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Il faut transmettre au monde le Feu
de la Miséricorde
Traditionnellement, l’évangile de ce dimanche est celui de
l’apparition de Jésus aux Apôtres, d’abord en l’absence de
Thomas au soir de la Résurrection, puis en sa présence huit
jours après. Depuis quelques années, c’est particulièrement
aussi le Dimanche de la Miséricorde Divine, ainsi appelé par
la volonté de Notre-Seigneur dans sa manifestation à sainte
Maria Faustyna Kowalska, dite “Sœur Faustine”, 1905-1938,
que Jean-Paul II a canonisée en 2000 (et qui a sa fête le 5
octobre). Voyons donc ce que les textes d’aujourd’hui nous
montrent de la Miséricorde Divine.
Cette
apparition du Ressuscité le jour-même de la Résurrection est
très importante dans la vie de la première Église, non pas à
cause du doute momentané de Thomas, mais parce que le
Ressuscité souffle l’Esprit Saint sur les Apôtres. Le
Christ, qui avait rendu l’esprit, qui était mort, a
aujourd’hui repris la vie ; il se montre aux Apôtres et,
après leur avoir souhaité la Paix, son premier geste est de
leur insuffler comme une deuxième vie, une nouvelle force :
par l’Esprit, ils remettront désormais les péchés.
A chaque pas
de sa vie publique, le Seigneur n’a cessé de remettre les
péchés, de pardonner ; maintenant, dans son immense bonté,
avant de regagner les Demeures éternelles, il transmet ce
pouvoir aux Apôtres et à toute l’Église : Tout homme à qui
vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis.”
Saint Thomas
n’a donc pas reçu ce pouvoir, puisqu’il était absent ? On
pourra répondre que, à travers les onze Apôtres présents,
Jésus a soufflé aussi sur lui, ainsi que sur tous les
successeurs des Apôtres, sur tous les évêques de tous les
temps et de toutes les nations (et rien n’empêche non plus
de supposer que Pierre, le chef des Apôtres, ait à son tour
soufflé sur Thomas pour lui transmettre ce pouvoir).
L’ordination
épiscopale ne comporte pas cette insufflation de l’Esprit ;
mais le geste consécrateur réside dans l’imposition des
mains sur la tête du Candidat, en signe de descente de
l’Esprit sur ce prêtre qui va devenir évêque. Il semble que
ce rite remonte déjà à la première Église, car saint Paul
parle du don que son disciple Timothée a reçu “par
l’imposition de (ses) mains” (2Tim 1:6).
Voici donc
officiellement institutionnalisé ce Sacrement de la
Miséricorde, la Réconciliation sacramentelle, l’accueil
sacerdotal de tout pécheur repenti. Mais n’omettons pas
maintenant d’admirer la magnanimité de Jésus qui “prend
Thomas au mot” et lui fait voir et toucher les plaies de ses
mains et de son côté. Aucun des autres n’a osé ce geste qui
tient de l’intimité, mais Thomas l’a demandé et (presque)
obtenu. En réalité, il n’est pas dit qu’il ait réellement
touché du doigt les plaies glorieuses de Jésus, mais il aura
certainement vu au moins celles des mains, et surtout il
nous a laissé cette magnifique déclaration de Foi : “Mon
Seigneur et mon Dieu”. Il se pourrait bien qu’à ce moment-là
Thomas ait eu une sorte de vision céleste et que, comme les
trois autres Apôtres sur le Mont Thabor, il ait contemplé
au-delà de la sainte humanité de Jésus, Sa lumineuse
divinité. Quoi qu’il en soit, la conviction la plus totale a
maintenant remplacé le doute et Thomas ira évangéliser la
Foi courageusement dans les contrées les plus lointaines
d’Asie.
Un récent
converti, qui n’était pas vraiment un enfant de chœur, tant
s’en faut, mais qui est maintenant un authentique apôtre de
Jésus, a eu dans sa prison une attitude un peu semblable à
celle de saint Thomas, lorsqu’il interpella ce “Mec” qu’il
ne connaissait pas encore en l’invitant à venir le voir à
deux heures du matin. A l’heure dite, quand notre bonhomme
n’y pensait plus et dormait profondément, le Seigneur l’a
pris au mot, Il s’est montré, l’a appelé, lui a parlé : à
sept heures du matin, l’homme était encore à genoux,
pleurant ses péchés, transformé et désormais respectueux de
tous, obéissant, discipliné, et prisonnier modèle. Ce n’est
pas un secret de mentionner ici le nom d’André Levet, que
vous pourrez retrouver sur Internet.
Vraiment la
miséricorde de Dieu est immense envers tous ceux qui ouvrent
leur cœur à la Vérité. Et comment ne pas rendre aussi
d’immenses actions de grâces pour cette divine promesse que
Jésus nous adresse à travers l’apôtre Thomas : “Heureux ceux
qui croient sans avoir vu.” Indirectement, Jésus rappelle à
Thomas leur conversation de deux jours avant ; c’est en
effet le même Thomas qui, lors de la dernière Cène, demanda
à Jésus : “Seigneur nous ne savons pas où tu vas. Comment en
connaîtrions-nous le chemin ?” et en reçut cette sublime
réponse : “C’est moi qui suis le Chemin, la Vérité, et la
Vie. Nul ne va au Père que par moi.” A ce moment-là, les
apôtres n’avaient pas encore réalisé par quel “chemin” le
Christ devait revenir à la Vie pour nous y introduire, mais
il ne se passera qu’un peu plus de deux jours avant que tout
soit réalisé : alors le Christ sera passé dans les liens de
la mort, aura repris vie et leur apparaîtra avec son corps
glorieux. Voilà le “chemin” dans la “vérité”, le chemin vers
la “Vie”.
Oui,
vraiment, heureux ceux qui croient sans avoir vu. Heureux si
nous savons nous remettre entièrement à la volonté de Dieu,
à la Providence, à l’Église, et que sans hésiter nous
mettons toute notre personne à Sa disposition, pour être
dans la Main divine un bon instrument de travail pour la
Vigne du Seigneur. Peu importe où Dieu nous mènera,
mettons-nous à Son écoute, à Sa disposition ; malgré toutes
nos faiblesses, Il nous conduira vers la Vérité tout
entière.
Vivre dans un
tel état d’esprit explique la joie des premiers Chrétiens
que nous décrivent les Actes des Apôtres : “Tous ceux qui
possédaient des champs ou des maisons les vendaient, et ils
en apportaient le prix pour le mettre à la disposition des
Apôtres. On en redistribuait une part à chacun des frères au
fur et à mesure de ses besoins.” Apparemment on avait déjà
une réponse au problème social, il y a deux mille ans. Et
efficace.
Pour
conclure, disons aujourd’hui la prière que fit Jean-Paul II
à Cracovie, lors de son homélie :
“Dieu, Père
miséricordieux, qui as révélé Ton Amour dans Ton Fils
Jésus-Christ, et l’as répandu sur nous dans l’Esprit Saint
Consolateur, nous Te confions aujourd’hui le destin du monde
et de chaque homme. Penche-toi sur nos péchés, guéris notre
faiblesse, vaincs tout mal, fais que tous les habitants de
la terre fassent l’expérience de Ta Miséricorde, afin qu’en
Toi, Dieu Un et Trine, ils trouvent toujours la Source de
l’Espérance. Père éternel, par la Douloureuse Passion et la
Résurrection de Ton Fils, accorde-nous Ta Miséricorde, ainsi
qu’au monde entier. Amen”.
Le même
Pontife ajoutait : “Dans la Miséricorde de Dieu, le monde
trouvera la paix, et l’homme trouvera le bonheur !… Que ce
message de la Miséricorde Divine atteigne tous les habitants
de la terre et remplisse leur cœur d’Espérance… Il faut
transmettre au monde le Feu de la Miséricorde” (17 août
2002).
Abbé Charles Marie de Roussy
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