LES VINGT-SIX MARTYRS DU JAPON,
A NAGASAKI, LE 5 FÉVRIER 1597.
Les Portugais furent
les premiers Européens qui débarquèrent au Japon. En 1542, l'année
même où saint François Xavier débarquait aux Indes, des marchands,
poussés par les vents contraires, abordèrent sur les côtes de
Tanega-shima. D'autres naufragés furent jetés vers le même temps
dans le port de Kagoshima. En 1549, saint François Xavier abordait
le 15 août sur une jonque chinoise à Kagoshima. Il était accompagné
de deux Jésuites et de trois néophytes
japonais.
L'un de ces néophytes était un habitant de Cangoxima nommé Angeroo,
âgé de 35 ans, riche, noble, à qui le souvenir des dérèglements de
sa jeunesse causait de si violents et continuels remords de
conscience que pour les apaiser il s'était retiré dans une maison de
bonzes, se flattant que les entretiens et les bons avis de ces
ministres des dieux pourraient mettre fin à ses inquiétudes ; mais
ce remède bien loin de guérir son mal l'avait empiré et il croissait
de jour en jour ». C'était alors que Angeroo était allé trouver le
saint apôtre dont les Portugais dé Kagoshima lui avaient si souvent
parlé. Après de longues pérégrinations, il l'avait enfin rencontré,
s'était fait instruire et baptiser à Goa avec ses deux serviteurs.
Il prit le nom de Paul de Sainte-Foi. Il payait sa dette en amenant
saint François-Xaxier au Japon.
Les premiers succès de
la prédication du saint ameutèrent contre lui les bonzes, et le
daimyo de Satsuma, d'abord favorable, se laissa prévenir et publia
un édit contre le christianisme. Les voyages apostoliques de Xavier
au Japon furent traversés par plusieurs difficultés et il ne put
opérer ces conversions par grandes masses dont il avait donné, dans
l'Inde, l'étonnant spectacle. Il quitta le Japon le 15 septembre
1551.
Après son départ, le
christianisme prospéra rapidement, les navires portugais amenèrent
de nombreux missionnaires et on voit se former les chrétientés
florissantes de Hirado, Omura, Nagasaki. La province d'A-rima
compte, dès 1554, mille cinq cents baptisés ; les conversions des
bonzes deviennent fréquentes ; le martyre fait son apparition. En
1558, une femme esclave qui était rendue aux exercices des fidèles
malgré la défense de son maître rencontra celui-ci ; suivant la
coutume du pays, elle s'agenouilla devant lui ; il tira son sabre et
lui coupa la tête. La bienveillance déclarée de Nobunaga amena un
grand mouvement de conversions. A sa mort, en 1582, l'Église
catholique comptait au Japon 200.000 fidèles et 250 églises.
Pendant les six
premières années de son règne, Hideyoshi ne témoigna que de la
faveur aux chrétiens ; mais complètement retourné par les bonzes, il
publia en 1587 un édit de persécution, mais pendant dix ans
(1587-1597) on ne va pas jusqu'à l'effusion du sang. En une seule
année, 1591-1592, douze mille adultes reçurent le baptême; à cette
date on comptait 300.000 chrétiens.
Sur ces entrefaites, au
mois de juillet 1596, un galion espagnol, le Saint-Philippe,
faisant voile de Manille à la Nouvelle-Espagne, fut jeté par la
tempête sur la côte de la province de Tosa et déclaré de bonne prise
au nom de l'empereur Hideyoshi. Le commandant essaya de sauver sa
riche cargaison en intimidant le gouverneur de Tosa. Il lui montra
sur une mappemonde les immenses possessions coloniales du roi
d'Espagne et lui expliqua que cette vaste monarchie était parvenue à
s'établir par l'effort combiné de la religion et des armes. « Nos
prêtres, dit-il, nous préparent les voies. Ils convertissent les
peuples au christianisme. Ensuite, ce n'est plus qu'un jeu pour nous
de les soumettre à notre autorité. »
Cet entretien fut
rapporté à Hideyoshi, qui revint sur-le-champ à ses dispositions
hostiles. Le 9 décembre 1596, neuf religieux furent arrêtés à Myako
et à Osaka. Une. liste fut dressée dans ces deux villes de tous les
habitants connus pour fréquenter les missionnaires. Aussitôt une
étrange impatience du martyre enflamma tout ce peuple. On s'y
prépara, on l'appela, on l'attendit. Toutefois on ne fit que
vingt-quatre arrestations : six franciscains espagnols, trois
jésuites japonais, quinze laïques (catéchistes ou serviteurs, parmi
lesquels trois enfants âgés de onze à quatorze ans : Louis, Antoine
et Thomas). Nous donnons ici la relation du martyre des 26 chrétiens
: franciscains, jésuites et tertiaires, d'après la relation du Père
de Charlevoix, qui se tient très près des récits originaux.
*****
LES VINGT-SIX MARTYRS DE NAGASAKI
La nuit du neuvième de
Décembre (1596), le gouverneur d'Ozaca avait eu ordre de donner des
gardes aux religieux de saint François, il crut en devoir donner
aussi aux Jésuites, et un ordre pareil fut envoyé et exécuté de même
à Méaco ; mais quoique les Jésuites de ces deux villes n'eussent pas
été avertis, il ne s'en rencontra à Ozaca qu'un seul avec deux
prosélytes.
Ce Jésuite se nommait
Paul Miki, les deux prosélytes avaient nom Jean Soan et Diego
ou Jacques Kisaï, tous trois japonais. Les pères de saint François
se rencontrèrent au nombre de six dans les villes d'Ozaca et de
Méaco, à savoir trois prêtres, un clerc et deux laïcs. Les trois
prêtres étaient les pères Pierre Baptiste, Martin d'Aguire ou de
l'Ascension et François Blanco. Le clerc se nommait Philippe de Las
Casas ou de Jésus. Les deux laïcs avoient nom François de Parilha ou
de Saint Michel et Gonzalez Garcia.
Voilà quels étaient les
neuf religieux, qui furent arrêtez en vertu des ordres de Tayco-Sama.
Ce prince avait encore commandé qu'on dressât une liste de tous les
chrétiens, qui fréquentaient les églises de Méaco et d'Ozaca, et le
nombre en monta si haut, que Xibunojo, qui était spécialement chargé
de cette affaire, en fut effrayé ; aussi la fit-il supprimer, disant
que l'intention de Sa Majesté n'était pas de dépeupler son empire,
en faisant mourir tous les chrétiens, mais seulement de punir les
religieux venus des Philippines, qui contrevenaient ouvertement à
ses édits. Il est vrai néanmoins que s'étant rendu l'onde de
décembre à Fucimi, ou l'empereur était venu visiter le nouveau
palais qu'il y faisait bâtir, il en avait reçu un commandement
exprès de faire mourir tous les religieux étrangers, mais il s'était
contenté de l'assurer qu'il serait obéi, bien résolu de ne rien
omettre pour faire restreindre cette sentence, et en faire modérer
la rigueur. Le bruit ne laissa point de se répandre partout, qu'on
allait faire main basse sur tous les chrétiens, qu'on trouverait
dans les églises, ou avec un missionnaire, et cette nouvelle excita
dans tous les cœurs des fidèles une joie, et un désir du martyre qui
causèrent de l'admiration aux idolâtres.
Ucundono, qui quelques
mois auparavant avait eu la douleur de voir expirer entre ses bras
son père l'illustre Darie Tacayama, et la consolation de l'entendre
louer le Seigneur jusqu'au dernier soupir, et le remercier de
l'avoir jugé digne de mourir confesseur de Jésus-Christ; Ucundono,
dis-je, fut le premier, qui donna dans cette rencontre à toute
l'Église du Japon l'exemple de ce courage, dont nous verrons tant de
traits surprenants dans toute la suite de cette histoire. Nous avons
vu que ce seigneur avait été rappelé à la cour pendant la guerre de
Corée ; ce rappel et l'accueil que lui avait fait l'empereur,
avaient fait croire qu'on le reverrait bientôt partager au moins
avec Tsucamidono le premier commandement dans les armées, et avait
excité la jalousie de la plupart des courtisans, à qui son mérite
faisait ombre ; mais il y avait dans l'esprit de Tayco-Sama un fonds
de haine contre le plus fidele, et le plus illustre de es sujets,
qui l'emporta sur les services qu'il en pouvait tirer, et la
nouvelle faveur d'Ucondono avait abouti à le relever de l'état de
proscrit. Il ne quittait point le roi de Canga, dont il s'était fait
un ami ; mais sur le bruit, dont je viens de parler, il vint à Méaco,
et se rendit auprès du père Guecchi, pour avoir la consolation de
mourir avec ce religieux dont il respectait fort la vertu. Il voulut
néanmoins prendre auparavant congé du roi de Canga, il l'alla
trouver à Fucimi, où ce prince était avec l'empereur, et le pria de
vouloir bien agréer quelques bijoux qui lui restaient, et de les
garder, comme des témoignages de son amitié et de sa reconnaissance.
Le roi de Canga, bien étonné d'un adieu si imprévu, lui demanda d'où
il savait qu'on devait faire mourir le père Guecchi?
« Ce que je puis vous
dire de certain, ajouta-t-il, c'est que j'étais dernièrement chez
l'empereur ; Sa Majesté déclara, qu'elle n'avait aucun sujet de
plainte des pères de la Compagnie, et qu'elle n'en voulait qu'aux
religieux venus des Philippines; ainsi vous vous alarmés sans sujet,
et je vous conseille de demeurer tranquille chez vous, sans faire un
éclat, qui pourrait avoir de fâcheuses suites pour votre religion.
Tayco-Sama n'ignore point que vous êtes chrétien, il saura bien vous
trouver, s'il a envie de vous faire mourir ; mais n'achetez point
cet honneur dont vous paraissez si jaloux, par une indiscrétion qui
pourrait coûter la vie à des personnes que vous estimez et
auxquelles on ne pense point. » Cet avis était sage, Ucodono le
suivit, sans perdre néanmoins, ni le désir, ni l'espérance du
martyre.
Les deux fils de
Guénifoin firent aussi paraître pour un sort pareil une ardeur, qui
fut longtemps le sujet des entretiens. Paul Sacandono, l'aîné des
deux, et déjà reçu en survivance des charges de son père, qui était
en même tems vice-roi de la Tense, et grand-maître de la maison de
l'empereur, se trouvait à deux cents lieues de la capitale,
lorsqu'il apprit la détention des missionnaires, qu'il croyait tous
dans les fers. Il partit sur le champ, congédia ses domestiques,
dont pas un ne voulut le quitter, se déguisa en Jésuite dans
l'espérance qu'il serait plus aisément arrêté sous cet habit, et
arriva en poste chez le père Guecchi, auquel peu s'en fallut que ce
grand fracas ne valût la couronne du martyre. Sacandono commença à
se préparer par une confession générale de toute sa vie à la mort,
qu'il était venu chercher de si loin. Constantin son cadet, qui
était dans sa famille, eut a combattre toute la tendresse de ses
parents, et les menaces de son père ; mais animé d'en-haut, il fit
comprendre à tous, qu'aucune crainte, ni aucune espérance humaine
n'étaient capables de l'ébranler, et il eut le courage de voir avec
ses yeux secs couler des larmes dont les plus insensibles étaient
touchez. Un de leurs cousins germains, nommé Michel, ne fit pas
moins paraître de fermeté, il vit sans être ému, tomber en faiblesse
à ses pieds, la vice-reine sa tante, alarmée du péril, où ses
enfants et lui s'exposaient ; il tâcha même, après qu'elle fut
revenue à elle, de lui faire regarder la mort, qu'on souffre pour
son Dieu, comme quelque chose de plus grand, que tous les honneurs à
quoi on les destinait. Il parla en vain, cette dame et son mari
étaient de ces âmes droites. qui savent estimer la vertu, mais que
les grandeurs du siècle éblouissent et que l'attachement aux biens
de la fortune éloigne du royaume des cieux.
Un seigneur fort riche,
et fort puissant, baptisé depuis très peu de tems, fit publier dans
ses terres, qu'il punirait sévèrement quiconque étant interrogé par
ordre de l'empereur, si son maître était chrétien, dissimulerait la
vérité : un autre appréhendant qu'on n'osât point venir chez lui,
pour se saisir de sa personne, alla sans suite avec son épouse, le
père conduisant un petit garçon de dix ans, et la mère portant entre
ses bras une petite fille qui ne pouvait encore marcher, se
présenter à un de ceux qui commandaient à Méaco. Un parent de Tayco-Sama,
à qui ce prince avait donné trois royaumes, alla s'enfermer avec
quelques Jésuites, pour ne pas perdre l'occasion de mourir avec eux.
On trouva un jour [l'] illustre reine de Tango, qui travaillait
elle-même avec ses filles à se faire des habits magnifiques, pour
paraître avec plus de pompe au jour de leur triomphe, ainsi qu'elles
s'exprimaient. Partout on ne rencontrait que gens de tous les
ordres, uniquement attentifs à ne pas laisser échapper le moment
favorable de confesser Jésus-Christ devant les officiers de
l'empereur. Les femmes de qualité se réunissaient dans les maisons
où elles croyaient pouvoir être plus aisément découvertes, et il y
eut à Méaco une jeune dame qui pria ses amies, que si elles la
voyaient trembler, ou reculer, elles la traînassent par force au
lieu du supplice. En un mot les moyens de se procurer l'honneur du
martyre étaient la grande occupation des fidèles de tout âge, de
tout sexe, et de toute condition : et souvent la seule vue de la
joie et de la tranquillité, qu'ils faisaient paraître en se
disposant à la mort, inspirait les mêmes sentiments et la même
ardeur à ceux en qui la grâce n'avait pas opéré d'abord aussi
puissamment. Je n'en rapporterai qu'un exemple qui pourra faire
juger en quelle disposition se trouvait alors toute cette
chrétienté.
Un gentilhomme bungois
nommé André Ongasavara, après la désolation de sa patrie et la
dégradation de son roi, s'était retiré à Ozaca, où, comme il avait
perdu tout son bien, il était réduit pour vivre à apprendre à tirer
de l'arc, et à monter à cheval, qui sont deux arts fort honorables
au Japon. Du reste il menait une vie tout-à-fait édifiante, et par
sa conduite il faisait honneur à la religion. Du moment qu'il eut
avis qu'on dressait des listes de chrétiens, il en témoigna une joie
dont il ne fut pas le maître, et dit assez publiquement, qu'on ne
pouvait pas lui disputer l'honneur d'y être écrit des premiers. On
fit ce qu'il souhaitait, et il travailla ensuite à procurer à toute
sa famille le bonheur, qu'il croyait s'être assuré à lui-même. Il
avait encore son père, qui était âgé de quatre-vingts ans, et qui
n'était baptisé que depuis dix mois. Il craignit que ce vieillard,
qui dans un âge si avancé conservait toute la vigueur de sa
jeunesse, et qui avait passé toute sa vie pour un des plus braves
hommes du Japon, n'eût pas encore bien connu le prix et la véritable
grandeur de la douceur et de l'humilité chrétienne et ne voulût se
défendre, si on se mettait en devoir de l'arrêter. Il crut donc que
le plus sûr était de l'engager à se retirer dans quelque maison à la
campagne, où l'on ne s'aviserait pas de l'aller chercher.
Il le va trouver, et
lui demanda, s'il est bien instruit, et bien persuadé qu'il ne peut
rien arriver de plus glorieux à un chrétien, que de mourir pour son
Dieu : « Ouï, mon fils, répondit-il, je le sais, et s'il est beau de
mourir pour son prince, à plus forte raison l'est-il de mourir pour
son Dieu, et pour un, Dieu qui le premier a donné tout son sang pour
nous. — Mais mon père, ajouta Ongasavara, il y a ici une différence,
que vous ne savez peut-être pas encore ; c'est que quand on meurt
pour Dieu, il faut recevoir la mort sans se mettre en
défense. — Sans se mettre en défense, répond le vieillard tout en
colère, et se laisser massacrer comme un lâche ! Mon fils, il faut
aller débiter ces maximes à d'autres. Je prétends bien me défendre,
et défendre les pères qui nous ont instruits » ; aussitôt il tire
son sabre, et le tenant nu à la main : « Allons, dit-il, chez nos
maîtres, si les soldats approchent, pour leur faire la moindre
insulte, j'en abattrai sept ou huit à mes pieds, et si je péris en
combattant pour une si belle cause, à la bonne heure, je serai
martyr. — Mon père, répliqua Ongasavara, ce n'est point là l'esprit
du christianisme : croyez-moi, il n'est pas nécessaire de se
présenter à la mort ; il est même quelquefois de la prudence de s'y
soustraire, et le Sauveur des hommes l'a recommandé à ses disciples,
quoiqu'il semble que ce soit à eux à nous donner l'exemple de mourir
pour lui ; j'ai un fils fort jeune, retirez-vous avec cet enfant,
l'unique espérance de votre race ; on n'ira point vous chercher, à
la campagne, pour moi je resterai avec les frères, et je mourrai en
leur compagnie. — Comment, repartit le vieillard outré de dépit,
comment as-tu la hardiesse de me faire une pareille proposition ? Il
ferait beau me voir craindre la mort à mon âge, après l'avoir si
souvent affrontée dans les combats.
Non, non, je ne fuirai
point, on me trouvera partout en bonne posture, je casserai la tête
aux premiers, qui se mettront en devoir de faire violence aux pères,
ou à moi, et si je meurs les armes à la main en faisant mon devoir
d'homme d'honneur et de chrétien, je le répète, je serai volontiers
martyr, mais comme il me convient de l'être. »
Il entre ainsi plein
d'émotion dans l'appartement de sa belle-fille, et la trouve occupée
à se faire des habits fort propres ; il voit en même tems les
domestiques, et jusqu'aux enfants, qui s'empressaient à préparer,
l'un son reliquaire, l'autre son chapelet, d'autres leur crucifix ;
il demanda la cause de tout ce mouvement, et on lui répond que l'on
se dispose au combat : « Quelles armes et quelle espèce de combat »
? s'écrie-t-il. Il s'approche de la jeune femme : « Que faites-vous
là, ma fille ? » lui de-mande-t-il : « J'ajuste ma robe,
répond-elle, pour être plus décemment, lorsqu'on me mettra en croix;
car on assure qu'on y va mettre tous les chrétiens. » Elle dit cela
d'un air si doux, si tranquille, si content, qu'elle déconcerta son
beau-père. Il demeura quelque tems à la regarder en silence ; puis,
comme s'il fut revenu d'une profonde léthargie, il quitta ses armes,
tira son chapelet, et le tenant entre les mains : « C'en est fait,
dit-il, je veux aussi me laisser crucifier avec vous. »
Mais tout ce mouvement,
qui avait donné lieu à un spectacle si glorieux à la religion,
s'apaisa tout à coup,: la nouvelle se répandit de toutes parts qu'on
ne ferait mourir que les religieux, qui étaient actuellement arrêtez
à Ozaca et à Méaco, avec quelques chrétiens qu'on avait trouvez chez
eux.
Les choses en demeurent
là jusqu'au trente de Décembre et l'on commençait même à espérer que
l'empereur, dont les accès de colère étaient aussi peu durables,
qu'ils étaient violents, se contenterait d'exiler les pères de saint
François, et ne ferait plus répandre de sang, lorsque Jacuin Toçun,
qui connaissait parfaitement le génie de son maître, et qui ne
pouvait souffrir qu'un feu, qui lui avait tant coûté à allumer, et
qu'il n'avait jamais depuis discontinué d'attiser sous main,
s'éteignît, sans qu'il en coûtât la vie à quelqu'un, parla à
l'empereur ; et l'on regarda comme un 'miracle, qu'il ne lui eût pas
fait prendre de plus violentes résolutions. Mais soit qu'il se fût
un peu radouci lui-même à l'égard des jésuites, à qui il avait même
fait quelques politesses dans le tems que l'évêque avait eu audience
de Tayco-Sama, soit qu'il ne voulût point se brouiller avec ceux qui
protégeaient ces pères, il paraît certain qu'il ne parla point en
cette occasion contre eux. En effet, l'empereur ayant fait appeler
le même jour Xibunojo, il lui dit : « Je vais partir pour Ozaca,
d'où je vous enverrai les prisonniers qu'on y a arrêtez, joignez-les
à ceux qui sont à Méaco. Je veux qu'ils soient tous promenés sur des
charrettes par les rua de Méaco, qu'on leur coupe le nez et les
oreilles, qu'on les envoie ensuite à Ozaca, où on les promènera
aussi par les rués ; que la même chose se fasse à Sacaï, et qu'on
porte devant la charrette la sentence de mort, que j'ai prononcée
contre eux. » Elle était conçue en ces termes :
TAYCO-SAMA
J'ai ordonné qu'on
traitât ainsi ces étrangers, parce qu'ils sont venus des Philippines
au Japon, se disant ambassadeurs, quoiqu'ils ne le fussent pas ;
qu'ils y ont resté longtemps sans ma permission, et que contre ma
défense, ils ont bâti des églises, prêché leur religion et commis de
grands désordres. Je veux qu'après avoir été ainsi exposés à la
risée du peuple, ils soient crucifiés à Nagasaki.
Xibunojo ayant reçu cet
ordre, se rendit à Méaco, où il donna commission à son lieutenant de
faire conduire chez lui tous les prisonniers qui étaient sur la
liste qu'il lui envoyait. Ils étaient dix-sept, cinq religieux de
saint François et douze laïcs, la plupart domestiques ou catéchistes
de ces pères ; et comme on appelait ceux-ci par leurs noms, il s'en
trouva un de moins ; car ils n'étaient pas tous dans la maison des
Pères de Saint-François, et on leur avait laissé sur leur parole la
liberté de vaquer à leurs affaires.
Celui qui était absent
se nommait Mathias; on eut beau l'appeler, il était allé faire
quelques emplettes pour le couvent, dont il était le pourvoyeur, et
personne ne put dire ou il était. Alors un bon artisan du voisinage,
qui portoir le même nom, entendant le domestique du lieutenant, qui
criait de toutes ses forces: « Où est donc Mathias ? » s'approcha de
cet homme et lui dit : « Je me nomme Mathias, je ne suis point
apparemment celui que vous demandez, mais je suis chrétien aussi
bien que lui et fort disposé à mourir pour le Dieu que
j'adore. — Cela suffit, dit le domestique, peu m'importe pourvu que
ma liste soit remplie. » Le généreux chrétien, ravi de joie, se
joignit à la troupe des confesseurs de Jésus-Christ, se félicitant
de ce que par un trait particulier de la Providence qui paraissait
un effet du hasard, il se voyait en possession d'un sort après
lequel tant de milliers de chrétiens avoient vainement soupiré, et
qu'à l'exemple de son saint patron « il avait été ajouté aux onze ».
Le trente-unième de
Décembre l'empereur arriva à Ozaca, et sur le champ ordonna au
gouverneur de cette ville d'envoyer à Méaco ceux qui étaient sur sa
liste : ils étaient sept, les trois jésuites, un religieux de saint
François et trois séculiers. Le gouverneur d'Ozaca aurait pu,
suivant l'ordre qu'il avait reçu de faire retirer la garde qui était
à la maison des jésuites, renvoyer libres Paul Miki et ses deux
compagnons, mais il n'osa le prendre sur lui ; et Xibunojo, à qui le
père Guecchi en porta ses plaintes, lui répondit que ces trois
prisonniers s'étaient trouvés sur la feuille qui avait été hie de
l'empereur, il n'était pas possible de les élargir sans en parler à
Sa Majesté; que cette démarche serait dangereuse, que par-là on
ferait connaître à ce prince qu'il était resté des jésuites à Ozaca
malgré ses défenses; qu'il le trouverait assurément très mauvais ;
qu'ainsi son sentiment était qu'il falloir sacrifier quelques
particuliers pour sauver le corps.
Parmi les chrétiens
condamnés à mourir, il y avait trois enfants dont la ferveur et la
constance étonnèrent les infidèles, et attirèrent sur toute la
troupe la compassion de la multitude. L'un se nommait Louis, et
n'avait que douze ans; les deux autres avoient nom Antoine et
Thomas, et n'en avoient pas plus de quinze; ils servaient à l'autel
chez les pères de saint François, et avoient été mis des premiers
sur la liste. Il n'avait tenu qu'à eux de n'y être pas, on avait
même refusé d'abord d'y mettre le petit Louis ; mais il fit tant par
ses pleurs et par ses prières, qu'on lui donna cette satisfaction.
Il refusa dans la suite un moyen qu'on lui suggéra de s'évader, et
ils soutinrent tous trois jusqu'au bout de la carrière ce grand
courage qui les y avait fait entrer.
Enfin le troisième jour
de janvier 1597, les vingt-quatre prisonniers furent menez à pied
dans une place de la haute ville de Méaco, où on leur coupa à chacun
un bout de l'oreille gauche, Xibunojo n'ayant pu se résoudre à les
faire défigurer, comme il était porté par l'arrêt de leur
condamnation. On les fit ensuite monter trois à trois dans des
charrettes et on les promena de rue en rue. C'est la coutume au
Japon d'en user ainsi à l'égard de ceux qui sont coupables des plus
grands crimes, et le plus souvent la populace accable d'opprobres
ces malheureux à qui la confusion cause un tourment beaucoup plus
sensible que le supplice même qui doit terminer leur déplorable
destinée. Mais il arriva tout le contraire en cette occasion ; on
voyait un peuple infini dans un morne silence qui n'était interrompu
que par des soupirs et des sanglots qu'arrachait aux païens mêmes la
vue de tant de personnes innocentes si indignement traitées. Les
trois enfants surtout, dont la joie, la tranquillité et le sang
coulait sur leurs joues, avoient véritablement quelque ― chose
d'attendrissant, excitaient la compassion des plus insensibles, et
de toms en temps on entendait crier (Oh l'injustice ! oh la cruauté
! Quel crime ont commis ces enfants et tant de gens de bien, pour
être punis comme des malfaiteurs ? »
Quelques chrétiens
venaient après les gardes et leur demandaient en grâce de les faire
aussi monter sur les charrettes, mais ceux-ci n'osèrent passer leurs
ordres. Les martyrs de leur côté s'occupaient de la prière, tandis
que le père Baptiste, digne chef de cette glorieuse troupe, les
exhortait à la persévérance et prêchait avec beaucoup de zèle au
peuple. Après qu'on eut fait faire bien des tours aux confesseurs de
Jésus-Christ, et parcourir presque toute la ville, on les ramena en
prison. Le lendemain on les fit partir pour Sacaï, où ils furent
traités de la même manière. Sur ces entrefaites, le bruit se
répandit que tous les missionnaires venaient d'être condamnez à mort
par l'empereur, et cette nouvelle, qui réveilla parmi les chrétiens
l'espérance du martyre, remua tellement toute la ville de Méaco, que
Xibunojo, craignant une révolte, crut être obligé d'envoyer dans
cette capitale un officier pour détromper le peuple .
Texazuba, fort à propos
pour lui, était occupé à la guerre de Corée ; l'empereur avait
nommé, pour commander en son absence, un de ses frères appelé
Fazaburodono, lequel était idolâtre, et ce fut lui qui reçut la
commission de faire mourir les prisonniers. On lui mit aussi en main
une copie de la sentence où l'empereur avait fait ajouter une
nouvelle défense, sous peine de la vie, d'embrasser la religion
chrétienne, et des ordres exprès, en vertu desquels Fazaburodono
commença par signifier aux jésuites qu'il ne souffrirait plus
qu'aucun Japonais entrât dans leur église, ni qu'eux-mêmes
parcourussent le pays, comme ils avoient toujours fait jusque-là,
prêchant, baptisant, et faisant toutes leurs autres fonctions. Il
fit ensuite embarquer dans un navire portugais, qui était en rade,
quatre religieux franciscains lesquels étaient venus à Nagasaki,
pour y tenter de nouveau un établissement; enfin il disposa toutes
choses pour exécuter la principale commission.
Le neuvième de Janvier,
les vingt-quatre prisonniers partirent de Sacaï. Le voyage eût été
bien plus court et plus aisé par mer ; mais Toyco-Sama, soit pour
intimider les peuples, soit pour augmenter les souffrances des
confesseurs de Jésus-Christ, voulut qu'ils le fissent par terre; et
l'on peut juger ce qu'ils eurent à souffrir du froid et d'autres
incommodités dans le cours d'une si longue route au cœur de l'hiver.
Il est vrai que la charité industrieuse des fidèles qui se
rencontraient sur leur passage, ne laissa pas de leur procurer
quelque soulagement; les soldats mêmes qui les escortaient, touchez
de compassion, ou peut-être dans la crainte que si quelques-uns
venaient à mourir dans le chemin, on ne les rendît responsables,
avoient assez de soin qu'on leur fournît partout le nécessaire ;
mais cela n'empêcha point qu'ils ne manquassent de beaucoup de
choses.
Le père Guecchi l'avait
prévu et avait engagé un bon chrétien, nommé Pierre Cosaqui, à les
suivre avec plusieurs rafraîchissements dont il l'avait chargé. Un
autre fidèle, nommé François Danto, fort affectionné aux pères
franciscains, s'était joint à Cosaqui dans le même dessein : d'abord
les gardes les laissèrent faire, mais au bout de quelques jours ils
entrèrent en mauvaise humeur contre eux et les maltraitèrent
plusieurs fois. Comme ceux-ci ne se rebutaient point, le commandant
de l'escorte leur demanda s'ils étaient aussi chrétiens; ils
répondirent qu'ils détestaient les dieux du Japon, ce qui irrita
tellement cet officier, que de son autorité propre, et sans aucune
formalité de justice, il les joignit aux autres prisonniers. Ces
fervents chrétiens en eurent une joie qui ne se peut exprimer, et
bénirent le Ciel de la grâce qu'il leur faisait de partager la
couronne de ceux dont ils ne pouvaient plus adoucir les souffrances.
L'empereur, à qui on rapporta cet événement, ne put s'empêcher de
dire : « Il faut avouer que les chrétiens ont véritablement du
courage, et que rien ne leur coûte pour se soulager les uns les
autres. »
Les martyrs de leur
côté prêchaient Jésus-Christ avec beaucoup de zèle dans tous les
lieux de leur passage, surtout le père de l'Ascension qui avait
assez bien appris, la langue japonaise et Paul Miki à qui elle était
naturelle. Il semblait d'ailleurs que le saint Esprit se fût emparé
du cœur de celui-ci, au moment qu'il fut arrêté prisonnier. Ses
gardes disaient qu'il n'était presque pas possible de ne se pas
rendre après l'avoir entendu parler de sa religion, et un officier
idolâtre en fit un jour une heureuse expérience. Les martyrs passant
par le Nangato, furent consignez en arrivant un soir fort tard à un
officier, homme dur jusqu'à la brutalité, qui les traita avec une
inhumanité extrême et les enferma tous ensemble, comme on aurait
fait un troupeau de bêtes, dans une espèce d'étable obscure, d'une
malpropreté et d'une puanteur insupportable. Miki, plus touché de ce
qu'il voyait souffrir à ses compagnons, et surtout aux trois enfants
dont nous avons parlé, que de ce qui le regardait, chercha
l'occasion de voir cet officier et la trouva ; il lui parla du vrai
Dieu et lui dit des choses si touchantes que non seulement il lui
inspira de l'humanité, mais qu'il le convertit même et en fit un
fervent chrétien. La même chose lui arriva en plusieurs endroits et
les bonzes se plaignirent hautement de ce que l'empereur prenait
pour abolir le christianisme des moyens qui étaient bien plus
capables de l'étendre dans les lieux où il n'était point établi.
Le premier jour de
Février la troupe des confesseurs partit de Facata et se rendit à
Corazu, qui n'est qu'à trois lieues de Nangoya, où elle rencontra
Fazaburodono qui l'attendait. Le gentilhomme avait autrefois connu
très particulièrement Paul Miki et fut également surpris et mortifié
de le voir parmi ceux qu'il était chargé de faire mourir; mais il ne
put que plaindre son sort et lui donner des larmes inutiles. Le
saint religieux les désapprouva et fit des reproches à son ami de ce
qu'il semblait être fâché de son bonheur; il ajouta bien des choses
pour tâcher de lui faire comprendre qu'il avait sujet de lui parler
ainsi, niais Fazaburodono n'était pas capable de les goûter ; Miki
lui demanda ensuite une grâce qu'il crut pouvoir espérer de son
ancienne amitié; c'était de pouvoir se confesser, entendre la messe
et communier; il ajouta qu'il souhaitait fort aussi mourir un
vendredi, parce qu'étant au même âge où le Sauveur des hommes avait
donné sa vie pour racheter le monde au prix de son sang, et le
supplice auquel il était condamné étant le même qu'avait enduré ce
Dieu-Homme, il ne lui manquait plus pour avoir une ressemblance
parfaite avec lui, que la conformité du jour. D'abord Fazaburodono
promit tout sans difficulté ; mais après avoir lu les derniers
ordres de l'empereur, il ne put tenir qu'une partie de ses
promesses.
Le commandant ayant
aussi jeté les yeux sur le petit Louis il en eut compassion, se le
fit amener, et lui dit que sa vie était entre ses mains s'il voulait
s'attacher à son service et renoncer à sa religion ; mais Louis
rejeta son offre avec horreur. Il crut pouvoir venir plus aisément à
bout du jeune Antoine, parce qu'il le vit entouré de ses parents,
lesquels, quoique bons chrétiens, ne laissaient pas de mettre par
leurs larmes sa constance à une très dangereuse épreuve : il
s'approcha donc de lui, et après lui avoir représenté la misère de
sa famille, qui était en effet très pauvre, il lui déclara qu'il ne
tenait qu'à lui de se mettre en état de la soulager et qu'il ne lui
en coûterait que de changer de religion. Le courageux enfant
l'écouta jusqu'au bout, puis lui demanda en riant s'il pouvait faire
part aux pères de saint François des avantages qu'on lui offrait. Le
commandant lui ayant répondu que non « Hé bien, seigneur, reprit
Antoine, réservez donc votre crédit pour d'autres : les biens de ce
monde ne me touchent point, et bien loin d'être effrayé du supplice
qui m'est préparé, je regarde comme le plus grand bonheur qui ait pu
m'arriver d'être condamné à mourir en croix pour un Dieu qui y est
mort pour moi. » Il se retira en finissant ces mots ; puis prenant
sa mère en particulier il lui fit un petit présent, qu'il la pria de
garder pour l'amour de lui ; il lui dit ensuite que la douleur
qu'elle témoignait n'était ni raisonnable, ni édifiante. « Que
peuvent penser les infidèles, ajouta-t-il, en voyant que vous qui
êtes chrétienne, pleurez ma mort comme si vous ne connaissiez point
le prix du sacrifice que je fais à Dieu de la vie qu'il m'avait
donnée pour le servir et rendre témoignage à son Évangile ? » Après
que ce saint, enfant eut expiré, on trouva dans ses habits une
lettre adressée à ses parents, où il les exhortait à demeurer
fidèles à Dieu en des termes si touchants qu'on ne pouvait douter
que le saint Esprit ne la lui eût dictée.
Le commandant n'ayant
donc pu rien gagner sur ces deux enfants, il désespéra de venir à
bout des autres et ne songea plus qu'à régler toutes choses pour le
reste de leur voyage, après quoi il écrivit à Nagasaki qu'on y
dressât cinquante croix dans la place publique. Comme ce nombre
excédait presque de moitié celui des prisonniers, cet ordre donna
beaucoup à penser ; l'évêque, les jésuites, les religieux de saint
François, les espagnols du Galion de Saint-Philippe, qui n'étaient
point encore partis, et quantité de personnes de tout ordre et de
tout âge se flattèrent de l'espérance d'être associez aux
confesseurs de Jésus-Christ. Bientôt même, comme il arrive dans ces
rencontres, on publia comme une chose certaine que tous les fideles
allaient passer par la rigueur des lois, et il n'y en eut pas un
dans la ville et aux environs qui ne prît ses mesures pour n'être
pas oublié.
Un enfant de cinq ans
se fit remarquer entre tous les autres d'une manière qui augmenta
encore la ferveur des chrétiens et l'étonnement des infidèles. Ayant
rencontré dans la rue un missionnaire, il lui demanda s'il était
vrai que l'empereur envoyât des soldats pour mettre à mort tous ceux
qui ne voudraient abjurer la foi. « On le dit ainsi, répondit le
père ; mais que direz-vous, mon fils, ajouta-t-il, quand on vous
demandera si vous êtes chrétien? » « Je dirai hardiment que je le
suis et que je le serai jusqu'au dernier soupir, » repartit
l'enfant. — « Et si l'on veut vous couper la tête, reprit le père,
que ferez-vous? » — « Je m'y disposerai de mon mieux, »
répliqua-t-il. — « Comment cela ?» dit le religieux. Alors ce petit
innocent faisant paraître une contenance assurée : « Je m'écrierai,
continua-t-il, Jésus miséricorde ! et j'attendrai sans rien craindre
le coup de la mort. »
Le jour que les
prisonniers étaient arrivez à Facata, le père Baptiste et Paul Miki
avoient trouvé le secret d'envoyer deux lettres qu'ils avoient
écrites l'une au père Gomez, vice-provincial des jésuites, et
l'autre au père Antoine Lopez, recteur du collège de Nagasaki, par
lesquelles ils le conjuraient de leur ménager les mêmes grâces que
Miki avait depuis demandées à Fazaburodono. Ces lettres furent
communiquées à l'évêque, lequel fit sur le champ partir les pères
Pasio et Rodriguez, pour aller au-devant des confesseurs et leur
procurer tous les secours spirituels et temporels qui pourraient
dépendre d'eux. Les deux pères se rendirent en diligence à Conoqui,
petite bourgade de la principauté d'Omura, éloignée de huit ou neuf
lieues de Nagasaki, et y attendirent les prisonniers qui devaient y
passer et qui y arrivèrent en effet peu de temps après eux. C'était
le quatrième de Février. Le père Pasio avait compté d'y dire la
messe et les communier; mais le commandant, qui avait pris une autre
route pour se rendre à Nagasaki, avait expressément défendu aux
gardes de s'arrêter dans aucun endroit, de sorte qu'on eut à peine
le tems de s'embrasser de part et d'autre. Les deux missionnaires
firent aux religieux de saint François beaucoup de civilités, de la
part du prélat et des supérieurs de la Compagnie ; le père Baptiste
de son côté, après s'être entretenu quelques moments avec le père
Rodriguez, lui dit d'un air fort touché ces paroles qui firent bien
voir que le charme était enfin levé, et que ce saint religieux était
alors très convaincu, qu'on l'avait trompé, qu'il s'était trop
laissé prévenir contre les jésuites, et qu'il envisageait les objets
bien autrement qu'il n'avait fait jusque là. « Mon cher père, il
pourra bien arriver qu'on nous exécute si promptement que nous
n'ayons pas le loisir de faire tout ce que nous souhaiterions. En ce
cas-là je vous supplie de présenter mes très-humbles respects au
digne prélat qui gouverne cette Église et d'assurer le révérend père
vice-Provincial et tous les pères de la Compagnie, que je suis
infiniment mortifié de tous les chagrins que nous leur avons causez
et que je prie instamment de vouloir bien nous les pardonner. » Le
père Rodriguez répondit que ni lui ni aucun autre jésuite n'avait
douté un seul moment de la droiture de leurs intentions ; que Dieu
avait permis tout ce qui étroit arrivé pour des raisons que lui seul
pouvait savoir, et qu'il en tirerait assuré sa gloire. Il ajouta,
que si de la part de la Compagnie on leur avait donné quelque sujet
de peine, il pouvait protester que c'avait été sans dessein, et
qu'il le conjurait de l'oublier. Après ces honnêtetés et ces excuses
réciproques, les deux religieux s'embrassèrent avec beaucoup de
larmes.
Le père Pasio pendant
cet entretien était retourné en diligence à Nagasaki, pour sommer
Fazaburodono de la parole qu'il avait donnée à Miki au sujet de la
messe; cet officier répondit qu'il aurait bien voulu donner à son
ancien ami aussi bien qu'aux autres prisonniers toute la
satisfaction qu'ils souhaitaient ; qu'il avait même retenu à ce
dessein une maison dans la ville afin qu'ils y pussent voir en
liberté tous ceux avec qui ils seraient bien aises de traiter; mais
que tous les chrétiens d'alentour s'étant rendus à Nagasaki sur la
nouvelle de ce qui allait s'y passer, il avait tout lieu de craindre
un mouvement, dont les suites seraient sur son compte. Cette même
crainte lui avait encore fait changer le lieu de l'exécution ; mais
ce changement se fit aussi à la prière des jésuites, parce que
l'endroit qui avait été marqué d'abord, était celui où l'on avait
accoutumé de faire mourir les malfaiteurs. Il fit donc transporter
les croix, dont il réduisit le nombre à vingt-six, qui était celui
des prisonniers; il les fit, dis-je, transporter sur une des
collines dont Nagasaki est presque environnée et qui donne sur la
mer, et comme dans la suite quantité de fidèles et des missionnaires
arrosèrent ce lieu de leur sang, on l'appela le « Mont des martyrs »
ou « la Sainte Montagne ». Fazaburodono ajouta au père Pasio que lui
et le père Rodriguez n'avoient qu'à se tenir à l'ermitage de
Saint-Lazare, qui se trouvait sur le passage des prisonniers, et
qu'ils pourraient les entretenir quelque tems, avant qu'on les
conduisît au supplice.
Le père Pasio, sans
perdre de tems, se rendit avec un domestique du commandant au lieu
qui lui avait été marqué, ayant fait avertir le père Rodriguez de
s'y trouver aussi. Le cinquième de Février qui était un vendredi
selon quelques-uns et selon d'autres un mercredi, les confesseurs
arrivèrent par mer à un petit havre tout joignant l'ermitage de
Saint-Lazare, où ils se rendirent à pied. Le père Pasio les y
attendait, et le père Rodriguez qui s'était avancé pour leur
apprendre qu'ils devaient mourir ce jour-là, les y conduisit. Ils
marchaient tous avec une allégresse qui étonna le commandant; il en
témoigna sa surprise au père Rodriguez, et ce religieux lui en ayant
dit la raison, il répondit que rien ne lui paraissait plus beau,
mais qu'il ne serait pas de ce goût-là. Dès que les martyrs furent
arrivez au lieu où était le père Pasio, Paul Miki entra avec lui
dans la chapelle et lui fit une confession générale de toute sa vie;
les deux novices en firent autant et le père reçut leurs vœux.
Tandis que le père Pasio était ainsi occupé à disposer à la mort ses
trois confrères, les pères de saint François se confessaient aussi
les uns aux autres et le père Rodriguez prenait soin de préparer les
séculiers au combat.
Quelque tems après on
leur vint dire que le commandant les attendait sur la colline, où
ils devaient consommer leur sacrifice ; ils se mirent aussitôt en
chemin pour s'y rendre, suivis d'un peuple infini. Les chrétiens qui
se trouvaient sur leur passage se prosternaient devant eux, et les
yeux baignez de larmes se recommandaient à leurs prières : ils
arrivèrent enfin au pied de la colline et du plus loin qu'ils
aperçurent leurs croix, ils coururent les embrasser, ce qui causa un
nouvel étonnement aux infidèles.
Les croix du Japon ont
vers le bas une pièce de bois en travers sur laquelle les patines
ont les pieds posez et au milieu une espèce de billot sur lequel ils
sont assis.
On les attache avec des cordes par les bras par le milieu du corps,
par les cuisses et par les pieds qui sont un peu écartez. On ajouta
à ceux-ci, je ne sais pourquoi, peut-être est-ce une coutume locale,
un collier de fer qui leur tenait le col fort roide. Quand ils sont
ainsi liez, on élève la croix et on la place dans son trou. Ensuite
le bourreau prend une manière de lance et en perce de telle manière
le crucifié qu'il la lui fait entrer par le côté et sortir par
l'épaule ; quelquefois cela se fait en même tems des deux côtés et
si le patient respire encore on redouble sur le champ, de sorte
qu'un homme ne languit point dans ce supplices.
On allait commencer
l'exécution, lorsque Jean de Gotto aperçût son père qui était venu
pour lui dire un dernier adieu. « Vous voyez, mon cher père, lui dit
le novice, qu'il n'ya rien qu'on ne doive sacrifier pour assurer son
salut. » — « Je le sais, mon fils, lui répondit le vertueux père, je
remercie Dieu de la grâce qu'il vous a faite et je le prie de tout
mon cœur de vous continuer jusqu'au bout ce sentiment digne de votre
état. Soyez persuadé que votre mère et moi sommes très disposez à
imiter-votre exemple et plût au ciel que nous eussions eu l'occasion
de vous le donner ! » On attacha ensuite le martyr à sa croix, au
pied de laquelle, dès qu'elle fut dressée, le père eut le courage de
se tenir. Il y reçut une partie du sang de son fils sur lui et ne se
retira que quand il l'eut vu expirer, faisant connaître, par la joie
qui éclatait sur son visage, qu'il était bien plus charmé d'avoir un
fils martyr que s'il l'eût vu élever à la plus brillante fortune.
Presque tous étaient
attachez à leurs croix et prêts à être frappez du coup mortel,
lorsque le père Baptiste, qui se trouva placé au milieu de la troupe
rangée sur une même ligne, entonna le cantique de Zacharie :
Maintenant, Seigneur,
ton serviteur peut mourir,
Mourir en paix selon ta parole,
Puisque mes yeux ont vu le Sauveur,
Celui que tu as destiné à paraître devant tous les peuples,
A être la lumière des païens
Et la gloire de ton peuple d'Israël.
Tous les autres [l’]
achevèrent avec un courage et une piété qui en inspirèrent à tous
les chrétiens et attendrirent les infidèles. Quand il eut fini, le
petit Antoine qui était à côté du père commissaire l'invita à
chanter avec lui le psaume :
Laudate pueri
Dominum,
Enfants, louez le Seigneur,
et le saint religieux,
qui était absorbé dans une profonde contemplation, ne lui répondant
rien, l'enfant le commença seul, mais ayant, quelques moments après,
reçu le coup de la mort, il l'alla achever dans le ciel avec les
anges. Le premier qui mourut fut Philippe de Jésus et le père
Baptiste fut le dernier. Paul Miki prêcha de dessus la croix avec
une éloquence toute divine et finit par une fervente prière pour ses
bourreaux; tous firent éclater leur zèle et leur joie, et ces grands
exemples excitèrent dans le cœur des fidèles qui en furent les
témoins une merveilleuse ardeur pour le martyre.
Dès qu'ils eurent tous
expiré, les gardes ne furent plus les maîtres, et quoiqu'ils se
fussent d'abord mis en devoir d'écarter à grands coups de bâton la
foule du peuple, ils furent contraints de céder pour quelque tems et
de s'éloigner. Ils laissèrent donc les chrétiens contenter leur
dévotion et recueillir tout ce qu'ils purent du sang dont la terre
était teinte : les idolâtres mêmes témoignèrent une grande estime
pour une religion qui inspirait tant de joie à ceux qui en étaient
les victimes et une si sainte jalousie à ceux qui en étaient les
spectateurs, et l'on assure que Fazaburodono se retira de très-bonne
heure les larmes aux yeux. Sur le soir, l'évêque, à qui ce
commandant n'avait pas voulu permettre d'assister les martyrs à la
mort et qui les avait vu mourir de sa fenêtre, vint avec tous les
jésuites de Nagasaki se prosterner au pied de leurs croix, et donner
à leurs sacrées reliques des marques sincères d'une religieuse
vénération.
LETTRE DU PÈRE JÉRÔME DE JÉSUS.
Au moment où éclata la
tempête dans la ville de Nagasaki, nous étions au Japon onze
franciscains.
Quand mes confrères
furent arrêtés, tant ceux de Méaco que ceux d'Usacca et de Nagasaki,
j'étais en route pour aller de cette dernière ville à Usacca, de
sorte que je ne fus saisi ni dans l'une ni dans l'autre. Arrivé près
d'Usacca, j'appris l'arrestation des religieux de Méaco ; je crus
mieux faire d'aller de l'avant que de rétrograder, mais le danger
était bien grand, ma situation bien précaire. Néanmoins, mettant
toute ma confiance dans le secours divin, j'entrai résolument en
ville où je trouvai moyen de faire demander à mon bien-aimé confrère
Martin Aguirre ce que je devais faire. Sa réponse fut de me retirer
chez un chrétien dont il m'envoya le nom et de quitter tout habit
religieux parce que la persécution dans son plein aboutirait pour le
moins à un bannissement. J'obéis. Je trouvai installés dans cette
maison, notre Frère Jean Povéro, le commandant du navire confisqué,
Mathias de Landecho, le Père Jean Guévara, Augustin, et trois
Espagnols. Les mains jointes, ils me supplièrent de retourner à
Nagasaki où je rencontrai le gouverneur de Macao, colonie
portugaise. Ce fonctionnaire, entretenant d'excellents rapports avec
l'empereur du Japon, pourrait, pensaient-ils, obtenir
l'élargissement des prisonniers et les tirer eux-mêmes de la
fâcheuse situation où ils se trouvaient. Incertain du parti que je
devais prendre et sachant que le Père Commissaire venait d'être
transféré avec ses compagnons de Méaco à Usacca, je réussis à lui
faire parvenir une lettre ; je le priais de me dire si vraiment il
désirait que je m'employasse à sa libération, selon le conseil qu'on
m'en donnait, ou si nous devions nous joindre à lui pour participer
à ses souffrances actuelles et à la gloire qui devait en être la
suite. Il me répondit :
«
Cher Frère Jérôme. Nous sommes irrévocablement condamnés à la mort
de la croix. Nous avons déjà les oreilles coupées et l'on dit qu'on
va encore nous couper le nez. Je vous en conjure, pour la
consolation des pauvres chrétiens que nous avons été obligés de
laisser et pour le bien de notre Ordre au Japon, tenez-vous caché.
Je vous l'enjoins même au nom de toute l'autorité dont je suis
revêtu et en vertu de celle de nos supérieurs de Manille. Priez Dieu
qu'il nous accorde la grâce de souffrir pour son amour. Recevez mes
salutations, ainsi que celles de nos confrères et des tertiaires
japonais; tous exultent de joie dans la perspective d'être admis à
sacrifier leur vie pour Jésus-Christ. Quand nous sortirons de la
prison d'Usacca, vous pourrez m'envoyer un nouveau billet. Cher
Frère Jérôme, pour la seconde fois, je vous prie et vous commande
dans toute nia tendresse de vous résigner à ce qu'a réglé le
Seigneur; faites en sorte de rester au Japon, voilà ce que réclame
de vous le ciel. »
« De la prison d'Usacca, 5 janvier 1597. »
Il me fit écrire
ensuite par le Père Blanco que j'étais nommé Commissaire de toute la
mission dans le cas où le Père Augustin viendrait à manquer.
J'acceptai ; je restai à Usacca et je recommandai à Dieu la position
difficile dans laquelle je me trouvais.
Cependant la maison
chrétienne qui m'avait reçu ne voulait plus me garder; une seconde,
puis une troisième me refusèrent également asile. Navré de douleur,
je m'abandonnai à l'aventure, n'ayant qu'un chétif vêtement sur le
dos par un froid intense. Arrivé à la porte de la ville, je sentis
une main me saisir le bras et une voix me dire : « Où allez-vous,
Père Jérôme? » — « Où il plaît à pieu, » répondis-je. — «
Suivez-moi, » reprit la voix. Deux personnages se mirent à marcher
devant moi; je les suivis sans savoir où ils allaient. Ils me
conduisirent chez un païen, lui recommandèrent chaleureusement de
bien me cacher et se retirèrent. Je m'endormis sous le coup d'une
profonde émotion et je vis en songe une rangée de croix auxquelles
étaient attachés mes confrères. Tout à coup une troupe de bourreaux
s'apprêta à se saisir de moi, mais notre séraphique Père se présenta
et dit : « Non, pus celui-là, j'ai besoin de lui, » et il dise
parut. Le matin à mon réveil, j'appris que l'arrêt de mort avait été
publié et l'ordre donné d'arrêter impitoyablement quiconque
s'opposerait à l'exécution de la sentence. Dans le même moment, je
recevais de notre Père Commissaire une lettre conçue en ces termes :
« Cher Père Jérôme. Je comprends toute la désolation que vous devez
éprouver, demeuré seul après notre capture, comme isolé et délaissé.
Nous sommes tous fort édifiés de votre saint désir de mourir avec
nous. Toutefois la perfection de la vertu ne consiste pas à servir
Dieu comme il nous plaît, mais à accepter volontiers ce qu'il
demande de nous, spécialement en ce qui touche le salut des âmes
rachetées par son sang précieux. Si, au moment où éclata la tempête,
il était d'une importance capitale que nous ne prissions pas la
fuite, mais que nous demeurassions pour fortifier les chrétiens, il
est d'une importance bien plus grande encore qu'aujourd'hui le
troupeau fidèle ne reste pas sans pasteur. Si nous n'avions pas été
surpris à l'improviste, j'y aurais pourvu, mais le temps m'a manqué.
Aussi Dieu a-t-il disposé que vous ne fussiez pas pris; vous ne
serez pas frustré pour cela de la couronne que vous désirez. On dit
que tous les chrétiens du Japon doivent mourir, ainsi que tous ceux
qui plus tard embrasseront le christianisme. Les fidèles de Méaco
seront certainement exécutés ; déjà même leur sentence est écrite,
sur les mêmes tablettes que la nôtre. Ayez soin de fortifier ces
pauvres, gens et rappelez-leur que le bon Pasteur donne sa vie pour
ses brebis. Que si le port de l'habit de notre saint Ordre est un
obstacle à l'accomplissement de votre mission, laissez-le avec la
bénédiction de Dieu. Mais si l'arrêt porté contre nos chers
néophytes vient à être exécuté, souvenez-vous que le père doit
précéder les fils régénérés par lui dans le sang de Jésus-Christ;
reprenez alors l'habit, comme le réclament l'honneur de l'ordre que
nous avons embrassé et la dignité de notre sainte foi. »
Dès que j'eus pris
connaissance de cette lettre, je partis pour Méaco; Dieu sait parmi
quels périls. Arrivé là, je vis que tout était tranquille; hommes et
femmes demeuraient en liberté, comme si la persécution n'avait eu
d'autre but que d'arracher du Japon l'Ordre de Saint-François. En
présence de cette situation, je me déterminai, après y avoir bien
réfléchi, à me rendre à Nagasaki, où je me tins caché chez un
fervent chrétien. De là, j'écrivis au Père Provincial de la
Compagnie de Jésus de vouloir bien m'envoyer tout ce qui était
nécessaire pour célébrer la sainte messe dans le plus grand secret.
Il me répondit qu'il me serait impossible de demeurer dans cette
cachette; de fait, peu de jours après, le gouverneur de cette ville
m'interdisait l'accès de deux maisons portugaises où j'avais
l'espoir d'offrir les saints mystères. Je demandai qu'il me fût au
moins permis de parler à l'ambassadeur que je savais avoir été
envoyé de Manille au Japon ; loin de là, on m'empêcha d'abord de me
rendre à Firando où il avait débarqué, puis on mit des gardes aux
portes du misérable réduit ou j'étais hébergé, afin que toute fuite
me devînt impossible. Enfin je m'embarquai pour Macao en compagnie
de deux Augustins et je retournai à Manille.
Déclarés bienheureux
par Urbain VIII, les vingt-six martyrs ont été canonisés par Pie IX,
le 8 juin 1862.
BIBLIOGRAPHIE
— P. M.
Ribadeneyra, Historia de las cosas, Barcelona, 1601, l. V, c.
XXII sq ; — Carletti, Ragionamenti sopra le cose da lui vedutene
suoi viaggi si nell'Indieoccidentali e orientali, Firenze, 1701,
part. II, ragio I ; — De Charlevoix, S. J., Histoire et
description générale du Japon ; où l'on trouvera tout ce
qu'on a pu apprendre de la nature et des productions du pays,
etc., in-12, Paris, 1736, t. IV, p. 354-422 ; — Victor Bernardin de
Rouen, Histoire universelle des missions franciscaines, t.
II, p. 332 sq. ; — F. Marnas, La « Religion de Jésus »
ressuscitée au Japon dans la seconde moitié du XIXe siècle,
Paris, 1896, t. I, p.3-31 ;— Bouix, Histoire des vingt-six
martyrs du Japon, 1862.
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