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Paulette LEBLANC

La Bienheureuse Dina Bélanger

(30 avril 1897 - 4 septembre 1929)

 

Sa vie et sa spiritualité

  

- Dina et la Très Sainte Trinité

- Le Cœur Eucharistique de Jésus

- Le Cœur Agonisant de Jésus

- Le Cœur agonisant de Jésus et les âmes consacrées

 

Février 2008


 

Bienheureuse Dina Bélanger

(30 avril 1897 - 4 septembre 1929)
Fête le 4 septembre

Sa vie

Les textes cités sont extraits de l'Autobiographie[1] de Dina Bélanger.

Remarque : C’est pour répondre à une demande expresse de sa supérieure que Sœur Marie Sainte Cécile de Rome, (Dina Bélanger) commença, dès mars 1924, à écrire son Autobiographie.

1
L’enfance et la jeunesse

Dina naît à Québec, au Canada, le 30 avril 1897, dans une famille aisée, mais très pieuse. Pianiste, elle devient une véritable virtuose et donne de nombreux concerts. Le 11 août 1921 elle entre chez les Religieuses de Jésus-Marie, à Sillery, et prend le nom de Sœur Marie Sainte Cécile de Rome. Atteinte de tuberculose pulmonaire elle meurt le 4 septembre 1929, dans sa trente troisième année. Elle fut béatifiée par le pape Jean-Paul II le 20 mars 1993.

C’est à partir de l’âge de 10-11 ans, que la piété de Dina s’affirma ainsi que son amour pour Jésus-Eucharistie. Elle écrit : “Une fois, Jésus, dans son ostensoir d’or captiva tout mon être ; je le regardais fixement, sans bouger; je lui disais intérieurement: Jésus, je sais que c’est vous qui êtes là, dans l’hostie. Ô montrez-vous donc aux yeux de mon corps; je désire tant vous voir! Je le contemplai très longtemps. Le désir de le voir m’enflammait; le doux Prisonnier répondit à ma naïve supplique par une grande augmentation de foi en sa présence réelle au Saint Sacrement. Ce fut une grâce de choix.”

Vers l’âge de 17 ans, Dina se livra à l’amour divin en qualité de victime. Les études musicales supérieures, qu’elle continua à New-York pendant deux ans, la fatiguèrent un peu, et on lui conseilla du repos, c’est-à-dire de ne plus aller à la messe tous les jours. Heureusement, le prêtre à qui elle s’adressa lui conseilla de ne jamais manquer le banquet sacré. Elle écrit à ce sujet: “En réalité les forces que je puisais durant le sacrifice sacré et dans l’ineffable communion étaient bien supérieures à celles que m’auraient procurées un repos prolongé. D’ailleurs, aurais-je pu me reposer loin de Jésus?”

Ses succès artistiques étaient nombreux à cette époque. Le Seigneur lui fit la grâce de ce que nous appellerions de nos jours un complexe d’infériorité, pour la faire grandir dans l’humilité : “J’apprenais, dit-elle, à chérir l’humilité comme une perle inestimable, et je désirais l’acquérir un jour... Combattre quand le Sauveur manie les armes, c’est une joie. Je revenais souvent à la pensée: je n’ai de valeur que ce que je vaux devant Dieu. Jésus ne voulait pas que je jouisse de mes efforts, et il permettait que, par ma manière d’agir, les autres ne puissent pas supposer ce qui se passait en moi.”

2
Premières faveurs divines

À partir de l’âge de vingt ans, Dina semble s’établir dans une étroite union avec Dieu. Elle bénéficie de quelques faveurs divines qu’elle ne comprend pas et qui l’effraient un peu. Elle écrit: “À certains moments, la voix de Jésus se faisait entendre au fond de mon cœur. Sa lumière présentait aux yeux de mon imagination des tableaux que je ne connaissais pas. Au sujet de cette voix et de ces tableaux, j’ai prié beaucoup. J’étais assurée que c’étaient là les enseignements de mon divin Maître: ce qui parle d’obéissance, d’humiliation, de renoncement ne peut venir que de lui. La faveur que j’implorais était de ne pas me laisser prendre aux pièges du démon qui est capable d’inventions si rusées et si habiles, de ne pas être victime des chimères de mon imagination...”

Un jour le Seigneur lui enseigna comment reconnaître ses interventions à Lui, et comment faire la différence entre sa voix divine et celle du démon qui veut jouer les imitations: “Le Sauveur ne se fait entendre que dans le recueillement, la paix, le silence. Sa voix est si douce que, en l’âme, tout doit se taire; c’est une mélodie suave. Le langage satanique est bruyant: c’est l’agitation, la précipitation, le trouble, la brusquerie.”

Jésus donna deux guides à Dina: l’Hostie et l’Étoile: “L’Hostie, c’était Lui-même; l’Étoile, c’était sa Sainte Mère. Il me représenta un chemin d’épines dans lequel il était passé le premier et où il désirait me voir marcher. D’abord les épines étaient peu nombreuses; elles se multipliaient à mesure que j’avançais... Et je voyais sans cesse l’Hostie et l’Étoile, qui figuraient Jésus et Marie, au-dessus de ma route, un peu en avant de moi...

Cela se produisait dans mon imagination; le tableau était net et clair. Aux heures où Jésus me le présentait, je l’apercevais plus fidèlement que je voyais une image matérielle avec les yeux de mon corps... Mon Seigneur m’apprit que j’avais une mission à remplir... Il me montra la nécessité et l’importance de m’y préparer... Je compris que le salut d’un grand nombre d’âmes y était attaché.

Par une lumière très vive il m’enseigna la valeur inestimable de la moindre des grâces parce qu’elle est un don de Dieu. Aucun des bienfaits divins ne peut-être appelé petit, mais notre langage humain est si pauvre que, lorsque nous avons parlé des faveurs extraordinaires et frappantes que sont les grandes grâces, il nous reste des termes moindres pour les grâces journalières qui se multiplient à chaque seconde. Je vis la multitude des dons que je recevais comme une chaîne précieuse, composée d’anneaux; une infidélité cassait un anneau et rompait la chaîne. Et là, Jésus me dit que mon manque de correspondance à une seule grâce pourrait me faire manquer ma mission.

Je saisis comment le plus léger refus pouvait me priver d’une immense quantité de grâces; après un premier manquement, la volonté a moins de résistance... Par contre, la correspondance à l’inspiration sainte attire un autre secours du ciel... Par ma faute, il m’était possible de compromettre ma mission... Et toutes ces âmes qui attendaient la lumière de ma fidélité! Je renouvelai à Jésus ma ferme résolution de répondre à ses désirs. J’étais confiante en son amour, en sa bonté, et confondue en ma misère extrême. Mon doux Maître me dit:

― Je veux me servir de toi parce que tu n’es rien; je veux prouver ma puissance par ta faiblesse.

Cette dernière phrase, il me l’a répétée en d’autres circonstances par des mots qui reviennent toujours à cette idée :

― C’est justement parce que tu es incapable et faible que je me sers de toi, afin que mon action seule apparaisse.

Il mit en mon cœur le désir ardent et sincère du mépris, de l’humiliation, ces biens sans prix que le monde abhorre parce qu’il ne connaît pas leur valeur cachée... Chaque matin et chaque soir, je disais la supplique suivante: “Mon Dieu, accordez-moi la grâce d’être méprisée et humiliée autant que vous pouvez vouloir que je le sois, et que tous ceux qui me mépriseront et m’humilieront ne soient pas coupables.”

Je pensais d’abord que cette prière était celle du renoncement total à la jouissance ici-bas; ce fut tout le contraire: juste à partir du moment où mon âme ne souhaitait que le sacrifice, elle fut enivrée de bonheur. C’est ici le secret de l’amour divin. Je me trouvai dans une sainte indifférence à l’égard de tout.

Jésus me familiarisait avec l’idée de la souffrance. Il se servit encore d’un tableau. Sa main tenait une croix. Une première fois il entra le pied de la croix dans mon cœur. Plus tard, il l’enfonça davantage. Enfin, il la plaça en entier, avec les deux bras, en l’entrant profondément; il avait fallu déchirer. Ce dernier acte figurait que le Sauveur, avec sa croix, régnait en moi. Puis il entoura mon cœur d’une couronne d’épines, symbole de la sienne.

Il m’initia à la vie d’union avec lui. Au commencement, il me semblait qu’il était à mes côtés, qu’il marchait près de moi. Ensuite, je le trouvai en moi. J’aimais à causer intérieurement avec lui quand je sortais seule sur la rue... Ensuite, il mit sa volonté à la place de la mienne... L’idéal divin m’apparaissait comme exigeant de moi que je devienne une très grande sainte. Je n’étais pas capable de désirer moins.

Jésus commença ainsi à me brûler de ses flammes d’amour... La réparation envers le Cœur divin outragé, le zèle du salut des âmes me devenaient deux devoirs impérieux... Je compris, par une grâce, que je devais consoler Notre Seigneur et prier pour l’amendement des âmes aveuglées. Matin et soir, régulièrement, je priais pour les prêtres, les religieux, les religieuses. Les personnes consacrées ont une si lourde responsabilité. Elles ont la meilleure part; elle reçoivent les grâces de choix de l’Époux. Puissent les moissonneurs répondre en tout, partout et toujours, aux vœux du divin Semeur.

Mes prières se généralisaient à toutes les intentions, à l'infini, selon la puissance et l'amour de Jésus. Je priais en union avec Notre-Seigneur et la Très Sainte Vierge… pour tous les êtres, au nom de tous, en esprit d'adoration envers la Trinité sainte et de louanges vis-à-vis des anges et des saints…

À la même époque, Dina fut admise dans le Tiers-Ordre de Saint Dominique. Après un an de probation elle fut admise à la profession et reçut le nom de Sainte Catherine de Sienne.

Dina put terminer ses études musicales à New-York. Cette période fut celle des concerts. Elle travaillait avec acharnement, se demandant quel pouvait être le but de son travail musical. Jésus lui répondit:

― Tes connaissances musicales protégeront ta vocation; mais tu feras du bien surtout par tes écrits... Oui, au couvent, tu te livreras à un travail littéraire.

3
La vie religieuse-Première partie

Le 11 août 1921, Dina Bélanger entra chez les Religieuses de Jésus-Marie, à Sillery[2]. Elle portera désormais le nom de Sœur Marie Sainte Cécile de Rome. De nouveau, Jésus lui parla: "C'était la paix, l'amour. Puis le Bon Maître prit mon pauvre cœur, s'en empara à la façon dont on enlève un objet de quelque endroit, et mit à la place,- ô don de l'infinie tendresse!- son Cœur sacré et le Cœur Immaculé de Marie. Je n'avais plus à chercher au-dehors  l'Hostie et l'Étoile: Jésus et Marie, je les possédais dans mon intérieur." Jésus lui fit comprendre aussi que "la vraie joie intérieure se reflète sur le visage; ses divines leçons m'enseignèrent le secret de toujours sourire... "

On lui confia l’enseignement du piano à quelques élèves. Sa vie intérieure s’approfondit. Parfois Jésus lui montrait les fleurs de son Jardin et lui expliquait quels actes de vertu produisaient la croissance des tiges, l’éclosion et l’épanouissement des fleurs. “Dans un endroit à part, où leur splendeur était beaucoup plus éclatante et leur parure plus riche, il me dit que celles-là étaient cultivées par les âmes consacrées. Il me montra celles qu’il attendait de moi. Puis, un jour, il me fit entrer dans le parterre des âmes privilégiées. Oh! les pures délices! Au centre était sa croix divine, à la teinte sombre, et de bois: les amis de Notre Seigneur n’obtiennent ce titre de noblesse qu’à la condition du renoncement. Les fleurs superbes, à la corolle pleinement ouverte, autour de la croix, étaient l’offrande du sacrifice parfait, de l’amour pur. Elles me semblaient le sourire des crucifiés d’amour à l’Amour crucifié.”

À L’Automne 1922 Dina dut passer quelques semaines à l’infirmerie. “Ce furent des jours de bienfaits célestes.” Dina commence à écrire, essentiellement des poésies. Elle comprit vite que son travail, c’était le travail de Jésus. Elle écrit: “C’est si bien son travail à lui que souvent je sais à peine ce que j’écris, j’y suis poussée par une force douce et supérieure et, quand je me relis, j’ai maintes fois la surprise d’avoir émis des idées sans les avoir pensées.”

Dina savait qu'elle avait un immense travail à accomplir, mais, écrit-elle: "Notre Seigneur avait pitié de ma faiblesse: mes nombreux manquements de générosité servaient à m'humilier… Pour me démontrer qu'il voulait vivre, lui, par moi, Jésus me donna ses yeux, ses oreilles, ses sens, c'est-à-dire qu'Il était la Vie de ma vie." Le Seigneur demanda aussi à Dina de consoler son Cœur outragé dans la Sainte Eucharistie.

Un premier vendredi du mois, le Saint Sacrement étant exposé, durant son adoration, Dina “crut voir une multitude d’âmes qui couraient à leur perte éternelle. Quelques-unes étaient sur le bord de l’abîme; elles allaient tomber. Jésus me dit que je pouvais sauver ces dernières en priant pour elles avec ferveur, en lui offrant de petits sacrifices, par amour; ce que je fis immédiatement. Alors je vis ces âmes, vaincues par la grâce divine, abandonner le camp du démon.

La miséricorde de Dieu est infinie. Dina écrit: “Notre Rédempteur a soif de pardonner et d’oublier. Il n’attend souvent qu’un geste ou une pensée d’amour de notre part pour accorder à tel ou tel pécheur la grâce extraordinaire qui l’arrachera des mains de Satan.

Dina revient à de nombreuses reprises sur le désir de Jésus: être consolé. “Jésus voulait être consolé. Il me présenta son Cœur tout meurtri, frappé de tous côtés par une infinité de lourds marteaux que je voyais s’abattre sur lui avec violence; il me le montra ensuite victime dans toutes ses parties d’une multitude de lances qui s’enfonçaient plus ou moins avant et le déchiraient. Chaque coup de marteau ou de lance était l’outrage causé par un péché. Puis je le vis blessé par un nombre incalculable d’aiguilles, la plupart étaient petites, même très petites:

― Ce sont là, dit Jésus, les indélicatesses des âmes religieuses; oh! qu’elles me font souffrir, ces aiguilles, parce qu’elles me viennent des âmes que j’aime le plus.

Dina précise: “C’est dans l’éternité seulement que nous comprendrons un peu la peine qu’éprouve Notre Seigneur à cause de nos péchés, de nos négligences, de nos manques d’amour. Et dire que nous pouvons le consoler!”

Comment comprendre ces mystères? Jésus s’abaisse jusqu’à nous, suppliant qu’on lui verse quelques gouttes de baume sur les plaies de son Cœur! “Ô mystère de l’amour d’un Dieu! Charité infinie du Pasteur envers ses brebis!”

Parfois Jésus demande des prières parce qu’un grand crime va se commettre, ou en prévision d’outrages. “Ah! que les plaintes de Jésus sont déchirantes! Comme il souffre le Captif silencieux de nos tabernacles, emprisonné jour et nuit par l’amour! Ma plus grande douleur devint alors celle de la souffrance du Cœur Eucharistique... Comment rester insensible quand c’est Jésus qui est délaissé et méprisé!”

Le noviciat de Dina se poursuit. Sa faim de l’Eucharistie croît toujours. La Sainte Vierge l’assiste souvent dans son action de grâces: “Durant mon action de grâces, souvent Marie parlait pour moi; je n’avais qu’à l’écouter, à m’unir à elle, à contempler mon Sauveur, à l’aimer. Parfois je me voyais comme une petite brebis dans les bras du Bon Pasteur; je me laissais porter par lui. J’ai ressenti d’ineffables consolations dans ce tableau.” Dina imaginait parfois qu'elle était une petite colombe avec laquelle Jésus s'amusait, et Dina disait: "Jésus, tu sais bien qu'elle t'aime ta petite colombe, tu sais combien elle veut t’aimer." Ou bien, elle était une humble fleur, le muguet de Jésus…

Le Seigneur éduque toujours Dina, et Il insiste pour que jamais elle ne néglige ses devoirs d’état. Nous sommes en 1922. Une nouvelle étape se prépare: “Vers ce temps, Notre-Seigneur me dit de le laisser agir, et qu’il allait commencer à me préparer à la mort d’une manière plus immédiate.”

En mai 1923, Dina écrit: “Mon Jésus, ah! que je t’aime! Je veux vivre et mourir martyre d’amour, victime d’amour, apôtre d’amour pour vous seul, mon Dieu! Marie, ma bonne Mère, vous que j’aime tant, accordez-moi d’aimer toujours Jésus et de le faire aimer avec son Cœur à lui, et avec votre Cœur à vous.”

Dina était heureuse, et voici quelques-uns de ses souhaits:

 

Je voudrais, Jésus, ô ma vie,

Submerger mon âme ravie

Dans ton Cœur d'Époux et de Roi,

L'anéantir d'amour pour toi.

 

Je voudrais parcourir le monde,

Lui donner la paix qui m'inonde,

Écrire en feu dans chaque cœur:

Mon Dieu, vous êtes mon bonheur!

 

Je voudrais que partout sur terre

Les hommes te sachent leur Père;

Que ton Nom soit sanctifié

Et ton Règne glorifié.

 

Je voudrais voir dans la nature

Ta raisonnable créature

Éviter le moindre méfait

Et vivre en toi d'amour parfait.

 

L’éducation de Dina se poursuit. Jésus lui demanda d’accepter avec amour et reconnaissance les petites croix qu’il lui présenterait, de ne pas en désirer d’autres, mais de le laisser faire. Peu de temps avant sa profession, Jésus lui dit :

― Tu vas faire profession; et puis, un an plus tard, aussi le 15 août, en la fête de l’Assomption de ma Mère, je viendrai te chercher par la mort.[3]

L’union de Dina avec Jésus se fait de plus en plus intime. Elle le supplie de lui accorder l'esprit d'obéissance et d'humilité, et de ne jamais rien lui refuser. Elle veut comprendre l'esprit de Jésus, et surtout, le laisser faire, toujours. Elle s'abandonne à son Cœur Eucharistique. Dina écrit: “Je me cache à jamais dans ton Cœur, ô Jésus, j’y établis ma demeure, pour cette vie et pour l’éternité...

Ô Jésus, je veux vivre et mourir apôtre d’amour, victime d’amour, martyre d’amour! Pour me satisfaire, il me faut t’aimer avec ton Cœur divin; je veux aimer Marie, ma bonne Mère, comme tu l’aimes; je veux aimer les âmes, surtout celles des pécheurs, du même amour que le tien, à la folie.

Ô Jésus, je veux souffrir pour me détruire en ton Cœur et te laisser vivre seul en moi; je veux souffrir pour te consoler; je veux souffrir pour sauver les âmes et pour diminuer le péché sur la terre; je veux souffrir parce que je t’aime!... Mon Dieu, je me meurs de ne pas mourir, tellement est intense mon désir d’union parfaite avec vous...”

Dina exprime l’intensité de son amour pour Dieu dans ses poésies, et notamment dans les strophes qui suivent:

 

Ah! tu le sais combien je t’aime!

Ta pensée est mon seul bonheur:

Tu m’as ravi mon pauvre cœur...

C’est toi, Jésus, beauté suprême

Qui captives ma faible ardeur,

Rends mon désir d’amour, extrême.[4]

 

Fais de moi ce que tu désires,

Je ne veux rien te refuser.

Si tu te plais à me briser,

Je te réponds par des sourires;

Si tu préfères t'amuser,

Je jouis de tes faits et dires.

 

Comme la plupart des grands mystiques, Dina découvre le lien existant entre l’amour et la souffrance : “L’amour m’apparaissait comme unissant la souffrance et la joie; je les voyais naître toutes deux dans le Cœur de Jésus.[5]

3-1-Jésus se substitue à Dina

Durant le mois d'octobre 1923, jusqu'au 2 novembre, Jésus enseigna à Dina la pratique du parfait abandon. Elle devait tout lui remettre, et lui, Jésus, se chargerait de penser, d'agir, à sa place. Il se substituait à Dina, et elle devait le laisser faire.

Le 13 novembre 1923, Dina bénéficia d’une grâce étonnante qui éclairera tout le reste de sa vie, et qui fut comme le prélude à sa mort annoncée pour le 15 août suivant: “Le 13 novembre au matin, dixième jour (de ténèbres intérieures) et fête de Saint Stanislas Kostka, patron des novices, Notre Seigneur revint avec ses consolations et chargé de ses miséricordes à mon égard. Il me montra un autel assez élevé sur lequel s’élevaient de brillantes flammes: c’était l’autel de son amour. Dans sa main, je vis mon cœur, le mien, celui qu’il m’avait enlevé à la retraite du postulat; il me le fit regarder, comme pour me donner l’avantage de me livrer une fois de plus entièrement et librement à lui, puis il le plaça sur l’autel; le feu l’enveloppa, je le vis brûler jusqu’à la dernière fibre; il n’en resta rien, absolument rien.

Ensuite, Jésus m’invita à monter moi-même sur l’autel. Il y avait à gravir cinq degrés en l’honneur des cinq plaies sacrées. Ce qui se passa en moi ne se définit pas. Je sentis comme une répulsion, une révolte de ma nature; dans mon âme, je possédais la paix et le bonheur. Je posai le pied sur la première marche, la deuxième, et, continuant avec abandon, j’arrivai vite au centre de l’autel. Les flammes écartées de chaque côté ne me touchaient pas.

Le Bon Maître me regardant toujours me fit ouvrir les bras en croix; aussitôt, les flammes se précipitèrent sur moi, avec violence dans leur intensité, mais néanmoins avec une certaine lenteur dans leur action. Elles consumèrent mon être entier.

Durant l’incendie divin, il me semblait que ma nature frémissait, gémissait, et, enfin, elle me parut morte au moment de la destruction complète. Quand le brasier n’eut plus d’aliment, le feu s’abaissa et s’éteignit. Au centre, il restait des cendres. Jésus s’approcha, souffla sur elles et les anéantit. Enfin, il ne restait rien de moi-même.

Néanmoins, si j’étais morte selon les desseins du Sauveur, n’étais-je pas encore vivante sur la terre? Oui, mais alors, Jésus prit ma place. Il se substitua à mon être. Il venait de me faire disparaître, le champ était libre. Il pouvait agir lui-même en liberté. Il me démontra que mes apparences extérieures n’étaient plus qu’un manteau dont il était obligé de se servir, un manteau qui le dérobait aux regards humains et lui permettait de continuer sa vie ici-bas. Puis il ajouta:

― Afin de te prouver que ce tableau n’est pas un effet de ton imagination et que cette action d’anéantissement de ton être vient en vérité de moi, Jésus, ton Dieu, je te donne un signe extérieur.

À ce moment même Dina se mit à sangloter. Jésus lui dit:

― C’est moi, qui te fais pleurer; voilà le signe que je t’accorde.”

Les larmes de Dina coulèrent pendant longtemps, mais, curieusement,  elle n’eut pas les yeux rougis... Après cette faveur insigne de la substitution de Jésus en elle, souvent la voix de Jésus lui disait:

― Laisse-moi faire. Laisse faire l'Amour.

Et souvent aussi Jésus répétait sa soif des âmes:

― J’ai soif des âmes! J’ai soif d’amour! Je mendie les cœurs... On ne m’écoute pas, on me repousse, on m’insulte et on me frappe!... Oh! que j’ai soif et que je souffre!...

Et encore :

― Aujourd’hui, je veux ramener beaucoup de brebis égarées; je vais les chercher; toi, pour leur obtenir la grâce du retour, laisse-moi faire en tout. 

Dina ajoute: “Le divin mendiant me pénétra de la vérité que les hommes sur la terre sont solidaires les uns des autres, dans la vie spirituelle comme dans la vie sociale. J'avais une part de responsabilité morale envers toutes les âmes du monde entier, celles qui vivaient à l'heure actuelle, et celles qui seraient créées dans l'avenir.”

3-2-Et Jésus fit parler son Cœur Eucharistique

Dina est malade et isolée pour quarante jours, en raison de la contagion. Jésus va lui faire commencer ses travaux littéraires et se servir de sa main pour redire aux âmes "qu'il les aime d'un amour qu'elles ne comprennent pas…"

Quelques jours plus tard Jésus ajouta:

― Je veux parler, dans un écrit, de l’amour excessif dont mon Cœur est embrasé pour les âmes; je veux me plaindre d’être oublié, refusé; je veux demander de l’amour comme un pauvre supplie pour obtenir un morceau de pain. Ah! Je les aime tant, les âmes, et si souvent, je ne suis pas compris et pas aimé! Non, l’Amour n’est pas aimé! Oui, Jésus veut faire parler son Cœur Eucharistique dans le seul langage de l'amour.

Ainsi, à partir de cette époque, Dina ne devait s’occuper de rien d’autre que de se laisser faire, et de laisser faire Marie, la Mère bénie. “Mes fautes et mes misères sont grandes et incalculables, mais Ma Mère est là pour me recouvrir de son manteau parfait et me donner Jésus avec ses trésors infinis.” Sa seule souffrance, c'étaient les blessures du Cœur de Jésus, occasionnées par les outrages de trop nombreuses d'âmes.

Les jours passent... Dina les compte car Jésus lui a dit qu’elle mourrait le 15 août 1924. Elle est souvent malade et fréquente l’infirmerie de plus en plus. Du 6 au 15 août, Dina commence une grande retraite avec la communauté, mais à l’infirmerie. Le grand jour approche... Grande déception! Le 15 août passe. Dina est toujours vivante. S’était-elle trompée? Dina ne comprenait plus rien. Elle fit un acte d’abandon plus parfait et un acte d’amour plus pur, et... elle commença une vie toute nouvelle. Dina avait compris qu’elle était bien morte à sa vie ancienne, et qu’elle venait de naître à une vie de véritable perfection.

4
La vie religieuse
Deuxième partie-Une vie toute nouvelle

Désormais Dina ne veut que ce que Jésus veut: “Rien de plus, mais rien de moins.” Son Éternité est déjà commencée, elle vit dans le Cœur de Dieu, perdue, anéantie en lui, abandonnée totalement à l’action de la Trinité Sainte en son être. Mais les mots de la terre ne peuvent plus exprimer ses pensées et ses sentiments: “Pour parler justement de la vie du ciel, il faudrait le langage du ciel...”

Et ses lectures sont toutes contenues dans le grand livre du Cœur de Jésus. Elle y savoure “les délicieux chapîtres de l’abandon” et du silence: ”Le silence! Quelle fontaine d’allégresse!”

Le 3 octobre 1924 Dina prononce le vœu du plus parfait, simplement pour dire à Dieu qu'elle l'aimait et qu'elle s'abandonnait à son action. "Ce fut comme un jour de noces spirituelles jusqu'au lendemain." L'obéissance devient sa règle du plus parfait. Elle reconnaît ses imperfections, mais elle sait que ses indélicatesses ne blessent pas Jésus parce que sa volonté n'y consent pas mais la fait grandir en humilité. Elle embrasse son crucifix en disant: "Cher Jésus, si je n'av   ais pas commis cette sottise, tu n'aurais pas eu tant de baisers et tant d'actes d'amour."

Le 1er novembre 1924 elle écrit des plaintes d'amour:

 

Jésus, Jésus, quel martyre indicible

De t'aimer tant et de t'aimer si peu!

De ton amour, la flamme inextinguible

Brûle en mon âme avec l'ardeur du feu.

 

Le jour, la nuit, je languis, je soupire,

Et c'est vers Toi que montent mes élans;

Ah! Je t'appelle… Oh! Que je te désire!

Je pleure… hélas! Encor, toujours, j'attends…

 

Jésus, Jésus, je t'aime! Ah! Que je t'aime!

Ton nom béni seul me fait tressaillir;

Quand donc enfin, Jésus, mon bien suprême,

Vais-je t'aimer assez pour en mourir?

 

J'ai soif de toi, d'une soif dévorante,

J'ai faim, j'ai faim de ton amour, de toi;

Prends donc pitié de ma fièvre brûlante,

Pour l'apaiser, mon Jésus, viens à moi.

 

Mon seul vouloir, Jésus, c'est de te plaire,

Et tes désirs font ma félicité.

 

Dina avait faim des âmes et elle écrit: "Jésus, j'ai faim! J'ai faim des âmes! De toutes les âmes! De leur perfection! Jésus, j'ai faim de la souffrance sous toutes ses formes! J'ai faim de l'Amour!

Dina ne veut plus que ce que Dieu désire: rien de plus. Elle est heureuse, n'ayant de désirs que le salut et la sanctification des âmes pour la plus grande gloire de Dieu. Elle vit dans le Cœur de Dieu, perdue, anéantie en lui, abandonnée totalement à l'action de la Trinité sainte en elle. De sa nouvelle vie, Dina ne sait pas exprimer la substance. Elle écrit: "Les expressions ne rendent plus mes pensées et les sentiments. Pour parler justement de la vie du ciel, il faudrait le langage du ciel… On peut faire vibrer quelques notes intimes, chanter quelques mélodies, mais les harmonies suaves et puissantes, le concert pur et divin, je crois que Jésus veut être seul à pleinement en jouir."

Mais cela ne l'empêche pas d'être dans la nuit. Elle regarde et ne voit rien. Jésus seul la conduit et lui apprend les leçons de l'anéantissement et les délices de l'abandon et du silence: pour elle, le silence traduit mieux sa reconnaissance et son bonheur.

Mais Dina s'ennuie de Dieu… Elle le déclare: "Plus vous me faites ennuyer de vous, plus je sens que vous m'enfoncez en votre Trinité adorable." Elle a soif, soif de Dieu: Ô Trinité sainte, vous seule savez l'intensité de ma soif! Mon Dieu, je vous en supplie, si cela vous glorifie, ah! Donnez-moi l'amour, la souffrance, les âmes!"

Étonnant! Dina pensait qu'elle devait mourir le 15 août 1924. Mais elle ne mourut pas au sens habituel du terme… En fait, c'est à une vie nouvelle qu'elle était alors appelée: vie d'union à Dieu de plus en plus intime. Mais la vie spirituelle n'est jamais parfaite sur la terre, et doit sans cesse être recommencée. Dina l'a bien compris, qui écrit le 3 mars 1927: "Je recommence une vie d'amour infini. Notre-Seigneur m'a fait mieux comprendre aujourd'hui la valeur de chaque seconde pour sa gloire et les âmes. Il me demande encore la plus grande attention à lui seul… L'amour est un tourment, infini comme Dieu lui-même…"

Le 20 mars 1927 Dina est de nouveau à l'infirmerie, et Jésus lui demande de contempler "l'union d'amour de son Cœur avec son divin Père."

Et Jésus met Dina en retraite dans son Cœur, plus intimement qu'à l'ordinaire, et lui dit:

― Par ma sainte Mère, je te donne la grâce de penser constamment à moi, de penser continuellement à Dieu.

4-1-Les stigmates invisibles

À partir du 2 septembre 1926, Dina participera, tous les jeudis et vendredis, au calice de la Passion de Jésus. Dina sera de plus en plus associée à l’Agonie de Jésus.

Ce jour-là, Samedi 22 janvier 1927, le Saint-Sacrement était exposé et Dina méditait: ”J’éprouvais déjà la présence de mon divin Maître, mais il y avait quelque chose de plus que dans l’union ordinaire, pourtant si intime du jeudi au vendredi. En effet, Notre Seigneur m’accorda une grande faveur: les stigmates d’amour de ses plaies sacrées. De son Cœur divin, des flammes rayonnaient sur les mains, les pieds et le cœur de mon être anéanti dans le sien. La très sainte Vierge posa ces flammes sur mes membres et Jésus y imprima les stigmates d’amour de ses plaies sacrées... Depuis mes membres sont comme consacrés par une impression divine.”

Dina venait de recevoir les stigmates invisibles. Depuis ce jour, Jésus appelle Dina: sa petite “Moi-même”, et lui demande l’oubli absolu d’elle-même et de tout ce qui la concerne. Sa vie spirituelle s’approfondit de plus en plus et son union à Dieu est quasi permanente.

4-2-Une grande fatigue

Dina est toujours donnée au Seigneur, et de plus en plus. Malgré tout son amour et tout son renoncement, elle laisse parfois échapper quelques plaintes. Ainsi, en avril 1928:

― Je suis bien fatiguée physiquement. Combien tout est bon pour Jésus!.. Malgré ma véritable joie intérieure, ma joie de volonté, mes larmes me montaient à mes yeux. Et j'ai grand'peur des larmes, c'est une faiblesse qui m'humilie beaucoup; et j'en ai peur, surtout parce que je crains toujours de manquer de générosité et de faire de la peine à Jésus.

En mai 1928 sa fatigue devient encore plus pesante, et elle avoue:

― Depuis deux semaines, tentations de découragement, angoisses morales, lassitude physique; tout me taquinait et m'ennuyait, tout était lourd et pénible… Intérieurement j'étais heureuse… Mais hélas! Au dehors, que j'ai commis de manquements matériels! Je n'ai pas su dérober mes ennuis par un bon sourire extérieur. Maintes fois je me suis surprise à soupirer, comme accablée par un fardeau qui répugne; je réparais ce mouvement naturel en baisant terre et en m'humiliant…

Un jour, Dina, ennuyée, désolée s'en va à la chapelle redire à Notre Seigneur que malgré ses chutes extérieures, elle ne voulait pas lui faire de peine… Jésus lui répondit:

― Sourire… Souris à tout, quand même je te broie… Applique-toi à sourire à tout. Refoule en silence tes ennuis, tes fatigues, tes douleurs morales et physiques et ne t'occupe qu'à me plaire, en souriant.

À partir du 26 août 1928 l'action du Seigneur en elle prend un caractère nouveau: "C'est comme un épanouissement de la vie de Jésus (en Dina) à la place de sa vie misérable et totalement disparue." Elle est contente de tout et contente surtout du Bon Dieu. Elle participe à la joie du Cœur de Jésus au ciel et à la joie des élus, et elle s'écrie:

― Oh! Si nous connaissions la sainte Béatitude des élus en Dieu, rien ne nous coûterait pour en acquérir le moindre degré!

Jésus lui fait aussi comprendre que, même ici-bas, "on ne peut s'approcher de son Cœur sans être heureux, parce qu'il est le Foyer de la joie et du bonheur.

Cette joie peut d'ailleurs se trouver aussi dans les aridités, les angoisses, les ténèbres, parce que c'est la joie de l'union parfaite à sa volonté divine, c'est la joie dans son amour, dans la joie de son Cœur.

Le 30 avril 1929, Dina entre définitivement à l’infirmerie plus ne plus en sortir[6]. Le 14 mai 1929, Dina très faible, a peur de passer la nuit seule. Elle s'abandonne à Jésus dont elle sent la présence à la droite de son lit. Jésus dit:

― Je viens passer la nuit avec toi, je vais prendre soin de toi.

À partir de juillet 1929 Dina n’a même plus la force d’écrire. On ne sait d’elle que ce que ses sœurs ont rapporté, mais il semble que, malgré ses souffrances, elle ait su conserver une joie inaltérable: "on  la trouvait absorbée, gracieuse, souriante. Notre Seigneur lui avait demandé de souffrir avec joie et reconnaissance, de lui sourire dans la souffrance."

Le mercredi matin 4 septembre 1929 elle se sentit soudain plus faible. Elle conserva sa connaissance jusqu’à la fin, son regard fixé sur l’image du Cœur Eucharistique. Elle mourut vers trois heures de l’après-midi.

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Portrait de Dina

5-1-L’humilité de Dina

Ce qui caractérise le plus Dina Bélanger, c’est son humilité. Elle écrit: “Le sentiment de mon indignité est indicible; je suis pénétrée de mon néant, je me sens faible, pauvre, impuissante. À cause de cela ma confiance en Jésus est comme un océan sans horizon, engloutissant l’abîme de mes misères. Je m’élance avec foi et amour dans les régions de la Miséricorde infinie. La bonté de Dieu: voilà mon assurance ferme et ma paix délicieuse.”

Les tempêtes spirituelles sont nombreuses et parfois violentes. Pénibles à supporter, elles accroissent cependant, en Dina, le sentiment de sa faiblesse et de ses misères. Elle écrit: “Je comprends comment l’amour réparateur des âmes converties, telle celle de Marie-Madeleine, peut dépasser en intensité l’amour innocent des âmes pures... Je comprends aussi qu’il soit salutaire quelquefois, de tomber dans certaines fautes -plutôt irréfléchies que consenties, c’est vrai, mais enfin humiliantes pour la volonté-,  parce qu’alors notre pauvre nature, déplorant sa fragilité, s’appuie avec plus d’amour et de confiance sur Dieu, son unique force.”

Quand Jésus eut fait entrer Dina dans les parterres infinies de la Très Sainte Trinité, elle vit ses actions: “Oh! mes pauvres actions! Elles étaient toutes entachées d’amour-propre, de vanité et de secrète recherche de moi-même... J’avais besoin d’avouer ma misère; je dis à mon bon Maître: “Mon Jésus, je suis bien coupable!” Jésus lui répondit:

― Ne te regarde pas toi-même. Aie confiance en ma miséricorde. C’est justement parce que tu es faible et misérable que je t’ai choisie...

Et Jésus fit comprendre à Dina la nécessité pour elle de conserver le silence de reconnaissance et d’humilité. Puis Il lui parla de sa gloire et de l’heureuse faute:

― La gloire que mon Père reçoit depuis la Rédemption est beaucoup plus grande, malgré l’offense de l’homme, que si l’homme n’avait jamais péché, parce que la réparation que je lui offre, à mon Père, est infinie, et elle couvre infiniment toutes les offenses humaines. Chaque fois qu’une âme s’unit à moi pour glorifier mon Père, elle lui rend par moi une gloire infinie.

5-2-L'obéissance et les désirs de Dina

L'obéissance était la grande règle du plus parfait de Dina qui s'est engagée à ne rien refuser à Notre-Seigneur, et à ne se préoccuper que de Dieu seul.

Dina désire, pour la gloire de son Père et de l’adorable Trinité, tout ce qu’une créature humaine peut souhaiter par l’Esprit et le Cœur d’un Dieu. Et pour la consolation de son Cœur, elle désire le salut et la sanctification de toutes les âmes, comme Dieu le désire lui-même.

L’œuvre du salut des âmes, c’est le travail du Seigneur, et cela, Dina l’a bien compris: “Le Cœur de Jésus m’emmène à la conquête des âmes. C’est lui qui fait tout le travail, et moi je lui donne mon ennui, mes petites souffrances, je n’ai qu’à le laisser faire et à ne rien lui refuser. Il m’a bien avertie, hier matin (24 septembre 1927), qu’on ne va pas à la conquête des âmes sans de grandes fatigues ni sans peines, mais tout est si bon avec lui et pour lui!”

5-3-L'union à Dieu

Dina fut unie à Dieu d'une manière exceptionnelle. Une telle perfection doit-elle nous décourager? Certainement pas. Nous avons vu combien Dina, la dernière année de sa vie, manifesta parfois ses faiblesses et ses difficultés à vivre son extrême fatigue physique, cause d'une véritable lassitude spirituelle. Mais elle s'accrochait à la volonté de son Seigneur qui, prenant comme exemple les âmes consacrées, réalisait pour elle un véritable cours d'union à Dieu.

Ainsi, ayant exprimé ses désirs: la Gloire du Père et de l'adorable Trinité, la consolation du Cœur de Jésus, et la sanctification des âmes, Dina "entendit" Jésus lui répondre:

― On ne m'aime pas assez pour moi. On m'aime trop pour soi-même. Il y a si peu d'âmes qui m'aiment pour moi dans l'amour qu'elles me donnent… Je suis triste, dit encore Jésus, parce qu'il y a des âmes consacrées qui m'aiment pour elles-mêmes; c'est parce qu'il y a tant de mes prêtres qui cherchent leurs intérêts personnels avant les miens…

Trop d'âmes religieuses et sacerdotales ne comprennent pas que les sacrifices que je leur demande sont des flammes d'amour qui s'échappent de mon Cœur divin pour attirer et sanctifier leur cœur humain.

Et à une question de Dina concernant sa famille religieuse, Jésus dit:

― Il leur manque (aux religieuses de Jésus-Marie) l'union avec moi. Un grand nombre de mes épouses agissent trop souvent par elles-mêmes en oubliant de s'appliquer à s'unir à moi. Je ne puis bénir leurs prières ni leur travail comme je le veux, parce que l'attachement à leurs désirs humains met obstacle à la plénitude de mes grâces.

― Que faut-il à chacune de nous pour obtenir la grâce d'être bien unie à toi, demande Dina.

Jésus reprit:

― Il faut me la demander. Je la donne, ma grâce, à toute âme qui me la demande, et surtout à toute âme religieuse qui est mon épouse ou qui veut le devenir.

― De quelle manière la demander?

― Que l'âme demande simplement la grâce que je règne en elle comme je le veux…. Et y correspondre avec beaucoup d'amour.

― Mais si l'on tombe? s'inquiète Dina. Que faire ?

― Se relever avec beaucoup d'amour, toujours revenir à moi, compter sur moi… Comptez sur moi sans jamais craindre de trop compter.

5-4-Conseils de Jésus à Dina

5-4-1-La joie

En septembre 1928, Jésus parle de la joie associée à la souffrance:

― Je veux que dès maintenant tu chantes avec moi le cantique éternel de mon Cœur sacré glorieux. Laisse-moi rayonner en toi l’amour et la joie de l’éternité...

Une âme ne peut pas s’approcher de mon Cœur sans être heureuse, parce que je suis le Foyer de la joie et du bonheur. Même dans les moments où j’associe une âme plus intimement à ma Passion et à mes souffrances, je sais changer pour elle en douceurs toutes les amertumes. Ma petite Moi-même, je te garde dans mon Cœur et dans les profondeurs de l’Essence de la Très Sainte Trinité; je veux donc que tu jouisses comme moi, dès maintenant, dans la mesure où tu souffres avec moi, dans la mesure de ton amour pour moi et de la consolation que tu me donnes. La joie parfaite et constante en moi est la plus grande preuve de l’union parfaite et constante avec moi. Tu m’aimes sincèrement: c’est moi qui agis en toi et à ta place; je veux donc le prouver par le rayonnement de ma joie divine...

5-4-2-La joie et la souffrance

Ma joie à laquelle je te donne part peut se trouver dans les aridités, dans les angoisses, dans les ténèbres, parce que c’est la joie de l’union parfaite à ma volonté divine, c’est la joie dans mon amour, la joie dans mon Cœur.

Souris... Souris à tout quand même je te broie... Veux-tu, ma petite épouse, me laisser rayonner au dehors la joie que je te donne intérieurement?... Applique-toi à sourire à tout. Refoule en silence tes ennuis, tes fatigues, tes douleurs morales ou physiques, et ne t’occupe qu’à me plaire en souriant... Que la souffrance ne t’empêche pas de sourire extérieurement comme tu me souris intérieurement; que la souffrance ne te distraie pas de ma pensée.

Mais la joie dans la souffrance est-elle vraiment possible? Et pourquoi la souffrance? À cette universelle question des hommes:  Jésus répond:

― La souffrance est la rançon nécessaire du péché. Mais Dieu aime les âmes d’un amour si grand qu’il met son bonheur à changer pour elles en jouissances toutes leurs souffrances. Il veut que déjà sur la terre, les âmes soient heureuses dans la souffrance par l’amour divin. C’est pourquoi les âmes qui aiment Dieu véritablement trouvent tant de bonheur dans la croix, malgré les répugnances de leur nature. C’est qu’elles trouvent et aiment Dieu en tout ce qui les contrarie...

Les âmes ne sont malheureuses qu’autant qu’elles s’éloignent de Dieu. Le grand désir de mon Père et le mien, serait de voir toutes les âmes heureuses, même sur la terre. Quand notre Justice divine afflige ou punit, c’est toujours par amour, et toujours pour rapprocher les âmes de Dieu, de leur souverain bonheur...”

5-5-Dina et Satan

Dina ne fut pas épargnée par les attaques de Satan. Elle est restée très discrète sur ce sujet, mais en avril 1925, après avoir prononcé son vœu du plus parfait, elle confie pourtant:

― Lutte pénible. Paix dans l'obéissance. L'assaut a été terrible, mais aussi la grâce divine très forte… Oh! Que le démon a de ruses!...

― Le démon est comme enragé parce que l'action de Notre Seigneur en mon être lui arrache des âmes et les conduit à Dieu. Que ma responsabilité est grande!

― Le démon, en essayant de me troubler et de m'attrister, me dit que je ne suis pas généreuse et pas mortifiée. Je ne l'écoute pas, le vilain ange de ténèbres… Je jette tous mes manques de renoncement dans la miséricorde infinie…

Le 15 juin 1925 elle avoue:

Le démon ne m'oublie pas, mais Jésus est mon rempart inexpugnable. Il ne se passe pas un seul matin sans que le vilain ange de ténèbres ne me tende un piège pour me faire manquer ma communion. Chaque soir, au moment de l'examen général, il revient à l'assaut. Outre ces deux filets habituels, il se présente avec ruse en d'autres temps; il se dissimule pour essayer de me tromper mieux…

Et le 23 juin 1925:

Les attaques de l'ennemi sont plus violentes. Hier soir, tout à coup, j'ai senti la présence du démon à côté de moi, à gauche, aussi réellement que j'aurais constaté la présence d'un être visible. J'éprouvais en même temps ses tentations d'enfer; il était là comme un enragé multipliant ses pensées et ses actions diaboliques… Les assauts étaient aussi rusés que forts. Je n'aavais pas peur, car Jésus et Marie étaient entre lui, le misérable, et moi… Alors Dina explique que ce qui la sauve, c'est l'obéissance et l'Eucharistie. Pourtant le démon la poursuit avec fureur. Elle éprouve sa présence effroyable, mais sa rage ne peut la troubler puisqu'il ne peut l'atteindre en Jésus et Marie.

Le 5 février 1927: "L'action du démon est violente; ce vilain esprit voulait me faire croire que je n'étais pas en état de grâce, et, par une ruse nouvelle, il essayait de m'éloigner de la Sainte Vierge, de me distraire de la pensée de ma céleste Mère et d'affaiblir ma confiance en elle."

2 mai 1927:

Le démon multiplie ses ruses… Pour essayer de me faire croire que je ne suis pas en état de grâce, il agit comme une personne qui mettrait un manteau sur les épaules d'une autre en lui disant: "C'est vous qui l'avez fait, ce manteau," quand ce ne serait pas la vérité. De même le démon essaie de me jeter des péchés mortels sur mon âme en me disant: "Tu les as commis!"… Vendredi il s'y est pris d'une autre manière: il a essayé d'agir comme Notre Seigneur… Mais bientôt une lumière suave me fit remarquer l'empressement, l'agitation, la brusquerie qui accompagnaient la pensée distrayante, et à ce signe infaillible, je reconnus que c'était là une tentation du mauvais esprit.


[1] L’Autobiographie de Dina Bélanger est éditée par Les Religieuses de Jésus-Marie, au Canada.

[2]La Congrégation des Religieuses de Jésus-Marie a été fondée à Lyon en 1818. Son but: l’éducation de la jeunesse. La Maison-mère est à Lyon, et la Maison générale est à Rome.

[3] Dina ne mourut pas; sa vie fut seulement totalement transformée. Elle n'était pas sur la terre tout en y demeurant encore: c'est ce que certains appellent la mort mystique.

[4] On ne peut manquer de remarquer la similitude de pensée et d’expression entre Dina et Thérèse de Lisieux.

[5] Padre Pio (saint Pio) dira plus tard: "L'amour ne peut être que douleur…"

[6] Dina était atteinte de tuberculose

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