15 décembre 1944
Tôt, avant même que le
jour ne pointe, je me suis réveillée après un court sommeil. Ô mon
Dieu, c’est vendredi ! Une nuit obscure est tombée sur moi. Jésus, à
chaque moment qui passe, il me semble de cheminer vers la mort, non
point comme quelqu’un qui chemine par amour et avec joie, mais comme
quelqu’un
qui la plus grande horreur et répugnance de la mort. Ensevelie dans
cette souffrance, l’heure est arrivée de recevoir mon Jésus. Je Lui
ai fait mes demandes. En les Lui faisant, je Lui ai rappelé
certaines choses.
— Jai confiance, j’ai
confiance, mon Jésus ! Pour ne pas croire en cela il faudrait que je
ne croie à rien.
J’ai dis cela pour
m’épancher et en même temps pour montrer à Jésus ma confiance, loin
de penser à en obtenir une réponse. Mais il me l’a donnée :
— C’est ainsi, ma
fille, c’est exactement comme cela. Aie confiance, ce sont les
paroles d’un Dieu, ce sont les paroles de ton Époux Jésus qui t’aime
et ni ne permets ni consent que tu te trompes.
Je me suis sentie
davantage revigorée, j’ai acquis plus de force pour résister à la
douleur et supporter les bousculades, aux plaisanteries et aux
brimades dont j’étais l’objet. Je devais tout souffrir en silence,
les lèvres serrées. Je sentais la douleur de quelqu’un qui pleurait
de voir combien je souffrais et ce quelqu’un avait un amour comme
celui d’une mère. En silence j’ai uni ma douleur à cette douleur.
Jésus est venu et, se sa tendre et douce voix m’a dit :
— Ma fille, unis ta
douleur à la mienne, adouci-la dans l’amour de mon divin Cœur.
J’adouci la mienne dans le tien. Aime-Moi, car tu es aimée de Moi,
tu es un coffre de richesse, dépositaire des dons divins.
Ma fille, ange chéri,
ta douleur est allée embellir le manteau et la couronne que ta
Petit-Maman ta remise. Quelle brillance ! Quel éclat ta douleur lui
a donné ! C’est une douleur de gloire, c’est une douleur de salut.
C’est un océan de martyre, un océan d’immolation.
Ma fille, jardin
céleste aux fleurs divines, pré verdoyant où paissent les pécheurs.
Abreuve-les de grâces, de pureté et d’amour. Garde-les, guide-les,
pastourelle divine, pastourelle choisie par Jésus !
Purifie-les, purifies-les pour Moi, guide-les, achemine-les vers mon
divin Cœur.
Ma fille, maîtresse
de sciences divines, garde ce qu’il y a huit jours a été déposé
dans ton cœur par Moi et par ma Mère bénie : c’est le monde, ce sont
les pécheurs. C’est d’une valeur infinie, c’est mon divin Sang. Ce
sont des âmes sauvées par ta souffrance. Cette anxiété de vouloir
garder et ne pas savoir comment est un tourment qui va te consumer
jusqu’à ta mort et qui augmentera de plus en plus, jour après jour.
Ma fille, où est écrit
tout ce qui est divin : en toi ils apprendront a aimer, en toi ils
apprendront à souffrir, en toi ils apprendront à connaître comment
Je Me communique aux âmes. Ils ne le savent pas, ne l’étudient pas.
Agissant ainsi ils font beaucoup souffrir mon divin Cœur.
Aie courage ! Qui
souffre avec Moi, avec Moi est vainqueur. Combien de larmes de
repentir ils verseront voyant que ton nom maintenant si bafoué sera
avec Moi et ma Mère bénie glorifié dans le Ciel !
Viens, ma Mère bénie,
viens réconforter la mienne et ta fille, viens la couvrir de tes
caresses.
La Petite-Maman est
venue, Elle m’a prise sur ses genoux, m’a serrée avec beaucoup de
tendresse et d’amour, m’a embrassée, m’a caressée et m’a dit :
— Ma petite fille,
reine choisie par Moi et par mon divin Fils, tu seras au Ciel à côté
de Moi et de mon divin Fils sur un trône de reine. Moi comme Reine
du Ciel et toi comme reine de la terre.
— Ma Mère — dit
Jésus — alimente-la, donne-lui ta vie, la vie de l’âme dont elle a
toujours vécu et vit, la corps dont elle a besoin.
La Petite-Maman a
commencé à souffler doucement de ses très saintes Lèvres unis aux
miennes. Je me suis sentie forte de l’âme et du corps. Jésus a fait
de même, souffla doucement et m’a caressée. Puis Il m’a dit :
— Je suis, ma fille,
avec ma Mère bénie, en train de te donner le réconfort que tu devais
recevoir des hommes. Quand il y a quelques années Je te disais que
ce serait Moi ton directeur, Je faisais allusion à ces temps-ci, ce
n’était pas pour éloigner ton directeur. Oui, j’avais besoin de lui
en union avec Moi pour te guider et pour t’amener à la hauteur que
mon divin Amour exige. Je voyais déjà la cruauté et la persécution
des hommes.
Courage ! Ton nom que
tu sens méprisé, bientôt sera prononcé avec respect e loué avec Moi.
— Soyez à jamais
remercié, mon Jésus. Plus vous me dites des choses, plus misérable
et mesquine je me sens devant Vous.
Mère de Jésus, ton
chemin à Toi
Me réconforte pour porter la croix.
Pour porter la Croix
dans cette détresse,
Au milieu des ténèbres, dans une grande sécheresse.
Ô Mère de Jésus,
donne-moi ton bonheur
Pour aimer avec lui le tien et mon Seigneur !
18 décembre 1944
Venez à mon a mon
secours, Jésus, car de la terre je ne peux espérer de l’aide. Je me
sens abandonnée de tous, comme si tous se révoltaient contre moi.
Pauvre de moi sans Vous un seul instant ! Toujours et toujours des
rumeurs de tempête, toujours, toujours une souffrance presque
insupportable, une souffrance sans fin. Je ne peux pas rester là,
mon Jésus, la nostalgie du ciel me consume. Je ne peux pas voir ni
sentir la distance qui me sépare de Vous. Un feu par fois
insupportable embrase mon cœur, et vient jusqu’à ma bouche,
paraissant me brûler les lèvres. L’eau avec laquelle je les
rafraichis ne sert à rien, car je dois ensuite la cracher. C’est du
feu, du feu, toujours du feu. Je sens que je ne Vous aime pas et que
je ne sais pas ce qu’est l’amour. Pauvre de moi, je ne sais pas
vivre.
Je suis fatiguée de
faire autant d’efforts pour garder en moi ce que Jésus et la
Petite-Maman m’ont confié. Il me semble rester toujours les bras
croisés sur ma poitrine les y maintenant le plus fortement possible,
pour la garder en moi. D’autres fois je m’enfuis, comme si je fuyais
un assaut ! Quelqu’un, je ne sais pas qui, vient sur moi, une
multitude incalculable qui veut me voler ce que j’ai en mon cœur et
je m’enfuis dans une course folle pour tout cacher. Je veux enrouler
autour de moi des chaînes, de fortes chaînes, des prisons, de fortes
prisons afin que rien ne puisse être volé. Dur tourment pour mon
âme, mais je n’arrive à rien !
Pendant les heures où
je souffrais de la sorte, j’ai souffert un terrible assaut du démon.
J’ai senti alors comme s’il m’avait tout volé ; je suis restée sans
cœur, sans poitrine, sans rien. Ce n’était qu’une simple coquille
d’œuf qui n’avait rien en son intérieur. Je sentis que le vol a été
emmené très loin ! Cela m’obligeait à dire :
— Je ne veux rien
garder en moi, je veux pécher, je veux jouir du monde.
Le démon m’affirmait
que je péchais avec beaucoup d’autres démons, avec certaines
personnes et il les nommait, disant sur elles et sur moi beaucoup de
vilains mots. Il était désespéré. Il blasphémait contre Jésus et
L’accusait de crimes, il me faisait trembler de peur en entendant ce
qu’il disait à l’encontre de Jésus. Rarement j’ai pu demander
secours au Ciel. Je me trouvais dans un bain de sueur, dans une
fatigue que je ne sais pas expliquer. J’ai fini par dire, sans
vouloir le dire : “Mon Jésus, je n’en peux plus !” L’attaque a cessé
mais je n’ai pas pu bouger. Très attristée de me voir dépossédée du
trésor immense que je possédais au-dedans de moi et de peur d’avoir
péché, je mormurais toute seule :
— Mon Dieu, mon Dieu,
je suis sans lumière, sans guide, sans un prêtre avec qui j’aurais
pu m’entretenir sur tout ceci. Ô Ciel, ô Ciel, ô Jésus, ô
Petite-Maman !
Les abîmes avaient
disparu, mais mes oreilles entendaient encore au loin les bruits
causés par le démon. Je ressentais fortement sa rage. Dans cette
détresse, dans une position violente, un long moment s’est écoulé.
Si Jésus ne vient pas à mon aide, qui pourra m’aider? Ô mon Dieu,
c’est par amour pour Vous et pour les âmes. Alors j’ai entendu
Jésus :
— Tu n’as pas péché, ma
fille, tu n’as pas péché, aie confiance. Tu M’as donné la plus
grande des consolations, tu M’as donnée toute la réparation
possible.
Regarde, ma petite
fille, ton Ange Gardien, chargé de te protéger, il reçoit maintenant
la mission de veiller encore davantage sur toi te changeant de
position quand t’en auras besoin après ces combats. Aie courage, Je
suis avec toi.
Je me suis retrouvée
dans la position habituelle. Et après quelques instants, j’ai
commencé à comprendre que j’avais toujours en moi le trésor que le
démon avait fait disparaître. Mon âme était toute en joie de savoir
qu’elle possédait toujours cette richesse ! Je voulais enlacer le
riche trésor, l’embrasser. J’ai ressenti comme la joie d’une mère
qui, ayant perdu son enfant, le retrouve enfin.
Je ne sais pas
expliquer la joie de mon âme. Je ne sais pas expliquer les soins à
quoi cela m’oblige ; j’ai toujours la crainte que quelqu’un puisse
me le voler. Je veux tout faire afin que le trésor ne courre aucun
danger.
Hier, sans réfléchir,
j’ai dit une parole qui m’a semblé déplaire à Jésus. Je suis devenue
toute triste. Je me suis humiliée devant Notre Seigneur, j’avais
honte.
— Pardonnez, mon Jésus.
Que suis-je sans Vous ?
Cette douleur m’a
accompagnée tout le long de ma journée et aussi une grande partie de
la nuit. Au petit matin, lorsque j’ai fait ma préparation pour la
venue de Jésus,
je n’ai pas pu résister à la douleur. J’ai pleuré, pleuré. Quelle
peine j’avais d’avoir blessé le divin Cœur de Jésus ! Je voulais un
prêtre afin que par la sainte absolution mon âme soit purifiée.
Purifiez-moi, Jésus,
purifiez moi, Vous. Regardez la peine que j’ai de vous avoir déplu.
Je suis toute seule, sans aucun réconfort sur la terre. Ne me
manquez pas, mon Jésus. Pardonnez-moi, pardonnez-moi ! Acceptez la
douleur que je ressens de Vous avoir déplu pour tous ceux qui
pèchent gravement et n’en n’ont aucun remord.
Cette souffrance m’est
restée tout le long de la journée et je surveillais toujours ce que
j’ai rangé dans mon cœur. Une anxiété destructrice de posséder des
mondes, des milliers de mondes, et de leur crier qans cesse : Aimez,
aimez Jésus !
Mon Dieu, je ne sais
pas si je vaincrai, je ne sais pas si je résisterai à tant de
souffrance. Je veux Vous voir aimé de tous ; je ne veux pas Vous
savoir offensé. Je ne peux pas supporter de Vous voir souffrir.
Ô péché, triste péché,
combien tu blesses Jésus ! Ô Amour, ô Amour, quelle sorte de
caresses
avez-Vous prêtes à m’offrir ? Je les attends, je les pressens. J’ai
peur. Si elles me blessent beaucoup, je Vous aimerai toujours. Plus
grande sera la douleur, avec Votre grâce, plus grand sera mon amour.
Ô Ciel, aide-moi, viens à mon secours !
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