Saint Romuald naquit à
Ravenne, en 906, d'une des plus illustres familles d'Italie. Sa
jeunesse fut orageuse,
mais bientôt la grâce, qui le poursuivait,
triompha de ses résistances, et il racheta son passé par les plus
effrayantes
austérités.
Après avoir vécu sept
ans dans un monastère de Saint-Benoît, il se sentit inspiré de mener
la vie solitaire, et alla habiter avec un saint homme qui lui
faisait réciter chaque jour de mémoire tout le psautier. Quand il
faisait quelque faute, l'ermite, toujours armé d'une verge, lui
donnait un rude coup sur l'oreille gauche. Romuald souffrait
patiemment; cependant un jour, s'apercevant qu'il perdait l'ouïe du
côté gauche, il pria le rude vieillard de le frapper sur l'oreille
droite. Ce fait suppose un grand progrès dans la vertu.
Bientôt Romuald devint
le chef d'une foule de solitaires; il réforma et fonda un grand
nombre de monastères, et établit enfin l'Ordre des Camaldules.
Dieu éprouva sa vertu
par les terribles assauts du démon, qui lui demandait à quoi
servaient tant de prières et de pénitences. Les victoires du Saint
rendaient son ennemi plus furieux, et plus d'une fois il fut battu
et foulé aux pieds par des esprits malins revêtus des formes les
plus fantastiques: "Quoi! disait Romuald au démon, en se moquant de
lui, tu as été chassé du Ciel et tu viens au désert montrer ta
honte! Va-t-en, bête immonde, vilain serpent!"
Notre Saint jouit à un
haut degré du don des larmes ; il ne pouvait célébrer la Messe sans
pleurer, et, pendant son oraison, vaincu par l'émotion et ravi en
extase, il s'écriait: "Jésus, mon cher Jésus! Ô doux miel, ineffable
désir, délices des Saints, suavité des Anges!"
Arrivé à une extrême
vieillesse, il jeûnait encore tous les jours, et, pendant le carême,
il se contentait d'une écuelle de légumes à son unique repas.
Quelquefois il demandait certains mets afin de les voir, d'en faire
le sacrifice à Dieu et de se moquer de la sensualité: "Voilà un bon
morceau bien apprêté, Romuald, disait-il; tu le trouverais bien de
ton goût, n'est-ce pas? Eh bien! Tu n'y toucheras pas, et tu n'en
auras eu la vue que pour te mortifier davantage."
Il faisait tant et de
si grands miracles que toute la nature semblait lui être soumise.
Cet illustre athlète de la pénitence, malgré ses austérités
étonnantes, mourut à l'âge de cent vingt ans, dont
quatre-vingt-treize ans dans la vie érémitique.
Abbé L. Jaud
Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame,
1950. |