Dans l’Autobiographie d’Alexandrina,
nous trouvons un long passage où elle parle longuement de son médecin traitant,
le docteur Manuel Augusto Dias de Azevedo.
Leur première rencontre eut lieu le
29 janvier 1941, d’une façon imprévue. En effet, accompagné d’un prêtre et
de
plusieurs autres personnes il rendit visite, ce jour-là à la “Petite malade de Balasar”.
Elle dit, en effet, que ce ne fut
qu’un long moment après leur arrivée et de conversation “qu’elle apprit que
parmi eux se trouvait un médecin”, ce qui la rendit un peu gênée, non point
qu’elle “ait dit quelque mensonge au sujet de sa souffrance”, mais plutôt
à cause de l’effet de surprise.
Cette visite n’est pas un fait du
hasard, mais une grâce divine, car ce bon médecin que Jésus lui-même surnommera
le “Bon Samaritain” deviendra non seulement le médecin traitant d’Alexandrina
mais aussi et surtout son défenseur lors des crises les plus graves dans la vie
de la Bienheureuse fille de Balasar.
A la fin de l’entretien il se
pencha sur elle, et “commença à l’examiner minutieusement, mais avec beaucoup
de prudence et de tendresse”, avoue la malade.
Non point pour satisfaire des
désirs personnels ou s’acquérir davantage de renommée, mais pour la défense
d’Alexandrina, le Dr. Azevedo va faire en sorte qu’elle soit examinée par un
certain nombre de grands spécialistes portugais de renom international. Elle
sera alors soumise à des examens délicats et difficiles, mais qui s’avèreront
par la suite d’une importance capitale, surtout en ce qui concerne son jeûne et
son anurie. Le certificat délivré par le Dr Gomes de Araujo, par exemple, fut
déterminant dans le procès de béatification.
Le Dr. Augusto de Azevedo sera l’un
des meilleurs témoins à avoir déposé lors du procès diocésain : son témoignage
est un exemple de sobriété, en même temps que de dévotion non dissimulée. En
effet, s’il est vrai qu’il a beaucoup donné, il a aussi beaucoup reçu
d’Alexandrina ou par son intercession.
* * * * *
« Le 29 janvier 1941, j’ai reçu la
visite d’un Prêtre connu, lequel était accompagné de plusieurs personnes de sa
paroisse. Dès son arrivée, il me les a présentées, mais ce n’est qu’après un
long moment de conversation que j’ai appris que parmi eux se trouvait un médecin.
Sachant cela, je me suis sentie gênée, non pas que j’ai menti, en parlant de ma
souffrance, mais tout simplement parce que je ne m’attendais pas à sa présence.
Il est toutefois resté discret et souriant. Je ne sais pas ce que je ressentais
pour lui au plus profond de moi. J’étais alors loin de penser qu’il deviendrait
dans quelques instants mon médecin traitant.
Il a commencé à m’examiner
minutieusement, mais avec beaucoup de prudence et de tendresse. Son examen
terminé, il lui a paru judicieux d’inviter le Dr Abel Pacheco, jusqu’alors mon
médecin traitant, afin de l’informer de son diagnostique. Cela m’a peinée, car
j’en avais assez d’examens médicaux, mais j’ai cédé, ayant toujours en vue la
volonté de Notre Seigneur et le bien des âmes.
Le premier mai de la même année
j’ai été examinée par le docteur Pacheco. L’examen a duré peu de minutes, mais
il a été la cause de grandes souffrances pour mon corps et pour mon âme : pour
le corps parce que ses mains semblaient de fer ; pour l’âme parce que je
ressentais déjà les humiliations et les résultats de cet examen. Malgré cela,
j’étais encore loin d’en voir le bout ! J’ai été informée par le docteur Dias de
Azevedo qu’il serait mieux que je retourne à Porto afin de consulter le docteur
Gomes de Araujo, si telle était la volonté de Notre Seigneur .
Il m’a suggéré de demander la lumière divine e, car il ne voulait en rien
contrarier le Seigneur.
Pendant un mois j’ai prié pour
savoir si c’était bien là la volonté de Dieu. Plus je demandais de la lumière et
plus les ténèbres augmentaient et plus profonde devenait la souffrance de l’âme,
car je ne savais pas quoi faire. Finalement, le Seigneur m’a dit que c’était sa
divine volonté que je parte à Porto.
Mon état physique était assez
grave. Ils craignaient de me sortir de mon lit pour un aussi grand voyage.
Moi-même je craignais beaucoup : si, rien que le fait de me toucher était cause
de grandes souffrances, comment pouvais-je aller aussi loin ?... Encouragée par
les paroles de Notre Seigneur, j’avais confiance en lui et sous sa divine action,
je me suis préparée pour partir à l’aube du 15 juillet 1941.
À quatre heures, j’avais déjà fait
mes prières. Pour montrer que j’en étais contente, j’ai appelé ma sœur pour lui
dire que “nous allions en ville” : rien que pour cacher ma douleur.
Pendant que je lui disais cela, j’ai entendu la voiture qui arrivait chez nous.
Le docteur Dias de Azevedo et un
monsieur de nos amis sont
entrés dans ma chambre. Après une courte conversation, pendant que ma sœur
s’habillait, nous nous sommes préparés pour partir. Nous avons pris la route à
4,30 heures, afin de ne pas alarmer la population ; il faisait encore nuit. En
effet, nous sommes sortis du pays sans rencontrer personne.
Mon âme était encore ans dans un
plus grand silence ! Plongée dans un abîme de tristesse, sans interrompre mon
intime union avec Jésus, je voyageais Lui demandant toujours davantage de
courage pour les examens qui m’attendaient et en offrant mon sacrifice afin
d’avoir son divin Amour et pour les âmes. J’invoquais aussi la Maman du Ciel et
les saints qui m’étaient les plus chers. Rien ne m’attirait et, tout ce que je
voyais me causait une profonde tristesse. De temps à autre ils interrompaient
mon silence pour me demander si j’allais bien ; je les en remerciais sans même
sortir de l’abîme dans lequel j’étais plongée. Il faisait jour déjà quand nous
sommes arrivés à Trofa, chez la personne qui nous accompagnait : là je devais me
reposer et recevoir mon Jésus, en attendant de repartir pour Porto. Avant de
reprendre le voyage, j’ai été portée dans le jardin de monsieur Sampaio et,
soutenue par l’action divine, je me suis approchée de quelques petites fleurs
que j’ai cueillies en pensant : « — Le Seigneur, quand Il les a créées, savait
déjà qu’aujourd’hui je serais venue les cueillir. » Ensuite j’ai été
photographiée à deux endroits différents et, de l’un à l’autre, je me suis
déplacée toute seule, ce qui n’était plus jamais arrivé depuis que j’avais pris
le lit ,
de la même façon que plus jamais je ne m’étais retournée dans mon lit sans aide
de quelqu’un. Ce fut un miracle divin, car sans lui, je n’aurais pas pu le
faire.
Nous avons repris le voyage : mon
âme souffrait horriblement. À six kilomètres de Porto, Notre Seigneur a retiré
son action divine. J’ai commencé à ressentir les habituelles souffrances
physiques qui m’ont tourmentée jusqu’à la fin du voyage. J’ai dit alors, non pas
parce que je connaissais la distance, mais parce que mon état me l’a fait dire :
« — Nous sommes déjà proches de Porto. » Quelqu’un a répondu : « — Nous
arrivons, nous arrivons ! » En effet, j’avais pu voir qu’il ne manquait plus que
six kilomètres.
La sortie en voiture vers le
cabinet a été douloureuse, autrement dit : martyre pour le corps, agonie pour
l’âme; il me semblait que j’allais mourir.
Avant d’entrer dans la salle des
consultations, j’ai dit à celui qui me portait dans ses bras : « — Posez-moi,
posez-moi, même si c’est sur le carrelage ! » À ce même moment le médecin est
arrivé et il me fit coucher sur un brancard, où je suis restée en attendant la
visite. Quelques instants avant que je ne rentre dans le cabinet, Jésus m’a
libérée de l’agonie de l’âme, ne me laissant que les souffrances physiques, afin
que je puisse mieux résister.
L’examen a été assez long et
douloureux. Pendant que je me déshabillais, quelqu’un m’a dit de ne pas
m’affliger. Moi, me souvenant ce que l’on avait fait à Jésus, j’ai dit : « — Même
Jésus a été déshabillé. » Et je n’ai pensé à rien d’autre. Le docteur Gomes de
Araujo, même si un peu brusque, a été prudent et attentionné.
Pendant le retour à la maison,
Jésus a exercé sur moi son action divine, afin que je résiste au voyage, mais il
m’a laissée de nouveau l’âme angoissée. Arrivés à Ribeirão je suis allée me
reposer chez le docteur Azevedo afin d’attendre la nuit et de pouvoir rentrer au
village sans que nul ne s’en rende compte.
Que ce soit dans l’une comme dans
l’autre maison, j’ai été traitée avec beaucoup d’attentions, mais nul ne
parvenait à me réconforter, alors même que je souriais pour cacher le plus
possible ma douleur. Il faisait déjà nuit quand nous avons repris le voyage.
Tout m’invitait à un silence de plus en plus profond. J’étais indifférente à
tout. Pendant le trajet, je n’ai rien vu d’autre que les fleurs du jardin de
Famalicão parce que quelqu’un me les avaient signalées. Nous sommes arrivés à la
maison à minuit, obtenant ainsi, que personne ne se soit rendu compte de notre
absence.
Après ce voyage, mes souffrances
physiques ont assez augmenté. Tout ce que je devais souffrir le jour du voyage,
Notre Seigneur me l’a gardé pour le lendemain, allant de plus en plus mal. »
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