de votre part... [18]

« Combien de mains indignes distribuant ce pain et ce vin... »
(Moments de la Passion)

Quel feu dans mon cœur ! Il me brûle tellement qu’il semble le détruire. Combien je donnerais, combien j’aimerais souffrir pour obtenir que ce feu soit le mien et qu’il soit un feu d’amour pour Jésus. Je veux de l’amour, je veux de l’amour pour le donner au monde afin qu’il aime uniquement Jésus. Pauvre comme je le suis, je n’ai rien à lui donner ; je ne sais pas comment l’acquérir, je ne sais pas comment le confier à Jésus. Je le vois s’enfuir : il fuit vers un autre monde de perdition.

Je reste les bras ouverts et les yeux fixés au le ciel.

Comment remédier à ce mal ?

Ô Jésus, veillez sur le monde que vous m’avez donné et confié, gardez-le, il est à vous, uniquement à vous ! Donnez-moi votre amour afin qu’ainsi je puisse le conquérir.

Des grandes, très grandes inquiétudes de la terre arrivent au ciel.

Mon Dieu, je vois les âmes pleines de lourdeur et les corps détruits par la lèpre : conséquences du péché. Quelle lumière, celle qui m’oblige à tout voir ! A quel extrême le monde est réduit ! Doux Jésus, votre divin Cœur n’en peut plus.

Je me sens entre le monde et Jésus afin d’éviter que la méchanceté des hommes blesse son Cœur si aimant.

Flagellation, épines et mauvais traitements me blessent. Je ne vois pas Jésus mais je le sens comme opprimé, rempli d’épouvante et qui attend les coups de cette chaîne de méchanceté.

(...)

Sans même avoir pensé à la Cène de Jésus avec ses disciples, je me suis sentie à table. Mon cœur était le calice, le vin et le pain. Tous venaient manger et boire à ce calice. À partir de cet instant cette Cène allait se répéter. Mais quelle horreur ce que j’ai vu ! Tant de Judas buvant et mangeant indignement !

Que de langues sales ! Pire encore : combien de mains indignes distribuant ce pain et ce vin ; des mains indignes et des cœurs démoniaques.[19]

Quelle horreur mortelle ! J’en ai éprouvé tant de douleur et tant d’horreur au point de croire que mon âme allait fondre et le cœur se briser.

Je ne sais pas mieux exprimer ce que j’ai vu, ce que j’ai souffert. Et avant tout l’amour de Jésus, un amour indicible ; un amour que l’on ne peut évaluer qu’après l’avoir expérimenté... [20]

« L’amour dépasse toutes les souffrances... »

Je me suis réveillé d’un léger sommeil et aussitôt je me suis sentie attachée par la taille, traînée par les cheveux, flagellée, couronnée d’aiguës épines, lesquelles me causaient une telle douleur qu’il me semblait que ma tête brûlait dans un grand feu... Un amour irrésistible, sorti de mon cœur, m’attachait toujours davantage à la croix.

L’amour dépasse toutes les souffrances. Sur la croix j’ai éprouvé d’atroces souffrances car il a fallu que je garde ma tête collée au bois de la croix. Ceci avait pour conséquence que les épines pénétraient bien plus profondément ma tête et la souffrance était inénarrable.

Après une longue agonie et un horrible abandon, j’ai senti que la terre tremblait et se fissurait, et que les rochers se fendaient. Tout a tremblé... Je me suis sentie comme si mon âme me quittait, et comme si je n’avais plus de vie.

Mon cœur s’est ouvert et il laissa couler les dernières gouttes de sang et d’eau ; et je suis restée ainsi sans la vie de la terre et sans la vie du ciel...

(...)

— Mère, Mère, ma Mère bénie, venez avec moi réconforter notre petite fille ; venez avec moi mettre du baume sur les plaies de ce cœur et de cette âme, plaies causées par la douleur de ma divine Passion et par la méchanceté des hommes.

J’ai senti comme si la Petite-Maman approchait et qu’elle disait :

— Me voici, mon Fils, mon Fils Bien-Aimé !

J’ai ressenti en mon cœur comme que de fortes injections d'amour qui veinaient du Cœur de Jésus et de celui de la Petite-Maman du ciel. Toute ma poitrine est devenue un vrai foyer. [21]

« L’amour transforme, le feu purifie... »

Ma poitrine brûle, mon cœur brûle : quel feu véhément !

L’édifice est toujours à l’intérieur de moi ; il est en flammes ; il brûle violemment.

Je sens de nouveau que sous cet édifice un rocher mondial a été placé.[22]

Je le frappe, je tourne autour, je dois le secouer. Les flammes brûlent autours et sous l’édifice. Le feu ne s’éteint pas ; le rocher tout autour, çà et là, se brise par endroits, comme du bois. J’entends les morceaux de rocher se briser.[23] Mais, mon Dieu, que de peines ! Il reste encore tant à faire ! Ce feu ne peu pas s’éteindre : le rocher doit être complètement transformé, purifié par le feu divin. J’aimerais ne voir que du feu : du feu dans les corps, dans les cœurs, dans les âmes.

Mon pauvre cœur n’en peut plus de brûler, il n’en peut plus à cause des angoisses. Mais Jésus doit être aimé ; Jésus ne doit pas être offensé...

Je chemine rapidement vers des ténèbres épouvantables. Mon âme est exsangue, mais je dois me plonger dans un abîme où règne la plus grande obscurité. Mon âme le sent, elle la sent déjà venir vers moi, pendant que je chemine vers elle. Ô mon Dieu, qu’en sera-t-il de moi ? Ce sont des ténèbres jamais vues, à travers lesquelles je ne suis jamais passée...[24]

« L’édifice brûle... »

Je sens de fortes secousses ; mon âme est dans de continuels soubresauts ; je ne sais pas ce que cela présage. Seraient-ce de nouvelles « caresses » de Jésus ? Je me plie devant la divine Majesté : c’est rôle de tout accepter. J’embrasse ma croix, aussi pénible quelle puisse être.

L’édifice brûle et les flammes arrivent à la cime du rocher qui se fend petit à petit. Comment le traverser entièrement ? Il n’est pas possible de le transformer totalement en flammes ; quelques morceaux restent sans que le feu les consume.

Je suis sur le rocher, mais ce n’est pas moi. Le rocher est complètement trempé par les larmes qui tombent de mes yeux : ce sont des larmes de douleur et d’amertume ; ce sont des larmes de compassion. Et, ces larmes ne sont pas à moi. Elles tombent de mes yeux, mais elles viennent d’en-Haut. Elles coulent sur mes joues, mais elles coulent des yeux de Jésus. Oh quel dommage ! Tant de souffrance et tant d’amour perdus !...

Le démon, furieux, est venu me tourmenter le corps et l’âme...

On dirait qu’il serrait mes lèvres pour m’empêcher d’invoquer les noms de Jésus et de la Maman du ciel...

Mon Dieu, après tout cela, comment est-il possible que je n’ai pas péché ? Pendant que je souffrais cette inquiétude, Jésus est venu :

— Ma fille, offre-moi tes doutes et tes craintes... Je veux tes doutes pour les âmes qui n’ont pas de scrupules pour m’offenser gravement ; je veux tes craintes pour celles qui marchent toujours sur les chemins de l’impureté, sans crainte de m’offenser et de se perdre...

Aie confiance, tu ne m’as pas offensé.

— Mon Jésus, je crois en votre divine Parole et j’ai confiance en vous ; je ne crains que ma fragilité.

— Reste en paix : ce sont des railleries du démon ; c’est la réparation que j’exige de toi. Tu m’appartiens ; tu n’appartiens qu’à moi !

Peu après ce colloque, j’ai senti Jésus dans mon âme. Il avait un regard très triste et il pleurait à grosses larmes sur la cité de Jérusalem, qui elle aussi était à l’intérieur de moi. Il a pleuré longtemps : son regard était triste et accompagné de paroles d’invitation, mais aussi de menace.

Déjà pendant la nuit je sentais ma chemise de nuit collée à mon corps et trempée de sang, je sentais le déchirement de mes veines et une angoisse de mort.

Je voyais les oliviers du Jardin, la lune pâlie et la brillance triste, comme triste était aussi le divin Cœur de Jésus. Tout paraissait triste parmi les branches des oliviers et, une telle tristesse invitait au silence et au recueillement.

Comme déjà en d’autres occasions, mais bien plus au vif, j'ai senti le baiser de Judas, le bruit des pas des soldats, le retentir des épées. Si je pouvais décrire la tendresse, la douceur, l’amour de Jésus envers tous ceux qui l’offensaient ! Rien n’existe sur la terre qui puisse être comparable à Lui. Il a remédié au mal causé par Pierre avec tant de douceur.[25] Toujours avec autant de douceur il s’est laissé ligoter, se confiant aux malfaiteurs...[26]

« Je te prépare à mon absence... »

En montant vers le Calvaire, je ne pouvais pas ouvrir les yeux à cause du sang qui coulait de ma tête. Je faisais un très grand effort pour marcher. Je sentais qu’il ne s’agissait pas de forces humaines qui portaient la croix, car les souffrances endurées m’auraient déjà, plusieurs fois, causé la mort !...

Clouée à la croix, j’ai senti que beaucoup de ceux qui m’entouraient, me crachaient au visage. Sur les crachats, les larmes de Jésus tombaient, et elles s’unissaient à celles de la Petite-Maman. Jésus, plein de tendresse et d’amour, demandait pardon pour tous au Père éternel.

L’agonie s’est terminée par la remise de l’âme au Père... Je suis restée ainsi pendant quelque temps, étonnée du retard de Jésus :[27] il ne venait pas, il tardait...

Quand il est venu, il m’a dit ceci :

— Je suis en retard, ma fille, parce que je te prépare à mon absence, ou mieux, à ma présence en toi, mais présence cachée. Le terrain est prêt, prépare-toi pour un nouveau martyre, un martyre sans égale. Le terrain préparé est solide ; j’ai pleine confiance en toi. Par un tel martyre tu montreras aux âmes l’intensité de ton amour, la plus grande intensité d’amour pour moi...

J’ai porté au loin les chaînes de ton amour... Combien de secousses j’ai provoqué, à l’aide de celles-ci, sur le cœur du  président de l’Amérique.[28] Combien de fois je l’ai rappelé ! Il a été sauvé grâce à toi.[29] Quelle responsabilité la sienne ! Et combien d’âmes se sont sauvées en même temps ! J’ai utilisé l’offrande de tes yeux pour le salut des gouvernements : l’un d’eux est sauvé et je te promets d’en sauver d’autres. Je ne t’ai pas enlevé la lumière de tes yeux, mais la lumière de l’âme : voilà pourquoi tu vis dans les ténèbres les plus épouvantables. J’accepte tout ce que tu me donnes : tu es généreuse à donner et moi à accepter...

C’est à la chaleur de cet amour que le monde se réchauffera ; c’est par les flammes de cet édifice élevé en toi que le rocher se transformera : le rocher c’est le monde et il est sous l’édifice de l’amour. L’amour transforme, le feu purifie. S’il a de l’amour, s’il y a de la pureté, le monde sera sauvé...

Les morceaux que tu sentis ne pas être transformés, ce sont les âmes qui ne se laissent pas pénétrer par le feu de mon amour divin, qui ne se purifient pas...

Les âmes qui, à travers les temps, ne prendront pas feu et ne se purifieront en cet édifice de pureté et d’amour, devront brûler au feu de la divine justice, elles seront damnées pour l’éternité...[30]

« Mon cœur n’est que feu... »
(Moments de la Passion)

La joie existe-t-elle dans le monde ? Un seul jour dans ma vie l’ai-je, par hasard, connue ? Si une fois ou l’autre je l’ai expérimentée, maintenant elle est tellement morte pour moi, que c’est comme si je ne l’avais jamais connue.

La pensée d’accepter et d’accomplir d’âme et de cœur la volonté de Jésus, me donne un peu de courage. Mais aussitôt, cette autre pensée me tourmente : fais-je vraiment la volonté du Seigneur ? Cette pensée est cause d’une grande agonie et d’une grande tristesse pour mon âme.

Je suis écrasée entre le ciel et la terre ; je suis toute transformée et plongée dans les ténèbres. Quelle chose horrible, mon Jésus ! J’ai peur de moi-même. Qui sans Jésus pourrait supporter tant d’affliction ? Qui pourrait vivre et cheminer à travers une obscurité si noire sans garder les yeux fixés sur Jésus ?

Je meure, mon Dieu, je meure écrasée, broyée dans la terrible nuit. Mon cœur, ainsi opprimé par la douleur, lancent des faisceaux de lumière que je sens et je vois se répandre dans le monde : mon cœur n’est que feu. J’aimerais que tous les cœurs soient blessés par ces faisceaux et que tous les autres cœurs fussent incendiés par le feu qui sort du mien, afin que le monde ne fusse que feu d’amour pour Jésus...

(...)

Triste nuit de jeudi ! Oh, comme Jésus m’associe à ses douleurs et à sa divine Passion ! Je ressens l’angoisse de passer par-dessus toutes les épines et de partir à la rencontre de la croix, l’embrasser, et de continuer mon chemin, chargée de celle-ci jusqu’à la mort.

(...)

Je sens en moi le brasier et ceux qui se réchauffent tout autour. Je sens que l’un d’eux, qui se tient un peu à l’écart, atterré et timide s’approche et renie Jésus. Je sens ses larmes de repentir, tout comme je sens dans mon âme le coq qui ouvre son bec pour chanter.[31] Mais je ressens surtout la souffrance infinie de Jésus, son amour et sa mansuétude envers lui...[32]

« Le Roi habite dans son palais... »

Ce matin, quand je me suis réveillée d’un léger et bref sommeil, les ténèbres de mon âme étaient telles qu’il me semblait voir devant moi une haute et très noire muraille. Je me suis épouvantée et mon corps a tremblé. Ce n’étaient pas les yeux du corps qui la voyaient, mais ceux de l’âme : je me sentais atterrée. Petit à petit je me suis avancée, chaque fois davantage, dans ces épouvantables ténèbres.

Je me suis préparée à recevoir Jésus [Eucharistique] : il est entré dans mon obscurité et dans l’obscurité il est resté. Pauvre Jésus, où il est descendu !

Sans lumière, mais toujours unie à Lui, j’ai parcouru le chemin de mon Calvaire. Je tombais, et la croix tombait sur moi. J’étais traîne et traînée aussi était la croix.

Je sentais une soif brûlante et le plus grand abandon. J’ai entendu sortir de mon cœur ce cri : — “J’ai soif, j’ai soif !” J’ai compris que c’était Jésus, et je me suis souvenue qu’il avait soif d’âmes.

Au même moment j’ai passé sur mes lèvres, plusieurs fois, une éponge. La soif de mes lèvres n’a pas été éteinte et celle de mon cœur a augmenté.

Le cri continuait : ce n’est pas la soif des lèvres qui veut être rassasiée ; c’est la soif du cœur, soif d’âmes.

Je suis restée avec cette soif et dans cet abandon pendant longtemps, le regard tourné vers le ciel et le corps écrasé par le poids de l’humanité. Et Jésus ne venait pas ; il a tardé à venir, et moi, j’attendais, j’attendais !

Finalement il est venu et m’a dit :

— Le Roi habite dans son palais avec toute sa grandeur, tout son pouvoir et tout son amour, même quand la reine ne le voit pas ni ne le sent pas.

C’est pour l’époux une grande peine que de se séparer de l’épouse, mais la séparation n’est pas réelle : je reste caché en toi ; je reste pour gouverner ton âme à travers la parole de celui que je me suis choisi pour te soutenir et te diriger ; je l’ai conduit moi-même à côté de toi. Courage, petite fille, viens dans mon cœur recevoir vie (...), viens recevoir mon Sang ; tu as besoin de vie divine, car petit à petit, tu perds ta vie humaine. Tu vis miraculeusement, tu vis de mon Sang divin : c’est ton aliment.

Jésus a uni son Cœur au mien (...) ; il a fait pénétrer le Sang divin de son Cœur dans le mien, qui, pourtant si petit, a commencé à se dilater à tel point que je pensais que ma poitrine ne pourrait pas le contenir...

— Dans tes veines, ma fille, coule le Sang du Christ ! Comment ne serais-tu pas corédemptrice  ? Dans tes veines, coule le Sang virginal du Christ : comment ne serais-tu pas vierge pure, angélique et victime sans égale ? Dans tes veines, coule le Sang du Christ tout-puissant : comment ne serais-tu pas puissante ? Toute puissante en tout.

Donne ton sang par amour pour moi et moi, par amour pour toi, je verserai le mien en toi. Donne ton pour donner la vie [aux âmes] et moi, je te donne le mien pour te donner vie. Demande ce que tu veux. Pour chaque prière que tu m’adresseras en faveur d’un pécheur, immédiatement le nom du sauvé sera écrit dans le livre de la science divine.

Quand tu seras au ciel, ton nom sera invoqué en faveur des pécheurs. À peine tu me demanderas pardon pour lui, tous les élus se joindront à ta prière et elle sera exaucée.[33]

« Non pas le feu des armes... »

C’est à cause du grand amour que tu as envers mon divin Cœur et envers les âmes, car c’est de cet amour que je veux être aimé ; c’est par cet amour que le monde sera sauvé. Le temps de la paix est tout proche.[34] Si le monde, je le répète, et plus encore le Portugal, saura remercier la grâce qui lui est accordée, la paix sera durable ; je régnerai parmi les hommes, et parmi eux, ma divine paix subsistera. S’ils ne me remercient pas, s’ils ne font pas pénitence et ne prient pas; s’ils ne se lavent pas de leurs grands crimes, bientôt ils sentiront tomber sur eux, non pas le feu des armes, mais le feu de la divine justice ; non pas la destruction causée par le pouvoir des hommes, mais la destruction causée par le pouvoir de la divine Majesté.[35]

Invitation à la prière

Combien j’ai demandé de grâces, à la Petite-Maman, le premier mai ! Je me suis consacrée à Elle afin qu’Elle me consacre à Jésus. Entre autres choses, je lui ai demandé la force qu’il me faut pour savoir souffrir : combien j’ai besoin de l’aide du ciel et de la force de la Maman chérie, pour supporter le poids si écrasant de la croix !

Tout à coup, le deuxième jour, j’ai reçu une “caresse” du ciel, une épine que me blessa et me déchira le cœur. J’en ai remercié la Petite-Maman : je l’ai acceptée et je la lui ai offerte comme preuve de mon amour envers Elle, afin qu’Elle l’offre Elle-même à Jésus.

En moi, tout n’est que douleur. Quelle horreur ! Mon cœur et mon âme sont dans un deuil pesant : j’ignore pourquoi. Je sens des coups violents comme si l’on m’arrachait, par la bouche, tout ce que contient mon corps.

Combien je désire ardemment, presque d’une façon accablante, entendre dire que la guerre est finie ! Jésus seul sait combien je souffre. Je Lui renouvelle mon offrande comme victime afin que la paix revienne. Je ressens une grande compassion pour ces gouvernants que l’on dit morts.[36] Je prie pour eux, et on dirait me mon cœur leur est attaché.

Mon corps est toujours dans une vive flamme et je sens comme si ma propre chambre brûlait en même temps que moi.

Je veux secourir le monde, le prendre, l’emprisonner, le placer tout entier dans cette vive flamme, dans ce fut qui ne me procure pas de lumière. Quelle désolation de vivre dans les ténèbres ! Ma chambre est comme un cachot,[37] où ni le soleil ni la lumière du jour n’entrent jamais : ténèbres dans l’âme et dans le corps ; ténèbres au ciel et sur la terre.

Il me semble que plus jamais je ne pourrai voir Jésus ; je sens comme s’il ne m’appartenait pas, comme si je l’avais perdu pour toujours. Malgré cela je ne désire autre chose que de l’aimer. Je sens un désire fou de l’aimer et, ce désir ne me semble pas mien, tout comme l’amour ne me semble pas mien, alors je dis à Jésus :

— Jésus, ces aspirations ne sont pas les miennes, mais les vôtres ; c’est votre amour, ce n’est pas le mien mais le vôtre. C’est vous qui aimez avec ce qui vous appartient, c’est vous qui souffrez et portez ma croix. Gardez cette pauvrette qui ne fait rien et qui n’a rien : je ne suis que nuit et misère. Je suis votre esclave, la vôtre et celle de la Petite-Maman...[38]

« La prière est l’arme la plus puissante ! »

Comment dicter les choses horribles qui se passent dans mon âme, si je n’en ai pas la force ? O Jésus, cette force je l’attends du ciel, du moment que tout ceci c’est ton bon vouloir [que je dicte].

Je suis sortie de prison ce matin et, jusqu’à maintenant, j’ai parcouru de nombreuses routes, exténuée, tombant çà et là : je restais la face contre terre et la terre collait à mes lèvres, suffocant les plaintes de ma douleur. J’ai senti, venant de loin, les rigolades moqueuses et de satisfaction.

Combien j’étais déjà épuisée lors de mon départ vers le Calvaire ! Là haut on m’enleva les cordes que j’avais autour du cou et de la taille. Quels tourments ! Elles étaient enfoncées dans ma chair, imbibées de mon sang. Lorsqu’on me les a arrachées, elles ont laissé dans mon corps, auquel elles étaient collées, la trace d’immenses plaies.

Cela m’a beaucoup coûté d’être déshabillée devant la foule. Avec mes habits on m’a arraché des lambeaux de ma chair.

Non pas des yeux de mon corps, mais avec ceux de mon âme, je voyais qu’avec des épées ils tailladaient mes habits pour se les partager.[39] Mon âme sentait tout cela.

Les yeux au ciel, épouvantée par les ténèbres et l’abandon, j’ai bien souvent entendu sortir de mon cœur ce cri :

— Père, Père, ne me cachez pas votre Face ; n’éloignez pas de moi votre regard !

Mes yeux, plongés dans les ténèbres, ne pouvaient rien voir. Dans les miens, d’autres yeux voyaient tout ; ils voyaient, à travers les temps, la souffrance qui, jusqu’à la fin du monde, devaient blesser un Cœur qui était tout proche du mien. Ce Cœur-là éprouvait toute l’ingratitude du monde.

Les oreilles avaient un autre ouï pour entendre les insultes, les méchancetés, les délits de tous les temps.

Des vagues successives montaient dans une mer de souffrances.

Dans mon corps je sentais Jésus : c’était Lui le crucifié, c’était Lui qui, du haut de la Croix contemplant la Petite-Maman toute endolorie par le chagrin, murmurait :

— Mère, ma Mère, toi aussi tu es pour moi un martyre : ta douleur augmente la mienne ; même toi tu ne peux me procurer soulagement.

J’avais l’impression que mon cœur et mon âme étaient transpercés par des coups de poignard. Je peux dire que de moi-même je n’aurais pas pu supporter autant de souffrance : la nature humaine en serait incapable.

Jésus est venu :

— Regarde, ma fille, comme je suis couronné avec tant et d’aiguës épines : ce sont les prêtres qui me blessent de la sorte ; ils m’offensent beaucoup.

Cette plaie que tu vois ouverte a été faite par l’ambition des nations et elle devient de plus en plus profonde à cause de tant de malice et de vices. L’impureté ! L’impureté ! Des pères qui ne respectent pas leurs filles ; des fils qui ne respectent pas leurs mères ; des maris qui sont infidèles à leurs épouses et les épouses à leurs maris. Les frères qui ne respectent pas non plus leurs sœurs, m’offensent aussi beaucoup. Il n’y a plus de modestie dans les familles ; la crainte de Dieu est disparue des foyers. Quelle souffrance, la mienne ! Répare ! Répare !

Je veux, ma fille bien-aimée, que la voix du Saint-Père se fasse entendre très souvent dans le monde entier : qu’il l’invite à la prière, à la pénitence, à l’amour.

La prière est l’arme la plus puissante ; la pénitence est le moyen puissant pour attirer les bénédictions, les grâces et la miséricorde du Seigneur.

L’amour purifie le monde. Je veux être aimé et je veux voir ma Mère bénie aimée elle aussi ; je veux que toute l’humanité voie et entende dans la voix du Saint-Père la voix même de Jésus : c’est lui qui invite le monde à entrer dans mon Cœur ; c’est moi qui à travers ses paroles appelle le monde à moi.

Ma fille, comme par tes lèvres a été faite la demande de la consécration du monde à ma très Sainte Mère, je veux maintenant, avant que tu ne partes pour le ciel, que le Pape, de sa douce voix de père, invite, avec insistance, la pauvre humanité à se réconcilier avec moi, à sortir de son aveuglement, à vivre de pureté, de prière et d’amour...

... Écris tout : n’aie pas de doutes ; l’Esprit-Saint est avec toi. Jamais je n’ai permis et jamais je ne permettrai que tu te trompes...[40]

Les doutes sont un vrai martyre

O mon Dieu, qu’en sera-t-il de moi ! Quelle terrible confusion ! J’ai perdu tout réconfort du ciel et de la terre.

Le démon dansait radieux : il semblait avoir mon cœur entre ses mains...

Je meurs de douleur, épouvantée au milieu des ténèbres : ténèbres du ciel, ténèbres de la terre...

Pendant mon agonie Jésus est venu :

— ... Sois certaine que tu ne te trompes pas ; tu ne seras pas trompée par Satan : je veille sur toi...

Courage ! Pourquoi tant découragement  ? N’aimes-tu pas ta croix  ? Ne sais-tu pas que je suis avec toi  ?...

— Pardonnez-moi, Jésus, mon découragement ! Pardonnez-moi tant de doutes ! Vous savez très bien que je ne doute que de moi-même : ma misère est sans mesure...

... Pour peu de temps je suis restée confiante, puis, de nouveau je me suis plongée dans les ténèbres afin de pouvoir m’y cacher à tous et pour toujours...[41]

« Quelle grande confusion !... »

... Samedi [5 mai], à la grande douleur et à la tristesse est venu s’ajouter le déplaisir de vous avoir fait souffrir à cause du manque de mes nouvelles. Encore hier j’ai dicté quelques lignes parce que le dimanche, ici dans le pays, on ne peux pas poster les lettres. Ce n’a pas été par oubli ni par manque de volonté, mais par manque de forces.

Je souffre et je prie toujours pour vous. Même si, aujourd’hui j’apprenais que vous seriez contre moi, que vous seriez d’une opinion contraire à la mienne, croyez-moi bien, je ne m’arrêterais pas pour autant de prier pour vous, comme preuve de ma gratitude pour tout ce que vous avez fait pour moi. Tout souffrir : oui ; ingrate, jamais !

J’ai été très malade, sans pouvoir parler, même à voix basse. Maintenant, après avoir pris quelques “côtelettes et quelques œufs”, je peux dorénavant dicter quelque chose. [42]

Et mon âme, mon Père  ? Ma souffrance est indicible. Je ne sais pas pourquoi, mais je fini par croire que je mens, que je trompe. Je souffre et je ne connais pas la souffrance. Je souffre mais ce n’est pas moi qui souffre. Quel monde, quel corps et quelle vie de ténèbres ! Je n’ai plus rien : que ténèbres et misère. Le mois de la Petite-Maman, que j’aime tant, passe comme s’il m’était indifférent ; il se déroule dans les ténèbres, dans la froideur. Le peu que je prie, ce n’est pas moi qui le prie ; de même le peu que j’aime se confond et disparaît dans les ténèbres. Les doutes sont un vrai martyre. Quelle grande confusion ! Sentir que je trompe et que je trompe !

Mon Dieu, perdre tout et tous, mais ne pas tromper ceux qui me sont si chers et se sacrifient beaucoup pour moi. Je ne veux pas être pour eux un motif d’humiliations.

Le démon continue sa partie infernale : en tout et avec tout il trouve matière pour me tourmenter.[43] Combien je crains d’offenser Jésus !...[44]

« Tu sortiras toujours victorieuse de ton martyre. »

— Ma Mère, ma Mère bénie, vient donner à notre petite enfant réconfort et vie : elle en manque.

La Maman s'est approchée, Elle m’a prise dans ses bras, bien contre son cœur, me sera bien fort, me couvrit de tendresse. Elle le faisait si doucement, avec tant de précaution, comme quelqu'un qui soigne une personne gravement blessée. Le souffle me manquait : j'étais incapable de recevoir rapidement autant de vie.

Petit à petit j'ai acquis davantage de vie, à mesure que je récupérais des forces.

Ma Petite-Maman m’a dit :

— Toujours joyeuse, toujours contente, épouse de mon cher Jésus ! Tu me possèdes tout entière, tu Le possèdes tout entier. Tu sortiras toujours victorieuse de ton martyre.

Donne tout à ton Jésus, donne-lui ses enfants ; donne-les moi, parce qu'ils sont aussi à moi. [45]

« Quelle richesse je sens en moi !... »

Jamais, en aucune année, je me suis sentie aussi présente à Fatima le 13 mai que cette année. Je ne sais pas pourquoi : mon cœur se fondait et se fonds encore en remerciements à la Petite-Maman. Il y resta bien longtemps. Je veux l’aimer la louer, la remercier toujours pour la paix tant désirée.[46] C’est peut-être pour cela que Jésus m’a unie si étroitement à la Cova da Iria et m’a fait partager l’enthousiasme et les prières ferventes de tant de cœurs reconnaissants. Que Dieu soit béni ! Et qu’Il continue à donner à la terre sa divine paix et qu’Il accorde celle-ci aux autres nations qui n’en bénéficient pas encore, afin que son règne s’étende à toute l’humanité : que Lui seul règne...

Je rends grâces sans bénéficier du moindre rayon de lumière ; je rends grâces écrasée sous un ciel de ténèbres. Le ciel semble vouloir tomber sur la terre et moi, je traverse des mondes et des mondes remplis d’épouvantables ténèbres. Le poids de ce ciel de ténèbres m’oblige à pénétrer dans ces mondes : et j’en ai tant à traverser ! Ce sont des mondes posés sur d’autres mondes, et tout cela est pour moi. J’y vais comme quelqu’un qui vers le martyre ; je marche comme quelqu’un qui marche vers la mort. Mon martyre, ma mort, ce sont ces ténèbres qui me prennent la vie pour ne plus jamais me la rendre .

Petit à petit, je me sens de plus en plus écrasée et exsangue par tant d’obscurité.

Je me sens comme quelqu’un qui tombe dans un puits sans fond, puits qui est une rencontre avec la mort. Je sens que je mourrai seule et sans lumière. Mon cœur le craint et il saigne de douleur, mais il ne cesse pas pour autant de bénir le Seigneur. Seule la pauvre nature est épouvantée ; la volonté reste forte : elle est comme agrippée à Jésus et à la Croix, pour ne plus jamais s’en séparer.

Je ne vois pas, mais j’ai confiance, je ne sens pas, mais je crois : Jésus et la Maman chérie ne m’abandonnent pas et ils viendront à ma rencontre au dernier moment...

(...)

Depuis quelques jours, je sens dans mes yeux un regard qui n’est pas le mien. Ce n’est pas un regard malicieux, ce n’est pas non plus un regard du démon, comme certaines fois je l’ai senti dans mes luttes avec lui. La différence en est plus grande que celle entre le ciel et la terre.

Ce regard est tendre, il a de la douceur et du charme, il est rempli d’amour. Ce regard attire et pénètre partout, il procure de la lumière ; c’est comme un miroir dans lequel tout se reproduit, auquel on ne peut rien cacher.

Ce regard est comme un projectile qui atteint tout. Il voit l’intérieur et l’extérieur, il voit autant les yeux ouverts que les yeux fermés ; il voit tout et a, je ne sais quoi qui attire. Je sens que cette attraction investit mon cœur, l’ouvre avec beaucoup de douceur, afin qu’il accueille tout ce qu’il veut y déposer !

Ce regard a aussi des clefs qui ferment ; ce sont des clefs qui ne servent que pour le cœur ; elles ne mettent en sécurité que les seules choses que ce regard attire à lui.

Mon Dieu, je ne sais mieux exprimer mes sentiments, je ne sais pas rendre davantage éclaircir ce qui se passe en moi. Je me fonds dans l’amour, la bonté et la tendresse.

Quelle richesse je sens en moi ! Et rien ne m’appartient. Seule la souffrance générée par ces sentiments m’appartient. Je crains et je tremble. Mon Jésus, ne permettez pas que tout ceci naisse de moi, mais de vous seul...[47]

« Je dois souffrir et agoniser... »

Quelquefois, le feu que je sens brûler en mon cœur semble ne plus jamais s’éteindre. Que puis-je, que dois-je faire  ? Moi seule le sais. Je veux sauver le monde ; je veux que ce feu se propage sur la terre et atteigne tous les cœurs.[48]

Il me semble aller, comme une folle, frapper à toutes les portes, pour inviter tout le monde à abandonner le pécher, à ne marcher qu’avec Jésus. Je dois voir, je dois construire un monde nouveau, un monde pur, un monde semblable au ciel.

Je dois souffrir et agoniser pour lui ; je dois mourir dans les ténèbres pour produire de la lumière. Et je chemine en hâte vers lui : l’amour me pousse, rien que l’amour.

Les regards qui ne m’appartiennent pas se maintiennent toujours en moi et, en plus de m’attirer, ils m’attachent fortement à eux-mêmes.

Quelle confusion pour moi ! Même le sourire de mes lèvres n’est pas le mien. Cela me semble un sourire qui a des bras pour enlacer éternellement et du baume pour guérir toutes les plaies.

Je ne sais pas ce qui arrive dans tout mon corps. Ce qui est certain c’est que ce qui se passe en lui ne m’appartient pas. Ces liens, ces tendresses, ces douceurs et cet amour ne me regardent pas, ce n’est pas quelque chose que je puisse m’attribuer. Ce corps n’est pas le mien, cette vie non plus.[49]

Tout ce déroule dans mes ténèbres. Oh ! si je savais m’exprimer !... Si je savais montrer tout ce que j’éprouve pour le bien des âmes et pour la gloire de Jésus, je cesserais d’être victime...

Je vois tout ce qui m'attend. Je marche comme une brebis muette qui ne sait rien dire.[50] Je vois l’ingratitude, je vois le sang que je dois répandre, je vois le calvaire et la mort. Je sens les âmes qui doivent être lavées dans mon sang.

Je lève mes yeux au ciel : arrive ce qui arrivera, je dois donner au Ciel le monde ; je dois le payer avec la monnaie de mes souffrances.

Ce matin, lors de la Communion, me sentant plus unie à Jésus, j’ai osé lui demander :

— Si je ne vous offense pas, dites-moi ce que signifient ces secousses et ces sursauts que vous m’avez fait percevoir.

— Non, ma fille, tu ne m’as pas offensé, demande-moi tout ce que tu voudras. Les secousses ce sont celles des nations qui, actuellement, mettent un terme à la guerre des ambitions, pendant qu’elles agonisent dans leur mauvais comportement. Tu es et seras toujours leur victime. Par ton intermédiaire et celui de ma Mère bénie, elles ont eu la paix. Combien de secousses ont perçu leurs gouvernants ! Ils ont préféré la mort à l’humiliation.

Les sursauts concernent ma divine cause. Je te fais ressentir ce que ressentent ses défenseurs et ses ennemis. Les ennemis éprouve en eux de la haine et des remords ; ils ne voulaient pas céder, ils ne savent pas quoi faire. Les amis souffraient de te voir souffrir sans pouvoir t’aider. Mais bienheureux ceux que j’ai associés à ta souffrance, à ton martyre, parce que moi, je les aime...[51]

« J’ai soif de lumière... »

Je bénirai le Seigneur. En ce mois béni consacré à la Petite-Maman du ciel, j’ai reçu une autre épreuve : d’autres épines qui se sont enfoncées dans la plaie du cœur, toujours sanguinolente, l’empêchant de se cicatriser. De temps à autre ces épreuves arrivent violemment exacerbées.

Je bénirai Jésus et la Maman du ciel, mais j’avoue que, sans la vigueur que m’apporte le ciel, j’aurais désespéré et je serais déjà morte...

Avec cette aide, j’ai vaincu et je vaincrai toujours...

Je suis comme une colombe qui, le bec ouvert, bat ses ailes, tout près de se perdre, sans savoir où se poser.

J’ai soif de lumière, j’ai soif de réconfort. Vu que sur la terre, toutes les routes me sont interdites, ô Jésus, ô Maman chérie, laissez-moi entrer dans vos Cœurs très aimants. Même si je n’y ressens aucun réconfort, laissez-moi au moins avoir la certitude que j’y vis : là dans vos Cœurs, je serai libérée des haines et des persécutions ; je serai certaine de vous aimer et de ne pas vous offenser.

Oh ! si mon corps pouvait plonger dans les ténèbres afin de n’être plus ni vu ni remémoré, comme mon âme elle-même a été plongée dans les ténèbres ! Je mourrais ainsi, et on ne parlerait plus de moi, comme le désire mon archevêque.

C’est avec beaucoup d’amour que j’accepte ses ordres, auxquels j’obéis.[52] En moi il n’existe pas la moindre ombre de haine envers lui ou envers ses collaborateurs. Bien au contraire, j’ai toujours dit : “— Mon Jésus, ayez compassion d’eux, car ils ne connaissent ni ne comprennent la souffrance d’une âme. Puissé-je, ô Jésus, me prosterner devant vous, les mains levées, et savoir dignement vous remercier pour toutes ces épreuves !” [53]

Le cœur rempli de douleur, je n’ai pas pu de mes lèvres réciter le “Magnificat”, je le fait intérieurement.

— Donnez-moi de forces pour souffrir, mon Jésus. Ne me condamnez pas : que la sentence des hommes ne serve à autre chose qu’à augmenter mon martyre. Les hommes m’ont préparé la souffrance d’aujourd’hui pour me rendre plus semblable à vous, afin que je sois plus unie à vous sur le chemin du calvaire...

Mes regards continuent à ne pas être les miens. Ils fixent avec tendresse or ce cœur-ci or ce cœur-là, celui qui se laisse le plus profondément pénétrer par tant de tendresse et par tant d’amour. Mais ils ne les fixent pas tous de la même manière : c’est la correspondance des cœurs qui fait mériter tout ce que ces regards contiennent. J’aurais tant à dire à ce sujet ! Ils sont bien nombreux ceux que j’aimerais attacher et attirer vers moi !

— Qu’est-ce que cela, mon Jésus  ? C’est toujours la même croix...

— (...)

Je t’aime beaucoup, ma fille ! Je t’ai rendue semblable à moi et ton calvaire est le mien. Aie courage !...

Tu es riche de moi : c’est pour cela que tes regards attirent, ont de la tendresse, de la douceur, de l’attraction, de l’amour. C’est pour cela que ton sourire a de la douceur, c’est pour cela qu’il a tout ce qui est du ciel. Ce n’est pas toi qui vis, c’est moi. Ce sont des moyens de salut et d’appel pour les âmes.

N’est-il pas vrai, ma fille, que pendant ma vie, sur mon Calvaire, j’avais deux vies, l’humaine et la divine  ? Même en cela tu es semblable à moi : dans ton calvaire, tu as aussi la vie divine : c’est le Christ qui vit en toi. Ne crains pas...

Mes merveilles en toi ne resteront pas occultés, elles doivent briller : elles sont ma gloire, elles sont salut pour les âmes.

Tout sera écrit, ma maîtresse dans la divine science, tout sera connu dans le livre de ta vie. Tu es l’héroïne de l’amour, l’héroïne de la douleur...

Je suis retournée dans les ténèbres et dans ma douleur, mais toujours ardemment habitée par la soif de consoler mon Jésus et de sauver le monde. Il n’y a pas sur la terre une joie plus grande que de souffrir pour Lui.[54]

« Je veux sauver les âmes... »

Le ciel était couvert de nuages noirs et il pleuvait abondamment ; dans mon âme les nuages étaient encore plus noirs et la pluie plus forte encore.

À travers la fenêtre, mes yeux voyaient les feuilles verdoyantes de la vigne, recouvertes par les gouttelettes de pluie fraîche que le ciel leur envoyait. Quelle leçon pour moi !

Une pensée a traversé mon esprit et je me suis demandée : “Que feront les petits oiseaux pour protéger leur petits de la pluie  ?” Sûrement qu’ils les protègent de leur propre corps.

Le Seigneur prend soin d’eux, il ne les abandonne pas ; comment Jésus et la Petite-Maman ne s’occuperaient-ils pas moi, moi qui ai une âme  ? Oh ! comme je dois me réjouir de tout ce que le ciel m’envoie !...

Alors, que viennent les humiliations et les mépris : je veux sauver les âmes... [55]

« Mon Père, priez pour moi... »

Mon bon Père ;

Ne nous arrêtons pas de louer Jésus et la Maman du ciel pour tant de “caresses”. Je ne sais pas si je dois dicter pour vous ces paroles. Mais si les choses sont parvenues à un tel point que vous ne puissiez plus écrire, ni à moi ni à eux, je vous demande de brûler cette lettre, sans même finir de la lire.[56] Je ne veux pas déplaire à Jésus ni être la cause que d’autres lui déplaisent. Si je ne reçois plus de vos nouvelles, ne vous en faites pas. Je le sais d’avance : c’est parce que vous ne pouvez pas le faire... J’attends du ciel la force pour tout accepter. Il est certain, mon Père, que si Jésus ne m’avait pas soutenue de ses divines grâces, je serais déjà morte de chagrin. Prenons les choses comme venant de sa Main : Il sait que c’est pour Lui et pour les âmes.

J’aimerais beaucoup, si cela était possible, que mon nom soit effacé et que l’on ne parle plus de moi. Cela ne m’enchante pas pour vous, même si certains le désirent, mais pour d’autres raisons. Combien de luttes dans mon âme !

Priez pour moi, mon Père. Quant à moi, je ne vous oublie pas non plus. Et si jamais on ne vous autorise pas à me voir en ce monde, nous nous reverrons au ciel. Là, libres de toutes prohibitions, nous ne cesserons jamais d’aimer Jésus et la Petite-Maman, dans une même union, dans un même amour.

Ne pouvant pas faire autre chose, aidez-moi par votre prière, afin que je ne succombe pas sous cette croix si pesante... Pauvre de moi, méprisée et sans lumière... [57]

« Oh ! monde, combien tu es ingrat !... »

... Je suis perdue au milieu d’une mer démontée, dans une nuit de plus en plus noire et épouvantable.... J’entends le sifflement de la bourrasque : les ondes montent très haut, puis, tout redevient calme de nouveau. Et moi, je reste ainsi, seule, sans personne ! En sentant la tempêté si épouvantable, je la scrute, je l’écoute, mais avec sérénité : si je dois mourir au milieu de celle-ci, je meurs pour Jésus, je meurs pour les âmes. Je confie, j’espère : mon corps peut tout souffrir, il peut même disparaître, détruit par la fureur de la tempête, mais mon âme a son but : elle doit marcher o la rencontre de Jésus. Lui, il doit la recevoir, la soutenir et la prendre enfin avec Lui.

O monde, combien tu as été ingrat envers moi ! Et moi, je t’aime. Je t’aime non pas pour tes fausses attractions, mais parce que tu appartiens à Jésus.[58]

Les ténèbres...

En ces deux jours, j’ai eu tant à offrir à Jésus et à la Petite-Maman : j’ai beaucoup souffert dans le corps et dans l’âme. O douleur, ô douleur bénie ! Toi seule tu es ma joie sur cette terre : de toi seule je reçois quelque chose à offrir à Jésus et aux âmes.

Des océans et des mondes de ténèbres m’ont séparée à jamais de mon Jésus. Je suis comme aveuglée de corps et de l’âme.[59] Je suis plongée dans une mer d'obscurité et, je ne sais pas nager. Toujours immergée, je tends mes bras pour essayer de m'agripper à Quelqu’un : et ce Quelqu'un c'est la Petite-Maman.

Je veux aller de l'avant dans ces ténèbres, je veux y plonger autant que je le peux, autant que Jésus le souhaite. Mais je veux avoir la certitude que j'y plonge agrippée à la tendre Maman et recouverte de son manteau si saint, afin de ne pas avoir peur, afin de ne pas vaciller, afin de ne pas désespérer. Si j'y plonge seule, je risque de mourir de fatigue et d'offenser mon Jésus. [60]

Je sens sur mes épaules une énorme croix ; son poids m’oblige à mourir au milieu des plus atroces horreurs. Cette croix embrasse le monde entier, elle pèse autant que l’humanité.

Jésus n’a pas attendu la matinée du vendredi pour me la faire sentir, avec une différence pourtant, aujourd’hui je ne suis pas clouée à celle-ci.

Mon âme pleure en silence, elle cache ses gémissements, elle voit les noires ténèbres de la mort, elle voit déjà comment tous se préparent pour me capturer et m’ôter la vie, coûte que coûte.

Jardin des Oliviers, Calvaire, mort, cruauté et détresse. Combien énorme est le rocher mondial qui cache le ciel ! Combien souffrent mon corps et mon âme ! Combien Jésus a souffert ! Ingratitude du monde... [61]

La Vierge des Douleurs... et Jésus...

Pendant la nuit, je ne sais pas à quelle heure, mon corps n'en pouvait plus de douleur, et mon âme était dans l'angoisse, abîmée dans les ténèbres. Je n'avais personne pour m'aider et je devais lutter.

O mon Dieu, qui pourra résister à tant de douleur  ?

Tout d'un coup, érigée devant moi, j'ai aperçu une grande croix. Au pied de celle-ci, la Vierge des Douleurs était assise. Combien Elle était belle ! Je l’ai fixée sans rien lui dire : je ne pouvais pas parler.

Son très Saint Cœur, rempli de flèches m’a fait oublier ma douleur.

Moi, je n’ai rien dit, mais Elle, Elle m’a parlé :

— Ma fille, aie courage ! Cette croix est la tienne. Je suis toujours à côté de toi pour t'aider, comme je l’ai fait pour la croix de mon Jésus.

Ayant dit cela, la belle apparition a rapidement disparu. Une aussi grande croix ne m’a pas fait peur, grâce à la vision de la Petite-Maman chérie.

La tempête de ma souffrance se rasséréna et je me suis endormie pendant quelques instants.

(...)

Jésus est venu avec toute la force de son divin amour. Mon cœur battait très fort : il était trop petit pour contenir un Cœur qui possède la grandeur et un amour sans égal. Jésus s’est arrêté un moment pour me parler, mais son amour me suffisait :

— Brûle, ma fille, brûle dans mon divin amour. Purifie le monde, vierge fidèle ! Je veux de l’amour, de la grâce, de la pureté. Par ton intermédiaire, messagère de Jésus, les âmes recevront des richesses et des trésors divins.

— Jésus, j’ai le cœur rempli.

— Rempli d’amour, ma petite fille.

— Rempli de posséder votre amour, votre grandeur, mais pas de vous aimer, car je ne vous aime pas comme il le faudrait. Vous savez très bien que de mien je n’ai que ma misère : c’est ce que je vois en moi.

— Non, tu aimes mon divin Cœur à n’en pouvoir plus. Tu es remplie d’amour : l’amour lui aussi consume. Et il doit en être ainsi, à cause de l’importante mission que je t’ai confiée.

— Merci, mon Jésus. Donnez à tous les cœurs donnez à toutes les âmes cet amour.

— Donne-le toi-même, ma petite fille. Je t’y autorise : tu es la maîtresse de mon divin Cœur, tu es la maîtresse de mon amour. Distribue-le comme tu voudras, tes désirs sont les miens.[62]

« Ou souffrir ou mourir ! »

Le mois de la Petite-Maman se termine. Je suis navrée qu’il se termine. Sera-ce le dernier mois de mai que je passe sur la terre ? Je suis peinée de ne pas avoir aimé beaucoup plus Jésus et la Maman du ciel. Tout passe, tout disparaît : seule ma misère apparaît et plus clairement encore dans les mondes de mes ténèbres. Je tends les bras au ciel pour enlacer mon martyre et avec lui Jésus et la Maman chérie.

J’ai une soif qui ne peut pas être rassasiée. J’ai faim, rien n’existe qui me satisfasse, même pas la souffrance. Je la crains mais je la veux pour donner vie aux âmes, pour consoler mon Jésus.

Ou souffrir ou mourir ![63] Quelle valeur peut avoir la vie si je ne souffre pas, si je n’aime pas ? Je ne supporte plus de voir le monde dans sa course folle et aveugle vers la perdition. Je le vois dans un incendie de passions. Je veux l’éteindre avec le feu d’amour que j’ai dans le cœur et par la tendresse qu’il renferme, mais je vois que le feu des passions et l’attraction du mal lui sont préférées.

Le feu et la tendresse ne m’appartiennent pas. C’est une tendresse qui sauve ; c’est un feu qui purifie... Je possède en moi ce qui n’est à m :i. Je sens et je reconnais que cela appartient au Ciel.

Je suis las ; je veux enchaîner le monde à ce feu, à cette vie du ciel, et je ne le peux pas. Pendant que je sens les chaînes de l’amour de Jésus avec lesquelles il veut l’attacher, je sens celles du démon qui veut le conduire à la perdition. Le monde n’écoute pas la voix de Jésus, ne garde pas ses enseignements, n’accepte pas ses affectueuses sollicitations, ne se laisse pas apprivoiser par Lui... [64]

Comme l’appel de Noé...

Mes angoisses ont des élans qui me font m’envoler vers la mort. Je brûle du désir de donner la vie. Les routes restent imprégnées de mon sang ; je chemine dans le plus grand silence. J’ai soif de donner la vie pour posséder la vie.

Je vois le tombeau où reposera mon corps : c’est un tombeau qui enlève les âmes de la tombe, beaucoup d’âmes corrompues, déjà presque mortes.

Je grimpe l’abrupte montagne du Calvaire. Je tombe souvent, et à chaque fois je me retrouve comme si mon corps était déjà un cadavre : un cadavre méconnaissable à cause du sang qui coule le long de ma face ; c’est un corps dans une pire condition que celle d’un lépreux en putréfaction.

Le cœur est désireux d’aller de l’avant ; il doit vaincre pour les âmes, il doit mourir pour elles !

Alors que j’étais clouée à la croix, le sol bougeait au point de faire trembler ma croix et ceux qui se trouvaient à côté. Les tendresses du cœur se répandaient sur ceux qui, avec moi, étaient crucifiés : à droite elles étaient acceptées, à gauche refusées. Je sentais la révolte de celui qui les refusait et l’amour de celui qui les acceptait.

Mon âme sentait et voyait la Petite-Maman qui, au pied de la Croix, essayait d’ouvrir les bras pour accueillir Jésus, encore vivant, ce qu’elle lui ferait aussitôt après sa mort : l’embrasser, le baigner de ses larmes. C’est indescriptible ce qu’on souffert les Cœurs de Jésus et de la tendre Maman. Quelle douleur aussi dans mon cœur !...

Jésus est venu :

— Ma fille, étoile brillante, ta splendeur illumine les âmes ; tu es la lumière qui les guide vers mon divin Cœur.

De son divin Cœur je recevais du Sang ; mon cœur se dilatait...

— Reçois, ma fille, le Sang qui engendre les vierges, qui procure la pureté, la grâce, l’amour. C’est la vie divine que je donne à mes épouses les plus aimées...

« Mon cœur souriait à la douleur... »

La nuit tombait à peine, mais au-dedans de moi elle était déjà ténébreuse et triste.

Je souriais pour me montrer joyeuse et cacher ma douleur, qui me tuait presque. Mais malgré cela, mon cœur souriait à la douleur, il souriait à Jésus et brûlait dans les flammes dévoratrices de son amour. [65]

« La réparation la plus dure... »

J’ai senti et mon âme a remarqué des bras qui se tendaient vers moi pour me défendre et m’enlacer. À la fin de la deuxième réparation — deuxième assaut du démon — ces bras ont fait irruption au milieu de la fureur des démons qui s'enfuirent comme des lions terrorisés.

Il s'agissait de la Maman : c’est Elle qui m’a prise sur son sein et m'a embrassée, en même temps qu’elle me disait :

— Ma fille, celle-ci est la réparation la plus dure à supporter pour une victime, pour une épouse et vierge fidèle à mon Jésus. Viens ici. Tu ne mérites pas d’être au milieu des démons : tu es digne de vivre au milieu des anges et à l'ombre du manteau des vierges.[66]

« O Jésus, l’enfer, l’enfer de suite... »

Aujourd’hui, quand la deuxième attaque du démon s’est terminée, j’ai crié, de toutes mes forces :

“O Jésus, l’enfer, l’enfer de suite, en ce moment même, si avec ceci je vous offense ! Je ne veux pas pécher, non, je ne veux pas !”

Cela ressemblait même à un défi à Jésus. Mais il sait bien, que ce n’en était pas un. Toutefois, cette phrase a été suffisante pour que je sois encore davantage surchargée de souffrances. Je n’ai plus le cœur à résister à tant de douleur.[67]

● ● ● ● ●

NOTES

[1] “Car beaucoup sont appelés, mais peu sont élus.” Saint Mathieu 22,14.

[2] Journal du 23 mars 1945.

[3] Journal du 27 mars 1945.

[4] Journal du 29 mars 1945.

[5] “Ils le mène dehors afin de le crucifier. Et ils requièrent, pour porter sa croix, Simon de Cyrène, le père d’Alexandre et de Rufus, qui passait par là, revenant des champs.” Saint Marc 15,20-21.

[6] Journal du 30 mars 1945 (Vendredi-Saint).

[7] Au dos de cette dernière image il était écrit : “Pour tous les salésiens : être parmi tous le plus petit ; obéissance aveugle ; ne pas commettre de péché ; souffrir en silence ; aimer Jésus ; aimer, aimer toujours.”

[8] Lettre du 31 mars 1945 au Père Umberto Pasquale.

[9] Alexandrina commence à souffrir les peines des damnés, dont la plus douloureuse est la perte de Dieu.

[10] Jésus est consolé par le grand nombre d’âmes qui sont sauvées par l’intermédiaire du martyre d’Alexandrina.

[11] Journal du 3 avril 1945.

[12] Journal du 5 avril 1945.

[13] Alexandrina, comme tant d’autres âmes victimes, disait que la couronne d’épines de Jésus avait la forme d’un casque et non point, comme nous le voyons communément une petite bande qui entoure la tête du Christ.

[14] Journal du 6 avril 1945.

[15] L’armistice a été, signé un mois plus tard, à Reims (France), par les troupes alliées et par l’État-major allemand. C’était le 8 mai 1945.

[16] Le Portugal qui, malgré ses alliances, a pu rester neutre tout le long de la guerre 1939-1945. Jésus avait promis à Alexandrina, le 4 juillet 1940, que le Portugal serait épargné.

[17] Journal du 7 avril 1945.

[18] Lettre du 9 avril 1945 au Père Umberto Pasquale.

[19] Il faut remarquer ici que, ce texte datant de 1945, a pu paraître incompréhensible pour ceux qui à cette période du XXe siècle ne se doutaient pas que ceci se réaliserait quelques années plus tard. De nos jours, tous et n’importe qui, peuvent distribuer la Communion et que rares sont ceux qui se confessent pour recevoir le Sacrement d’Amour. Cette affirmation peut et doit être considérée comme une vraie prophétie de la servante de Dieu.

[20] Journal du 12 avril 1945.

[21] Journal du 13 avril 1945

[22] Ce rocher mondial est l’Église fondée par Jésus.

[23] Ces paroles, elles aussi prophétiques, peuvent être rapprochées de celles, prononcées bien des années plus, tard par le Pape Paul VI : « par des fissures ouvertes dans l’Église, passent les fumées de Satan. »

[24] Journal du 17 avril 1945.

[25] “Alors Simon-Pierre qui portait un glaive, le tira, frappa le serviteur du grand prêtre et lui trancha l’oreille droite. Ce serviteur avait nom Malchus. Jésus dit à Pierre : « Rentre le glaive dans le fourreau. La coupe que m’a donnée le Père, ne la boirai-je pas ? » Saint Jean 18,5 et suivants.

[26] Journal du 19 avril 1945.

[27] Après chaque “Passion”, Jésus viens toujours, pendant l’extase, réconforter Alexandrina et lui redonner vie. Cette fois-ci il tarde à venir.

[28] Il s’agit de Francklin D. Roosevelt, mort le 12 avril 1945.

[29] Il est bon de rappeler que la Servante de Dieu s’était offerte comme victime pour sauver les gouvernements engagés dans la Grande-Guerre : Roosevelt, Staline, Mussolini et les autres... Elle avait fait don de ses yeux à Jésus !

[30] Journal du 20 avril 1945.

[31] “Or Simon-Pierre se tenait là et se chauffait. Ils lui dirent : « N’es-tu pas, toi aussi, de ses disciples ? » Lui le nia et dit : « Je n’en suis pas. » Un des serviteurs du grand prêtre, un parent de celui à qui Pierre avait tranché l’oreille, dit : « Ne t’ai-je pas vu dans le Jardin avec lui ? » De nouveau Pierre nia, et aussitôt un coq chanta.”— Saint Jean 18,25-27.

[32] Journal du 26 avril 1945.

[33] Journal du 27 avril 1945.

[34] Parole prophétique ! En effet, quelques mois plus tard, l’armistice qui mettait fin à l’horrible guerre, allait être signé à Reims.

[35] Journal de la fin avril 1945.

[36] La nouvelle de la mort de Mussolini et d’Hitler se propageait parmi le peuple.

[37] Cf. Saint Thérèse d’Avila : “Vie par elle-même” ; chapitre 21-7 :

« Ah ! quel supplice, pour une âme élevée à cet état, que l'obligation de traiter avec le monde, de contempler de ses yeux la pitoyable comédie de cette vie, de passer son temps à prendre soin de son corps, à dormir, à manger ! Tout l'excède. Elle ne sait comment fuir ; elle se voit enchaînée, prisonnière. Comme elle sent vivement la captivité où nous tient le corps, et la misère de cette vie ! »

Cf. Sainte Catherine de Gênes ; “Traité du Purgatoire”, chapitre 17 :

« La prison dans laquelle je me vois, c'est le monde ; la chaîne, c'est le corps. L'âme illuminée par la grâce, c'est elle qui connaît l'importance d'être retenue ou retardée d'atteindre sa fin, par quelque empêchement que ce soit. Cela lui cause une peine extrême, car elle est d'une sensibilité aiguë. »

[38] Journal du 3 mai 1945.

[39] Saint Jean : 19 ; 23.

[40] Journal du 4 mai 1945.

[41] Journal du 5 mai 1945.

[42] Il faut admirer ici le sens de l’humour qu’Alexandrina a toujours démontré en toutes circonstances. Il va de soit qu’elle ne pouvait rien manger ni boire. Elle ne vivait que de la Communion quotidienne.

[43] Lire à ce sujet le chapitre 10, du Livre II de “La Nuit obscure” de saint Jean de la Croix.

[44] Lettre du 7 mai 1945 au Père Umberto Pasquale.

[45] Journal du 7 mai 1945

[46] Le 5 mai le général Iodl annonçait la reddition de toutes les troupes allemandes. La guerre était finie, en Europe. Le 8 mai, l’armistice était signé.

[47] Journal du 15 mai 1945.

[48] Saint Luc : 12 ; 49.

[49] Voir en saint Paul : “Ce n’est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi !...”

[50] Isaïe : 53 ; 7-8. Actes des Apôtres : 8 ; 32.

[51] Journal du 17 mai 1945.

[52] C’est certainement un autre grand mérite de cette grande mystique, celui d’avoir accepté fidèlement les normes dictées par saint Paul sur l’utilisation des charismes, afin que parmi les charismes et la structure divino-hiérarchique, parmi la charité et la justice, ne surgissent des controverses, mais que règne l’harmonie, l’intégration et la collaboration.

Alexandrina est ainsi, de nos temps, un exemple resplandissant et salutaire de grande urgence et d’actualité.

[53] Le docteur Azevedo, angoissé par ces nouvelles souffrances dues à la persistance de l’incompréhension de la part de l’autorité ecclésiastique, écrivit de nouveau à l’archevêque. Voir dans les “Lettres”.

[54] Journal du 18 mai 1945.

[55] Journal du 19 mai 1945.

[56] Voici un trait significatif de l’obéissance d’Alexandrina. Elle préfère ne plus recevoir ou ne plus écrire elle-même à son directeur spirituel que de s’exposer, ou de l’exposer à la désobéissance envers la hiérarchie du diocèse, l’archevêque en tête. La suite de la lettre nous apporte les raisons, ô combien valables !

[57] Lettre du 21 mai 1945, au Père Umberto Pasquale.

[58] Journal du 22 mai 1945.

[59] Il fallut obscurcir sa chambre étant donné que la lumière filtrant à travers la fenêtre la faisait beaucoup souffrir.

[60] Journal du 24 mai 1945

[61] Journal du 24 mai 1945.

[62] Journal du 25 mai 1945.

[63] Phrase, ô combien célèbre, prononcée par une autre âme d’exception : sainte Thérèse d’Avila.

[64] Journal du 31 mai 1945.

[65] Journal du 29 juin 1945.

[66] Journal du 26 juillet 1945

[67] Journal de septembre 1945.

 

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