Saint
Baudile,
que les
habitants
de
Nîmes considèrent
comme
leur père
dans
la foi,
comme
le fondateur
principal
de
leur église,
était,
selon
la tradition,
originaire
d'Orléans.
Peu
de saints
ont
eu un
culte
plus célèbre
on a
compté
jusqu'à
quatre
cents
églises dédiées
sous
son invocation,
tant
en Espagne
qu'en
France, et
cependant,
ce
que l'on
sait
de lui
se
réduit à
dire
qu'il arrosa
de
ses sueurs
et de
son
sang la
cité
et le
territoire
des
Nemausiens
on
ignore absolument
l'époque
où il
a
vécu, ses
qualités
civiles,
le
rang qu'il
occupait
dans
l'église de
Dieu. Les
uns
placent son
martyre
en
187, les
autres
en
295, d'autres
à la
fin
du IVe
siècle
c'est-à-dire
qu'on
en est
réduit
à des
conjectures.

Martyre de Saint
Baudile, par Ferdinand Pertus
Nîmes
avait
à coup
sûr
été évangélisée
dès
le premier
siècle
par
saint Trophime
d'Arles,
puisque
c'est
d'Arles, comme
l'a
écrit le
bienheureux
pape
Zozime, que
les
ruisseaux de
la
foi se
répandirent
pour
arroser toutes
les
Gaules par
saint
Paul de
Narbonne,
puisque
la
grande voie
romaine
qui
conduisait en
Espagne
traversait
Nîmes,
et
que saint
Paul
Serge dut
la
suivre par
saint
Saturnin de
Toulouse
surtout,
qui
convertit là
son
premier
disciple,
Honestus.
Mais
longtemps encore
après
eux, Nîmes
conservait
sa
physionomie païenne
tous
ses temples
d'idoles
étaient
encore
debout
la
foule continuait
à se
presser
autour
des
autels des
faux
dieux, tandis
que
le christianisme
proscrit
recueillait
furtivement
ses
disciples dans
quelque
retraite
obscure,
loin
du regard
des
persécuteurs.
A
une
date donc
qui
flotte entre
la
fin du IIe
et la
fin
du IIIe
siècle,
entre
187 et
295,
un généreux
chrétien,
obéissant
à une
inspiration
divine,
quitta
sa
ville natale
pour
aller évangéliser
les
contrées qui
étaient
plongées
dans
l'erreur.
C'était
Baudile ;
il
était engagé
dans les
liens
du mariage,
et son
épouse
s'était
associée
à son
pieux
dessein. Il
apprit
dans
ses courses
apostoliques
que
l'ancienne capitale
des
Volces, la
ville
d'Auguste et
d'Antonin,
la
cité de
Nîmes,
non
moins importante,
disent
les Actes
des
Saints, par
son
commerce
et
ses grandes
richesses
que
par sa
population,
était
encore presque
toute
païenne, que
les
habitants étaient
privés
de
l'enseignement des
prêtres,
et
qu'ils languissaient
comme
des brebis
errantes,
loin
des soins
vigilants
des
pasteurs il
résolut
de
tenter un
effort
suprême
pour
l'arracher aux
idoles.
Le
nouvel
apôtre
arriva
à
Nîmes le
jour
même où
l'on
célébrait, dans un bois
sacré, aux portes de la ville, un sacrifice public. Le polythéisme
avait déployé toutes ses pompes pour attirer la foule. C'était sur
une des collines qui dominent la ville, non loin de cette antique
Tourmagne qui est encore debout. Les prêtres des idoles conduisaient
les victimes destinées au sacrifice. La multitude frémissante se
pressait autour de l'autel. Tout à coup apparaît un étranger qui
élève la voix au milieu de la foule. Il attaque avec une indignation
généreuse ces dieux impuissants auxquels on offre un encens criminel
ces dieux de marbre et de pierre, qui ont des yeux et qui ne vaient
pas, qui ont des oreilles et qui n'entendent pas, impies et vains
simulacres, qui doivent être brisés et foulés aux pieds. Il annonce
ce Dieu inconnu qui a fait le ciel et la terre et qui seul a droit
aux adorations des mortels. Il montre cette croix du Sauveur,
scandale et folie pour les Gentils, devenu l'instrument glorieux de
la rédemption du genre humain. A ces accents inconnus, la multitude
s'arrête étonnée elle écoute avec une étrange surprise ce langage
nouveau pour elle. Peut-être quelques hommes du peuple, quelques
pauvres esclaves se sentent émus en entendant parler de ce Dieu
rédempteur, qui a voulu prendre sur lui le fardeau de nos misères,
qui s'est fait pauvre et qui a revêtu la forme de l'esclave pour
râcheter les hommes. Peut-être aussi, quelques philosophes, qui
reconnaissent le vide profond des doctrines païennes, auraient voulu
qu'on laissât cet étranger exposer librement la doctrine dont il
s'est fait l'apôtre. Mais les prêtres des idoles, n'écoutant que la
passion de l'intérêt, s'écrient qu'un tel langage est une insulte à
leurs dieux, que cet homme est un impie, un blasphémateur, un
sectateur obstiné de cette superstition nouvelle qui attaque les
anciennes divinités, et que son crime ne doit pas rester impuni. La
foule mobile et légère passe soudainement de la surprise à la colère
et fait entendre des cris de mort contre le contempteur de ces
dieux. On l'entoure, on le saisit, on étouffe sa voix, et les
sacrificateurs demandent qu'il soit immolé là même où il a osé
attaquer le culte de la cité. Le saint apôtre, calme et résigné au
milieu de ce déchaînement des fureurs populaires, s'offre au ciel
comme une victime. Il demande au Seigneur que son sang devienne une
semence féconde qui fasse germer une Église florissante sur cette
terre infidèle, et il consomme son généreux sacrifice. D'après une
tradition populaire, la tête du Martyr, abattue par la hache des
sacrificateurs rebondit trois fois sur le sol, et chacun de ses
bonds fit jaillir une source.
Les trois
fontaines que fit jaillir le sang de saint Baudile, sont restées
comme les témoins de son glorieux martyre. Elles furent alors comme
la source bénie d'où coulèrent, sur la cité encore païenne, les eaux
vivifiantes de l'Évangile. Elles sont devenues pour le peuple
chrétien là source de bien des grâces, et c'est de là que découlent
ce dévouement ardent, ces convictions généreuses, cette fidélité
inébranlable qui animent les catholiques de Nîmes.
N'en doutons pas,
la dévotion dont les Trois-Fontaines sont l'objet a pour elle la
consécration des siècles. De tout temps, les fidèles ont vénéré ce
lieu et attribué à la source de Saint-Baudile une vertu miraculeuse.
Ce mouvement pieux qui, de nos jours, attire les fidèles sur cette
colline, les âges passés l'ont connu. Il a pu être ralenti et même
interrompu, au milieu de nos discordes civiles et religieuses. Mais
en le reprenant aujourd'hui, on ne
fait
que renouer
la
chaîne du
passé.
Ce
petit bassin,
creusé
dans
le roc,
a été
dans
tous les
siècles
une
piscine salutaire
où les
fidèles
'ont
retrempé leur
âme
et où
les
malades ont
quelquefois
trouvé
la
guérison de
leurs
maux. C'est
donc
une pensée
éminemment
pieuse
que
celle qui
a
porté de
nos
jours quelques
chrétiens
dévoués
à
restaurer et
à
agrandir l'antique
oratoire
des
Trois-Fontaines. On
ne
voit plus
aujourd'hui
trois
sources distinctes
comme
à Saint-Paul-Trois-Fontaines,
dans
la plaine
de
Rome. Les
travaux
qu'on
a dû
faire
pour niveler
la
roche et
asseoir
les fondements
de la
chapelle,
ont
dû bouleverser
le
sol et
changer
la
direction des
trois
sources qui
se
réunissent aujourd'hui
par
des filtrations
souterraines
dans
le même
bassin.
Lorsque
la
foule s'est
dispersée,
l'épouse
du
saint Martyr
et les
serviteurs
qui
l'accompagnaient recueillent
furtivement
ses
restes et
les
ensevelissent au
fond
de la
vallée
voisine.
« Par
cette
mort glorieuse,
disent
les Actes
des
Saints, cet
illustre
Martyr,
naguère
étranger
dans
Nîmes, y
a
conquis le
droit
de cité
et en
est
devenu le
protecteur
immortel.
Le
sang
du Martyr
fut
pieusement recueilli
par
quelques chrétiens
courageux.
Ainsi
qu'ils avaient
coutume
de le
faire
partout où
était
immolé quelqu'un
de
leurs frères,
ils
trempèrent des
linges
dans
le sang
qui
rougissait
le
sol et
les
conservèrent fidèlement
comme
un précieux
souvenir.
C'est
un fragment
d'un
de ces
linges,
teints
du
sang du
Martyr,
que
possède aujourd'hui
la
paroisse de
Saint-Baudile.
Ce
lieu resta
toujours
cher
à la
piété
des habitants
de
Nîmes. Ils
ne
séparèrent point
dans
leur ferveur
la
colline consacrée
par
le martyre
du
Saint de
la
vallée qui
gardait
sa
dépouille. En
allant
visiter
son
tombeau, ils
faisaient
une
station au lieu
de
son supplice,
et
ils les
associèrent
tous les
deux
dans une
égale
vénération.
SOURCE : P. Giry : Les
petits Bollandistes : vies des saints. T. VI. Source :
http://gallica.bnf.fr/ Bibliothèque nationale de France.
NOTA : L'image présentée
ci-dessus est l'oeuvre de
l'enlumineur Nîmois
Ferdinand Pertus. |