Sérapion,
anglais de nation, d’une famille,
naquit vers la, fin du XIIe,
siècle, fut
élevé à la cour du duc
d’Autriche, et
embrassa d'abord la profession des armes. Étant parti pour
l’Espagne avec le duc qui portait
secours au roi do Castille contre
les Maures, il s’engagea au service
d'Alphonse IX et demeura dans
la Péninsule, voulant consacrer
sa vie à combattre
les ennemis du nom chrétien.
Il porta les armes durant quelques années,
mais un jour ayant rencontré des religieux
de l'ordre
récemment fondé de Sainte Marie
de la Merci, qui venaient du pays occupé par les
infidèles,,
avec de nombreux captifs qu'ils
avaient rachetés, son cœur fut touché à cette
vue, et
il commença à
sentir naître en lui le désir d'embrasser cette sainte milice.
Il fut
reçu
dans l'Ordre par saint Pierre
Nolasque à
Barcelone, il se livra dès
lors avec beaucoup
d'ardeur à la pratique
de toutes les vertus ; il s’exerça sans
relâche
à l'oraison, à l’humilité et
à la mortification
et à la chasteté. Zélé
pour le
salut des âmes, il en retira
plusieurs de la corruption du vice pour les rendre à
la vertu, il
convertit en particulier
beaucoup de femmes perdues. Il mérita d’être
choisi plusieurs fois par
ses supérieurs pour
aller chez les infidèles traiter du
rachat
des captifs et chacun de
ses voyages fut couronné d'un plein succès, Le
saint fondateur
de son Ordre,
Pierre Nolasque, lui confia la direction des novices, parmi lesquels
se trouvait saint Raymond de Nonnat ; mais le désir d’établir le
nouvel Ordre dans sa patrie le fit passer en Angleterre. Pendant la
traversée, il fut pris par des corsaires qui le dépouillèrent et
l’accablèrent de mauvais traitements. Son zèle pour le salut des
âmes l’ayant porté à faire des remontrances à ces brigands sur les
blasphèmes qu’ils proféraient, et sur les désordres auxquels ils se
livraient sans retenue, ils furent tellement irrités, qu’après
l’avoir battu au point de le laisser pour mort, ils le jetèrent à la
mer. Il parvint, avec le secours de Dieu, à gagner la côte, et il se
rendit à Londres d’où il passa en Irlande et en Écosse. Il fut mal
reçu dans ce dernier royaume et retourna en Espagne.
Saint Pierre
Nolasque l’envoya presque aussitôt après à Alger avec un autre
religieux, nommé Béranger. Il délivra quatre-vingt-cinq captifs
espagnols qu’il se proposait de ramener dans leur patrie. Mais ceux
des autres nations voyant que leur délivrance était ajournée, vont
trouver Sérapion, lui exposent leur condition misérable, et le
danger où ils sont de perdre la foi, par suite des mauvais
traitements qu’on leur inflige pour les contraindre à l’apostasie.
Le saint religieux forme alors la résolution de laisser partir son
confrère avec les captifs rachetés, et de rester lui-même parmi ces
malheureux pour les soutenir et les consoler, tandis que l’on
recueillerait l’argent nécessaire à leur délivrance. Cependant,
comme il annonçait librement la vraie foi aux infidèles, et qu’il
opérait des conversions parmi eux, le chef des Maures le fit charger
de fers, jeter dans un cachot et battre cruellement. Bientôt après,
une sentence de mort fut portée contre lui : il fut mis en croix, et
tous les membres de son corps furent coupés, articulation par
articulation ; pendant son supplice il répétait cette prière :
“Seigneur, ne livrez pas aux bêtes les âmes de vos confesseurs :
sauvez les âmes que vous avez rachetées de votre précieux Sang”.
Enfin il eut la gorge tranchée, et s’envola au ciel pour recevoir la
couronne du martyre, l’an 1240.
Les Petits boullandistes :
Vies des Saints ; Tome 11. Paris 1866. |