Saint Paulin naquit à
Bordeaux en 354, d'une des plus anciennes et des plus célèbres
familles sénatoriales de Rome,
qui avait d'immenses possessions en
Italie, en Aquitaine et en Espagne. Ausone, le premier orateur et
le
premier poète de son temps, fut son maître; et, sous sa conduite,
Paulin devint lui-même un orateur et un écrivain fort remarquable.
Ses talents, ses richesses, ses vertus l'élevèrent aux plus hautes
dignités de l'empire; il fut même honoré du consulat, l'an 378.
Paulin avait
vingt-quatre ans quand il épousa Thérésia, opulente patricienne,
pieuse chrétienne, dont l'influence rapprocha peu à peu son époux de
la vérité et le conduisit au baptême. Ses relations avec le célèbre
saint Martin, grand thaumaturge des Gaules, qui le guérit
miraculeusement d'une grave maladie des yeux, contribua beaucoup
aussi à tourner ses pensées vers la beauté de la perfection
chrétienne. Il reçut le Baptême et goûta enfin la paix qu'il
cherchait depuis longtemps. La mort de son jeune enfant, nommé
Celsus, porta de plus en plus le nouveau chrétien au mépris des
biens de ce monde.
Son immense fortune lui
était à charge; il s'en dépouilla en faveur des pauvres, croyant que
“le véritable riche est celui qui compte sur Dieu et non celui qui
compte sur la terre” et que “celui qui possède Jésus possède plus
que le monde entier”. Dès lors Paulin et Thérésia, tout en vivant
dans une union parfaite, pratiquèrent la continence. Ces nouvelles
jetèrent l'étonnement dans tout l'empire; à l'étonnement succédèrent
les dérisions, les reproches, le mépris. Paulin, en revanche, voyait
sa conduite exaltée par tout le monde chrétien et recevait les
éloges des Ambroise, des Augustin, des Jérôme et des Grégoire.
Il fut ordonné prêtre
en 393, et alla se fixer à Nole, en Italie, où il fit de sa maison
une sorte de monastère. En 409, le peuple de Nole l'acclama comme
évêque. Son épiscopat est célèbre par un acte de dévouement devenu
immortel. Une pauvre veuve avait vu son fil unique emmené prisonnier
par les barbares; elle va trouver Paulin, le priant de racheter son
enfant: "Je n'ai plus d'argent, dit le pontife, mais je m'offre
moi-même." La pauvre femme ne pouvait le croire, mais il l'obligea à
se rendre avec lui en Afrique, où il se livra en échange du
prisonnier. Au bout de quelques temps, la noblesse du caractère et
les vertus de Paulin intriguèrent son maître; il fut obligé de se
découvrir, et le barbare, confus d'avoir pour esclave un évêque, lui
donna sa liberté avec celle de tous les prisonniers de sa ville
épiscopale. Sa réception à Nole fut un triomphe. (Abbé L. Jaud,
Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame,
1950).
Extrait d'une lettre de S. Paulin de Nole :
« Accomplissant le
mystérieux dessein de sa bonté, le Seigneur assume la condition de
serviteur et consent à s'humilier pour nous jusqu'à la mort de la
croix (Ph 2,8). Par cet abaissement visible, il réalise notre
élévation jusqu'au ciel, qui est intérieure et invisible. Regarde où
nous étions tombés dès le commencement ; comprends-le bien, c'est
par le dessein de la sagesse et de la bonté de Dieu que nous sommes
rendus à la vie. Avec Adam nous étions tombés par orgueil ; c'est
pourquoi nous nous humilions dans le Christ afin d'effacer
l'ancienne faute par la pratique de la vertu opposée. Nous avons
offensé le Seigneur par orgueil, nous lui plaisons maintenant par
notre humilité.
Réjouissons-nous,
glorifions-nous dans le Seigneur qui a fait nôtres son combat et sa
victoire en nous disant : “Courage, car j'ai vaincu le monde”
(Jn 16,33)... Lui, l'invincible, combattra pour nous et il vaincra
en nous. Alors le prince des ténèbres sera jeté dehors, car s'il
n'est pas chassé du monde où il est partout, il est chassé du cœur
de l'homme ; la foi, lorsqu'elle pénètre en nous, le repousse pour
faire place au Christ dont la présence jette le péché dehors et
exile le serpent...
Que les orateurs
gardent leur éloquence, les philosophes leur sagesse, les rois leurs
royaumes ; pour nous, la gloire, les richesses et le royaume, c'est
le Christ ; pour nous la sagesse, c'est la folie de l'Évangile ;
pour nous la force, c'est la faiblesse de la chair, et la gloire,
c'est le scandale de la croix ».(Lettre 38, 3-4.6 : PL 61, 359-360). |