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C’est le
rôle du pasteur, de réchauffer sans cesse le cœur des
fidèles
Après la
prophétie de Jérémie de dimanche dernier, nous lisons
aujourd’hui celle de Baruch. Ces deux écrits s’inscrivent
dans le même contexte historique de la prise et de la
destruction de Jérusalem, six siècles avant le Christ, de
l’exil des Juifs à Babylone et enfin de leur retour.
Au moment
de l’exil, Jérusalem est comparée à une veuve, qui a perdu
tous ses enfants ; maintenant elle doit reprendre la parure
de la gloire de Dieu, le manteau de la justice de Dieu. Elle
doit se tenir “sur la hauteur”, et redevenir le point de
rencontre des enfants d’Israël, “de l’orient à l’occident”.
L’Auteur sacré reprend les expressions du prophète Isaïe,
qui annonçait que “toute vallée doit être comblée, toute
montagne et toute colline abaissées” (Is 40:4 ; cf. 2e
dimanche de l’Avent-année B, et infra).
Ces
épisodes historiques apparaissent aussi dans le psaume 125,
un psaume qui est souvent repris dans la liturgie pour
évoquer la souffrance des martyrs. Ainsi, l’exil d’Israël
sert à évoquer l’exil où nous vivons dans le monde, les
souffrances que nous endurons et en particulier celles de
tous les martyrs, pour aboutir enfin au “retour” à la Maison
de Dieu, la véritable Jérusalem, la Jérusalem céleste et
éternelle.
Dans
cette marche vers l’Eternité, l’apôtre Paul exhorte les
chrétiens de Philippes, cette ville de Macédoine où il avait
annoncé l’évangile en 50-52 (et aujourd’hui disparue). Ici
encore, Paul montre toute l’affection, la “tendresse”,
dit-il, qu’il nourrit envers ces chers frères ; il les sait
fidèles, convaincus, mais il les exhorte encore - et il
exhorte chacun de nous aussi - à grandir dans l’amour, à
progresser dans la connaissance vraie et la parfaite
clairvoyance, c’est-à-dire à s’ouvrir davantage encore à
l’Esprit de Dieu qui, en leur communiquant ses Dons, les
aidera à parvenir à la “plénitude de la justice”, à la
sainteté en Dieu.
C’est le
rôle du pasteur, de réchauffer sans cesse le cœur des
fidèles, parce que la faiblesse humaine est toujours là,
avec ses faux arguments de bien-être, de facilité, pour nous
éloigner de la ferveur de la charité. Saint Paul s’efforce
toujours de reconduire l’attention de tous les fidèles aux
valeurs premières, essentielles. Un bon pasteur, tel un
saint Curé d’Ars, doit toujours revenir à la charge — en
donnant d’abord l’exemple — pour convaincre ses ouailles et
les aider à s’approcher encore plus de Dieu.
La
prédication de Paul a prolongé l’annonce de l’évangile par
Jésus-Christ. Quelques années avant Jésus, c’est
Jean-Baptiste qui prêchait “dans le désert”, non pas
vraiment dans la solitude désertique, mais loin du bruit de
la ville, de sorte que ceux qui venaient à lui n’entendaient
vraiment que la parole de Jean, inspirée de Dieu. Et Jean
reprend à son tour la prophétie d’Isaïe dont on parlait plus
haut : “Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute
colline seront abaissées”. En clair, tout ce qui est
tortueux en nous, dévié, notre orgueil qui nous élève, nos
défauts qui nous abaissent, doivent être nivelés pour
laisser une route plane aux pas de Jésus-Christ en notre
cœur. Jean-Baptiste ne dit rien de nouveau : il répète le
même message fondamental des Prophètes précédents.
L’évangéliste Luc y ajoute une note historique bien précise,
difficile à mettre en doute, en citant tous les responsables
religieux et politiques du moment. Le nord de la Palestine
était une région divisée par les Romains en quatre (tetra)
parties, avec à leur tête un tétrarque, sorte de roitelet.
Galilée, Iturée, Trachonitide, Abilène étaient ces quatre
provinces autour du lac de Gennésareth.
On le
verra souvent, saint Luc travaille en véritable historien,
qui aime se documenter à la source, préciser les références
historiques, les dates, les faits exacts.
Ces
détails historiques sont là pour nous aider à recevoir le
message évangélique avec la certitude qu’il n’a pas été
inventé : Jésus est bien venu sur terre, annoncé par tous
les prophètes jusqu’à Jean-Baptiste, prêché ensuite par tous
les apôtres. Un message unique, authentique, stable et
pérenne, qui exige de nous une adhésion totale.
Acceptons
de nous interroger, de regarder en nous nos “montagnes et
collines”, travaillons à raser ces défauts qui défigurent en
nous l’image de la bonté de notre Créateur. Pour être de
vrais Chrétiens, nous devons chaque matin recommencer notre
vie avec un cœur nouveau.
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