Benoîte
Rencurel
voyante du Laus
1647-1718
EXTRAIT BIOGRAPHIQUE
«Le
péché du vingtième siècle est la perte du sens du péché», déclarait le
Pape Pie XII, le 26
octobre 1946. Un demi-siècle plus tard, la crise du
sacrement de Pénitence, délaissé par tant de catholiques, montre que ce
jugement du Pape reste d'une grande actualité. Pourtant, «aux yeux de la
foi, aucun mal n'est plus grave que le péché et rien n'a de pires
conséquences pour les pécheurs eux-mêmes, pour l'Église et pour le monde
entier» (Catéchisme de l'Église Catholique, CEC 1488).
Notre époque n'est pas la première à traverser une crise du sacrement de
Pénitence. La Très Sainte Vierge Marie a souvent été la messagère de
Dieu auprès des hommes pour les détourner du péché et les ramener à
l'amour de leur Créateur. Au cours des derniers siècles, elle est
intervenue à plusieurs reprises, notamment à La Salette, Lourdes et
Fatima; mais auparavant, elle avait daigné se manifester à une pauvre
fille des Alpes, Benoîte Rencurel.
Le 16 septembre
1647, Benoîte Rencurel vient au monde dans la petite commune de
Saint-Etienne d'Avançon (Alpes du Sud). Ses parents sont de bons
catholiques, vivant modestement du travail de leurs mains. À la
naissance de Benoîte, ils ont déjà une fille, Madeleine; une troisième,
Marie, naîtra quatre ans plus tard. Le père, Guillaume Rencurel, meurt
alors que Benoîte, pleine de vie et de gaieté, a sept ans. Pour la veuve
et ses trois filles, cette disparition entraîne la misère matérielle. Il
n'y a pas d'école à Saint-Etienne d'Avançon; aussi Benoîte ne
saura-t-elle jamais lire ni écrire. Sa seule instruction vient du sermon
de la Messe dominicale; elle y apprend que Marie est la toute
miséricordieuse Mère de Dieu, ce qui éveille en elle le désir de la
voir. Benoîte, âme contemplative, aime à prier longuement.
«Je
m'appelle Dame Marie»
Un jour de mai 1664,
la jeune fille, qui est employée comme bergère chez les paysans des
environs, garde les brebis dans un vallon dont les pentes sont percées
de failles ressemblant à des grottes peu profondes. Benoîte récite son
chapelet lorsqu'elle aperçoit une belle Dame sur une roche, tenant par
la main un enfant d'une beauté singulière. «Belle Dame! lui dit-elle,
que faites-vous là-haut? Voudriez-vous goûter avec moi? J'ai un peu de
bon pain, nous tremperions dans la fontaine!» La Dame sourit de sa
simplicité, et ne lui dit mot. «Belle Dame! Vous plairait-il de nous
donner cet enfant, qui nous réjouirait tant?» La Dame sourit encore sans
répondre. Après être demeurée quelque temps avec Benoîte, elle prend son
enfant dans ses bras et disparaît dans l'antre du rocher, où la bergère
l'a vue plusieurs fois entrer et sortir.
Quatre mois durant,
la Dame se fait voir chaque jour, conversant très familièrement avec la
jeune fille. Pour la préparer à sa mission future, elle l'éduque,
corrigeant sa vivacité et sa brusquerie, son entêtement et son
attachement aux choses et aux animaux. Benoîte raconte ses visions à sa
patronne, qui d'abord ne la croit pas, mais qui, un beau matin, la suit
secrètement au vallon des Fours. Là, elle ne voit pas la Dame, mais elle
entend les paroles que celle-ci adresse à Benoîte. Or, l'apparition
demande à la bergère d'avertir sa patronne des dangers que court son
âme: «Sa conscience est en mauvais état. Qu'elle fasse pénitence!»
Touchée, celle-ci se corrige, se remet à fréquenter les sacrements et
vit le reste de ses jours très chrétiennement. Le 29 août, Benoîte
demande à la visiteuse son nom, et s'entend répondre: «Je m'appelle Dame
Marie». Mais en même temps, la Vierge lui annonce que les apparitions
cesseront pendant un temps indéterminé. De fait, Benoîte passe un mois
sans voir la Dame; cette absence, en la privant des consolations
sensibles, contribue à purifier son âme.
Enfin un matin, à la
fin de septembre, la bergère, qui a arrêté ses moutons et ses chèvres au
bord d'une rivière, aperçoit, face à elle, éclatante comme un beau
soleil, Dame Marie. Elle se hâte de la rejoindre. Mais le vieux pont de
bois qui franchit la rivière est brisé. Elle passe le cours d'eau en
montant sur le dos d'une grosse chèvre. Arrivée près de l'apparition,
elle demande: «Ma bonne Dame, d'où vient que vous m'avez privée si
longtemps de l'honneur de vous voir? – Désormais, quand vous voudrez me
voir, vous le pourrez dans la chapelle qui est au lieu du Laus», répond
la Dame, en lui indiquant le chemin à suivre. Le lendemain, Benoîte se
rend au hameau du Laus et arrive à la petite chapelle. Elle entre
aussitôt et voit sur l'autel la Vierge Marie qui la félicite d'avoir
bien cherché sans s'être impatientée. Ravie de revoir Notre-Dame,
Benoîte est confuse de constater la pauvreté et la malpropreté du lieu;
elle propose de couper son tablier en deux, afin de mettre une nappe
sous ses pieds. La Dame lui répond que dans peu de temps, il n'y
manquera rien: elle y verra linges, cierges et autres ornements; elle
ajoute qu'elle veut faire bâtir une église en son honneur et en celui de
son très cher Fils; beaucoup de pécheurs et de pécheresses s'y
convertiront. Pendant l'hiver 1664-1665, Benoîte monte au Laus très
souvent; chaque jour, elle voit la Vierge qui lui recommande «de prier
continuellement pour les pécheurs». Notre-Dame nous donne à entendre par
là que les pécheurs se trouvent dans un état pitoyable. Dieu est offensé
par leurs fautes, mais Il veut leur prodiguer sa miséricorde, qui ne
peut être acceptée que librement. La nouvelle des apparitions se propage
parmi les villageois, à la faveur des veillées, les soirs d'hiver. Dès
la Saint-Joseph (19 mars), les pèlerins accourent à Notre-Dame du Laus.
Beaucoup ont obtenu des grâces par son intercession; ils viennent pour
se confesser et prendre la résolution de changer de vie.
Le
médecin qui sonde la plaie
L'Évangile est la
révélation, en Jésus-Christ, de la miséricorde de Dieu pour les
pécheurs. Mais, si «Dieu nous a créés sans nous, Il n'a pas voulu nous
sauver sans nous» (Saint Augustin). L'accueil de la miséricorde divine
réclame de nous l'aveu de nos fautes. Si nous disons: «Nous n'avons
pas de péché», nous nous abusons, la vérité n'est pas en nous. Si nous
confessons nos péchés, Il est assez fidèle et juste pour remettre nos
péchés et nous purifier de toute injustice (1 Jn 1, 8-9) (cf. CEC
1846-1847). Cette confession des péchés est un effet de la grâce, car
Dieu, tel un médecin qui sonde la plaie avant de la panser, projette une
vive lumière sur le péché. «Reconnaître son péché, et même se
reconnaître pécheur, capable de péché et porté au péché, est le principe
indispensable du retour à Dieu. C'est l'expérience exemplaire de David
qui, après avoir fait ce qui est mal aux yeux du Seigneur,
réprimandé par le prophète Nathan, s'écrie: Oui, je connais mon
péché, ma faute est toujours devant moi. Contre Toi, et Toi seul, j'ai
péché; ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait» (Jean-Paul II,
Exhortation apostolique Reconciliatio et Pænitentia, 2 décembre
1984, n. 13).
Dieu a donné à
l'homme la liberté pour L'aimer et Le servir. Le péché, qui est un abus
de cette liberté, consiste en tout acte, parole ou désir contraire à la
loi de Dieu. Toutefois les péchés n'ont pas tous la même gravité. On
distingue péché mortel (ou grave) et péché véniel. Le péché véniel
refroidit l'amour de Dieu en nos coeurs sans nous priver de la vie de la
grâce.Le péché mortel, en tant qu'infraction grave à la loi de Dieu (par
exemple le blasphème, l'idolâtrie, l'irréligion, l'hérésie, le schisme,
le parjure, l'avortement, la contraception, l'adultère, la fornication),
détourne l'homme de son Créateur, auquel le pécheur préfère un bien
créé. Pour qu'un péché soit mortel, une matière grave ne suffit pas; il
est requis également que l'acte soit accompli avec pleine connaissance
et de propos délibéré. «Le péché mortel est une possibilité radicale de
la liberté humaine comme l'amour lui-même. Il entraîne la perte de la
charité et la privation de la grâce sanctifiante, c'est-à-dire de l'état
de grâce. S'il n'est pas racheté par le repentir et le pardon de Dieu,
il cause l'exclusion du Royaume du Christ et la mort éternelle de
l'enfer, notre liberté ayant le pouvoir de faire des choix pour
toujours, sans retour» (CEC 1861). L'Apôtre saint Jean décrivait
ainsi le sort de ceux qui meurent en état de péché mortel: Pour les
lâches, les incrédules, les dépravés, les meurtriers, les impudiques,
les magiciens, les idolâtres et tous les hommes de mensonge, leur part
est dans l'étang brûlant de feu et de soufre: c'est la seconde mort
(Ap 21, 8). Cette vérité prend d'autant plus de relief que, pour chaque
être humain, la mort est une certitude, et qu'après la mort, chacun de
nous sera jugé. Car il nous faudra tous apparaître à découvert devant
le tribunal du Christ, pour que chacun reçoive ce qu'il a mérité, soit
en bien soit en mal, pendant qu'il était dans son corps (2 Cor 5,
10). Or, après la mort il n'y aura plus de temps pour se convertir.
C'est donc maintenant qu'il faut faire pénitence. «Malheur à ceux qui
mourront dans les péchés mortels» (Saint François d'Assise).
Une
huile miraculeuse
En septembre 1665,
une enquête sur les apparitions du Laus est entreprise par le vicaire
général d'Embrun, Antoine Lambert. Celui-ci, après avoir achevé
l'interrogatoire de la voyante, célèbre la Messe. Ce matin-là, est
présente Catherine Vial, femme gravement atteinte d'une maladie nerveuse
à l'origine du repliement de ses jambes, en sorte que les talons
touchent le bas du dos. Ses parents ont tout essayé pour la guérir, mais
en vain. On a conduit la malade au Laus afin d'y faire une neuvaine à
Notre-Dame. Pendant la nuit qui suit la conclusion de la neuvaine, elle
peut étendre ses jambes et se sent guérie. Au matin, elle se fait porter
à la chapelle, alors que le vicaire général termine la Messe. On crie
tout haut «Miracle!» La Messe achevée, l'ecclésiastique interroge la
miraculée et les témoins, puis affirme: «Le doigt de Dieu est là».
Ainsi, le 18 septembre 1665, pour les dix-huit ans de Benoîte, les
apparitions et le pèlerinage sont officiellement reconnus par l'autorité
diocésaine et, dès l'automne de cette année, on commence la construction
d'une église assez grande pour accueillir les pèlerins, de plus en plus
nombreux.
Notre-Dame s'est
révélée au Laus comme la réconciliatrice et le refuge des pécheurs.
Aussi donne-t-elle des signes pour convaincre ceux-ci de la nécessité de
se convertir. Elle annonce alors à Benoîte que l'huile de la lampe de la
chapelle (qui brûle devant le Saint-Sacrement), opérera des guérisons
sur les malades qui s'en appliqueront, s'ils ont recours à son
intercession avec foi. De fait, de nombreuses guérisons sont
enregistrées en peu de temps: une enfant retrouve l'usage d'un oeil; une
personne est guérie d'un ulcère à la main. Encore de nos jours, des
miracles se produisent chez des personnes qui, confiantes en
l'intercession de Notre-Dame, se servent avec dévotion de l'huile du
Laus.
Une
planche de salut
Benoîte prend à
coeur la mission qu'elle a reçue de la Très Sainte Vierge: préparer les
pécheurs à recevoir le sacrement de Pénitence. Aussi, encourage-t-elle
souvent les deux prêtres qui sont affectés au sanctuaire à recevoir les
pèlerins avec douceur, patience et charité, usant d'une bonté
particulière à l'égard des plus grands pécheurs afin de les inciter au
repentir. «Le Christ a institué le sacrement de Pénitence pour tous les
membres pécheurs de son Église, avant tout pour ceux qui, après le
baptême, sont tombés dans le péché grave... C'est à eux que le sacrement
de Pénitence offre une nouvelle possibilité de se convertir et de
retrouver la grâce de la justification. Les Pères de l'Église présentent
ce sacrement comme «la seconde planche de salut après le naufrage qu'est
la perte de la grâce». Dieu seul pardonne les péchés. Parce que Jésus
est le Fils de Dieu, Il dit de Lui-même : Le Fils de l'Homme a le
pouvoir de remettre les péchés sur la terre et Il exerce ce pouvoir
divin : Tes péchés sont pardonnés! Plus encore : en vertu de sa
divine autorité, Il donne ce pouvoir aux hommes pour qu'ils l'exercent
en son nom» (CEC 1446, 1441). Dans ce sacrement, le prêtre, qui
tient la place du Christ juge et médecin, doit être informé sur l'état
du pénitent. Par conséquent, «il faut que le fidèle, outre la conscience
des péchés commis, la contrition et la volonté de ne plus retomber,
confesse ses péchés. En ce sens, le Concile de Trente déclarait qu'il
était nécessaire, «de droit divin, que l'on confesse tous et chacun des
péchés mortels»». (Jean-Paul II, Motu proprio Misericordia Dei, 7
avril 2002).
Cette obligation
n'est pas un poids imposé aux pénitents de manière arbitraire, mais un
moyen de libération pour retrouver la paix du coeur. Si, par le péché,
nous nous sommes détournés de notre Père du Ciel, le sacrement de
pénitence nous permet de revenir vers Lui, de nous jeter dans ses bras
miséricordieux. La confession est ainsi l'occasion de retrouvailles
amoureuses entre l'enfant et son Père. «Ce n'est pas le pécheur qui
revient à Dieu pour Lui demander pardon, mais c'est Dieu qui court après
le pécheur et qui le fait revenir à Lui», disait le saint Curé d'Ars.
«Pour recevoir le sacrement de pénitence, il faut trois choses, ajoutait
le même saint: la Foi qui nous découvre Dieu présent dans le prêtre,
l'Espérance qui nous fait croire que Dieu nous donnera la grâce du
pardon, la Charité qui nous porte à aimer Dieu, et qui met au coeur le
regret de L'avoir offensé». Benoîte encourage aussi les confesseurs à
avertir les pénitents de ne s'approcher de la Sainte Communion qu'après
une bonne confession, préparée par un examen de conscience à la lumière
des dix Commandements et du Sermon sur la Montagne. En effet, «celui qui
a conscience d'avoir commis un péché mortel ne doit pas recevoir la
Sainte Communion, même s'il éprouve une grande contrition, sans avoir
préalablement reçu l'absolution sacramentelle» (CEC 1457).
La tâche de Benoîte
n'est pas facile; la Vierge lui demande d'admonester les femmes et les
filles qui mènent une vie scandaleuse, allant parfois jusqu'à
l'infanticide, les gentilshommes injustes ou pervers, les prêtres et les
religieux infidèles à leurs engagements sacrés. Mais la voyante s'en
acquitte bien. Elle encourage les pénitents, avertit ceux qui n'osent
confesser leurs péchés, et les oriente vers un confesseur approprié. «En
célébrant le sacrement de la Pénitence, le prêtre accomplit le ministère
du Bon Pasteur qui cherche la brebis perdue, celui du Bon Samaritain qui
panse les blessures, du Père qui attend le fils prodigue et l'accueille
à son retour, du juste juge qui ne fait pas acception de personnes et
dont le jugement est à la fois juste et miséricordieux. Bref, le prêtre
est le signe et l'instrument de l'amour miséricordieux de Dieu envers le
pécheur» (CEC 1465). Surtout, Benoîte se sacrifie pour les
pécheurs et prie pendant qu'ils se confessent. Pour réparer leurs péchés
et leur obtenir des grâces, elle s'adonne à des pénitences sévères au
point de compromettre sa santé.
Un
temps propice pour se réconcilier
Cependant, tous ne
voient pas d'un bon oeil les événements du Laus; certains vont jusqu'à
attribuer les apparitions au démon. Aussi, une nouvelle enquête
diocésaine devient-elle nécessaire; elle convainc le nouveau vicaire
général, Jean Javelly, de la réalité des apparitions. À ceux qui se
plaignent que tout le monde s'en va au Laus, il répond: «Ce n'est pas
Benoîte qui fait perdre la dévotion (c'est-à-dire la pratique
religieuse) de notre Église, ce sont nos péchés qui en sont la cause:
par le peu de zèle et de soin que nous avons de la maintenir, la
dévotion est allée à l'extrémité du diocèse. Bien loin de l'en retirer,
ni de rien faire à cette bonne et sainte fille dont je connais la vertu,
nous devons prendre garde que la dévotion n'en sorte (du diocèse
d'Embrun), et concourir avec elle pour la conserver là, de peur que nous
la perdions tout à fait». Dans sa prière comme dans son apostolat,
Benoîte est sans cesse conseillée par Notre-Dame: «Courage, ma fille!
Prenez patience... faites de bon coeur votre tâche... ne portez aucune
haine aux ennemis du Laus». Son ange gardien l'instruit, lui aussi:
«Quand on est joyeux, tout ce qu'on fait est agréable à Dieu; quand on
se fâche, on ne fait rien qui Lui plaise».
Entre 1669 et 1679,
Benoîte est favorisée de cinq apparitions du Christ qui se révèle à elle
dans un état de souffrance. Un vendredi de juillet 1673, le Sauveur tout
ensanglanté lui dit: «Ma fille, je me fais voir en cet état afin que
vous participiez aux douleurs de ma Passion». Le Seigneur Jésus, en
effet, veut associer à son sacrifice rédempteur ceux-là même qui en sont
les premiers bénéficiaires (cf. CEC 618). Saint Pierre nous
avertit: Il a souffert pour nous, Il nous a tracé le chemin afin que
nous suivions ses pas (1 P 2, 21). Le temps de la Passion nous
rappelle que ce sont nos péchés qui ont fait subir à Notre-Seigneur le
supplice de la Croix. «À coup sûr, ceux qui se plongent dans les
désordres et dans le mal crucifient de nouveau dans leur coeur,
autant qu'il est en eux, le Fils de Dieu par leurs péchés et le couvrent
de confusion (He 6, 6)» (CEC 598). Mais, par sa mort, le
Christ nous libère du péché, et par sa Résurrection, Il nous ouvre
l'accès à une vie nouvelle. Ainsi, Pâques est-il un temps propice pour
recevoir le sacrement de Pénitence et se réconcilier avec Dieu.
«Elle est la cause que je perds tant d'âmes!»
À partir de 1684, le
pèlerinage du Laus connaît son plein essor. Des troupes, en garnison à
Gap, se rendent en masse au Laus. Les soldats, saisis par la grâce, se
confessent, changent de vie et deviennent des messagers du Laus, dans
toute la France et même à l'étranger. Cependant, à ce temps de réussite,
succède une période d'épreuves et d'obscurité. Benoîte subit de fortes
tentations contre la confiance en Dieu et la chasteté; le démon
l'attaque même physiquement, mais elle, se réfugiant dans la prière, ne
cède pas. L'esprit infernal révèle un jour le motif de ces attaques:
«Elle est la cause que je perds tant d'âmes», crie-t-il. Fin juillet
1692, Benoîte et les prêtres du Laus sont obligés de se réfugier à
Marseille pour fuir l'invasion des troupes du duc de Savoie qui
dévastent la région de Gap. La paix civile finit par se rétablir, mais
Benoîte continue à traverser des épreuves purificatrices. En effet, le
successeur de l'abbé Javelly, adversaire du pèlerinage du Laus, nomme
deux nouveaux responsables du sanctuaire qui ont peu de zèle pour le
soin des âmes, et fait publier en chaire que le Laus n'est qu'un abus. À
partir de 1700, on interdit à la bergère de parler aux pèlerins, et des
menaces pèsent sur sa réputation. Cependant, Benoîte n'est pas sans
consolations: elle reçoit souvent la visite de la Sainte Vierge et de
son bon Ange, qui la réconfortent. Enfin, en 1711, le pèlerinage est
confié à une nouvelle communauté, celle des «Pères gardistes». Ces
prêtres se révèlent être des hommes de prière qui inculquent aux
pèlerins du Laus la dévotion au Sacré-Coeur de Jésus et le recours à
Marie, refuge des pécheurs.
Après vingt ans de
calvaire, Benoîte peut de nouveau exercer sa mission dans la paix; une
foule de pèlerins vient à elle. Mais tant d'austérités et d'épreuves ont
eu raison de sa santé. Alitée depuis plus d'un mois, elle reçoit le
saint Viatique le jour de Noël 1718. Trois jours plus tard, elle se
confesse et reçoit l'Extrême-Onction, avec grande consolation. Vers huit
heures du soir, Benoîte dit adieu à ceux qui l'entourent, puis, ayant
baisé un crucifix, les yeux levés au Ciel, elle décède dans la paix et
va rejoindre au Ciel son Époux Jésus et sa Très Sainte Mère Marie. La
cause de béatification de la Servante de Dieu Benoîte Rencurel,
introduite en 1871, a récemment été reprise en main par le diocèse de
Gap. Après avoir été administré successivement par les Pères gardistes,
les Oblats de Marie Immaculée et les Missionnaires de Notre-Dame du Laus,
le sanctuaire est aujourd'hui confié au clergé diocésain, avec
l'assistance d'une communauté de Frères de Saint-Jean. Le sanctuaire du
Laus est un centre spirituel qui, fidèle à sa mission, accueille des
pèlerins venus se mettre sous la protection maternelle de Marie et
recevoir le sacrement du pardon.
Demandons à la Mère
de Miséricorde de renouveler chez les chrétiens l'estime et la
fréquentation de ce sacrement qui est un moyen privilégié, institué par
le Sauveur lui-même, pour recouvrer la grâce de Dieu et la paix de
l'âme.
Dom Antoine Marie osb, abbé
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