Cette basilique fut la cathédrale du Pape
En ce 9
novembre, nous célébrons une fête à la fois très importante
et très méconnue : la Dédicace de la Basilique Saint Jean de
Latran. Nous allons essayer d’expliquer de quoi il s’agit et
pourquoi cette fête “remplace” la liturgie dominicale
normale.
Le “Latran” doit son nom à la famille des Laterani, qui
avait sa propriété dans la zone sud-est de Rome ; devenue
propriété de l’empereur Constantin au IVe siècle, elle fut
donnée aux papes (qui y résidèrent en effet pendant dix
siècles, jusqu’à la “papauté en Avignon”) ; une première
basilique y fut alors construite, plusieurs fois
reconstruite, qui s’appela “Archibasilique du Saint
Sauveur”, puis dédiée aussi à Saint Jean-Baptiste, le
Précurseur et Cousin de Jésus-Christ.
Cette basilique fut donc la cathédrale du Pape, Evêque de
Rome. Dès son élection le Pape “prend possession” de cette
basilique, où il célèbre ensuite chaque année
traditionnellement la Messe du Jeudi Saint, au cours de
laquelle il lave les pieds à douze personnes, soit prêtres,
soit laïcs, comme le fit Jésus au cours de la Dernière Cène.
Signalons aussi que, au-dessus de l’autel est conservée la
Table de la Dernière Cène, cette Table-même où Jésus
institua l’Eucharistie. Siège de l’Evêque de Rome, la
basilique de Saint Jean de Latran est donc en même temps la
“Mère et Maîtresse de toutes les Eglises”.
Faire la “dédicace” d’une église nouvelle est une cérémonie
grandiose : l’évêque y vient consacrer cette construction
pour en faire la maison de Dieu, le Lieu où seront ensuite
célébrés les Sacrements, où les chrétiens recevront le
Baptême, où se réunira la famille de Jésus-Christ ou
“Ecclesia” (“Assemblée”) des appelés ; ils convergent là
pour prier ensemble, pour y louer Dieu, pour y recevoir la
Grâce des Sacrements et un Enseignement sacré, en un mot
c’est le Lieu où chacun se sent “chez soi”, pour y
rencontrer Dieu.
Au tout début de sa vie publique, Jésus intervient dans le
Temple de Jérusalem pour en faire retirer tout ce qui s’y
vendait : les fidèles devaient bien se procurer ce qui était
nécessaire aux sacrifices à offrir dans le Temple, mais peu
à peu ce commerce s’était introduit à l’intérieur de la
Maison Sainte, avec tout ce que cela pouvait comporter de
conversations, marchandages, cris et disputes, et
d’insanités malodorantes. Imaginons la Foire-Expo de
bestiaux à Versailles s’installer dans une de nos
cathédrales !
Mais aux Juifs, Jésus précise que le vrai Temple de Dieu,
c’est d’abord Lui-même, qui est venu pour se faire Agneau et
être offert en Sacrifice parfait. A la suite de ce Temple
divino-humain, nous sommes tous appelés à être
d’authentiques temples, ce que s. Pierre appelle dans son
épître des “pierres vivantes” (1P 2:4-5), formant l’unique
Temple sacré, l’Eglise éternelle.
Quoiqu’on ait osé parfois opposer s. Paul à s. Pierre,
l’épître aux Corinthiens d’aujourd’hui ne dit pas autre
chose : “N’oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu et
que l’Esprit de Dieu habite en vous”. Une telle
“construction” sainte ne doit donc pas être profanée par
n’importe quel “marché à bestiaux”, par n’importe quelle
conversation, n’importe quelle conduite.
Là où Dieu habite, là s’installe la Paix. “Paix aux
hommes de bonne volonté” (Lc 2:14), chantèrent les Anges
à la naissance de Jésus. Toute personne qui cherche Dieu en
vérité et Le reçoit pleinement, trouve en lui la paix et la
répand autour de lui. Toutes les guerres viennent d’abord du
fait que les hommes sont eux-mêmes en conflit avec Dieu à
l’intérieur d’eux-mêmes. Chantons donc le psaume 45 de ce
jour en cherchant vraiment à garder en nous la paix de Dieu.
Il sera beaucoup trop long de commenter le texte d’Ezéchiel
que nous avons ici en première lecture. Globalement, la
vision de ce Prophète veut nous dire qu’en ce Temple divin,
se trouve la source de la Vie, l’Eau purifiante et
régénératrice, l’abondant Poisson et la flore qui donne du
fruit chaque mois de l’année, comme symbole du Christ
eucharistique.
La fête de la Dédicace, c’est donc tout cela : Dieu parmi
nous, Emmanuel, Celui qui s’est révélé à nous comme “la
Voie, la Vérité et la Vie”. Que cette fête soit une
action de grâce pour cette Annonciation quotidienne, pour
cette présence divine parmi nous. Mais qu’elle soit surtout
l’occasion d’une réponse de notre part, d’une sanctification
quotidienne, ce que veut dire la Prière du jour : “Que le
peuple ne cesse pas de progresser pour l’édification de la
Jérusalem céleste” ou bien celle après la Communion :
“Accorde-nous d’être le temple de ta grâce”.
|