Dagobert II Roi d'Austrasie

SOYEZ LES BIENVENUS SUR LE SITE D'ALEXANDRINA

Dagobert II
Roi d’Austrasie, Martyr, Saint
† 679

Dagobert II [1] était fils de Sigebert, Roi d'Austrasie, et de la Reine Himnehilde. Il était encore enfant, lorsqu'il perdit son père, le 1er Février 656. Il lui succéda sans opposition ; mais au bout de quelques mois, Grimoald, maire du palais, fit valoir une disposition qu'il prétendait avoir été faite en faveur de Childebert, son fils, par Sigebert, dans le temps que ce prince n'avait pas encore de postérité. Il dépouilla Dagobert de la puissance souveraine, et l'envoya en Irlande, où il vécut longtemps ignoré. Didon, évêque de Poitiers, prêta la main à l'exécution de ce crime, et conduisit le jeune prince au lieu de son exil. On publia ensuite qu'il était mort, et Childebert fut proclamé Roi, sous prétexte que Sigebert l'avait choisi lui-même pour son successeur, dans le cas où il ne laisserait point d'enfants.

Himnehilde se plaignit hautement de la violence et de l'injustice qu'on avait faites à son fils, elle se réfugia à Paris, auprès du Roi Clovis II, son beau-frère. Les seigneurs austrasiens ne purent souffrir l'attentat du maire du palais et l'usurpateur fut détrôné après un règne de quelques mois. On offrit la couronne d'Austrasie à Clovis II, déjà Roi de Bourgogne et de Neustrie. Ce prince étant mort peu de temps après, laissa la monarchie à Clotaire III, son fils aîné, qui avait à peine cinq ans. Celui-ci, sous la régence de Bathilde, sa mère, posséda l'Austrasie, jusqu'en 660, qu'elle fut démembrée en faveur de Childéric, le second des fils de Clovis.

Himnehilde parut en cette occasion sacrifier les intérêts de son fils Dagobert à ceux de sa fille Bilichilde ou Bilhilt, qu'elle fit épouser à Childéric. Mais elle fit bien voir dans la suite, qu'elle n'avait fait que céder à la nécessité.

Cependant on apprit que Dagobert vivait encore et qu'il était en Irlande. Dès qu'on en fut informé, les seigneurs d'Austrasie, attachés à Himnehilde et pleins de vénération pour la mémoire de saint Sigebert, s'occupèrent sérieusement du projet de procurer le retour de leur Roi. Ils écrivirent à cet effet à saint Wilfrid, évêque d'York, qui savait le lieu de la retraite du jeune prince, et qui l'avait généreusement assisté dans sa disgrâce. Le prélat ne pouvait recevoir une plus agréable nouvelle. Il fournit sur-le-champ à Dagobert ce dont il avait besoin pour retourner en Austrasie, et fit en même temps un appel à la générosité des princes anglais, qui se montrèrent à cette occasion pleins de bonne volonté et de grandeur d'âme. Dagobert cependant ne put réussir d'abord à s'y faire reconnaître pour Roi, quoique Himnehilde employât en sa faveur tout ce qu'elle avait de crédit. N'ayant pu atteindre le but auquel elle aspirait, et redoutant les horreurs d'une guerre civile, qu'entraînerait la tentative de faire valoir les droits de son fils par la force, elle se contenta d'obtenir de Childéric, qu'il cédât à Dagobert l'Alsace et quelques cantons au-delà du Rhin.

Mais Childéric, par ses cruautés et ses violences, se rendit odieux aux Austrasiens. Un seigneur, nommé Bodillon, qu'il avait fait battre de verges, se vengea de cet affront, en l'assassinant en 673, avec la Reine et son fils. L'habile Himnehilde profita de cette circonstance pour gagner les Austrasiens, chose d'autant plus facile, que les royaumes étaient en proie à la confusion et aux troubles. Elle proposa aux grands son fils Dagobert : il avait des qualités qui faisaient espérer qu'il régnerait sagement, et on savait par expérience qu'il avait bien gouverné l'Alsace et les autres provinces que Childéric lui avait cédées. Les seigneurs d'Austrasie écoutèrent cette proposition et résolurent d'empêcher, que Thierri III, qui fut déclaré alors Roi de Bourgogne et de Neustrie, ne s'emparât aussi de l'Austrasie. Wulfoade, maire du palais, se déclara en outre en faveur de Dagobert, qui fut conduit à Metz et reconnu Roi par les différents ordres du royaume.

Les commencements de son règne furent heureux. Il choisit les palais d'Isenbourg et de Kirchheim, en Alsace, pour le lieu de sa résidence[2]. Il profita de la paix dont jouissait l'Austrasie, pour fonder des abbayes et rétablir les églises et les monastères. On lui attribue entre autres la fondation de l'abbaye de Wissembourg, devenue si célèbre dans la suite, et située anciennement dans le diocèse de Spire, aujourd'hui dans celui de Strasbourg, ainsi que celle du couvent de Blidenvelt ou Klingenmùnster. Il fonda également les abbayes de Surbourg, de Haslach et de Saint-Sigismond, en Alsace. C'est à lui que l'église de Strasbourg doit la plus grande partie des richesses qu'elle possédait, mais particulièrement deux évêques pieux et éclairés, S. Arbogast et S. Florent.

Dagobert, pendant son exil en Irlande, avait épousé une princesse saxonne, nommée Bachtilde ou Mathilde. Il en eut cinq enfants ; un fils, auquel il donna le nom de Sigebert, et quatre filles, Irmine, Adèle, Rathilde et Ragnétrude. Sigebert ayant été dangereusement blessé à la chasse, par un sanglier dans la forêt de Novientum, où se trouvait déjà le couvent d'Ebersmùnster, fut guéri par les prières de saint Arbogast. Pour marquer à Dieu sa reconnaissance, Dagobert donna à l'église de Strasbourg le palais d'Isenbourg, ainsi que le territoire voisin.

Saint Wilfrid, qu'on avait chassé indignement de son siège, prit le parti de porter ses plaintes à Rome. Il vint en Alsace au commencement de l'année 679. Dagobert, qui lui devait tout, le reçut avec autant de joie que de vénération. Le Roi fit l'éloge du Saint en présence de toute sa cour, et déclara que c'était à sa prudence et à son zèle qu'il était redevable de sa couronne. Il voulut le retenir auprès de sa personne, et lui offrit l'évêché de Strasbourg, qui venait de vaquer par la mort de saint Arbogast, arrivée le 21 Juillet 678.

La paix dont jouissait le royaume d'Austrasie ne dura pas longtemps. La guerre s'alluma entre Dagobert et Thierri III, qui démembrait tous les jours quelques dépendances des étals du premier, pour les incorporer à son royaume. Les deux Rois, à la tète de leurs armées, s'avancèrent sur les frontières de la Lorraine et de la Champagne. Le sanguinaire Ebroïn, maire du palais, sous lequel Thierri était à peine une ombre de Roi, forma contre Dagobert une conspiration, où entrèrent plusieurs seigneurs. Il fut surpris dans la forêt de Voivre, à cinq quarts de lieue de Stenay, le 23 Décembre 679, et assassiné de la main de Grimoald[3]. Il est à présumer que le prince Sigebert, son fils, éprouva le même sort : du moins n'en est-il plus fait mention dans l'histoire.

La piété et la vertu de Dagobert le firent mettre au nombre des Saints. On l'a qualifié de martyr, parce qu'anciennement on donnait ce titre à ceux qui, après avoir vécu saintement, périssaient d'une mort injuste et violente. Le corps de Dagobert fut porté à Rouen ; mais on le transféra depuis à Stenay, sur la Meuse, où il est honoré en ce jour et le 2 Septembre.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard.


[1] On ne connaissait qu'un seul Dagobert, Roi d'Austrasie, avant le milieu du quinzième siècle. Le nom de celui dont nous donnons la vie serait encore dans l'oubli, sans les découvertes d'Adrien de Valois et du P. Henschenius. (Voyez sur ce sujet le livre de ce dernier, imprimé en 1655, sous le titre : De tribus Dagobertis, Francorum regitus diatriba, et celui de M. Berain, mort en 1758, prévôt de Haslach, en Alsace, intitulé : Mémoires historiques sur le règne des trois Dagobert, 1717.) On avait partagé ses actions entre Dagobert Ier et Dagobert III. Henschenius a débrouillé ce chaos, a remis tout à sa place, et a rendu à chacun de ces princes ce qui lui appartenait. Il a montré aussi que Dagobert II était le fondateur de la plupart des abbayes, dont la fondation avait été auparavant attribuée à Dagobert Ier, son grand-père. Voyez Grandidier, Histoire de l’Église de Strasbourg, I, 199.
[2] Le premier de ces palais était situé près de Ruffach, aux environs de Colmar, l'autre à quelques lieues de Strasbourg, du côté des Vosges.
[3] Après la mort de Dagobert II, les Austrasiens refusèrent de se soumettre à Thierri III, troisième fils de Clovis II, qui régnait alors sur le reste de la France, mais qui était un prince faible. Thierri voulut inutilement se rendre maître du royaume de Dagobert. Martin et Pépin de Héristal, qui prirent le titre de ducs et de princes d'Austrasie, lui firent une vigoureuse résistance. Après la mort de Martin, Pépin devint si puissant, qu'il se fit reconnaître maire du palais dans toute la France, à la place d'Ebroïn, qui l'avait été sous Thierri III, Clovis III et. Dagobert III. Il mourut sous le règne du dernier de ces princes, et laissa sa dignité à son fils Théobald, encore enfant. Celui-ci fut chassé par Rainfroi. Mais Charles-Martel, que Pépin avait eu d'Alpaïde après avoir été quelques années duc d'Austrasie, vainquit Rainfroi à son tour. Il devint maire de toute la France, et transmit cette dignité à son fils Pépin-le-Bref qui fut Roi depuis.

Pour toute demande de renseignements, pour tout témoignage ou toute suggestion,
veuillez adresser vos courriers à
 :

alexandrina.balasar@free.fr