Anschaire, moine
de la vieille Corbie en Picardie, passa dans la nouvelle, que S.
Adélard avait fondée en Saxe. Il y fut chargé d'enseigner les
lettres, d'instruire le peuple, et de prêcher publiquement dans
l'église : fonctions dont il s'acquitta avec autant de piété que de
succès. Harold ou Hériold, prince de Danemark, ayant reçu le baptême
à la cour de l'empereur Louis le Débonnaire, chez lequel il s'était
réfugié, demanda quelques missionnaires zélés pour l'accompagner
dans son pays. On lui donna notre saint, qui ne soupirait qu'après
l'accroissement du règne de Jésus-Christ. Anschaire prêcha la foi,
premièrement aux Danois, puis aux Suédois, et enfin aux peuples qui
habitaient le nord de l'Allemagne. Le Seigneur répandit tant de
bénédictions sur son ministère, qu'un grand nombre d'idolâtres
embrassèrent le christianisme. Le pape Grégoire IV le nomma, en 83a,
légat du Saint- Siège et archevêque de Hambourg. Après la ruine de
cette ville, qui fut pillée et brûlée par les Normands, en 845,
Anschaire travailla de toutes ses forces à consoler et à soutenir
dans la vraie foi son troupeau dispersé par les barbares. Le siège
de Brème étant devenu vacant en 849, le pape Nicolas le réunit à
celui de Hambourg, et confia à notre saint le gouvernement des deux
églises.
Anschaire, en
quittant le Danemark et la Suède, y laissa des missionnaires tirés
de la nouvelle Corbie, pour cultiver le champ qu'il avait défriché.
Mais tous les soins de ces ouvriers évangéliques ne purent empêcher
les peuples de ces deux royaumes de retomber
dans l'idolâtrie. Le triste état de cette Eglise naissante demandait
le retour de son fondateur. Anschaire reparut donc dans le Danemark,
où, avec la protection du roi Horic, il vint à bout de faire
refleurir la religion chrétienne. Son zèle rencontra plus de
difficultés en Suède. Olas, prince superstitieux, voulut que lé Sort
décidât si le libre exercice du christianisme serait permis dans ses
Etats. Le saint évêque, qui ne voyait qu'avec peine la cause de Dieu
soumise au caprice du hasard, recommanda du moins au ciel l'issue
d'une décision si bizarre. Les choses tournèrent comme il l'avait
désiré, c'est-à-dire au désavantage du paganisme. La lumière de
l'Evangile n'eut pas plus tôt brillé, qu'il se convertit une
multitude prodigieuse. Anschaire fit bâtir plusieurs églises, qu'il
pourvut d'excellents pasteurs avant que de retourner à Brème.
Craignant j comme
S. Paul, d'être réprouvé après avoir prêché Jésus-Christ aux autres,
il réduisait son corps en servitude par la pénitence et la
mortification. Il portait le cilice, et ne se nourrissait
communément que d'eau et de pain. Jamais il n'entreprenait rien sans
avoir imploré auparavant le secours du ciel. Quoiqu'il possédât le
talent de la parole dans un degré supérieur, il n'attendait; que de
Dieu le succès de ses prédications. Sa charité pour les pauvres ne
connaissait point de bornes ; et son plus grand plaisir était de
leur laver les pieds et de les servir à table. Il avait toujours
ardemment désiré le martyre, et il était persuadé que ses péchés
seuls lui avaient tari la gloire de verser son sang pour
Jésus-Christ. Dans la vue de s'exciter à la componction et à l'amour
de Dieu il s'était fait Un recueil de passages fort touchants, dont
il mit une partie à la fin de chaque psaume. Il mourut à Brème, en
865 à la soixante-septième année de son âge, et à la
trente-quatrième de son épiscopat; il s'opéra plusieurs miracles par
son intercession. Son nom fut inséré dans les Martyrologes peu de
temps après sa mort.
SOURCE :
Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux
Saints… – Traduction : Jean-François Godescard. |