La
vie de ce saint religieux doit intéresser
particulièrement les Français, puisqu'il demeura longtemps dans
ce royaume et qu'il habita Paris pendant un assez grand nombre
d'années. Il naquit, en 1234, à Ascoli, dans la Marche d'Ancône.
Son père , appelé François Miliani, surnom que l'on donne
quelquefois à Conrad, était d'une famille noble, et sa mère,
Agnès Saladini, n'était point d'une condition inférieure à celle
de son époux. Leur fils annonça de bonne heure, par ses
heureuses dispositions ', qu'elle serait sa sainteté future. Il
parut même doué, dès son enfance, du don de prophétie ;
car il e’était dans l'habitude de se prosterner aux pieds d'un
jeune homme de son âge et de son pays, nommé Jérôme, qui, entré
depuis chez les Franciscains, gouverna cet ordre en qualité de
général et devint ensuite Pape, sous le nom de Nicolas IV.
Conrad, ayant lui-même embrassé dans sa ville natale l'institut
des frères Mineurs, reçut le doctorat à Pérouse, et vint
à Rome, où il se livra avec zèle à la prédication. .Quelque
temps après, il passa en Afrique, s'avança jusqu'en Libye, dont
il parcourut les différentes contrées ; apprivoisa par sa
douceur, par l'éclat de ses vertus, et par ses miracles, ces
nations barbares, et gagna à Jésus-Christ plusieurs milliers
d'âmes qu'il avait évangélisées.
Revenu en
Italie et épuisé par ses travaux, Conrad excita l'admiration de
frère Jérôme, son compatriote et son ancien compagnon, qui était
alors général de l'ordre de
Saint-François. Aussi Jérôme ayant été envoyé en France par le
Pape Nicolas III, pour apaiser
des différends qui s'étaient élevés entre Philippe le Hardi et
le Roi de Castille, il voulut que Conrad le suivît. L'heureux
succès de la négociation ramena Conrad à Rome. Il y passa deux
ans, après lesquels on lui ordonna de se rendre de nouveau h
Paris,
pour y professer la théologie. Il s'acquitta de cet emploi de
manière à mériter les
applaudissements
publics ; mais il ne se bornait pas à enseigner dans les
écoles, il annonçait souvent la parole de Dieu au peuple, et
visitait assidûment les hôpitaux dans lesquels il produisit de
grands fruits. Son genre de vie était
très austère
et son attention continuelle était de travailler à parvenir, par
la pratique des vertus, à la perfection du christianisme. Il
avait pour Jésus souffrant une dévotion si tendre, qu'il
éprouvait quelquefois les douleurs de sa passion ; et sa foi au
mystère de la Trinité était si vive, qu'il s'en servait pour
combattre le démon et pour guérir les maladies.
Le frère Jérôme était devenu, depuis son retour de France,
évêque de Palestrina. Il fut, le 15 Février 1288, élu Pape et
prit le nom de Nicolas IV, en mémoire de Nicolas III, qui
l'avait élevé au cardinalat. Un de ses premiers soins fut de
rappeler Conrad à Rome, avec l'intention de le faire entrer dans
le sacré collège ; mais le saint religieux ne put jouir
de cette faveur. Étant parvenu à Ascoli, sa patrie, il y tomba
dangereusement malade. Muni des sacrements de l'Église et couché
par terre, ainsi qu'il l'avait demandé, il mourut le jour qu'il
avait prédit, c'est-à-dire le 29 Avril 1289. Son corps, qui
resta flexible et répandait une odeur agréable, fut inhumé au
bout de trois jours, et ensuite placé dans un tombeau par
l'ordre de Nicolas IV. Au bout de quatre-vingt-deux ans, on le
transporta dans la nouvelle église de Saint-François, où il n'a
pas cessé do recevoir les marques de la vénération publique et
où Dieu continue de manifester, par des miracles, la sainteté de
son serviteur. Le Pape Pie IV a autorisé le culte du bienheureux
Conrad.
SOURCE : Alban Butler : Vie
des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction :
Jean-François Godescard. |