Pierre-Louis-Marie Chanel naquit le 12 juillet 1803, à Cuet dans
l'Ain, village du diocèse de Lyon. Il était le cinquième d'une
famille de huit enfants. De sept à douze ans, il travaillait comme
berger. Un jour, un prêtre
le
remarqua et se chargea de le faire instruire.
Après ses
humanités au séminaire de Meximieux et ses études théologiques au
grand séminaire de Brou, il reçut l'onction sacerdotale, le 15
juillet 1827. Il exerça d'abord le ministère pastoral à Ambérieu,
comme vicaire, puis à Crozet, en qualité de curé. Mû par un désir de
plus grande perfection, il entra dans la Société de Marie en 1831 et
enseigna pendant cinq ans au petit séminaire de Belley.
En 1836, il
sollicita la faveur d'être appliqué à l'apostolat des missions
d'Océanie. Le 24 décembre, il s'embarquait au Havre avec Mgr
Pompallier et au bout de dix mois de navigation, ils abordaient à
l'île de Futuna.
Pendant que
l'évêque continuait sa route vers la Nouvelle-Zélande, le Père
Chanel s'établissait à Futuna avec deux compagnons. Pendant les deux
premières années de leur installation, ce fut le chef de la
peuplade, le roitelet Niuliki, qui les hébergea et leur fournit des
vivres. Les missionnaires employèrent ce temps à apprendre la langue
du pays et se bornèrent à baptiser les enfants moribonds. Dès qu'il
se sentit capable de prêcher, le Père Chanel commença le travail
d'évangélisation.
Après de très
durs débuts, l'apôtre réussit à répandre l'Évangile chez les
indigènes où régnait encore l'anthropophagie. Il rendait tous les
services possibles, soignait les blessés, empêchait souvent la
guerre entre les idolâtres; on l'appelait: l'homme à l'excellent
coeur. Lorsque Niuliki, roi et pontife à la fois, vit le mouvement
des conversions au christianisme prendre de l'ampleur, il cessa
d'envoyer des vivres aux missionnaires et alla s'établir dans un
autre village.
Pour subsister,
les missionnaires furent réduits à défricher un champ de manioc.
Pour les forcer à fuir le pays, on mangeait leurs fruits et leur
récolte. Réduits à la plus extrême pauvreté, les Pères durent manger
leur chien pour ne pas mourir de faim. Menacé de mort, le Père
Chanel répond: «La religion est implantée dans l'île, elle ne s'y
perdra point par ma mort, car elle n'est pas l'ouvrage des hommes,
mais elle vient de Dieu.»
Les zélés
missionnaires continuèrent à réunir leurs catéchumènes tous les
dimanches et malgré tout, le petit groupe ne cessa de s'accroître.
Le propre fils du roi, touché par la grâce et par les enseignements
des missionnaires se déclara publiquement chrétien. Cette conversion
acheva d'exaspérer Niuliki et le décida à en finir avec la religion
chrétienne à Futuna.
Le 28 avril 1841,
à la pointe du jour, une horde sauvage, conduite par le gendre de
Niuliki et armée de lances, de massues, de haches, envahit la maison
des missionnaires en un moment où le Père Chanel était seul. Les
indigènes pénétrèrent dans le jardin où se trouvait le missionnaire,
l'assommèrent à coups de bâton et de massue, puis se livrèrent au
pillage. Leur carnage terminé, voyant que le Père respirait encore,
Musumusu, le gendre du roi, l'acheva d'un coup de hachette sur la
nuque. C'est ainsi que, sans une plainte, sans un soupir, le Père
Chanel rendit son âme à Dieu.
Peu d'années
après ce drame, toute l'île de Futuna était chrétienne, y compris
les assassins du saint martyr. Sa Sainteté Pie XII a canonisé
solennellement Pierre Chanel, le 13 juin 1954.
J.M. Planchet,
Vie des Saints, édition 1946, p. 438-439; Résumé |