Germain d'Ecosse

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Germain d’Écosse
Évêque, Martyr, Saint
† 480

Entre les agréables fruits que saint Germain, évêque d'Auxerre, recueillit en l'île de la Grande Bretagne, lorsqu'il y fut envoyé comme légat apostolique, pour exterminer l'hérésie de Pelage, on peut compter avec justice un autre saint Germain, dont je vais rapporter les plus belles actions. Ce saint prélat,, étant en cette île, fit connaissance avec un seigneur écossais, appelé Audin, qui y était passé avec Aquila, sa femme. Ils avaient un fils parfaitement beau et qui charmait toutes les personnes qui le voyaient. Saint Germain fut si touché de compassion de les voir ensevelis dans les ténèbres de l'idolâtrie, qu'il demanda à Notre-Seigneur leur conversion pour la récompense de ses travaux. Sa prière eut son effet ; car ce seigneur, pénétré des lumières de l'Évangile que ce saint évêque prêchait, se fit chrétien avec sa femme, son fils et toute sa famille. Comme saint Germain avait une tendresse particulière pour leur fils il voulut, à son baptême, lui servir lui-même de parrain et lui donner son nom. Ce fut par une providence du ciel que ce jeune néophyte fut effectivement, par son zèle et son courage, un autre saint Germain.

A près son baptême, ses parents le firent élever avec tant de soin dans la piété et dans les sciences, qu'il fut comme le prodige de son siècle. Personne, de quelque condition et qualité qu'il fût, ne rapprochait sans en être parfaitement satisfait ses paroles portaient une certaine onction qui ravissait tout le monde néanmoins, les pauvres et les malheureux y étaient les mieux venus il ne les pouvait voir sans découvrir, sous leurs misères, la majesté de son Rédempteur, qui s'est caché en leurs personnes. Quand il se vit en âge de faire le choix d'un genre de vie, il renonça généreusement à tous les avantages que le droit de sa naissance lui pouvait faire espérer dans le monde, pour se mettre dans les Ordres sacrés.

Étant prêtre, il voulut faire un voyage en France, pour y voir son père en la foi, saint Germain, évêque d'Auxerre c'est pourquoi il résolut, comme Abraham, de quitter sa patrie, ses parents et tous ses biens, pour se, donner entièrement à la vie apostolique et porter partout la gloire et le nom de Jésus-Christ. Mais, étant arrivé sur le bord de la Manche, où l'Océan sépare l'Angleterre de la France, il n'y trouva pas de vaisseau pour traverser ce bras de mer n'en pouvant pas espérer de sitôt, il s'adressa au souverain Maître des eaux, et le pria de lui donner de quoi faire ce trajet, si le dessein qu'il avait formé venait de l'Esprit-Saint. Chose étonnante sa prière ne fut pas plus tôt achevée, qu'il vit paraître sur les eaux un chariot qui vint à lui, l'enleva de terre et le transporta en un moment de la côte d'Angleterre à celle de France, aux environs de Flammenville, près de Dieppe. Les habitants de cette contrée, qui vivaient encore dans les ténèbres du paganisme, le voyant arriver sur cette nouvelle barque, le prirent, les uns pour Neptune, dieu des eaux, les autres pour un magicien qui faisait paraître ce fantôme à leurs yeux. Mais ils changèrent bien de sentiment à la mort tragique du juge de ce lieu, qui expira dans d'horribles douleurs pour avoir blasphémé contre la doctrine de saint Germain. Sa sainteté fut encore reconnue par un autre miracle. Un serpent, d'une prodigieuse grandeur, ravageait tout le pays et avait nouvellement étouffé un enfant. Le Saint ressuscita d'abord cet innocent puis, se faisant conduire à l'entrée de la caverne, où ce monstre se retirait, il lui jeta son étole sur le cou, et, en cet état, il le mena fort paisiblement jusqu'à une citerne très profonde, l'y précipita et fit ensuite combler le trou ce qui étonna tellement ces idolâtres que cinq cents se convertirent. L'histoire ne dit point si notre Saint rencontra saint Germain d'Auxerre ; mais elle dit qu'il passa jusqu'à Trèves, où il trouva l'évoque saint Sévère, qui l'avait accompagné dans son second voyage d'outre-mer, et qui avait aussi connu celui dont nous parlons, dans sa jeunesse. Ce prélat, voyant les talents que Dieu lui avait donnés, lui conféra, en vertu de pouvoirs spéciaux, le caractère épiscopal, mais sans lui assigner de siège, afin qu'il pût donner un plus large essor à son zèle. Étant autorisé par cette nouvelle dignité, il alla prêcher l'Évangile en Frise, et généralement dans toutes les provinces de la Basse Allemagne, confirmant sa doctrine par beaucoup de miracles. Il était si affable dans sa conversation, et si charitable à secourir les malades, que les idolâtres mêmes le chérissaient et couraient après lui comme après un souverain médecin. Voilà, en substance, tout ce que nous avons pu recueillir des fruits de la prédication de saint Germain dans les Allemagnes. Il alla ensuite à Rome visiter les sépulcres des bienheureux apôtres saint Pierre et saint Paul; et, priant une. nuit dans l'église de Saint-Pierre, il reçut lui-même la visite de cet Apôtre qui, approuvant ses travaux pour la prédication de l'Evangile, l'exhorta à continuer, avec promesse expresse que, pour sa récompense, il recevrait enfin la couronne du martyre. Saint Germain, ravi de ces bonnes nouvelles, et fortifié par cette voix du ciel, n'eut plus de repos dans son cœur qu'il n'eût trouvé l'occasion de recevoir cette palme qu'on lui faisait espérer. Il passa d'abord d'Italie en Espagne, pour voir si, parmi les idolâtres qui y étaient encore, ou parmi les Ariens qui persécutaient les catholiques, il ne trouverait pas de quoi satisfaire ses désirs. Il y prêcha partout l'Évangile, baptisa plusieurs personnes, renversa les temples, fit bâtir de nouvelles églises au vrai Dieu enfin, il y fit tant de miracles, que la ville de Tolosa en a conservé longtemps le souvenir.

Mais ce zélé prédicateur, voyant que, au lieu de la persécution qu'il cherchait dans les pays étrangers, il trouvait de l'honneur et des applaudissements, crut qu'il serait plus heureux dans sa patrie. C'est pourquoi il passa en Écosse, et se mit à y prêcher sans se faire connaître, afin que ses parents et ses amis n'empêchassent point qu'il ne fût persécuté. Mais le moyen de cacher celui que le ciel voulait faire connaître à tout le monde ? L'amour divin embrasait tellement son cœur, qu'il faisait rejaillir l'éclat de ses saintes flammes jusque sur son visage, de sorte que les prêtres mêmes des idoles lui portaient du respect. Cependant, comme il ne désirait rien de plus que la dissolution de son corps pour vivre avec Jésus-Christ, il passa une seconde fois en France, pour y chercher l'accomplissement des promesses du ciel. Lorsqu'il fut sur mer, le démon, qui ne lui avait pu nuire sur la terre, essaya de le perdre dans les eaux pendant que le Saint dormait sur le pont, il monta sur la poupe, et appesantit tellement le vaisseau, que les matelots n'attendaient plus que de faire naufrage. Mais le Saint s'étant éveillé, aperçut bientôt l'auteur de ce désordre, et, faisant le signe de la croix, le renvoya lui-même dans les abîmes de l'enfer.

Cette tempête ainsi apaisée, le vaisseau arriva heureusement, au port de la Hougue, entre Barfleur et Carentan, dans le Cotentin, partie de la Basse-Normandie. Dieu rendit son entrée célèbre car la fille du gouverneur de Montebourg, paralytique et aveugle de naissance, ayant appris, par révélation, la venue de saint Germain, n'eut point de repos qu'on ne l'eût portée devant lui elle lui demanda le baptême et il le lui administra, la nomma Pétronille, en l'honneur de saint Pierre, et, en même temps, lui donna la vue et le parfait usage de ses membres. Un miracle si éclatant, en une personne si considérable dans le pays, fut cause de la conversion générale de toute la province. Il s'avança ensuite vers la ville de Bayeux et, comme il en approchait, il fit supplier le gouverneur de lui envoyer quelques rafraîchissements pour ses gens, qui en avaient un extrême besoin mais cet homme incivil, lui ayant refusé cette grâce, reçut bientôt la punition de son avarice. à l'instant même, tous ses tonneaux se trouvèrent épuisés jusqu'à la dernière goutte. Le contraire arriva à un honorable habitant de la ville, appelé Gantius ayant fait cette charité au serviteur de Dieu, il reçut, pour sa récompense, une abondante bénédiction sur toute sa famille.

Saint Germain, entrant dans Bayeux, pria pour la délivrance de certains prisonniers mais, ayant essuyé un refus, il en sortit aussitôt, et, dans une sainte colère, frappant du pied contre les murs du rempart, il en fit tomber une partie notable, dans le fossé son histoire dit que l'on s'en souvient encore dans le pays. Néanmoins, voulant faire paraître à ce peuple que sa colère était de la nature de celles des colombes qui n'ont point de fiel, il ressuscita un mort que l'on portait en terre, et qu'il rencontra aux portes de la ville cela obligea le magistrat de lui donner les prisonniers qu'il avait demandés, et qui se trouvèrent au nombre de vingt-quatre.

Saint Germain, au sortir de Bayeux, prêcha partout le nom de Jésus-Christ, le long de la côte jusqu'à Mortemer, village au pays de Caux, sur la rivière d'Eaulne. Près de Dieppe, il eut révélation que le lendemain serait le dernier jour de sa vie, et qu'il y recevrait la couronne du martyre, qu'il avait cherchée avec tant d'empressement. Il fit part de ces agréables nouvelles à ses chers compagnons, qu'il éveilla exprès et, s'étant mis en chemin dès la pointe du jour, il passa près de la commune des Essarts, et y fit désaltérer sa monture (c'était un âne que Gantius lui avait donné pour ses courses apostoliques). Il baptisa ensuite des néophytes dans un étang qui porte encore aujourd'hui (1871) le nom de “Saint-Germain” et reprit sa route. Il se trouva vers le soir sur la pente d'une montagne, appelée le Vieux Rouen, entre Aumale et Senarpont là demeurait un tyran, nommé Hubault, grand fauteur des idoles. Ce barbare, sachant l'arrivée du serviteur de Dieu, par le bruit que sa renommée faisait de tout côté, vint au-devant de lui, armé de rage et de fureur, et, l'ayant trouvé près d'une petite chapelle de Notre-Dame, sur le bord de la Bresle, autrement dit la rivière d'Eu, qui sépare la Normandie de la Picardie, lui déchargea un coup de cimeterre sur le cou avec tant de violence, qu'il lui trancha la tête. Son âme, laissant son corps, parut visiblement s'envoler au ciel, sous la forme d'une colombe plus blanche que la neige. Ce fut le second jour de mai. Les auteurs ne s'accordent point touchant l'année néanmoins, puisqu'il a été baptisé par saint Germain d'Auxerre, qui mourut vers le Ve siècle, l'on peut conclure qu'il a souffert le martyre vers l'année 480.

Son corps demeura en pleine campagne, sans que personne osât lui donner sépulture, parce que le tyran, extrêmement redouté dans le pays, l'avait défendu mais, le lendemain, une jeune fille allant faire sa prière dans cette chapelle de Notre-Dame, entendit distinctement la voix du Saint, qui lui commandait d'avertir le seigneur de Senarpont de lui faire rendre les derniers devoirs, comme à celui dont il avait reçu plusieurs faveurs durant qu'il était en vie.

Senard, prévenu aussitôt par la jeune fille, s'empressa d'accourir avec des clercs de tous les Ordres pour procéder aux funérailles. Il ne trouva plus le corps au lieu même où il avait été martyrisé, mais un peu plus loin, là où il avait été transporté par des anges. Senard l'enveloppa d'aromates et l'ensevelit dans un beau sarcophage à l'endroit où il l'avait rencontré. Plus tard il érigea une église sur le tombeau où s'accomplirent divers miracles ce fut l'origine du village de Saint-Germain-sur-Bresle.

Le corps de saint Germain resta jusqu'au IXe siècle dans son tombeau de Saint-Germain-sur-Bresle, sous la garde des Bénédictins qui avaient établi un prieuré. Les ravages des Danois les déterminèrent à mettre ce précieux trésor en lieu de sûreté. En 850 deux religieux, chargés de ces reliques, se dirigèrent vers le Vermandois et arrivèrent le soir du 13 novembre à Ribemont ils virent s'ouvrir subitement devant eux les portes de la chapelle de Sainte-Anne, située dans le faubourg de Sazencourt, et qui devait plus tard prendre le vocable de notre Saint. Ils y passèrent la nuit. Le lendemain, faisant de vains efforts pour lever le corps du Saint, ils comprirent qu'il était fi à tout jamais dans cet asile par la volonté de Dieu.

Peu de temps après, un comte de Ribemont fit ériger une église collégiale dans son château fort, en l'honneur du Saint dont les reliques y furent bientôt transférées.

SOURCE : P. Giry : Les petits Bollandistes : vies des saints. T. V. Source : http://gallica.bnf.fr/ Bibliothèque nationale de France.

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