Saint Antonin
naquit à Florence. A quinze ans il alla s'offrir aux Dominicains
de Fiesole. Le supérieur, voyant
cet
enfant si délicat, craignit qu'il ne pût s'astreindre aux
austérités de la règle :
— “Qu'étudiez-vous ? dit-il à Antonin.
— Le Droit
canonique.
— Eh bien !
ajouta le religieux pour le décourager, quand vous saurez le
Droit par cœur, nous vous recevrons”.
Un an après,
Antonin revenait, possédant toute la science demandée. C'était
un signe clair de l'appel divin, et les religieux n'eurent pas à
se repentir de l'avoir admis, car il devint bientôt de tous le
plus humble, le plus obéissant, le plus mortifié, le plus
régulier.
L'onction
sacerdotale l'éleva plus haut encore, et toutes les fois qu'il
offrait le saint Sacrifice, on le voyait baigné des larmes de
l'amour divin. Tour à tour prieur en huit couvents, il en
renouvela la ferveur et la discipline. Quand il apprit, au
retour de la visite d'un de ses monastères, sa nomination à
l'archevêché de Florence, fuir et s'ensevelir dans la solitude
fut sa première pensée; mais on le mit dans l'impossibilité de
réaliser son projet. Il entra dans sa cathédrale pieds nus; sa
tristesse faisait contraste avec la joie de son peuple.
Saint Antonin
sut concilier les obligations de l'épiscopat avec l'austérité
monastique. Sa maison ressemblait plus à un couvent qu'à un
palais, et dame Pauvreté y tenait seule lieu de train et
d'équipage. Il n'avait point de buffets ni de tapis, ni de
vaisselle d'argent, ni de chevaux, ni de carrosses; il accepta
dans sa vieillesse un mulet, dont il ne se servait que par
besoin. Jamais il ne refusait à un pauvre qui lui tendait la
main; s'il se trouvait sans argent, il vendait ses pauvres
meubles pour subvenir à leurs besoins; il alla même jusqu'à se
dépouiller pour couvrir des misérables.
Homme de
prière, il le fut au point qu'il semblait être toujours en
retraite; mais il était aussi homme des saintes études; il
passait les nuits au travail, et c'est à cette privation de
sommeil que nous devons ses précieux ouvrages.
Sa grande
fermeté, jointe à son immense charité, opéra à Florence un bien
incalculable. Un jour que l'autorité civile menaçait de le
chasser, à cause d'une mesure pleine de vigueur qu'il avait
prise, il dit: "Chassez-moi, je trouverai toujours un asile!" Et
il montrait une clef de couvent pendant à sa ceinture. Il mourut
à soixante-dix ans. Son nom reste dans l'Église comme le nom
d'un des plus savants canonistes qui l'aient illustrée.
Abbé L. Jaud
Vie des Saints pour
tous les jours de l'année,
Tours, Mame, 1950. |