Première station
Jésus
est condamné à mort
Pilate
ressortit et leur dit : « Voyez, je vous l’amène dehors pour que
vous sachiez que je ne trouve aucun motif de condamnation ». Jésus
sortit alors, portant la couronne d’épines et le manteau de couleur
pourpre. Pilate leur dit : « Voici l’homme ! ». Dès qu’ils le
virent, les grands prêtres et les gardes crièrent : « Crucifie-le !,
Crucifie-le !… Nous avons une Loi et d’après cette Loi il doit
mourir : il s’est fait Fils de Dieu »… Pilate fit amener Jésus
dehors et s’assit à son tribunal. Pilate dit aux Juifs : « Voici
votre roi »… les grands prêtres répondirent : « Nous n’avons d’autre
roi que César ! ». Alors il le livra pour être crucifié. (Jean 19,
4… 16)
MÉDITATION
Jésus sait ce qu’il y a
dans l’homme. Il a créé l’homme intelligent, capable de juger. Il
l’a créé libre, capable d’aimer mais aussi de pécher. Il a vu le
cœur de Judas se durcir, l’orgueil et la jalousie des pharisiens
chercher une occasion favorable pour le supprimer. Il voit la
lâcheté de Pilate en face des menaces. Il entend la phrase terrible,
l’abominable injure faite à son Père, la négation de toute
l’histoire d’Israël : « Nous n’avons pas d’autre roi que César. »
L’alliance séculaire redisait : « Je serai votre Dieu, vous serez
mon peuple. » « Mon peuple que t’ai-je fait, réponds moi. » Il
savait qu’il allait vers cette suprême injustice ; mais maintenant
le verdict est tombé.
Tout au long des
siècles et des générations, à commencer par le temps des apôtres,
n’est-ce pas Jésus-Christ lui-même qui a comparu tant de fois aux
côtés d’hommes jugés à cause de la vérité, et qui est allé à la mort
avec des hommes condamnés à cause de la vérité ? (Jean-Paul II,
Redemptor hominis N° 12)
PRIÈRE
Seigneur Dieu,
jugé par les hommes,
ne permets pas que nous te jugions à nouveau
en péchant contre toi
et fortifie tous ceux qui sont jugés
injustement à cause de toi.
Deuxième station
Jésus
est chargé de sa croix
Ils
prirent donc Jésus, qui, portant lui-même sa croix, sortit de la
ville pour aller au lieu dit du Crâne, en hébreu Golgotha. (Jean 19,
16)
« Or c’étaient nos
souffrances qu’il supportait et nos douleurs dont il était accablé…
transpercé à cause de nos péchés, écrasé à cause de nos crimes. Le
châtiment qui nous rend la paix est sur lui et c’est grâce à ses
plaies que nous sommes guéris. » (Isaïe 53, 4-5)
Il disait à tous : « Si
quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, se charge
de sa croix chaque jour, et qu’il me suive. Qui veut en effet sauver
sa vie la perdra, mais celui qui perd sa vie à cause de moi,
celui-là la sauvera ». (Lc 9, 23-24).
MÉDITATION
Ô bonne croix, depuis
si longtemps désirée. Terrible croix, trop lourde à mon corps
épuisé. Croix du supplice qui approche. Depuis toujours je pense à
toi. Croix du salut du monde entier. J’épouse avec toi toutes les
souffrances du monde. Je me donne à toi. Je te donne ma chair et mon
sang, je te donne ma divinité. Tu porteras à tous mon amour et ma
joie. Abba, Père, toi qui veux sauver le monde par cette horreur,
fortifie ton enfant. Le calice que le Père me donne, ne le boirai-je
? Père, je viens vers toi.
PRIÈRE
Merci Seigneur
d’avoir porté la croix de nos fautes,
la croix des fautes de toute l’humanité.
Donne-nous d’accepter les croix que tu nous envoies
et soutiens de ta force tous ceux qui souffrent
dans leur corps ou dans leur âme.
Troisième station
Jésus
tombe pour la première fois
La
voici venue l’heure où le Fils de l’homme doit être glorifié. « En
vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé ne tombe en
terre et ne meurt, il reste seul ; s’il meurt, il porte beaucoup de
fruit. Qui aime sa vie la perd et qui hait sa vie en ce monde la
conservera en vie éternelle. Si quelqu’un me sert, qu’il me suive,
et où je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu’un me sert,
mon Père l’honorera. Maintenant mon âme est troublée. Et que dire ?
Père, sauve-moi de cette heure ? — Mais c’est pour cela que je suis
arrivé à cette heure. Père, glorifie ton nom ! » (Jean 12, 23-28)
MÉDITATION
Jésus a subi
l’affreuse flagellation romaine, dont beaucoup mouraient. Il n’a pas
dormi en cette nuit d’outrages et d’interrogatoires. La couronne
d’épines lui a déchiré la tête et le cœur. Comment mesurer la
douleur aiguë qui lui transperce l’âme. L’ingratitude nous rend
malade. Jésus ne porte pas seulement la tristesse de la trahison de
Judas, la tristesse de voir son peuple condamner le Messie qu’il
attendait, il porte le poids des péchés du monde entier, de tous les
hommes, depuis Adam jusqu’au dernier. Fardeau démesuré ! Au delà de
nos forces, il y a encore place pour l’humiliation. Les forces
physiques cachées, qui n’obéissent plus à notre volonté, sont
réveillées par l’aiguillon des coups. Qu’attendre de soldats qui
l’ont frappé, ont craché sur lui quelques heures plus tôt. Cet
écrasement rachète nos fautes, celles de notre volonté délibérée,
celles aussi qui viennent des profondeurs désordonnées par le péché
d’autrefois. Sous le pressoir de l’épreuve, c’est la totalité de
notre nature humaine qui est ainsi atteinte. Par cette immense
souffrance, Jésus rachète et vivifie nos fibres les plus secrètes.
PRIÈRE
Notre Père qui es aux
cieux,
viens au secours de ton Fils épuisé ;
donne aujourd’hui la lumière aux incroyants,
le pardon aux pécheurs,
le pain aux affamés
pour qu’ils se relèvent de leur abattement.
Quatrième station
Jésus
rencontre sa mère
Syméon
dit à Marie : « Vois ! cet enfant doit amener la chute et le
relèvement d’un grand nombre en Israël ; il doit être un signe en
butte à la contradiction, - et toi-même, un glaive te transpercera
l’âme - afin que se révèlent les pensées intimes d’un grand nombre.
» (Luc 2, 34-35)
« Sa mère gardait
fidèlement tous ces souvenirs en son cœur. » (Luc 2, 51)
« Vous tous qui passez
par le chemin, regardez et voyez s’il est une douleur pareille à la
douleur qui me tourmente. » (Lm 1, 12)
MÉDITATION
Mère, ô ma mère. Quel
bonheur que tu sois là ! Je sais bien que la vue de mon sang te
transperce l’âme. C’est pour toi, que je suis là. Le Père voyait ma
peine d’aujourd’hui quand il a façonné ton âme immaculée. Quel
bonheur que tu sois pure, immaculée depuis toujours. Quel bonheur
qu’il y ait aujourd’hui sur terre quelqu’un qui soit avec moi,
quelqu’un qui plaise au Père avec moi. Quel bonheur qu’il y ait
aujourd’hui avec moi quelqu’un qui n’ait jamais désobéi au Père, qui
ne l’ait jamais renié, abandonné. O mère, ma mère Marie ! Mon cœur
ne t’a jamais quittée, mais maintenant que je vais à la mort, tout
en moi reflue vers toi. Merci d’être là, à cette heure où les
pensées intimes de chacun se dévoilent, à cette heure où mes
disciples sont loin. Mère, mon heure est venue, c’est la tienne
aussi. Je rachète une foule immense. Tu en es la Reine, toi qui
l’enfantes avec moi. Mère ! veille avec moi. Les bien aimés du Père
n’ont plus de vin, je leur donne cette vie qui me vient de toi.
Comme tu me l’a appris quand j’étais petit, j’obéis, j’obéis au
Père, à tout ce qu’il me dit.
Nous ne pouvons pas
oublier que du haut de la croix Jésus regarda sa Mère et Jean le
disciple qu’il aimait. Il confia le disciple à sa Mère : « Femme
voici ton Fils ! » Il indiqua ensuite Marie au disciple : « Voici ta
Mère » (Jean 19, 26). En ce seul homme, le disciple que Jésus
aimait, Jésus désigna Marie pour Mère à chaque homme, il lui confia
tous les hommes. Obéissants aux paroles du testament du Christ, nous
nous confions à Marie comme à notre mère.
PRIÈRE
Ô Mère,
ta souffrance est grande comme la mer.
Obtiens-nous de la reconnaître.
Ton cœur très pur est le seul
à pouvoir vraiment comprendre la peine de ton Fils.
Retiens-nous sur le chemin du mal
et obtiens-nous d’entrer avec toi dans le cœur de Jésus.
Cinquième station
Simon de
Cyrène aide Jésus à porter sa croix
«
Comme ils emmenaient Jésus, ils mirent la main sur un certain Simon
de Cyrène qui revenait des champs, ils le chargèrent de la croix
pour la porter derrière Jésus. » (Luc 23, 26)
« Portez les fardeaux
les uns des autres et accomplissez ainsi la loi du Christ. »
(Galates 6, 2)
« En ce moment je
trouve ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous, et je
complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son
Corps, qui est l’Église. » (Colossiens 1, 24)
« C’est par sa faveur
qu’il vous a été donné, non pas seulement de croire au Christ, mais
encore de souffrir pour lui. » (Philippiens 1, 29)
MÉDITATION
Ne crains pas Simon. Je
sais bien que tu n’as pas pu résister aux soldats qui t’ont chargé
de ma croix. Je sais tout ce qui se passe en ton cœur. Merci de
m’aider car je suis à bout. Avec toi je veux porter la croix que le
Père m’a donnée. J’ai besoin de toi. Je n’arriverai au bout qu’avec
toi. Le Père savait que tu serais là, avec moi, près de moi, et même
en moi. Tu es avec moi, mais moi je suis avec toi. Ma grâce va te
rejoindre. Elle va adoucir ton cœur contrarié, elle va t’aider à
porter cette croix qui est la mienne. Je te bénis Simon de m’aider à
faire ce que je ne voulais pas faire seul. Je te bénis maintenant,
je te bénis en tes enfants, Alexandre et Rufus, qui seront fiers un
jour de ce que tu fais aujourd’hui. Je bénis par toi tous ceux qui,
au long des siècles, te ressembleront, tous ceux qui auront été
forcés de porter un fardeau et une croix qu’ils n’auront pas choisis
ni voulus. Toutes les croix du monde, toutes les souffrances du
monde seront bénies par ma croix d’aujourd’hui. Merci Simon de
m’aider. Merci.
PRIÈRE
Ô mon Dieu,
voyez combien le prêtre est accablé en notre époque.
Donnez-lui de l’aide et aussi de la relève.
Montrez à tous ceux qui souffrent
quel est Celui qui souffre avec eux.
Sixième station
Une
femme pieuse essuie le visage de Jésus
«
Alors que des multitudes avaient été épouvantées à sa vue, tant son
aspect était défiguré — il n’avait plus d’apparence humaine — de
même des multitudes de nations s’en étonneront ; devant lui des rois
resteront bouche close, car ils verront un événement non raconté…
Sans beauté ni éclat et sans aimable apparence, objet de mépris et
rebut de l’humanité, homme de douleurs et connu de la souffrance… Or
c’était nos souffrances qu’il supportait et nos douleurs dont il
était accablé. » (Isaïe 52, 14-15 et 53, 2-4)
« J’ai cherché celui
que mon cœur aime… Les gardes m’ont rencontrée, ceux qui font la
ronde dans la ville : “Avez-vous vu celui que mon cœur aime ?” À
peine les avais-je dépassés, j’ai trouvé celui que mon cœur aime. »
(Ct 3, 1-4)
MÉDITATION
Ce que tu es défiguré
Seigneur ! Les coups ont tuméfié ton beau visage. Et pourtant, même
ainsi, avec le sang et la sueur, n’ayant plus d’apparence humaine,
tu es beau ! La nuit terrible et les crachats n’ont pu atteindre la
majesté profonde de ton visage. Je vois bien que tu étais beau, que
tu es beau encore et malgré tout. Et dans ce grand et beau visage,
ton regard Seigneur ! Les gardes revenus près des grands prêtres
disaient : « Jamais homme n’a parlé comme cet homme » ; jamais non
plus ne s’est trouvée une telle profondeur, une telle douceur, une
telle beauté de regard.
Pourquoi Seigneur ton
visage, lumineux comme le soleil au jour de la Transfiguration,
est-il maintenant si maltraité ? — J’accomplis ce qui est écrit en
Isaïe : « des multitudes épouvantées à ma vue tant je suis défiguré
», mais tout cela n’est rien à côté des désastres causés par le
péché dans les âmes, créées pourtant à mon image. En étant identifié
au péché, j’imprimerai dans les âmes, la beauté de mon visage. Plus
sûrement que sur un linge, j’imprime ma face dans l’âme et dans le
cœur de ceux qui m’aiment, de ceux qui veulent essuyer les larmes de
mes yeux, les larmes aussi de tous ces petits qui sont à moi.
PRIÈRE
Seigneur Jésus,
montre ton visage à tous les enfants du monde.
Que les outrages et les crachats des propagandes impies
ne les empêchent pas de t’aimer.
Seigneur, imprime ton visage en mon âme !
Septième station
Jésus
tombe pour la deuxième fois
Jésus
leur dit : « Tous vous allez être scandalisés, car il est écrit : Je
frapperai le pasteur et les brebis seront dispersées. Mais après ma
résurrection, je vous précéderai en Galilée. » Pierre lui dit : «
Même si tous sont scandalisés, au moins pas moi ! Jésus lui répond :
« En vérité, je te le dis, toi, aujourd’hui, cette nuit même, avant
que le coq chante deux fois, tu m’auras renié trois fois ». Mais lui
reprenait de plus belle : « Dussé-je mourir avec toi, non je ne te
renierai pas ». Et tous disaient de même. (Marc 14, 27-31)
MÉDITATION
Je porte les premiers
péchés des hommes, ces péchés de surprise ; je porte aussi toutes
les fautes habituelles, toutes ces fautes que l’on avait promis de
ne plus commettre. La première chute m’a surpris. Combien de fois
vais-je encore tomber ! Le péché du monde est démesuré. Il se
répète. Il est innombrable. Père ! mes forces humaines sont
limitées, elles ne suffisent pas à porter ce qui m’écrase. Comment
le Père peut-il permettre une chose pareille ? Comment Dieu peut-il
permettre un si grand mal ? Père, tu es plus grand que le mal. Tu as
tellement aimé le monde, que tu lui donnes ton Fils unique, tu le
donnes tout entier. Oui, Père, j’ai voulu avec toi cette heure avant
que fut le monde. Car moi aussi j’ai voulu donner ma vie pour mes
amis. Merci, Père, de dire au monde ton amour infini avec ma
faiblesse humaine et mes chutes sur le chemin.
PRIÈRE
Seigneur Jésus,
aide tous ceux qui souffrent en leur cœur et en leur chair.
Donne-nous de te reconnaître
dans tous tes membres malades et affligés
et fais nous te suivre sur le chemin de la Croix.
Huitième station
Jésus et
les femmes de Jérusalem
«
Le peuple, en grande foule, suivait Jésus, ainsi que des femmes qui
se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. Mais se
retournant vers elles, Jésus dit : Filles de Jérusalem, ne pleurez
pas sur moi ! pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! Car
voici venir des jours où l’on dira : “Heureuses les femmes stériles,
heureuses les entrailles qui n’ont pas enfanté, et les seins qui
n’ont pas nourri ! Alors on se mettra à dire aux montagnes : Tombez
sur nous ! Car si on traite ainsi le bois vert, qu’adviendra-t-il du
bois sec ?” » (Luc 23, 27-31)
MÉDITATION
« Jérusalem, Jérusalem,
toi qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés, que
de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble
ses poussins sous ses ailes…, et vous n’avez pas voulu ! » (Luc 13,
34)
« Ah ! si en ces jours
tu avais compris, toi aussi le message de paix ! Mais hélas il est
demeuré caché à tes yeux. Oui des jours vont fondre sur toi, où tes
ennemis te presseront de toutes parts. Ils t’écraseront… ils ne
laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas
reconnu le temps où tu fus visitée. » (Luc 19, 41)
« À longueur de
journée, j’ai tendu les mains vers un peuple incroyant et rebelle. »
Jérusalem ! Jérusalem !
toi qui m’acclamais avec de la verdure et des palmes, tu te frappes
la poitrine et me conduis au supplice. Bienheureux ceux qui
pleurent, ceux qui pleurent leurs péchés et ceux du monde entier.
Bienheureux ceux qui pleurent d’avoir fui l’amour du Père et de lui
avoir désobéi. Vous pleurez de me voir souffrir, et vous ne pleurez
pas de ce qui me fait souffrir. Ne pleurez pas sur moi. Je travaille
à votre salut. Maintenant le Fils de l’Homme est glorifié.
PRIÈRE
Seigneur,
nous compatissons à tes souffrances,
mais donne nous de pleurer sur nous mêmes
et sur nos enfants.
Délivre nous de notre superficialité ;
montre-nous nos fautes cachées.
Que la sève de vie de la vigne de ton Fils
rajeunisse le bois sec de nos cœurs habitués.
Neuvième station
Jésus
tombe pour la troisième fois
«
Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi !
Cependant, non pas comme je veux, mais comme tu veux ». Il dit à
Pierre : « Ainsi vous n’avez pas eu la force de veiller une heure
avec moi ! Veillez et priez pour ne pas entrer en tentation :
l’esprit est ardent mais la chair est faible ». À nouveau, pour la
deuxième fois il s’en alla prier : « Mon Père, si cette coupe ne
peut passer sans que je la boive, que ta volonté soit faite ! ».
Puis il revint et les trouva à nouveau en train de dormir… Il s’en
alla encore prier une troisième fois, répétant les mêmes paroles. »
(Matthieu 25, 38-44)
MÉDITATION
Que dire devant tant de
souffrance ? Les mots ont déjà servi. Comment te suivre si loin
Seigneur ? Même les saints qui ont le plus souhaité participer à ta
passion en ont été effarés : « Je ne pensais pas qu’il était
possible de tant souffrir », disait Thérèse à la veille de mourir.
Le cœur de l’homme est
un abîme. Abîme du péché qui s’en prend à l’être même de Dieu. Abîme
de la rédemption et de la souffrance du Rédempteur. « Oui – dit
Jésus – sur le chemin du Calvaire j’ai été accablé au-delà de ce que
les plus grands saints en ont deviné, au delà de ce que l’on peut en
dire. Le prophète dit que je suis broyé à cause de vos perversités.
J’ai marché devant vous pour que vous puissiez me suivre. »
« Venez à moi, vous
tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous
soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car
je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour
vos âmes. Oui, mon joug est aisé et mon fardeau léger. » (Mt 11,
28). Mon joug est léger car maintenant je le porte avec vous.
PRIÈRE
Seigneur,
libère-nous des péchés qui t’ont coûté si cher.
Libère-nous surtout de notre dernier péché,
celui qui risque de nous séparer éternellement de toi.
Quelle qu’ait été notre vie,
à cause de ta dernière chute,
sauve-nous de la désespérance.
Dixième station
Jésus
est dépouillé de ses vêtements
Les
soldats prirent ses vêtements et firent quatre parts, une pour
chaque soldat, et la tunique. Cette tunique était sans couture,
tissée tout d’une pièce de haut en bas ; ils se dirent entre eux : «
Ne la déchirons pas, mais tirons au sort qui l’aura ». Ainsi
s’accomplissait l’Écriture : Ils se sont partagés mes habits, ils
ont tiré au sort mon vêtement. Voilà ce que firent les soldats.
(Jean 19, 23-24)
« Je donne ma vie pour
la reprendre. On ne me l’ôte pas ; je la donne de moi-même. J’ai
pouvoir de la donner et pouvoir de la reprendre. » (Jean 10, 17-18)
MÉDITATION
Père, j’ai tout attendu
de toi, et rien ne m’a jamais manqué. Je n’avais pas même une pierre
pour reposer ma tête. Tu as préparé pour moi l’ânon de l’entrée à
Jérusalem et la chambre du Cénacle, tout ce qu’il fallait pour la
Pâque. Je veux bien que l’on me prenne mes vêtements.
Je leur ai donné ta
parole. Je leur ai donné du pain et du poisson. Je veux bien donner
ce qui me touche de plus près. Je donne mon sang, je donne ma vie.
L’Écriture s’accomplit. Père ! Sauve ma tunique de la déchirure !
Que tous ceux qui s’attacheront à moi soient parfaitement unis pour
que le monde croie que tu m’as envoyé.
Ils sont heureux de me
prendre l’honneur de ma chair. Leurs regards me flagellent. Père, tu
n’as voulu ni sacrifice, ni oblation ; mais tu m’as façonné un
corps. Alors j’ai dit : voici, je viens, pour faire, ô Dieu, ta
volonté. Père, tu as trouvé l’agneau pour le sacrifice.
PRIÈRE
Ô Dieu, Notre Père,
à cause de l’humiliation de Jésus, guéris nos yeux.
Sauve tous ceux que la malice humaine
dépouille de leur dignité.
Change le regard des coupables
et réconforte les victimes.
Onzième station
Jésus
est cloué sur la croix
«
Ils amènent Jésus au lieu dit Golgotha. Et ils lui donnaient du vin
mêlé de myrrhe, mais il n’en prit pas. Puis ils le crucifient…
C’était la troisième heure… L’inscription qui indiquait le motif de
sa condamnation était libellée : “Le roi des Juifs”. Et avec lui ils
crucifient deux brigands, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche. »
(Marc 15, 23-27).
Jésus, lui, disait : «
Mon Père, pardonne-leur, ils ne savent ce qu’ils font ». L’un des
malfaiteurs suspendus à la croix l’insultait en disant : « N’es-tu
pas le Christ ? Sauve-toi toi-même et nous aussi ». Mais l’autre, le
reprenant lui dit : « Pour nous c’est justice, nous payons nos actes
; mais lui n’a rien fait de mal ». Et il disait : « Jésus,
souviens-toi de moi, quand tu viendras dans ton royaume ». Il lui
répondit : « En vérité, je te le dis, dès aujourd’hui, tu seras avec
moi dans le Paradis ». (Luc 23, 34-43)
MÉDITATION
Père, sauve-moi de
cette heure ! Mais c’est pour cette heure que je suis venu.
Douleur fulgurante du
clou dans la main, douleur qui efface toute idée de la tête. Un seul
clou ne suffit pas. Il en faut un autre, encore un autre. Père, je
ne sais plus rien. Tu m’as identifié au mal. Je suis ce serpent
cloué en haut du mat. Ma vue torture ma mère, elle torture ceux qui
m’aiment. Les crucifiés qui m’entourent sont cloués dans la même
souffrance. Je suis cloué à la souffrance du monde entier. Mais je
sauverai ceux qui me regarderont. Père pardonne à tous. Donne leur
de ton Esprit. Que tous ceux qui souffrent se tournent vers ton
Royaume. Je guérirai ceux qui me regarderont, ceux qui
m’invoqueront. Ouvre ton paradis à ma brebis pantelante pour qu’elle
soit éternellement avec moi et que moi aussi je sois avec toi.
« Si quelqu’un veut me
servir, il doit me suivre, et là où je suis, sera aussi mon
serviteur. »
PRIÈRE
Jésus, cloué à la
croix, privé de liberté,
souviens-toi de tous les prisonniers :
ceux du péché, ceux des prisons,
ceux de la maladie et de la dernière agonie ;
fais-les entrer dès aujourd’hui en participation de ta vie.
Douzième station
Jésus
meurt sur la croix
«
Près de la croix de Jésus se tenaient sa mère, la sœur de sa mère,
Marie, femme de Clopas, et Marie de Magdala. Voyant sa mère et près
d’elle le disciple qu’il aimait, Jésus dit à sa mère : “Femme, voici
ton fils”. Puis il dit au disciple : “Voici ta mère”. À partir de
cette heure, le disciple la prit chez lui. Puis, sachant que tout
était achevé désormais, Jésus dit : “J’ai soif”… Une éponge imbibée
de vinaigre fut fixée à une branche et on l’approcha de sa bouche.
Quand Jésus eut pris le vinaigre, il dit : “Tout est achevé”, il
baissa la tête et remit son esprit. » (Jean 19, 25-30)
« Jésus, poussant un
grand cri, rendit l’esprit. Et voilà que le voile du Temple se
déchira en deux, du haut en bas. » (Matthieu 27, 51)
MÉDITATION
« Éli, Éli, lema
sabachtani », nous gardons ce cri étrange, craignant de l’abîmer en
le traduisant : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »
Que s’est-il passé dans l’ âme du Seigneur Jésus quand il a crié ce
début de psaume. Il est Dieu, Il est la Résurrection et la Vie. Il
est homme aussi. Il a voulu connaître cette profondeur de désarroi
où tous les désespérés de la terre pourront se reconnaître. Pourquoi
m’as-tu abandonné ? Dieu est présent en nous au-delà de ce que nous
pouvons percevoir. Pour Jésus, la présence du Père a quelque chose
d’unique. Même dans la brume de l’agonie demeure la vérité de ce
qu’il disait aux juifs : « Nul ne peut rien arracher de la main du
Père. Moi et le Père, nous sommes un. » « Entre tes mains je remets
mon esprit. »
Jésus abandonné par le
Père nous obtient l’accès permanent au Père. La soif de ce corps
exsangue le transforme en source qui jaillit éternellement… Dans le
grand cri de la mort, Dieu nous dit tout ce qui ne peut plus
s’exprimer en des mots humains : l’amour éternel transcende toute
parole.
PRIÈRE
O Mère du Christ,
toi qui te tiens au pied de la Croix de ton Fils,
tu es devenue notre mère.
Aide nous à croire comme le centurion,
aide nous à espérer la résurrection
dont tu n’as jamais douté.
Apprends-nous surtout à aimer comme ton Fils
nous le montre en son sacrifice.
Treizième station
Jésus
est descendu de la croix
«
Pour éviter que les corps ne restent sur la croix durant le sabbat…
les Juifs demandèrent à Pilate qu’on leur brisât les jambes et qu’on
enlevât les corps. Les soldats vinrent donc et brisèrent les jambes…
Arrivés à Jésus, ils le trouvèrent mort ; ils ne lui brisèrent pas
les jambes, mais l’un des soldats, de sa lance, lui perça le côté,
et aussitôt il sortit du sang et de l’eau… Joseph d’Arimathie, qui
était disciple de Jésus, demanda à Pilate l’autorisation d’enlever
le corps de Jésus. Pilate le permit. Ils vinrent donc l’enlever. »
(Jean 19, 31-38)
MÉDITATION
Mon enfant ! Te voilà
de nouveau dans mes bras. Te voilà baptisé dans ce baptême que tu as
tant désiré. Que tu es jeune encore ! Ta vie n’était pas à son
terme. Je sais, mon Jésus, que ni Judas, ni Caïphe, ni Pilate, ni
les soldats, ni même la lance n’auraient eu raison de ta vie si tu
n’avais voulu la donner par amour. Toi, le Maître du monde. Tu es né
sans me blesser, tu as ressuscité l’enfant de la veuve de Naïm, tu
as guéri l’oreille de Malchus. Mon Jésus, j’ai gardé en mon cœur
toutes tes paroles, toutes les paroles qui me furent dites de toi
depuis la venue de l’ange. Je sais que ton règne n’aura pas de fin.
Je savais qu’un glaive devait me transpercer. Je me souviens de
Siméon et de sa prophétie, je me souviens des autres prophéties : de
tout ce que le Messie devait endurer pour entrer dans sa gloire. Ce
que tu as enduré mon petit ! Ton front percé, tes mains clouées, ton
cœur ouvert. Je voudrais me cacher en tes plaies, en ton côté. Mon
fils emmène moi avec toi.
Tes paroles m’habitent.
Il n’y a plus qu’elles en moi : « Il faut que le Fils de l’homme
souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands
prêtres et les scribes, qu’il soit mis à mort », vraiment mon fils,
tu savais tout d’avance, « et que le troisième jour il ressuscite ».
Et que le troisième jour il ressuscite ! Ta promesse m’emplit l’âme
et le cœur. Ta promesse résonne en mon corps. Je suis en attente,
comme jadis sur la route de Bethléem. Mon petit je suis ta mère, et
c’est pour toujours. Je suis mère de ceux qui sont à toi. Tu me l’as
dit quand tu pendais aux clous abominables. « Voici ton fils ». Je
suis encore ta maman quand je suis mère de ton disciple, quand je
suis mère de tous tes disciples, de tous ceux que tu aimes.
Père ! Père juste !
justice pour mon Fils !
PRIÈRE
Je vous salue Marie,
pleine de grâce.
Le Seigneur est avec vous.
Vous êtes bénie entre toutes les femmes.
Et Jésus, le fruit de votre sein est béni.
Sainte Marie, Mère de Dieu,
priez pour nous pauvres pécheurs,
maintenant et à l’heure de notre mort.
Quatorzième station
Jésus
est mis au tombeau
«
À l’endroit où il avait été crucifié, il y avait un jardin et dans
ce jardin un tombeau neuf où personne n’avait encore été mis… Comme
le tombeau était tout proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus. »
(Jean 19, 40-42)
« Joseph d’Arimathie
enveloppa le corps de Jésus dans un linceul et le déposa dans une
tombe taillée dans le roc où personne encore n’avait été mis.
C’était le jour de la Préparation et déjà pointait le sabbat. Les
femmes qui l’avaient accompagné depuis la Galilée suivirent Joseph ;
elles regardèrent le tombeau et comment son corps avait été placé.
Puis elles s’en retournèrent et préparèrent aromates et parfums. »
(Luc 23, 53)
MÉDITATION
Seigneur où va-tu ? Où
je vais tu ne peux pas venir, tu me suivras plus tard. Je descends
au plus profond de la mort, au plus profond des enfers. Je suis
réuni à mes pères. Avec eux je suis humilié. Mais, ô mort, je serai
ta mort. Vous avez détruit ce temple, en trois jours je le rebâtirai
pour la gloire de mon Père. Et la gloire de ce Temple sera plus
grande que la gloire de tous les temples faits de main d’homme. En
ce Sabbat, je me repose de toute l’œuvre que je viens d’accomplir.
Ma chair repose dans l’espérance. Père glorifie ton Fils de cette
gloire que j’avais près de toi avant que fut le monde. Père, je sais
que tu m’exauces toujours, je sais que mon cri sur la croix est
parvenu jusqu’à toi. Je sais que tu me ressusciteras.
Quand viendra le
premier jour de la semaine, je montrerai que je suis le Créateur. Ma
création blessée, ma création souillée, je la reprends, plus belle.
Je suis né d’une mère vierge, toujours vierge, en entrant à
Jérusalem j’ai monté un ânon que personne n’avait monté, mon tombeau
est un tombeau neuf. Voici que je vais faire toutes choses
nouvelles.
PRIÈRE
Merci Seigneur,
d’être mort pour nos péchés.
Fais mourir en nous, ensevelis en ta mort,
ce qui résiste à la lumière, ce qui résiste à la grâce,
ce qui résiste à la vie, pour qu’avec toi,
dans le Saint Esprit,
nous rendions gloire au Père.
Amen.
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