L'ordre
des Acemètes ne différait qu'en
un seul point des moines de saint Basile ; chacun de leurs
monastères était divisé en plusieurs chœurs qui, se succédant l'un à
l'autre sans aucune interruption, chantaient l'office divin nuit et
jour. C'est de là que leur vint le nom d'Acemètes, qui en grec
signifie non-dormans. Cet institut eut pour fondateur un
gentilhomme de Syrie. Il se nommait Alexandre, et il avait servi
plusieurs années avec distinction. Mais ayant renoncé au monde en
402, il bâtit sur le bord de l'Euphrate un monastère, où il assembla
près 'de quatre cents moines, qu'il divisa en plusieurs chœurs, de
la manière que nous venons de le dire. L'usage de chanter les
louanges du Seigneur nuit et jour sans interruption, s'appelait
la louange perpétuelle.
Alexandre vint
depuis à Constantinople. Il fonda un monastère près de cette ville,
du côté du Pont-Euxin. Il y eut jusqu'à trois cents moines sous sa
conduite. Ce monastère, dit de Saint-Menne , devint dans la suite si
nombreux , qu'il en fonda un autre à Gomon sur le Pont-Euxin, en
Bithynie. Il y mourut en 430. Sa vie a été publiée par Bolandus,
sous le 15 de Janvier. Mais quoiqu'il ait le titre de saint dans les
menées, lorsqu'il est parlé de lui par occasion, son nom ne se
trouve dans aucun calendrier, soit de l'Eglise grecque, soit de l'Eglise
latine.
Jean, successeur
d'Alexandre, réunit tous ses religieux dans le monastère de Gomon.
Marcel, qui succéda à Jean, porta l'ordre au plus haut degré de
célébrité. Il sortait d'une famille illustre d'Apamée, en Syrie. Ses
parents lui laissèrent en mourant une fortune considérable. Quoique
à la fleur de l'âge, il ne se laissa point séduire par les dangers
du monde. Il se retira à Antioche, où il partagea son temps entre
l'étude et les exercices de piété. La méditation de la loi du
Seigneur le convainquit de plus en plus de la vanité des choses
terrestres, et l'enflamma d'amour pour celles du ciel. Il céda ses
droits à son frère, et distribua aux pauvres la partie de ses biens
dont il pouvait disposer. Affranchi de tous les liens qui le
retenaient dans le monde,
il se retira à Ephèse, où il se mit sous la conduite de quelques
serviteurs de Dieu qui vivaient dans cette ville. Il donnait la plus
grande partie de la nuit à la prière, et il employait le jour à
copier des livres, ce qui lui fournissait de quoi vivre et de quoi
assister les pauvres, Ayant entendu parler des austérités et de la
solitude des Acemètes, il résolut d'entrer dans leur ordre. Il y
prit l'habit, et courut avec une ardeur incroyable dans la carrière
de la pénitence. Après la mort d'Alexandre, on l'élut pour le
remplacer ; mais il s'enfuit et se cacha de manière qu'on ne put le
trouver. Lorsqu'il fut de retour, l'abbé Jean, successeur
d'Alexandre, voulut qu'il l'aidât dans l'exercice des fonctions de
sa place. Cependant, pour éprouver son humilité, il lui fit remplir
quelque temps le dernier emploi de la communauté. Marcel s'en
acquitta de la manière la plus édifiante, et pria même l'abbé de l'y
laisser toute sa vie.
Jean étant mort, notre Saint fut choisi pour lui succéder, vers l'an
440. Il assista au concile qui se tint huit ans après à
Constantinople, et il acquiesça à la demande qu’il lui fit de
ramener ses religieux dans leur premier monastère. Il gouverna son
ordre avec une vertu et une prudence .admirables. Comme il était
obligé d'agrandir les bâtiments de sa communauté, il trouva des
secours pour cet effet, dans les libéralités de Pharétrius. C'était
un seigneur fort riche qui renonça au monde avec ses fils, pour
vivre sous la conduite du saint abbé. Ils prirent tous l'habit le
même jour. Vers l'an 465, Stude, qui avait été consul, fit bâtir
pour les Acemètes un monastère considérable dans la ville, près la
porte Dorée. On dit qu'il s'y trouva jusqu'à mille moines à la fois.
On leur donna depuis le nom de Studites, à cause du monastère que
Stude avait fondé.
Saint Marcel
assista au concile que saint Flavien tint à Constantinople contre
Eutychès, et il y condamna les erreurs de cet hérésiarque après les
Pères qui composaient
cette vénérables assemblée. Il vécut fort longtemps, et pratiqua
toutes sortes de bonnes œuvres pendant les soixante ans qu'il passa
dans l'état monastique. Il mourut en 485 ou 486. Les Grecs et les
Latins l'honorent en ce jour.
Alban Butler :
Vies des pères, des martyrs, et des autres principaux saints… traduction
de
Jean François Godescard. |