Un des personnages les plus étonnants
du XIIIe siècle Raymond Lulle est autodidacte,
philosophe, théologien, alchimiste, poète, mystique, visionnaire.
Considéré par les uns comme un aventurier, suspecté
d’hérésie
par d’autres, récupéré par les alchimistes, il a été béatifié dans
l’Ordre franciscain qui retient surtout son extraordinaire zèle
missionnaire, et son amour inconditionnel du Christ-Sauveur. On le
désigne sous le titre de Docteur illuminé, mais lui-même
s’intitulait « Procureur des Infidèles ». Raymond est mal connu,
malgré ses œuvres autobiographiques dans lesquelles il n’est pas
aisé de trier le vrai du caché ou de l’exagéré. Sa vie est un roman,
et c’est bien ainsi qu’il la conçoit lui-même.
On sait qu’il est né à Palma de
Majorque, entre 1232 et 1235, d’une famille noble. Son père, catalan
d’origine était militaire et aurait participé à la “reconquista” de
l’île de Majorque. Mais la présence dans l’île de nombreux Maures,
après la reconquête, semble avoir marqué son destin et l’intérêt
qu’il porta toute sa vie au dialogue avec l’Islam. Dès l’âge de
douze ans, il est envoyé comme page à la cour de Jacques I d’Aragon
où il mène une vie légère, et fertile en aventures féminines.. Puis
il se marie, très jeune, avec une beauté qu’il admire qui lui donne
un garçon et une fille. Malgré cela il continue sa vie volage et
écrit des madrigaux pour ses conquêtes, jusqu’à l’âge de trente ans.
Mais subitement il va changer de vie. En 1263, le Christ crucifié
lui apparaît à plusieurs reprises et l’invite à consacrer sa vie à
la conversion des Musulmans. La mort brutale de sa femme l’affecte
profondément. Il se retire du monde, après avoir assuré l’avenir de
ses enfants. Il part en pèlerinage pour expier sa vie passée, puis
se retire dans un ermitage, où il conçoit son projet missionnaire
que l’on peut ainsi résumer :
Écrire des livres de controverse et
d’apologétique pour affronter les musulmans ;
Fonder des écoles de langues arabe et
hébraïque pour la formation de futurs missionnaires ;
Évangéliser par la parole et par
l’action.
Pendant neuf ans, dans sa retraite de
Randa, il étudie la philosophie et la théologie, il apprend
l’hébreu, ainsi que la langue arabe avec l’aide d’un esclave. Là, il
obtient la fondation d’un couvent de Frères Mineurs, prémisse de ses
« collèges missionnaires ».
Il aurait bien voulu être admis comme
frère mineur, mais sa vie passée et ses idées ne favorisent pas son
admission dans l’Ordre. Il rejoindra donc le Tiers-Ordre de saint
François, en restant laïc dans le monde et en conservant ainsi sa
liberté d’action. Il entreprend des démarches à travers toute
l’Europe pour obtenir des soutiens : il visite le prince Jacques
d’Aragon, écrit au Pape, au roi de France et à divers supérieurs
religieux. Ceux-ci tout en restant sceptiques l’aident cependant à
fonder le collège missionnaire de Miramar.
En 1285, il se rend à Rome, au
chapitre général des Prêcheurs, puis à Paris où il fréquente
l’Université et passionne quelques jeunes religieux pour l’aventure
missionnaire. Malgré ses voyages incessants, en Europe, et ses
traversées de la Méditerranée, il continue à écrire toutes sortes de
livres.
Tantôt à Montpellier, à Perpignan, à
Bologne, à Paris, à Majorque et à Chypre, et souvent à Rome, où il
rencontre tour à tour les papes Nicolas IV, Célestin V, Boniface
VIII pour les convaincre de soutenir son ministère. Il trouve des
auditoires d’étudiants partout où il passe, et il combat les idées
philosophiques d’Averroès.
En 1307 il part à Bougie, en Algérie,
pour disputer sur la foi chrétienne et la religion de Mahomet. Il
est emprisonné durant 6 mois en cette ville, puis peut retourner en
Europe, spécialement en Italie, à Gênes, à Pise où il essaie de
convaincre les peuples de la nécessité d’une croisade.
En 1311, il visite le concile de
Vienne pour persuader les évêques de créer un collège multilingue où
seraient confrontées les thèses des savants juifs, arabes et
chrétiens. Il rêve d’une association mondiale des penseurs car il
est certain de la supériorité de la pensée chrétienne.
Après une très abondante production
littéraire, il rédige enfin son Arbor scientiae, reprise de
son Ars magna, dans lequel il prétend donner une clé des
connaissances qui permette de découvrir la vérité de chaque science,
par la rigueur du langage et de la logique.
En 1314, âgé de plus de 80 ans, il
repart comme prédicateur infatigable, pour Tunis, afin de prêcher
encore la foi chrétienne. Selon la légende qui en fait un martyr, il
fut attaqué et lapidé par les habitants qui l’abandonnèrent comme
mort, sur la place publique. Mais il fut recueilli par des marins
génois qui le reconduisirent à Majorque. Il y mourut, soit à bord du
bateau qui le transportait, soit une fois arrivée à terre, soit plus
prosaïquement, si la légende est fausse, dans son lit de vieillard,
en sa ville natale.
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