La famille de Marie-Anne Béguin-Royal était d'une situation
modeste. Mais Dieu devait l'ennoblir, en y multipliant les vocations, et en y
choisissant deux de ses martyres.
Trois nièces de la bienheureuse embrassèrent, en effet, la
vie religieuse dans la communauté du Saint-Sacrement de Bollène : Marie Cluse
qui fut immolée, comme nous l'avons dit le 12 juillet, Madeleine Cluse qui
accompagna la Révérende Mère de la Fare à Pont-Saint-Esprit, et Louise Béguin,
tourière du couvent qui fut aussi incarcérée à Orange, le 2 mai, mais ne fut pas
jugée, et sortit de sa prison le 1er janvier 1795.
Née à Vals-Sainte-Marie, un hameau de la paroisse de Bouvante,
de Guillaume Béguin-Royal et d'Élisabeth Rimet, en l'année 1736, Marie-Anne
trouvait, dans le foyer où elle venait de voir le jour, un abondant patrimoine
de vertus chrétiennes. Elle en devait être la généreuse héritière, y ajouter
encore de ses propres mérites, et lui donner un lustre incomparable en le
couronnant de la gloire du martyre. Ainsi la Providence divine, qui paraît ne
pas toujours récompenser sur l'heure les vertus des parents chrétiens, réserve,
parfois, à leur descendance, des grâces de choix et des faveurs particulières.
Le 1er novembre 1759, elle entrait comme postulante au
couvent du Saint-Sacrement de Bollène. Six mois après, elle recevait l'habit
religieux et prenait le nom de Sœur Saint-Joachim. Enfin, le 26 mai 1761, elle
faisait profession entre les mains du vicaire général de l'évêque de
Saint-Paul-Trois-Châteaux. Sa pieuse mère avait la joie d'assister à la
cérémonie.
Sœur Saint-Joachim passa trente ans dans les humbles
fonctions des sœurs converses. Au cours de cette laborieuse existence, Dieu lui
donna une grande joie. Attirées par leur tante qui n'avait cessé de prier Dieu à
cette intention, ses trois nièces, vinrent tour à tour demander leur admission
au couvent qu'elle édifiait par ses vertus. La dernière fut cette Sœur du
Bon-Ange Cluse que nous avons vu repousser si noblement le bourreau lui
promettant la vie, si elle consentait à l'épouser.
Sa tante fut immolée quatre jours après elle. C'était le 16
juillet, et l'Église célébrait la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel. Depuis leur
emprisonnement les pieuses Sacramentines demandaient à Dieu de les appeler à
Lui, un jour plus spécialement consacré à Sa Sainte-Mère. Elles étaient
exaucées. Vers six heures du soir, Sœur Saint-Joachim, dont le courage n'avait
pas faibli, donnait sa vie pour son divin Époux qu'elle avait humblement servi
et courageusement aimé jusqu'à la fin. Elle était âgée de cinquante-huit ans et
avait passé trente-quatre ans dans les saintes pratiques de la vie religieuse.
Abbé Méritan
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