Saint Isidore
naquit à Madrid, en Espagne, de parents très pauvres qui ne
purent le faire étudier, mais lui apprirent à aimer Dieu et à
détester le péché. L'enfant devint bientôt très habile dans
cette science, la
meilleure
de toutes. Quand il fut en âge de travailler, il se plaça comme
laboureur chez un riche habitant de la ville, nommé Jean de
Vargas.
Plus tard, il
épousa une femme aussi pauvre et aussi vertueuse que lui, et il
eut un enfant auquel il enseigna le service de Dieu. Un jour,
cet enfant tomba dans un puits; ses parents, désolés,
adressèrent au Ciel de si ferventes prières, que l'eau du puits
s'élevant jusqu'en haut, y apporta cet enfant plein de vie et de
santé. En reconnaissance, les deux époux se séparèrent et
vouèrent à Dieu une continence perpétuelle.
Quoique
occupé du grossier travail de mener la charrue, saint Isidore
n'en avait pas moins des heures fixes et réglées pour ses
exercices de piété. Les jours ordinaires, après avoir passé une
partie de la nuit en oraison, il se levait de grand matin et
s'en allait visiter les principales églises de Madrid; les jours
de fête étaient entièrement consacrés à suivre les offices et à
prier.
Jamais il ne
négligeait en rien son travail; malgré cela, ses compagnons
l'accusèrent auprès du maître, qui voulut s'assurer par lui-même
de la vérité; il regarda Isidore travailler, et vit deux Anges
aider le Saint. Dès lors, Jean de Vargas conçut la plus grande
estime pour son serviteur, et les bénédictions du Ciel se
répandirent sur sa maison. Saint Isidore opéra des miracles en
sa faveur; il rendit la vie à un cheval dont on avait grand
besoin; la fille de Jean de Vargas étant morte à la suite d'une
maladie douloureuse, il la ressuscita. Un jour, en frappant du
pied la terre, il fit jaillir, afin d'étancher la soif de son
maître, une fontaine qui coule encore. À la suite de ces
miracles, Jean de Vargas se déchargea sur saint Isidore du soin
de sa maison.
Saint Isidore
était pauvre, et cependant il trouvait le moyen de se montrer
libéral envers les indigents; il partageait avec eux son dîner,
et un jour qu'il avait tout donné, il pria sa femme d'aller voir
s'il ne restait pas quelque chose: celle-ci trouva le plat qui
venait d'être vidé, aussi plein que si personne n'y eût touché.
Une autre fois, il avait été invité à un dîner de confrérie, et
ses dévotions le retinrent si longtemps, qu'il arriva quand tout
était fini.
Une multitude
de pauvres le suivaient comptant sur ses restes. Les confrères
lui dirent, d'assez mauvaise humeur, qu'on lui avait gardé sa
part, mais qu'il n'y avait rien pour les mendiants. "C'est
assez, répondit-il, cela suffira pour moi et pour les pauvres de
Jésus-Christ." En effet, on trouva un repas entier là où on
n'avait mis de côté que quelques morceaux.
La femme de
saint Isidore, de son côté, donnait des marques d'une sainteté
aussi grande que celle de son mari. Elle aussi faisait des
miracles. Retirée dans un petit héritage, près de l'ermitage de
Caraquiz, elle avait à traverser une rivière pour se rendre à
une église de la Sainte Vierge qu'elle fréquentait assidûment.
Un jour, elle trouva cette rivière débordée, et, avec une
entière confiance dans la puissance de Dieu, elle détacha son
tablier, l'étendit sur les eaux, et, à l'aide de cette barque
d'un nouveau genre, passa tranquillement à l'autre bord.
Saint Isidore
mourut avant sa femme, en 1170, et on l'enterra sous une
gouttière, dans le cimetière de Saint-André, où il fut oublié
quarante ans. Alors le Saint apparut à une dame vertueuse pour
la presser de procurer l'élévation et la translation de son
corps. Quand on l'eut retiré de terre, il fut trouvé aussi frais
et aussi sain que s'il venait de mourir; un parfum de délicieuse
odeur embauma les airs, et toutes les cloches sonnèrent
d'elles-mêmes. L'église de Saint-André fut choisie pour recevoir
ses saintes reliques; on y vit un grand concours de peuple; de
nombreux miracles s'opérèrent et firent croître et grandir la
dévotion à saint Isidore.
P. Giry,
Vie des Saints,
p. 241 |