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Notre charité doit toujours être réchauffée…
"Avent" ne signifie pas que
nous sommes “avant Noël”, erreur qu'on entend ici ou là dans les
réunions de catéchisme. “Avent” vient du latin “adventus”,
arrivée. Jésus vient, il va naître, il va nous apporter son message.
“Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur” (psaume 117),
chantons-nous à la Messe, peu avant la Consécration, l'Incarnation
quotidienne de Jésus.
Une caractéristique liturgique
de l'Avent est que le prêtre revêt un ornement de couleur violette ; une
couleur un peu sombre qui évoque la patiente, souvent douloureuse attente de
tous les patriarches, de tous les prophètes, de tout le peuple d'Israël, à
qui Dieu avait annoncé “la” promesse d'un Sauveur. En signe de cette
longue attente de tout l'Israël, marquée par tant d'épreuves diverses, on ne
chantera pas non plus le “Gloire à Dieu” : ce chant joyeux des Anges
reviendra dans la nuit de Noël.
En cette nouvelle année
liturgique, l'Église nous propose la lecture particulière de l'évangile de
saint Matthieu. Cet apôtre a voulu montrer dans son écrit comment les
Écritures se sont accomplies avec la venue de Jésus.
On s'étonnera sans doute que
l'évangile soit extrait d'un des derniers chapitres de Matthieu, qui plus
est, ce passage évoque le retour final de Jésus-Christ. En réalité, si nous
n'évoquions que sa venue il y a deux mille ans, nous nous en tiendrions à
une simple commémoration du passé, stérile, tandis que nous devons
renouveler chaque année l'accueil que nous devons à notre Sauveur, Le faire
entrer dans notre maison, dans notre vie, dans notre cœur, dans notre cité.
Nous devrions renouveler cet accueil à chaque instant, et cette période est
propice à nous le rappeler.
En même temps, la venue du
Seigneur a aussi ― et surtout ― sa valeur pour tous les hommes de tous les
temps, quand le Seigneur viendra rassembler près de lui tous les justes,
pour la vie éternelle. C'est pourquoi il y a un lien très fort entre la fête
du Christ-Roi de dimanche dernier, et ce premier dimanche de l'Avent.
Reste que notre Maître nous
rappelle instamment : Tenez-vous prêts ! Et saint Paul, aux chrétiens de
Rome : Rejetons les activités des ténèbres ! Ripailles, beuveries, orgies,
débauches, dispute, jalousie... C'est qu'il y en avait, dans cette Rome du
premier siècle, des débauches de toutes sortes ! Mais... les temps ont-ils
beaucoup changé ?
Revenons maintenant à la
prophétie d'Isaïe, qui vivait huit siècles avant la naissance de Jésus.
C'est le Prophète de l'Annonce par excellence, qui a prophétisé l'Emmanuel,
l'Agneau innocent immolé, le Royaume nouveau, la Terre nouvelle. Dans
l'extrait d'aujourd'hui, il évoque la colline où sera Jérusalem et son
temple, le but du pèlerinage des enfants d'Israël, là où ils se
retrouveront, là où Jésus accompagnera ses parents et où il consommera son
sacrifice. Mystiquement, l'Église sera à son tour notre Jérusalem.
Ceux qui cherchent dans la
vérité de leur cœur à vivre selon l'enseignement de Dieu, qu'ils auront
entendu dans le Temple ― et maintenant dans l'Église ― ceux-là se
convertiront, seront des artisans de paix, transformeront leurs épées en
socs de charrue, et ne songeront plus à la guerre. Ils rejetteront les
ténèbres.
Une telle conversion profonde
donne une grand joie, parce qu'on sent combien notre âme est délivrée des
liens de la terre. Cette joie est exprimée dans ce psaume 121, qui chante
les sentiments des pèlerins en marche vers Jérusalem : « Quelle joie,
quand on m'a dit “Nous irons à la maison du Seigneur” », à Jérusalem, là
où montent les tribus, où l'on rend grâce, où l'on vit en paix.
Il faut vivre intensément cette
conversion. Quand le prêtre dit d'échanger un signe de paix, il faut que ce
signe de paix évoque vraiment autant notre conversion que notre amour des
frères, pour que notre communion soit préparée dans l'authenticité. Sinon,
nous refaisons des rites morts et nous nous endurcissons.
Notre charité doit toujours
être réchauffée, parce que c'est ainsi que le Seigneur peut “venir parmi
nous”.
Abbé Charles Marie de Roussy
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