Le Seigneur avait voulu avoir
besoin d’Alexandrina pour l’aider dans le mystère insondable de la Rédemption.
Pour cela, il la prépara soigneusement, choisissant Lui-même les fleurs qu’il
voulait planter dans ce jardin vierge
après avoir, tel un jardinier
consciencieux, préparé le terrain, éliminant toutes les mauvaises herbes.
Il lui traça la route à suivre par
les paroles entendues en 1932 ou 1933 : souffrir, aimer, réparer ; Il lui
choisit ensuite un Directeur spirituel selon son Cœur ; puis l’“anoblit” de
quelques charismes, avant de lui parler clairement et de lui faire une première
demande toute conforme aux trois mots ci-dessus. Il lui dit un jour :
“Donne-moi tes mains, je veux les clouer avec les miennes”.
Le ton était donné et la mission
était ainsi précisée : souffrir la Passion du Maître dans sa chair. Cela se
vérifiera jusqu’en 1942, de façon visible, puis, de 1942 jusqu’à sa mort,
Alexandrina souffrira intérieurement, tous les vendredis, et même d’autres jours
de la semaine.
A cause de sa maladie, Alexandrina
ne pouvait pas écrire, ou alors quelques lignes : cela la faisait trop souffrir,
mais elle “devait tout dire à son directeur spirituel", au
sujet des paroles qu’elle venait d’entendre, et qui concernaient l’invitation à
la Passion qui lui avait été faite par Jésus.
Comment faire alors ?
Ce qui se passa
ensuite est presque surréaliste, car, sa sœur Deolinda qui,
pour l’aider en lui évitant de souffrir, écrivait sous sa dictée, tout en
n'étant pas encore au courant de la teneur particulière des faits mystiques dont
bénéficiait maintenant sa sœur Alexandrina, qui hésitait à les
lui communiquer, comme elle l’avoue elle-même :
“Je ne voulais rien dire à ma
sœur, mais je ne voulais pas non plus me taire… je devais tout dire à mon
directeur spirituel…”
Elle finit par vaincre cette
timidité et se lança dans sa dictée… “Nous l’avons fait sans échanger le
moindre regard”, avoue-t-elle, gênée.
Puis, elle nous fait partager
quelques-unes de ses expériences mystiques, de ses visions… et son désir du Ciel.
* * * * *
« Ce fut en septembre 1934 que j’ai
compris que c’était la voix de Notre Seigneur et non pas une exigence, comme je
le pensais. Ce fut alors qu’Il m’a parlé et demandé :
— Donne-Moi tes mains : je veux
les clouer avec les miennes ; donne-Moi tes pieds : Je veux les clouer avec les
miens ; donne-Moi ta tête : Je veux la couronner d’épines, comme ils Me l’ont
fait à moi ; donne-Moi ton cœur : Je veux le transpercer avec la lance, comme
ils ont transpercé le Mien ; consacre-Moi tout ton corps ; offre-toi toute à
Moi ;
Je veux te posséder entièrement.
Il m’a demandé ceci deux fois.
Je ne sais pas expliquer mon
tourment, parce que je ne peux pas écrire.
Je ne voulais rien dire à ma sœur, mais je ne voulais pas non plus le taire, car
j’ai compris que je ne devais pas le faire, taire la parole de Dieu : je devais
tout dire à mon directeur spirituel
.
Je me suis décidée à faire le sacrifice et j’ai demandé à ma sœur d’écrire tout
ce que je lui dicterai. Nous l’avons fait sans échanger le moindre regard. La
lettre étant écrite, tout cela est resté entre nous et nous n’en avons plus
parlé.
Si jusque là toutes les lettres de
mon directeur spirituel me rendaient joyeuse, à partir de ce moment, je n’en
éprouvais plus la moindre consolation : je vivais dans la crainte qu’il me
désapprouve et me dise que tout cela n’était qu’illusion. J’avais cédé à
l’invitation du Seigneur, mais je pensais que les sacrifices qu’Il me demandait
n’étaient que ceux résultant de ma maladie, même si majorés; il ne m’était pas
venu à l’esprit qu’Il me ferait passer par des phénomènes singuliers. Le
directeur m’a exigé de tout écrire et, pendant deux ans et demi il ne m’a jamais
dit qu’il s’agissait bien de choses de Dieu.
Ce silence m’a beaucoup
fait souffrir.
À cette époque Jésus
m'apparaissait, et me parlait souvent. La consolation spirituelle était grande
et les souffrances plus faciles à supporter. En toute chose je sentais de
l'amour pour mon Jésus et je sentais qu'Il m'aimait, étant donné que je recevais
de la tendresse en abondance. Je cherchais le silence. O comme je me sentais
bien dans le recueillement et bien unie à Lui !... Jésus se confiait à moi. Il
me disait des choses tristes, mais le réconfort et l'amour qu'Il me procurait,
rendaient plus douces ses lamentations. Je passais des nuits et des nuits sans
dormir, à converser avec Lui, dans la contemplation de ce qu'Il me montrait.
Une certaine fois j'ai vu Jésus tel
un jardinier soignant ses fleurs, les arrosant, etc.
Il se promenait au milieu de celles-ci, m'en montrait les variétés. D'autres
fois Il m'apparaissait pour me montrer les rayons éblouissants de son Cœur.
Une fois j'ai vu la Petite-Maman
avec l’Enfant Jésus dans ses bras et une autre fois je l'ai vue en Immaculée
Conception :
O comme Elle était belle !... Comme j'aimerais n'aimer qu'Elle et Jésus !... Je
ne serais vraiment bien qu'en Leur compagnie. »
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