Digne d'être connu et vénéré de
l'univers entier, illustre par ses nombreux et éclatants miracles, saint
Francisco Solano, le
grand apôtre de l'Amérique du Sud, est resté trop longtemps
dans l'oubli, et cependant ses travaux apostoliques peuvent être comparés avec
avantage à ceux de ce homme intrépides qui ont fait sur d'autres plages de si
merveilleuses conquêtes à l'Évangile, et dont l'histoire est universellement
connue.
De plus, malgré les siècles
écoulés depuis sa découverte, le monde de Christophe Colomb peut encore
facilement compter ses saints ; il est juste qu'il connaisse au moins ceux qu'il
a produits. Sans doute l'Amérique ne donna pas le jour à ce vaillant soldat du
Christ, l'Espagne eut cette gloire, mais du moins, sur la terre du
Nouveau-Monde, ce saint exerça son glorieux apostolat ; de ces régions fécondées
par sa sueur il s'éleva vers la céleste patrie, et c'est elle qui garde son
tombeau.
Francisco Solano vint au mode à
Montilla, ville d'Andalousie, le 10 mars 1549, en ce temps là, les ténèbres de
l'hérésie s'élevaient sur le monde, L'Europe voyait sa foi diminuer et
s'éteindre sous les doctrines dégradantes de Luther et de Calvin ; pendant que
ces apôtres de l'enfer, se survivant dans leurs adeptes, ravissent aux nations
leur foi et leur fidélité, Dieu se choisit de nouveaux peuples, sa divine
providence fait naître un véritable apôtre qui portera à des barbares moins
dégradés, cette lumière de la foi, cette espérance de la vie éternelle, que les
peuples soi-disant civilisés s'efforcent de ne plus voir, pour ne plus
l'accepter, le vœu de Colomb sera exaucé, car c'était moins des terres à
L'Espagne moins de l'or à la Palestine, que des âmes pour le Christ qu'était
allé chercher l'intrépide navigateur.
Déjà Francisco Solano avait
traversé saintement l'adolescence, déjà tout jeune religieux il avait servi de
modèle aux plus anciens et aux plus pieux ; déjà comme prédicateur il avait
distribué aux âme les dons du Saint-Esprit dans les ses paroles brûlantes
d'amour de Dieu jointes aux admirables sanctions d'une vie sainte déjà martyr de
sa charité, il s'était, durant la peste qui désolait sa patrie, livré à la
contagion en se dévouant aux malades abandonnés pour les servir et les
soulager ; déjà par sa profonde humilité, par les austérités de la plus sévère
discipline, par les séjours et ses nuits passés dans les exercices de piété et
de pénitence, il avait porté la mortification jusqu'a imiter les grands
Patriarches de la vie monastique, Benoît et François, se roulant comme eux dans
les épines dans l'excès de son zèle pour dompter son corps et éteindre l'ardeur
de la concupiscence ; il voulait encore monter plus haut et désirait avec ardeur
souffrir le martyre.
Dans ce but, il demanda par grâce
à ses supérieurs la permissions d'aller prêcher en Afrique ; sur le refus qu'on
lui en fit, il demanda et obtint une place parmi les missionnaires de son Ordre
qui s'embarquaient pour aller porter la Foi dans l'Amérique méridionale.
Comptant pour rien les périls de la terre et de la mer, en comparaison du salut
des âmes, il arriva non sans prodiges avec ses compagnons, au lieu où le
Seigneur lui préparait une grande mais difficile moisson. Il n'épargna ni
travaux, ni veilles, ni fatigues ; faisant siennes les misères des autres,
enflammé de l'amour de Dieu et du prochain, il mérita d'apprendre par infusion
divine la langue de ces peuples, et leur prêchant la foi d'une parole si
persuasive, il s'insinua si fort dans leurs esprits, que ces sauvages, quittant
leur férocité naturelle, accouraient à l'envie à ses instructions ; il en
instruisit et en baptisa une multitude innombrable. Il gagna tellement leur
estime et leur confiance qu'il leur faisait faire de bon gré ce qu'on n'avait pu
obtenir d'eux par des moyens de rigueur. La force de ses paroles parut
particulièrement un jour de jeudi saint : les chrétiens s'étant assemblés selon
leur coutume pour célébrer saintement les mystères de la passion de
Notre-Seigneur; plusieurs milliers d'infidèles s'attroupèrent pour fondre sur
eux et les exterminer, Francisco Solano ayant paru, et s'étant fait entendre à
ces barbares, de nations et de langues différentes, les désarma, fit la paix
avec eux et en convertit à la Foi de Jésus-Christ plus de neuf mille en cette
occasion.
Plus tard s'étant rendu à Lima,
il prêcha la pénitence à cette grande ville ; comme un autre Jonas, il menaça
cette autre Babylone d'une entière destruction si ses habitants ne se livraient
pas de tout leur cœur au repentir. Cette exhortation fut si efficace qu'ils
s’engagèrent dans la voie d'une pénitence étonnante.
Indiens et Espagnols se
convertissaient en foules sur son passage, car Francisco était un véritable
missionnaire et un homme de Dieu. Jamais la première ferveur de son apostolat ne
se refroidit, l'ardeur du combat loin de le lasser le ranimait sans cesse ;
l'esprit de la foi le soutenait ; il entretenait son zèle par les mêmes
austérités qui avaient marqué les débuts de sa vie religieuse et peut être par
de plus grands encore. Il faisait tous ses longs voyages à pieds sans jamais
porter de sandales, en quelque état que fussent les routes à travers les forêts
et les montagnes. Véritable enfant de François d'Assise, dont il est une des
parfaites copies, il se confiait en tout à la bonne Providence sans redouter les
mille dangers que lui offraient continuellement les hommes, les animaux ou les
choses ; il n'emportait jamais de provision laissant à Dieu le soin de pourvoir
à tous ses besoins.
Durant 14 ans, Francisco Solanno
se dévoua ainsi au salut de ses frères ; travaux pénibles à la nature, mais
consolants pour son cœur d'apôtre, fructueux pour les âmes et agréables à Dieu.
Enfin complètement épuisé, âgé seulement de 61 ans, il connut que le jour de son
dernier appel approchait Ayant reçu les sacrements de l'Église, mettant ses bras
en croix, fixant son cœur et son esprit en Dieu et récitant de ferventes
prières, il expira le 14 juillet 1610, le jour de la fête de saint Bonaventure
qu'il avait choisi depuis longtemps pour son protecteur. Son corps, auparavant
fort brun, devint après sa mort si blanc et si beau et répandit un parfum si
suave, que la foule émerveillée pensa instinctivement à la beauté mille fois
plus grande encore de son âme qui venait de s'envoler dans le sein de Dieu.
Béatifié le 245 janvier 1675, par Clément X, saint Francisco Solano fut canonisé
par Benoît XIII el 17 décembre 1736, les Péruviens l'on choisi comme Patron.
Tiré des Fleurs Franciscaines
Vol. 2. 126-132 – 14 juillet.
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