Françoise
(Franziska) Schervier naquit, le 8 janvier 1819, à Aix-la-Chapelle
en Allemagne. Son père, Johann Heinrich (1784-1845) industriel aisé,
deviendra vice-maire de la ville. Lorsque la petite Françoise fut
baptisée, l'empereur François Ier d' Autriche accepta d’en être le
parrain. Sa mère Marie-Louise Migeon
(1781-1832) était française et
fille d’un industriel de Charleville. Les Migeon et les Schervier
furent associés dans leurs affaires. Elle éleva ses six enfants avec
une douce fermeté. Lorsque Marie-Louise mourut de tuberculose, ainsi
que plus tard ses deux filles aînées, Françoise se retrouva à la
tête de la maisonnée ; elle n'avait que quatorze ans !
Jeune fille
privilégiée par sa position sociale, elle avait conscience de la
pauvreté de certaines couches de la population. Elle avait été
éduquée à l'école Saint-Léo-nard, où sous l'impulsion de la convertie
Louise Hensel (1798-1876) les jeunes filles étaient sensibilisées
aux questions sociales dans un esprit de charité chré-tienne**.
Françoise dépensa ainsi une partie de sa dot pour subvenir aux
besoins de ceux qui la sollicitaient.
En 1837, le
gouvernement prussien emprisonna l'archevêque de Cologne, Mgr
Clément-Auguste von Droste-Vischering qui s'était opposé à des
mesures limitant la liberté de l'Eglise à propos des mariages
inter-confessionnels. Ces événements (Kölner Wirren) causèrent un
grand émoi en Westphalie et en Rhénanie et provoquèrent un certain
renouveau spirituel. C'est dans ce contexte qu'un groupe de dames de
la bourgeoisie d'Aix-la-Chapelle créa des sociétés de charité pour
soulager les pauvres. Elles demandèrent au père de Françoise de lui
permettre d'y participer. Il donna son accord ; mais bientôt,
lorsque Françoise se mit à soigner des malades — notamment du
choléra ! — dans la maison paternelle, il fit part de ses
réticences. La jeune fille persévéra discrètement...
C'est à cette
époque que Françoise fit la connaissance de l'abbé Joseph Istas,
curé de la paroisse Saint-Paul, qui avait créé un réseau de soupes
populaires. Elle en fut vivement impressionnée et collabora avec
enthousiasme à cette œuvre ; mais la mort prématurée de l'abbé, en
1843, l'attrista ainsi que la mort de son père deux ans plus tard.
Elle partit faire une retraite à Liège, car elle se posait la
question de savoir si elle pouvait devenir Trappistine ; mais,
conseillée par son amie Gertrude Frank, elle constitua, avec quatre
autres jeunes femmes, le noyau de ce qui deviendra une future
Congrégation, tournée vers l'assistance aux pauvres et aux malades.
Elles s'agrégèrent au Tiers-Ordre franciscain. C'était à la
Pentecôte 1845.
Jusqu' en 1848,
elles continuèrent à soigner chez elles dans une petite maison les
malades et à s'occuper de la soupe populaire. Elles accueillirent
aussi des prostituées qu'elles tentèrent de sauver de la rue. Mais
les moyens de Françoise et de ses compagnes étaient limités.
Certaines " bonnes âmes " critiquèrent l'assistance qu'elles
portaient à ces femmes de mauvaise vie, dont beaucoup étaient
syphilitiques, et cessèrent de leur fournir des dons...
Après les
troubles de 1848 et les pénuries alimentaires qui s'ensuivirent,
d'autres jeunes femmes vinrent se joindre à la communauté. Elles se
tournèrent vers l'aide à la réinsertion de femmes sortant de prison.
La
Congrégation — les Sœurs des Pauvres de Saint-François — obtint de
Mgr Johannes von Geissel une reconnaissance locale de l'Eglise, en
1851. Malgré certaines objections de prudence en ce qui concernait
l'exigence de stricte pauvreté des Sœurs, elles avaient pu émettre
leurs premiers vœux en 1850. L'Etat prussien approuva en 1853 cette
association de religieuses qui " favorisait la paix sociale ".
Les Sœurs
connurent une expansion rapide. En 1858, suivant l’émigration des
paysans allemands aux Etats-Unis, elles ouvrirent une maison dans
l’Ohio. Mère Françoise Schervier visita sa mission américaine en
1863 et en 1868*. Elle fit à ce propos don d’une somme importante
pour l’édification d’une chapelle allemande au Havre qui servit aux
nombreux émigrés allemands en partance pour les Etats-Unis. Pendant
la guerre civile américaine, la guerre austro-prussienne de 1866 et
la guerre franco-prussienne de 1870, les Sœurs s’occuperont
d’hôpitaux de campagne pour soigner les soldats blessés.
Mère Françoise
Schervier mourut, le 14 décembre 1876 à l’âge de 58 ans, entourée de
ses compagnes. A sa mort, plus de 700 religieuses étaient à l’œuvre.
Elle avait reçu le soutien dans ses dernières années de
l’impératrice Augusta.
La Congrégation
fut définitivement approuvée par saint Pie X, en 1908, et la cause
de sa fondatrice introduite en 1912. Elle fut béatifiée par le Pape
Paul VI, le 28 avril 1974. A cette époque, les Sœurs étaient au
nombre de 1700, réparties en 121 maisons.
Depuis que la
Province des Etats-Unis a pris son autonomie, en 1959, les Sœurs se
sont divisées en deux branches : La branche américaine comprend une
quarantaine de maisons avec 400 Sœurs ; avec en plus des maisons en
Italie, au Sénégal et au Brésil. Elles ont pris le nom de Sœurs
Franciscaines des Pauvres et ont leur maison-mère à New-York. Elles
sont encore à la tête de maisons de retraite acceptant les invalides
en état de grande dépendance et d’autres œuvres répondant aux
situations les plus délicates.
La branche
allemande autonome, avec sa maison-mère à Aix-la-Chapelle, est plus
contemplative. Cette branche de 312 religieuses possède 37 maisons,
essentiellement en Allemagne, dont 5 maisons en Belgique, 2 maisons
au Danemark et une maison à Omsk en Sibérie qui, par l’intermédiaire
de la Caritas, participe à différentes œuvres sociales et
éducatives. Elles ont pris le nom de Pauvres Sœurs de
Saint-François. Elles ne connaissent pas de vieillissement de leurs
effectifs. Leur Supérieure Générale est la dynamique Sr Katharina-Maria
Finken, la Supérieure Provinciale est la Sr Maria-Martha Kruszynski.
Elles sont " attentives aux conséquences néfastes de la
mondialisation ".
Cette branche a
la particularité — voulue en 1849 par la bienheureuse
fondatrice — de posséder un couvent (à Mechernich-Kommern en
Rhénanie) où prient des religieuses cloîtrées, appartenant à la
Congrégation des Pauvres Sœurs de Saint-François.
Les deux branches
gardent des liens d’amitié.
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