Lébuin de Deventer
Prêtre, Saint
VIII siècle

S. Lébuin s'appelait Liefwin dans la langue des Anglo-Saxons, parmi lesquels il était né. Il montra de bonne heure un grand attrait pour la prière, les veilles, la mortification et les œuvres de miséricorde. Quoiqu'il eût élevé l'édifice d'une solide vertu, il continua toujours de travailler à sa sanctification avec crainte et tremblement. Tous ceux qui le connaissaient, l'aimaient autant qu'ils le respectaient. On était frappé de je ne sais quoi de divin qui brillait sur son visage.

Lorsqu'il eut été ordonné prêtre, il passa dans la Basse-Allemagne, pour partager les travaux de plusieurs missionnaires qui y prêchaient la foi. Il s'adressa à S. Grégoire, que saint Boniface avait choisi pour son vicaire, et auquel il avait confié l'administration du diocèse d'Utrecht. Il en fut reçu avec joie. On le chargea d'aller avec Marcellin ou Marchlem, disciple de saint Willibrord, annoncer l'Évangile dans le pays, présentement appelé Over-Yssel. Une dame, nommée Abachilde, le regarda comme un ange envoyé du ciel. Un grand nombre d'idolâtres se convertirent, et le saint missionnaire bâtit une chapelle sur le bord occidental de la rivière, à Hiulpe ou Wulpe, environ à une lieue de Deventer, vers l'an 772. Il eut beaucoup à souffrir de la part des païens , qui ne voulurent pas l'écouter ; mais les persécutions ne purent ralentir son zèle. Les Saxons, qui habitaient dans le voisinage , avaient coutume de tenir tous les ans une assemblée à Marklo, sur le Wéser, pour y traiter des affaires publiques de leur nation. Lébuin s'y rendit ; et se présenta revêtu de ses habits sacerdotaux, tenant une croix d'une main, et le livre des Évangiles de l'autre. Lorsqu'on allait offrir des sacrifices, il s'écria avec un ton de voix plein de force et de majesté : « Écoutez-moi tous, ou plutôt écoutez le Dieu qui vous parle par ma bouche. Sachez qu'il est le Seigneur, le Maître du ciel, de la terre, et de toutes les choses qui existent. Lui seul est le vrai Dieu. » II ajouta qu'il était son ambassadeur, qu'il venait le leur faire connaître, et il leur prédit que s'ils refusaient de l'écouter, ils périraient bientôt par les armes d'un prince que le même Dieu susciterait contre eux dans sa colère. A ce discours, plusieurs Saxons entrent en fureur, et s'arment de ce qu'ils rencontrent pour lui ôter la vie, mais le Saint, protégé du Ciel, passe au milieu d'eux, et s'échappe. Alors un des principaux de l'assemblée représenta, qu'ayant reçu avec humanité et même avec distinction les ambassadeurs des hommes, ils devaient au moins traiter de la même manière un ambassadeur de Dieu, et que la conduite qu'on venait de tenir, ne manquerait pas d'attirer des malheurs sur la nation. Ces représentations firent revenir les esprits ; on convint de permettre au missionnaire d'aller et de prêcher partout où il voudrait.

Mais les Saxons ayant été depuis attaqués par Charlemagne, ils persécutèrent les chrétiens ; ils vinrent jusqu'à Deventer, où ils brûlèrent l'église que le Saint y avait fait construire. Lébuin en fit bâtir une autre, quand ils se furent retirés. Il termina sa vie au milieu des travaux apostoliques et des austérités de la pénitence, vers la fin du huitième siècle, et fut enterré dans son église de Deventer, où il s'opéra plusieurs miracles par la vertu de ses reliques. Bertulfe, vingtième évêque d'Ulrecht, y fonda une église collégiale sous l'invocation du Saint.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard.