Mais, alors que tout paraissait
indiquer sa mort imminent, la voilà livrée, pendant trois mois, à des luttes
terribles avec les démons.
Depuis longtemps, ils
l’assaillaient par des menaces, des fantômes, des voix, des suggestions de
blasphème et des paroles grossières; mais, jamais ils ne l’avaient touchée
au corps. Maintenant, après avoir, bien souvent, menacé de la détruire, ils
arrivèrent à cette extrémité et d’une façon indescriptible.
Pas une heure ne se passait,
dans la journée, sans que la pauvre victime ne fût tourmentée par eux. Les
assauts devenaient plus violents de midi à quinze heures et à partir de
vingt et une heures. Elle était alors atteinte, non seulement d’obsession,
mais aussi, parfois, de possession diabolique.
J’assistai moi-même à
quelques-unes de ces attaques. Par exemple, le sept octobre 1937. J’ai pu
voir et entendre cette paralytique épuisée par les souffrances et ne pesant
que trente-trois kilos, se débattre violemment, tenter de casser les fers de
son lit, se mordre. A ces occasions là, quatre hommes, même costauds,
n’arrivaient pas à l’immobiliser. Pendant ces luttes, je l’ai entendu
prononcer des blasphèmes et des paroles inconvenantes dont elle ignorait le
sens, selon sa propre déclaration.
Dans un de ces moments, j’interrogeai
le démon, lui demandant, en latin, qui il était. Il me répondit
immédiatement :
— Je suis Satan et je te
haïs!
Afin de m’assurer, absolument,
je tournai la phrase, l’interrogeant encore en latin. La réponse fut sans
équivoque :
— Oui, c’est moi, Satan,
n’en doute pas !
Je me souviens que ce jour-là,
je célébrai la Messe dans sa chambre, et je l’offris, sans l’avoir prévenue,
pour elle, pour obtenir de Notre-Seigneur, la
fin de ces vexations diaboliques.
A la fin de la Messe, je
m’approchai de son lit, alors elle me dit :
— Notre Seigneur m’a dit
qu’il ne peut pas accorder ce que vous lui avez demandé, mon Père, parce
qu’il a besoin de ces souffrances pour la conversion des pécheurs...
Alors, je l’interrogeai :
— Mais, qu’ai-je demandé à
Notre-Seigneur ?
Elle me répondit de suite :
— Naturellement de me
libérer de ces attaques du démon...
— Et vous ne voulez pas que je
le prie de changer cette souffrance en une autre ?
— Non, mon Père, priez-le
plutôt afin que sa très sainte volonté soit faite.
Voyons, maintenant, ce qu’elle
dit dans ses lettres, au sujet de ces combats. Par exemple celle du 30 août
1937 :
« Les horribles attaques que
vous connaissez, mon Père, se sont répétés ; tout particulièrement
celle survenue dans la nuit qui suivit votre départ. O mon Jésus, quelle
chose effroyable ! Et le maudit me disait : “Toi qui commets
tant de crimes, tu veux te faire passer par une bonne personne, par une
innocente. C’est le prix de tout ce que tu racontes à cet espèce de
baratineur” (le directeur spirituel). Il me disait d’autres choses
semblables. Puis, il me précipita en bas du lit, mais mon cher Jésus ne m’a
pas abandonné ; il est venu a mon aide.
Avant même que je n’entende
sa voix, je ressentais une très grande paix. Il m’a parlé ainsi :
— Qui pourrait te donner
cette paix que je te fais ressentir ? Courage ; la victoire
t’appartient ! Rassure-toi, car je ne permettrai pas que tu
m’offenses. Je ne veux pas te délivrer de ces horribles combats, car j’en
retire beaucoup de réparation pour moi-même et des trésors de grâce pour les
pauvres pécheurs. Repose-toi dans mon Cœur. Les bons anges te défendront des
mauvais. Reçois, mon ange, les caresses de ton Jésus... »
« Si je suis encore de ce
monde, lorsque je vous rencontrerai de nouveau, je vous expliquerai mieux
tout cela. Vers minuit, j’ai été libérée du maudit. Quelles heures
terribles! Mon cher Jésus me dit, et vous aussi, mon Père, en qui j’ai toute
confiance, que je n’offense pas Notre Seigneur, alors que j’étais convaincue
du contraire. Je pensais que dans de telles circonstances il était
impossible de ne pas l’offenser ».
Après de telles luttes, son
corps restait meurtri, et son âme dans les plus épaisses ténèbres; mais le
plus souvent, après ces combats, Notre-Seigneur
revenait pour la réconforter, l’encourager et lui rendre la paix que le
démon lui avait volée par ses suggestions infernales. Jésus lui parlait
alors avec une immense tendresse et avec des termes divinement délicats.
C’est qui ressort de la lettre
du 24 septembre 1937.
« Dans la nuit du 16 — après un
nouveau et terrible combat — Notre-Seigneur m’a
parlé ainsi :
— Ma fille, je t’ai prise
dans mes bras, pour te défendre; et je le ferai à chaque fois qu’il sera
nécessaire. Je te défendrai toujours. J’ai accepté l’offrande; je l’ai prise
à la lettre; ainsi, tu es toute à moi. La simplicité avec laquelle tu t’es
offerte, m’a beaucoup consolé. Je t’ai choisie dès le sein de ta mère, afin
qu’après, et cela est vite arrivé, je puisse t’appeler mon épouse. Moi et ma
très sainte Mère, nous te regardons avec prédilection et t’avons protégée
pendant que tu marchais sur les chemins périlleux et terribles que tu as dû
parcourir. C’est moi qui te les ai choisi afin que tu puisses devenir une
victime réparatrice. Repose-toi dans mon Cœur où tu trouveras toujours :
Lumière pour te guider,
Force pour résister
Et amour pour souffrir.
Ma fille, aie pitié de ton
Jésus !...
Ne t’endors pas; répare pour tant de péchés que l’on commet à cette heure...
Teins-moi compagnie dans mes Tabernacles. Je suis si seul !...
Le 17 — après une lutte —, Il
me parla ainsi :
— Courage, ma fille, ne
t’attriste pas, ne te désole pas un seul instant, il se sentirait encouragé,
vu que les démons ne peuvent rien espéré d’autre de toi. Je ne permettrai
pas qu’ils arrivent à faire en sorte que tu m’offenses. Avec moi tu
vaincras. Aie confiance en moi. Si je permets que tu souffres de la sorte,
c’est parce que je t’aime. Je veux te donner au Ciel une haute place, très
haute place…
Copions encore de la lettre du
2 octobre 1937 ce qu’elle dis, et qui est très caractéristique :
Le 1er octobre Notre
Seigneur me dit :
— Ma bien-aimée Alexandrina,
viens : écoute ton Jésus qui vient à toi pour t’encourager, pour te
fortifier. Ne t’afflige pas ; ne crois pas, ma chère enfant, que tu
m’offenses… Tu devins belle, de plus en plus belle, pure, de plus en plus
pure. Tu es ma bien-aimée, de plus en plus ma bien-aimée. Ma fille, combien
je t’aime… Que ton Père spirituel le comprenne et qu’il te l’explique. Que
le comprenne qui de droit peut le comprendre. Ils peuvent se faire une idée,
une grande idée de combien je t’aime ! Quel amour sublime ! Une pareille
souffrance, après tout ce que tu endures en plus, consume de plus en plus
ton corps si frêle ! Vous pouvez ainsi vous faire une idée du prix que
j’attache aux âmes des pécheurs, me servant d’une pareille souffrance pour
les attirer. Je n’en méprise aucun ; je veux les sauver tous. Je suis ; j’ai
donné tout mon sang ; mais cela ne suffit pas : j’ai besoin de tes
souffrances (c’est le adimpleo
quæ desunt
Passioni Christi
de saint Paul) afin que tu m’aides. Reçois, ma fille mes caresses et
repose-toi entre mon très saint Cœur et celui de la Petite Maman du Ciel
qui, à côté de toi, regarde avec tendresse ta souffrance, heureuse de voir
la gloire que tu me procures, les pécheurs que tu me sauves, et ce qui au
Ciel est préparé pour toi. Associe-toi aux Anges et loue-moi avec eux, dans
mon Eucharistie.
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