Escritos Agosto 2008 Fr

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7 mars 1942

Mon bon Jésus,

J’ai passé presque toute la nuit à Vous tenir compagnie ; je n’ai pas perdu l’union avec Vous. J’ai pleuré, car je ne pouvais pas cacher davantage ma douleur ; mes larmes je vous les ai offertes. Les ténèbres ont atteint la hauteur qui sépare la terre du ciel, elles m’ont caché le bleu du firmament. Et moi si abandonnée, perdue dans l’obscurité : ma douleur était mortelle. Avant même l’aurore Vous êtes venu dans ma chambre, Vous êtes venu dans mon cœur. Je suis encore restée quelques instants dans la même douleur ; ensuite, dans mon âme, votre soleil divin a brillé, j’ai alors joui de votre douce paix et entendu votre divine voix :

— Ma fille, ô ma bien-aimée, mon amour te consume. En toi il n’y a que de l’or très fin ; mon feu divin purifie tout en toi. Quelle richesse que celle de ton cœur ! Je trouve en lui toute consolation et mes délices. Tu m’as tout donné : j’ai tout reçu et gardé.

Je suis venu dans le jardin de mon épouse, j’y ai cueilli beaucoup de fleurs ; j’ai gardé tout leur parfum. C’est pour le distribuer aux âmes : c’est lui qui les attire vers Moi.

Dis, ma petite folle, à ton Père spirituel, qu’il l’est et le restera toujours ; je n’ai pas consenti ni ne consentirai à ce qu'on te l'enlève ; dis-lui que je lui envoie tout mon amour et l'amour de ma Mère bénie également. Cela suffit, c’en est assez de l’expérience des hommes. Le coup qui t’a été porté aurait pu être fatal si je ne veillais pas sur toi, si je ne te soutenais pas et ne t’enveloppais de ma divine protection. Je veux que bien vite, avec toute son attention, ton Père spirituel veille sur ton âme.

Dis au Docteur Azevedo que tout ce qu’il fait pour toi c’est à moi qu’il le fait et que par toi je le reçois. La récompense est éternelle, je lui accorde tout mon amour : il recevra tout par toi. Tous ses enfants restent sous ma protection ; aucun d’eux ne se perdra ; tous auront dans le ciel une place de prédilection. Je veux qu’il soit toujours, toujours attentif à la plante que je lui ai confiée, car celle-ci ne pourrait pas vivre sans ses soins. La fin approche rapidement, toute la gloire et tout triomphe sont pour Jésus.

J’ai cessé de vous entendre, mon Amour, et presque aussitôt mon cœur a commencé à saigner de douleur. Toutefois, votre divine force m’a raffermie ; je souffre mais j’ai davantage de vie. Je ne veux pas douter de vos paroles, j’espère une résolution ferme, une transformation complète des cœurs humains. Seul le pouvoir de Dieu peut renouveler tant d’obstacles.

J’espère en Vous, mon Jésus : ne me laissez pas mourir de faim, ne permettez pas que je sombre dans l’abattement. Laissez-moi tout votre amour, toute votre confiance, un grand désir de souffrir pour Vous.

Accordez-moi votre bénédiction, mon Jésus,

je suis la pauvre Alexandrina.

13 mars 1942

Jésus, je me vengerai, et je me vengerai fortement de ceux que me font tant souffrir. Savez-vous comment, mon Amour ? Par des prières plus ferventes, par mes sacrifices afin qu’ils Vous connaissent et Vous aiment. S’ils Vous aimaient comme vous le voulez, ils ne procéderaient pas de la sorte. Pardonnez-leur, bon Jésus.

Tout ce qu’ils disent sur moi, moi, sans Vous, sans votre grâce, je le serais et peut-être encore davantage. Si Vous me laissiez seule ne fut-ce qu’un seul instant, cela serait suffisant pour que je pratique de plus grands crimes encore. Une seule chose me reste à faire : remercier ceux qui m’humilient et me blessent. Ils m’ont ouvert un nouveau chemin afin que je vous suive de plus près, avec davantage de perfection et d’amour.

Je veux sourire à tout et que ce sourire soit en premier lieu pour Vous. Mon pauvre cœur est blessé, on ne cesse pas de le piétiner et à rouvrir toujours la même plaie. Peu importe, car une seule chose m’intéresse : votre amour ; celui-là me suffit ; celui-là je veux le posséder même si pour cela je dois être piétinée et traitée par tous comme une esclave.

À Vous, mon Jésus, je me suis déjà offerte et je m’offre continuellement comme esclave. Je baisse la tête pour recevoir de Vous le coup qui apporte toute la douleur et le sacrifice. Au plus profond de mon cœur je répète toujours : que votre volonté soit faite, Jésus, faites de moi ce que vous voudrez.

Jésus, la soif et la faim dessèchent mes lèvres et mon âme elle-même se meurt de soif. La soif de mon corps c’est Vous qui permettez que je ne puisse pas la satisfaire ;[1] je Vous offre ce sacrifice, je l’accepte par amour, afin que Vous puissiez rassasier la soif de tous les cœurs.

La soif et la faim de mon âme est causée par les hommes, ce sont eux qui me laissent mourir : ils ne permettent pas que mon âme s’alimente et se rassasie à la source que Vous avez choisie vous-même.

Ô mon Jésus, ô Jésus, ayez pitié de moi, regardez mon âme qui ressemble à un petit oiseau perdu et désemparé, qui faiblit.

Que serais-je sans Vous ! Quel douleur, quelle souffrance, mon Jésus ! Quelles ténèbres ! Quelle obscurité horrifiante ! Que de chemins si parsemés d’épines! Aveuglée j’y tombe et m’y blesse, mon corps est meurtri de coups et mon sang coule. C’est pour les âmes !

Vous placez devant moi, devant mes yeux mon énorme croix ; je la vois clairement et sur elle je suis continuellement clouée. Et maintenant, mon Jésus, à chaque instant, mon agonie devient de plus en plus douloureuse. De temps à autre, déjà presque sans vie, je laisse échapper un gémissement ; mes yeux perdent leur éclat ; je meurs abandonnée, envahie par la peur. La crucifixion approche ; soutenez-moi, veillez sur moi, mon Jésus.

Après la crucifixion

Mon Jésus, lorsque les moments de plus grande angoisse approchaient, avez-vous entendu, mon Jésus, ma faible voix qui vous demandait de me ramener vers Vous, car je n’en pouvais plus ? Pardonnez-moi, mon bon Jésus, pardonnez-moi, mon Amour. C’est vrai que mon abattement était bien grand et mon corps n’avait plus de force, il était incapable de se mouvoir. Ma volonté voulait Vous suivre, celle-là était ferme, et Vous êtes venu la soutenir, vous êtes venu me redonner vie, me fortifier et alors, j’ai entendu votre douce voix :

― Ma fille, ma bien-aimée, donne à ton Jésus l'aumône que bien peu de fois te sera demandée[2]. Sans elle, les pécheurs, meurent de faim et tombent par milliers en enfer. Sans elle, le Portugal n’aurait pas de paix et l’univers entier ne recevra pas la paix désirée ; sans elle, mon divin Cœur serait absent de beaucoup de cœurs, de beaucoup d’âmes.

Courage ! Ton Père spirituel te soutient et te protège : Jésus et Marie te protègent aussi.

J’ai cheminé vers Gethsémani, toujours dans la tristesse, les ténèbres et la douleur. Je vous ai senti, mon Jésus, revêtu de moi, appeler les âmes. Vous leur parliez de l’agonie de votre Cœur, vous leurs montriez combien il était blessé et blessé uniquement par amour. Quelle ingratitude ! Je sentais les âmes Vous tourner le dos, Vous mépriser. Pauvres âmes qui ne veulent pas vous écouter ! Elles Vous fuyaient, comme folles, allant à leur perte.

Les âmes allaient d’un côté et le Père éternel de l’autre, en colère contre Vous, Jésus, Vous laissant dans le plus grand abandon. Je ne pouvais presque plus résister d’entendre votre douleur, votre amertume : même les pierres semblaient s’en émouvoir. Je ne pouvais pas Vous voir fuir vers la solitude, Vous mettre sous la terre, écrasé par un univers de péchés. Je ne sais pas exprimer votre souffrance, mon Jésus ; je n’ai pas de mots qui puissent expliquer l’infinité de votre Amour.

Je me suis relevée de Gethsémani pour continuer d’être le même instrument en vos mains divines, dans tout le parcours de votre Passion.

Mon abandon augmente de crucifixion en crucifixion ; mais mon abattement est de plus en plus grand. Je ne peux attendre l’aide du Ciel et, sur la terre on veut me priver de tout. Ô mon Jésus, ô Jésus, à qui dois-je m’adresser ? Ce n’est que par obéissance, si mal comprise pourtant, que je résiste à cette marée de souffrances.

Lors de la flagellation, je me suis reposée sur Vous, votre divin Cœur fut mon abri, en lui j’ai reçu la vie qui était presque perdue. Protégée par Vous, je regardais toutes les souffrances, mais pendant que je m’y reposais, je ne les craignais pas. Votre divin abri me donnait force, amenuisait ma douleur. Quand, sans état d’âme, on frappait ma tête et on y plantait des épines très aigües, je me suis reposée auprès de la si chère Mãezinha. Alors, comme le petit enfant qui joue dans les bras de sa mère, je me lançais vers Elle, je m’agrippais à son cou, je l’embrassais, je l’embrassais pendant qu’Elle aussi me caressait.

Je regardais d’un côté et de l’autre, de partout des souffrances arrivaient ; je savais qu’elles étaient pour moi ; mon cœur souriait à tout cela et je disais : je reçois tout cela par amour.

Ô mon Jésus, ce sont là des épanchements et non point des consolations. Que votre Cœur puisse avoir la consolation que j’aurais pu avoir ! Brillez dans les âmes pendant que je souffre dans les ténèbres.

Je suis montée vers le Calvaire, je suis allée vers la croix ; mon épuisement était mortel et les insultes tombaient sur moi. Mon corps et mon âme étaient pris par la peur et l’épouvante. Crier vers le Ciel ne servait à rien. Mourir seule, mourir de douleur entre larmes et soupirs, mourir pour donner vie, mourir pour que les ténèbres se transforment en lumière, voila mes seuls désirs.

Ce martyre est terminé, mon Jésus, et mon pauvre cœur n’a pas eu le moindre instant de soulagement ; il continua de saigner : il ne pouvait pas s’attendre à des horizons joyeux. Tout ou presque s’acharnait à creuser ma tombe. Je regarde en arrière, je regarde devant, je ne vois personne en ma faveur : tout est révolte, tout est mépris.

Ma vie avec ses “illusions” continue[3]. Me redonneront-ils mon Père spirituel ? Viendra-t-il aujourd’hui? Viendra-t-il demain? Mon Jésus, je n’ai commis aucun crime ; je souffre innocente, je souffre par amour pour Vous, je souffre pour Vous donner des âmes. Mieux vaut souffrir toute une vie innocente que de souffrir un seul instant coupable !

Mon Jésus, les lettres de mon Père spirituel m’ont été rendues. Pourquoi faire ? Le sacrifice était fait ! Ce fut comme si on les avait placées sur un cadavre qui ne ressent plus rien. L’obéissance le commande, je l’accepte.

Accordez-moi votre bénédiction et votre pardon.

La pauvre Alexandrina.


[1] Il faut se souvenir qu’Alexandrina ne mange ni ne boit plus : elle ne s’alimente que de l’Eucharistie et du Sang de Jésus.

[2] Deolinda, la sœur d’Alexandrina expliqua au Père Humberto Pasquale : “Notre Seigneur semble faire comprendre à Alexandrina que la crucifixion physique va se terminer”. Entendez par là la crucifixion visible.

[3] C’est la période où le Père Mariano Pinho, Directeur spirituel d’Alexandrina avait été éloigné de celle-ci par ordre de son Supérieur. Il ne sera plus jamais autorisé à la revoir et mourra en exil loin de Balasar, à Récif, au Brésil.
 

 

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