Page mensuelle  Juillet 2011

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SENTIMENTS DE L'ÂME
21 et 22 décembre 1944

21 décembre 1944

Le temps passe, j’ai déjà l’éternité en ce monde. Quand verrai-je Dieu ? Quand sortirai-je de la mort pour ressusciter à la vie ? Ô mon Dieu, c’est effrayant de rester là ! Je n’entends que les bruits d’une grande tempête qui se font sentir à mon âme. Quel poids écrasant d’humiliations, de calomnies, de mépris !

Ô Jésus, acceptez l’abandon dans lequel je me sens pour Vous consoler de l’abandon dans lequel les hommes vous laissent. Acceptez toute cette épreuve, tout mon pénible calvaire pour Vous sauver des âmes, pour Vous aimer comme Vous le méritez et êtes digne.

Ô mon Jésus, om pourrai-je fuir ? Où puis-je me cacher afin que l’on ne me vole pas la richesse que Vous avez déposée à l’intérieur de moi ?

Jésus, voyez ma fatigue. J’aimerais le garder dans plusieurs maisons en fer, mais dans lesquelles il n’y aurait pas d’entrée ; je voudrais vivre sous terre afin de ne pas être volée. On dirait que l’enfer vient toujours vers moi et je ne sais pas comment m’en défendre ; faites pour moi un abri dans Votre divin Cœur, gardez-moi y et gardez aussi ce que Vous avez déposé en moi. Je sens que l’on veut tout me voler ; et après, Jésus comment je vous en rendrai compte ?

Ô vie, ô ma vie ! Quelle peur j’ai de ma vie, qui n’est même pas une vie, elle n’est que mort, mort terrible ! Qu’elles sont terribles mes ténèbres et mes sécheresses ! J’aimerais avoir mon confesseur pour mon réconfort et purification de mon âme. Il est venu, il se montra très charitable envers moi, s’est efforcé de m’encourager, mais en vain : je me sens pire encore. Aucun confort ne me vient de la terre.

Ô mon Dieu, qu’en sera-t-il de moi ? Je suis arrêtée sur le versant de la montagne, mais j e ne peux ni ne sais avancer. Pas un seul pas en avant, je ne vois pas. Le démon tombe sur moi et quand ce n’est pas lui, ce sont ses maudites ruses. Il m’interpelle sur tout. Lors d’une attaque plus violente il a essayé de faire comme Jésus et la Petite-Maman, me confier le monde, mais un monde de jouissances et de plaisirs. Jouir, jouir, pécher.

— Tu pèches avec tout l’enfer, tu pèches avec toute la terre.

Et il me faisait sentir comme s’il en était ainsi : il voulait m’en convaincre. Tant de fois je veux recourir au Ciel, mais je ne le peux pas. Bien vite je cède à ses ordres. J’entends les insultes faites de mots indécents et il me semble les répéter ce qu’il veut, avec lui et même des fois seule. Au moment du plus grand danger, du fond de mon âme, je peux crier vers le Ciel, mais cela augmente encore mon tourment, car le démon me répète et m’assure que j’ai péché.

Jésus n’est pas venu me parler ; j’ai à peine senti comme un souffle léger et suave qui m’a porté vers ma place habituelle. Ma tristesse était mortelle et mon découragement sans pareil.

Mon Jésus, si seulement je ne péchais pas ! Si seulement je Vous aimais pour moi et pour tous ! Si seulement je vous sauvais des âmes ! Si seulement je Vous procurais consolation ! Je ne sais pas Vous parler, mon Amour. Voyez ce qui se passe dans mon âme, je ne sais rien Vous dire. J’ai envie de tout Vous dire ; pour tout Vous donner, de tout souffrir. Combien j’ai à Vous remercier ! J’aime tant Vous dire : “Doux Cœur de Jésus, soyez mon Amour” ! Rien que pour Vous dire que Vous êtes mon Amour et la Petite-Maman mon salut, je n’aurai pas assez de toute l’éternité pour Vous dire aussi : Merci beaucoup.

Hier j’ai reçu beaucoup de caresses[1] de Vous, les unes douces, les autres épineuses ; elles m’ont fait saigner le cœur. J’ai encore reçu des humiliations, moi et les miens. Mon âme a pressenti leur arrivée ; je les attendais déjà de la sorte, et j’en attends encore. Ô comme c’est bon de souffrir, être petite, disparaître par amour pour Vous ! Que meure mon nom afin que règne le Votre, mon Jésus. Que je disparaisse écrasée par la douleur, afin que Vous seul apparaissiez dans les âmes et par elles Vous soyez loué et glorifié avec amour.

Merci, mon Jésus, pour tout ce qui me cause joie et me fait souffrir. Merci, mon Jésus, pour le saint médecin [2] que Vous m’avez envoyé. Qu’en serait-il de moi sur cette route si épineuse du Calvaire ? Je vois que c’est Vous qui me réconfortez, qui m’encouragez par ses lèvres. Combien d’heures il passe avec moi ! Et malgré cela, quand il est absent, j’ai de lui une peur affreuse, une peur qui n’a pas raison d’être. C’est ainsi avec toutes les personnes que j’aime le plus : malgré leur tendresse envers moi, je me sens séparée d’elles. Je suis seule, il faut que je reste seule.

— Ô mon Jésus, quand me rendrez-Vous mon Père spirituel ? [3] Combien je désire qu’il me soit rendu ! Combien mon âme a besoin de lui ! Et malgré ce grand désir, je crains de le voir, j’en ai peur, terriblement peur.

Mon Jésus, c’est jeudi, aujourd’hui : je chemine vers la mort[4]. Mon cœur est si blessé, si maltraité ! Mon âme voit toutes les souffrances qui l’attendent. Mon esprit est dans le Seigneur et il en de même pour mes regards. Et en silence je continue de m’exclamer : “Mon Dieu, mon Dieu ; mon Père, mon Père !”

22 décembre 1944

Le démon accompli son rôle de grand voleur ; il pratique de terribles assauts dans mon cœur. Il veut même y entrer, me voler la richesse qui s’y trouve déposée. Comme il ne parvient pas à me la voler, plein de rage, il essaie de m’étrangler. J’ai l’impression de me trouver dans sa gueule de lion et mise en miettes par ses longues dents. Mais ce n’est pas uniquement la rage du démon, ce ne sont pas uniquement ses assauts, je me sens violentée par le monde. Ô mon Dieu, le monde qui veut se voler lui-même !

Je sens une fatigue tellement grande qu’elle me laisse prostrée. Je veux garder mon trésor, je veux le cacher. J’ai un grand désir immense de purifier ce monde comme à moi-même. Je veux être pure, pure et je veux qu’il soit pur, lui aussi. Je veux aimer Jésus d’un amour fou, passionné, et je veux que le monde l’aime du même amour. Je veux me baigner dans le Sang de Jésus pour me transformer en Jésus même, et je veux pour le monde le même bain, la même transformation. Je l’aime comme à moi-même ; je ne peux pas l’aimer davantage. Que faire pour lui, mon Jésus ? Faites Vous-même ce que je ne peux ni ne sais faire.

Ce matin, encore bien tôt, en me rappelant quel jour j’étais, je me suis exclamée : “Mon Dieu, c’est vendredi ! Silence et douleur profonde. Si mon vouloir existait et si je pouvais disparaître du monde en ce jour…” Jésus, pardonnez-moi, je me remets entre Vos mains ; que Votre divine volonté et elle seule soit faite. Ce n’est pas pour fuir la souffrance, Vous le savez bien ; c’est la peur de moi-même, de me tromper.

Je me suis sentie seule en prison, pendant que tout était en repos. Quelle douleur dans mon âme et que de larmes silencieuses ! J’ai reçu une grande leçon de Jésus. Lui, qui voyait et savait tout, pendant que l’âme pleurait de douleur et d’amertume, Lui, Il demandait le pardon pour tous. Son divin Cœur compatissant voulait posséder le monde entier ; Il semblait oublier sa souffrance pour n’aimer que nous. Ensuite je me suis sentie sur la croix, le sang coulant en abondance de mes pieds et de mes mains. Avec le tremblement de la croix [quand elle a été mise dans le trou préparé à cet effet] les blessures des épines se sont ravivées et une pluie de sang en sortait, baignant mon visage.

Ô Jésus, tout par amour pour Vous. Je n’ai même pas de force pour respirer.

Peu à peu j’ai perdu tout mon sang : il me semblait être moribonde. J’ai commencé ensuite à ressentir dans mon âme une paix suave et douce : c’était la paix céleste. Il me semblait quitter le monde et d’aller savourer les joies du Ciel. Je suis restée longtemps comme endormie dans un sommeil doux, réchauffée par une chaleur qui me brûlait le cœur et éclairait toute ma poitrine. Jésus a commencé alors à me parler :

— Ma fille, tu ne vis pas la vie du monde, tu t’es détachée de tout ce qui lui appartient. Tu vis au Ciel, tu vis de ce qui est divin. Tes chemins ce sont les chemin du Christ ; c’est pourquoi tu n’es pas comprise. Écoute, mon ange, ta mission est sublime : elle est la plus riche des missions. Voila pourquoi tu es haïe et persécutée ; haïe par Satan, à cause des âmes que tu lui voles. Persécutée par le monde, parce qu’il ne comprend pas la vie que tu vis, ce qu’est Ma vie dans les âmes. Ne crains pas, petite fille, le trésor immense que Moi et ma Mère t’avons confié, ne sera pas volé. C’est pour ton martyre soit plus grand, pour le profit des âmes et une plus grande gloire pour Moi. Je l’ai fermé avec ma Mère bénie avec des clés en or ; Nous avons scellé ton cœur avec des scellées divines. Quelle douleur pour mon divin Cœur de voir ta souffrance !

Il est nécessaire d’étudier, d’approfondir, afin de comprendre la vie du Christ dans les âmes.

Quand je t’ai créée, je t’ai créée avec une telle perfection, perfection qui ne pouvait que purifier le déroulement de la mission la plus sublime. Il en est de même pour les âmes destinées à te guider, des âmes qui comprennent, des âmes qui vivent ma vie, la vie intime avec moi. Ceux qui prennent soin de toi, prennent aussi soin de Moi.

Mon désir c’est que tous mes disciples étudient ces sciences divines. Mais ils ne les étudient pas, ne les comprennent pas. Je leur accorde les lumières nécessaires, mais ils tentent de les éteindre. Mais c’est en vain : ils n’y réussiront pas.

En tous temps J’ai eu besoin de victimes, maintenant, plus que jamais J’en ai besoin. Je t’ai déjà désignée, ma rédemptrice, pour que en cette époque tu sois immolée, époque où l’humanité s’est plongée dans une mer immense de boue et de vices[5]. C’est ce que sens vouloir voler le monde. C’est le vice qui peut plus que l’homme ; c’est le vice le voleur de tout ce qui m’appartient.

Ô pastourelle divine, reine du monde, c’est Moi, Jésus, qui t’élis, qui t’élève dans les hauteurs. Garde, sauve ce que je t’ai confié. Fais paître le troupeau dans le pré de la pureté, dans le pré de la charité, de l’humilité et surtout dans celui de l’amour. Celui qui aime, et aime en vérité, n’offense pas son Bien-aimé.

Ô lis parfumé, lis pur, irradie le monde avec tes arômes, avec tes vertus qui sont des arômes célestes, des arômes qui attirent à toi le troupeau que je t’ai confié et qui par toi vient à Moi à travers toi monte dans le Ciel.

Courage, ne crains pas. La gloire est la Mienne, le triomphe est le Mien. En tous les temps mon Église a été persécutée, comment ne le serait-elle pas maintenant ce qui lui appartient, ce qu’il y a de plus riche et de plus noble ?

Je n’ai jamais immolé de la sorte ni n’immolerai plus jamais une autre victime ; je n’ai jamais reçu d’aucune d’elles autant d’âmes, ni ne recevrai plus. Tu es mère, mère des pécheurs, leur reine.

Après moi et Ma Mère bénie, personne d’autre n’a sur eux autant de pouvoir que toi. Courage, mon étoile étincelante, phare de toute l’humanité !

J’ai tout entendu de Jésus sans mot dire. Pendant qu’Il parlait j’étais en feu, un feu consolateur, un feu qui m’attachait à son divin Cœur. En même temps j’ai reçu un réconfort qui me remontait les forces dont j’avais tant besoin pour supporter ma croix.

— Ô mon Jésus, que puis-je Vous dire ? Plus Vous me parlez plus je me rends compte de ma petitesse. Je m’humilie, je m’humilie, mon Jésus, j’ai honte de ma misère, j’ai honte que Vous Vous serviez de moi pour d’aussi hautes missions. Travaillez Vous-même, parlez Vous-même, car tout vos appartient ; parlez de Vos grandeurs.

— Ô violette bien-aimée, pur asile où j’habite ; j’habite en toi sur la terre, comme dans le Ciel tu habiteras avec mon Père éternel. Tu es mon Alexandrina transformée en Christ, uniquement en Christ.

— Merci, mon Jésus, mon Roi d’Amour !


[1] Comme déjà dit par ailleurs, il s’agit des souffrances qu’Alexandrina accepte librement pour le salut des âmes.
[2] Il s’agit du Dr Manuel Augusto Dias de Azevedo qui sera son médecin jusqu’à sa mort le 13 octobre 1955.
[3] Il s’agit du Père Mariano Pinho, jésuite et premier directeur spirituel d’Alexandrina. Sur ordre de son Provincial il fut obligé d’abandonner la direction spirituelle de la Bienheureuse et de s’exiler au Brésil où il est décédé.
[4] Elle veut parler ici de l’approche du vendredi et de la “passion” qui l’attend.
[5] Il est important de noter que la période dont parle Jésus, n’est certainement pas celle où vécut Alexandrina, mais celle où ses écrits pourrait être lus et connus, donc notre époque. En effet, ce n’est que longtemps après sa mort que ses écrits ont été rendus publiques, d’abord en portugais et maintenant dans plusieurs autres langues.

 

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