Saint
Colombin faisait partie de cette fervente communauté qui, sous
la conduite de saint Colomban, fonda (590) l'illustre abbaye de
Luxeuil (Luxovium). Il était Irlandais. Elevé par saint
Desle ou Déicole, son parrain, il répondit
si bien à
ses soins, que lorsque cet illustre fondateur (610) de l'abbaye de
Lure (Luthra, au diocése de Besançon), renonça
au gouvernement de sa communauté pour se préparer à
la mort, il n'hésita pas à le désigner pour être
son successeur. Desle sembla revivre dans Colombin. La réputation
de Lure s'étendit de plus en plus. Un grand nombre d'hommes
distingués par leur naissance et par leurs richesses
quittèrent le siècle pour venir embrasser, sous sa
direction, une vie plus parfaite On y vit bientôt, revêtues
de tout leur éclat, les 2 fleurs qui avaient coutume d'orner,
à cette époque, la solitude des cloîtres :
la piété et la science.
Tels
sont les traits généraux sous lesquels l'histoire nous
représente le gouvernement de saint Colombin. Sa mort fut
précieuse aux yeux de Dieu, et, comme celui de saint Desle,
son tombeau fut glorieux. Un des prodiges les ptus éclatants
par lesquels il plut au Ciel de révéler le crédit
du saint abbé, arriva vers l'an 926. Hildegarde, épouse
du comte Hugues, qui possédait alors la terre de Lure, eut la
téméraire pensée de s'approprier une partie des
reliques dont le monastère était enrichi. Comme elle ne
put détacher la moindre parcelle du corps de saint Desle, elle
ouvrit le tombeau de saint Colombin et en prit une dent; mais le peu
de résistance qu'elle éprouva lui inspirant des doutes
sur la vertu de ce corps, soit par dédain, soit pour soumettre
la relique à une sorte d'épreuve, elle jeta la dent au
feu. A l'instant même elle fut saisie d'une violente douleur,
et ni la ferveur de ses prières, ni son empressement à
réparer le sacrilège, ne purent y apporter de remède.
Près
de 400 ans après, le récit de ce prodige excitait
encore la piété et la foi de Rodolphe, duc d'Autriche,
qui était venu à Lure pour réprimer l'audace des
Bourguignons et assurer l'indépendance du monastère.
C'est lui-même qui nous raconte ce qui se passa dans cette
circonstance, comment il eut le bonheur d'obtenir une relique de
saint Colombin, et quel usage il en fit : "Nous, Rodolphe 4, par
la grâce de Dieu, duc d'Autriche, sommes venu en personne à
Lure, le 15 des calendes d'avril 1361. Nous sommes entré
dévotement à l'oratoire et chapelle de saint Desle ;
puis, nous étant humblement agenouillé devant le
tombeau de saint Colombin, nous lui avons demandé quelques
parcelles de ses reliques : ce qu'il a daigné nous accorder.
Sans éprouver la moindre résistance, et avec la
permission de l'abbé, nous avons détaché
plusieurs parties de ses ossements, dans le dessein de les porter à
l'église collégiale que nous voulons faire construire à
Vienne, et de les y renfermer et conserver avec le respect qui leur
est dû".
Quelques
reliques du saint abbé sont même arrivées jusqu'à
nous, comme un gage de sa protection et un titre à nos
hommages. Religieusement recueillies dans les jours mauvais de notre
Révolution, elles furent déposées, après
l'orage, dans l'église de Lure, où Mgr Gousset, alors
professeur de théologie au séminaire romain de
Besançon, vint en faire la reconnaissance, en 1825. Le 25
janvier 1838, N. Bergier, vicaire-général de Besançon,
la renouvela, dans une cérémonie où la piété
des peuples rivalisa avec le zèle du pasteur, pour orner et
bénir les restes des saints fondateurs de Lure. On déposa
ces précieuses dépouilles dans une châsse
élégante qui fut offerte par la libéralité
des fidèles et qui restera comme un témoignage de leur
reconnaissance.
Extrait de la "Vie des Saints de Franche-Comté",
par les professeurs du collège Saint-François-Xavier de
Besançon. |