Sainte Berthe eut pour
père un comte du palais, sous Clovis II, roi de France. Le sang des
princes et des héros coulait dans ses veines ; mais sa gloire est
d'avoir eu deux saintes pour filles. La mère de Berthe ne voulut
point
confier à des mains étrangères le précieux trésor commis par Dieu à
sa garde, et elle fit sucer à l'enfant, avec le lait de son sein, le
lait de la piété et de la vertu de son cœur ; aussi cette tendre
plante, cultivée par des mains si pures, donna-t-elle, dès les
premiers printemps, les fleurs et les fruits les plus suaves de
sainteté, au point qu'elle eut bientôt la réputation d'être la fille
la plus belle, la plus aimable et la plus vertueuse de son siècle.
À l'âge de vingt ans,
elle fut mariée au noble seigneur Sigefroy, et, ayant été le modèle
des jeunes filles, elle devint le modèle des épouses et des mères.
Après vingt ans d'une union que ne troublèrent jamais les nuages des
passions, Berthe, devenue veuve, libre de toute entrave terrestre,
résolut de se consacrer entièrement à Dieu dans la vie monastique.
Le démon sans doute
voulut décourager la Sainte : elle eut révélation, pendant son
absence, que son premier monastère, bâti dans ses domaines, s'était
écroulé entièrement. Sa soumission à la Volonté de Dieu fut
parfaite, sa résolution resta inébranlable, et, après trois jours de
jeûne et de prière, un ange vint montrer à Berthe le lieu où son
monastère devait être reconstruit et le plan qu'elle devait adopter.
Deux ans après, l'un des plus beaux couvents de l'époque s'élevait
et recevait la bénédiction de l'Église ; ce même jour, la sainte et
ses filles, Gertrude et Déotile, recevaient le voile et se
consacraient à Dieu, et bientôt le monastère se remplissait d'âmes
d'élite éprises de la vie religieuse.
Quelques années plus
tard, Berthe renonçait à son titre d'abbesse pour le transférer à sa
fille Déotile, pendant qu'elle-même, retirée dans un lieu solitaire
voisin de la communauté, menait une vie tout angélique et ne
conversait plus qu'avec Dieu. Quand elle sentit l'approche de la
mort, elle fit appeler sa fille Gertrude (car Déotile avait quitté
ce monde) et toutes les religieuses, leur adressa les plus
touchantes exhortations, et leur donna rendez-vous, après les
épreuves de la vie, dans la Patrie éternelle. Avant de mourir, elle
aperçut un Ange gardien qui lui présentait une Croix lumineuse, et
entendit un concert céleste, prélude des harmonies célestes.
Abbé L. Jaud, Vie des
Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950. |