Alors qu’elle n’a que neuf ans,
Alexandrina — avec sa sœur Deolinda et une de leurs cousines — va, dans le
village voisin, Gondifelos, pour se confesser — ce sera sa première confession
générale ! — et écouter le sermon de frère Manuel das Chagas, un franciscain qui
sa vie durant a prêché plus de 8 000 sermons.
Il était aussi un confesseur très recherché à cause de ses bons et judicieux conseils.
Il est permis de penser qu’il ne
s’agit pas là d’une coïncidence fortuite, mais d’une “indication” divine, car la
bienheureuse fille de Balasar gardera de cette journée un souvenir permanent. En
effet, elle en parle dans son Autobiographie et nous fait partager ses
sentiments d’alors qui frisent l’humour et démontrent la candeur de son âme.
Désireuses de se trouver une bonne
place dans l’église, “elles-mêmes ne sont pas sorties de l’église pour aller
jouer”, et dès que l’heure d’écouter la parole divine s’est approchée,
“elles ont pris place tout près de l'autel du Sacré-Cœur de Jésus”.
Alexandrina prit soin de bien ranger ses sabots tout neufs “à l'intérieur de
la balustrade” du dit autel.
|
Frère Manuel das Chagas, franciscain |
Frère Manuel das Chagas va parler
de l’enfer à ses auditeurs et, pour mieux les captiver et obtenir leur attention,
il leur propose d’aller en esprit dans le lieu des peines éternelles.
Ne comprenant pas très bien ce que
le franciscain voulait dire pas cette expression, aussitôt elle reprit ses
sabots et, toute tremblante, elle se dit à elle-même : “En enfer, moi je
n'irai pas !”. Et, elle était prête à s’enfuir au premier signe de départ
pour l’enfer… Mais, bien entendu, personne ne bougea ni ne se précipita pour ce
périlleux “voyage”, “ alors je me suis un peu calmée...” écrit-elle.
Mais, précautionneuse, ne sachant
pas ce qui pourrait arriver, “mes sabots, je ne les ai plus quitté des yeux...”,
avoue-t-elle.
Ce “pèlerinage” particulier à
Gondifelos nous permet de situer sa première approche du Sacré-Cœur, par sa
présence auprès de l’autel qui arbore fièrement sa statue qui le représente et
qui peut encore être admirée de nos jours dans l’église dudit village.
* * * * *
« À l’âge de neuf ans, j’ai fait ma
première confession générale à frère Manuel das Santas Chagas qui prêchait à
Gondifelos. Moi, Deolinda et ma cousine Olívia, ayant pris quelques victuailles,
nous y sommes allées, et nous y sommes restées toute l’après-midi pour écouter
le sermon. Je me souviens que nous ne sommes même pas sorties de l’église pour
aller jouer. Nous avons pris place tout près de l'autel du Sacré-Cœur de Jésus,
j'ai placé mes sabots à l'intérieur de la balustrade.
Le sermon avait pour sujet l’enfer.
J'ai écouté avec beaucoup
d'attention le prédicateur qui, à un certain moment, nous invita à nous
transporter, par la pensée, en ce lieu. Incapable de comprendre le vrai sens de
cette invitation et, persuadée que le Père était un saint, je suis restée
convaincue, que d'un moment à l'autre, il nous y amènerait. Placée en face de
cette conjecture, je me suis révoltée et me dis à moi-même: “En enfer, moi je
n'irai pas ! Si le Père et tous les autres veulent y aller, moi, je prends mes
jambes à mon coup et je m'échappe promptement”.
Et, sans plus attendre, j'ai
ramassé mes sabots afin d'être prête à fuir à la première alerte. Quand j'ai
remarqué que personne ne bougeait, alors je me suis un peu calmée... Mais, mes
sabots, je ne les ai plus quitté des yeux... »
|