Carmélites de Compiègne

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Carmélites de Compiègne

Historique

Le 4 août 1790, les membres du directoire du district se présentèrent au monastère des carmélites de Compiègne, conformément aux ordres donnés par la Constituante, et procédèrent à l'inventaire des biens de la communauté. Les religieuses furent invitées à quitter leur habit et à abandonner leur monastère. Cinq jours plus tard, sur les conseils de la municipalité, elles signèrent toutes le serment de Liberté-Égalité. Dès lors, elles vécurent dispersées en quatre petits groupes, mais continuant, sous le costume séculier, leur existence de prière et d'immolation.

Le songe de sœur Elisabeth Baptiste

Un siècle auparavant, une carmélite de ce monastère, sœur Élisabeth-Baptiste, avait vu en songe toutes les religieuses de son couvent dans la gloire du ciel, revêtues de leur manteau blanc et tenant une palme à la main... Le ciel leur réservait-il donc l'honneur du martyre ? Cette pensée se présentait fréquemment à leur esprit. Aussi la mère prieure, sentant le désir qui prenait corps dans la communauté, leur proposa-t-elle, au cours de l'année 1792, de faire un acte de consécration par lequel la communauté s'offrirait en holocauste pour apaiser la colère de Dieu et (pour) que cette divine paix que son cher Fils était venu apporter au monde fût rendue à l'Église et à l'État. Cette consécration fut faite d'enthousiasme.

Deux religieuses anciennes, qui, tout d'abord, n'avaient pu dissimuler la crainte que leur causait l'idée de la guillotine et qui avaient hésité, émues moins du sacrifice lui-même que de la manière dont il devait s'accomplir, sollicitèrent, quelques heures plus tard et en pleurant, la faveur de se joindre à leurs sœurs. Et, chaque jour, en communauté d'abord, dans les différents groupes ensuite, la consécration était renouvelée, maintenant une flamme qui ne devait s'éteindre qu'au jour de la suprême immolation, sous le couperet de la guillotine.

Arrestation des carmélites

Cependant la régularité même de la vie de chaque groupe, reproduisant aussi exactement que le permettaient les circonstances l'horaire de la vie conventuelle, n'avait pas échappé aux Jacobins de Compiègne. Ils dénoncèrent donc au comité de salut public du district les ci-devant carmélites comme existant toujours en communauté, se livrant à des réunions suspectes et entretenant avec les fanatiques de Paris une correspondance criminelle.

Le 22 juin 1794, elles furent enfermées au monastère de la Visitation, transformé alors en prison. Là, en attendant que le Comité de salut public, avisé par le comité local, statuât sur leur sort, les recluses rétractèrent leur serment de Liberté-Égalité, préférant mille fois mourir plutôt que de rester coupables d'un tel serment.

Le transfert à Paris

Le 12 juillet, parvenait à Compiègne l'ordre du Comité de salut public de les transférer à Paris. Escorté de deux gendarmes et de neuf dragons, le cortège prit la direction de Paris, et parvint le lendemain, vers trois heures de l'après-midi, à la Conciergerie.

Malgré leurs liens et leur extrême fatigue, les carmélites mirent pied à terre sans l'aide de personnes. Seule, une religieuse octogénaire et infirme, sœur Charlotte de la Résurrection, les membres engourdis par une longue immobilité, ne savait comment descendre de la charrette. Impatientés, les voituriers la saisirent et la jetèrent brutalement sur le pavé. Elle se releva tout en sang et se contenta de dire à ceux qui venaient de la traiter ainsi : Croyez bien que je ne vous en veux pas. Je vous ai eau contraire bien de la reconnaissance de ce que vous ne m'avez pas tuée, parce que si je fusse morte... J'aurais été ravie au bonheur et à la gloire du martyre. C'était l'une des deux religieuses qui, deux ans auparavant, avaient hésité devant la perspective d'une mort sanglante ; maintenant, elle acceptait généreusement son sacrifice.

A la Conciergerie comme à Compiègne, les seize carmélites continuèrent à observer leur Règle : un témoin digne de foi, Denis Blot, élargi le 9 thermidor, déclare qu'on les entendait toutes les nuits, à deux heures du matin, récitant leur office. Le 16 juillet, elles célébrèrent la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel avec un tel enthousiasme qu'au dire d'un détenu la veille de leur mort paraissait un grand jour de fête pour elles.

Le soir elles reçurent avis de leur comparution, le lendemain, devant le Tribunal révolutionnaire.

La mort sur l'échafaud

Après un bref interrogatoire et sans même entendre de témoins, le tribunal condamnait à mort les seize carmélites coupables de former des rassemblements et des conciliabules contre-révolutionnaires, d'entretenir des correspondances fanatiques et de conserver des écrits liberticides. Et comme sans s'émouvoir, l'une d'elles, sœur Henriette de la Providence, demandait au président Scellier ce qu'il fallait entendre par le mot de fanatique qui figurait dans le texte du jugement, elle reçut cet aveu qui devait les remplir d'une joie indicible : J'entends par là votre attachement à ces croyances puériles, vos sottes pratiques de religion.

Une heure après, elles montaient dans les charrettes qui, par la place de la Bastille, les conduisirent sur la place du Trône renversé (place de la Nation). Tandis qu'à leur passage une foule assez composite manifeste des sentiments divers, allant des cris et des injures jusqu'à l'admiration, elles, indifférentes et sereines, chantent le Miserere puis le Salve Regina. Arrivées au pied de l'échafaud, elles entonnent le Te Deum, le cantique de l'action de grâce qu'elles font suivre du Veni Creator. Après quoi, elles renouvellent leurs promesses de baptême et leurs vœux de religion.

Mais voici qu'une jeune novice, sœur Constance, s'agenouille devant la prieure. Avec autant de simplicité que derrière les murs du couvent, elle lui demande sa bénédiction et la permission de mourir, puis, chantant le psaume Laudate Dominum, omnes gentes, elle gravit les marches de l'échafaud. L'une après l'autre, les autres religieuses observent le même cérémonial et viennent recevoir la bénédiction de mère Thérèse de Saint-Augustin avant de cueillir la palme du martyre. Enfin, la dernière, après avoir vu toutes ses filles donner à Dieu la plus grande preuve d'amour que puisse, ici-bas, lui donner la créature, la prieure livre, elle aussi, sa tête au bourreau.

Vie des saint et bienheureux,
Bénédictins de la rue de la Source, éd. Letouzey

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