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Les gens restaient
émerveillés de sa doctrine
L'évangile nous présente un
Jésus auquel nous sommes, il semble, habitués, un Jésus qui correspond
bien à nos idées, un Jésus Maître qui enseigne avec autorité. L'épisode
se situe aux commencements de son ministère public, à Capharnaüm, la
ville qu'Il choisit comme résidence. Les gens restaient émerveillés de
sa doctrine ; Il ne prétendait pas expliquer la Loi de Dieu, comme les
scribes de son temps, mais plutôt Il la présentait directement, sans
détours ni arrangements, avec des gestes qui laissaient net son message.
Là s’enracinait l’autorité de son enseignement : Il pouvait montrer par
les faits tout ce qu’Il disait par ses paroles, ses mains réalisaient ce
que ses lèvres prononçaient. Et quand Il découvre un malade parmi ses
auditeurs, Il ne continue pas son discours, Il fait attention à celui
qui est soumis à un mal incurable, car Il a le pouvoir suffisant et hâte
pour le guérir avec sa parole. Il cesse de parler pour guérir ; mieux
encore, Il proclame l'évangile en guérissant du mal un auditeur.
I. LIRE :
Comprendre ce que le texte dit.
Pendant une journée dévouée à
l'enseignement (Mc 1, 21-35) Marc place le premier miracle de Jésus,
qu’Il réalise, — et ce n'est pas anecdotique — cette victoire sur
l'esprit du mal que son message proclame, ce qui lui confère déjà une
inusitée autorité (Mc 1, 22.27). En réalité Jésus ne fait que guérir
démoniaques et malades, quoique Marc s’obstine à nous Le présenter
enseignant toute la journée (Mc 1, 22.27.39) : Guérir un possédé c’est
sa première leçon. Curieux ! Jésus ne s'initie comme évangélisateur en
prêchant le bien, mais en guérissant, en délivrant du mal. La première
annonce du Royaume se réalise en poursuivant le Maligne et en réduisant
son domaine sur les hommes. L'évangélisation de Jésus ne pouvait être
plus efficace : Le tout premier que Jésus fait pour les autres c’est
faire le bien à un d’eux, en le libérant du démon : C’est sa manière
d'enseigner, avec autorité. Approcher les gens à Dieu, annoncer Dieu,
c’est éloigner le mal des hommes qui en souffrent ; personne ne sera
évangélisateur du Royaume si elle ne combat pas le mal. Le miracle, un
exorcisme exposé selon le schéma habituel (Mc 1, 23-27), est ici la
preuve d'une manière neuve d'enseigner (Mc 1, 21-22.28) ; décisif n'est
pas la rencontre, tellement précoce, de Jésus avec le démon, mais que
Jésus enseigne aux hommes avec un inouï pouvoir, en les délivrant du
Mauvais. Et un détail fortement significatif : Jésus guérit le possédé,
en déniant la parole au démon ; avant de le chasser, le réduit au
silence. Avec le mal, qui domine l’homme, on ne dialogue point ; la
venue de Dieu s’annonce seulement, et toujours, avec autorité, on ne
dialogue jamais avec celui qui fait du mal à l’homme. Les gens de
Capharnaüm se émerveillent, avec raison, de que Jésus fût obéi par les
esprits immondes. C’était son autorité : Il pouvait refuser la parole à
celui qui essaie du mal et être obéi !
II. MÉDITER :
Appliquer ce que le texte dit à la vie.
Curieusement l'épisode
évangélique s'ouvre et se referme en insistant sur l'enseignement de
Jésus et l'autorité avec laquelle Il l’offre, étant donné qu’il se
centre sur la narration d'une guérison. Les faits de Jésus, plus que ses
paroles, le font connaître : Jésus est un Maître qui enseigne en rendant
la santé à celui qui la nécessite. Malheureusement, au début de son
ministère seulement les esprits mauvais perçoivent qui Il est et
qu’est-ce que signifie sa présence. Sans engager aucun dialogue avec
eux, Jésus leur ordonne lâcher le possédé : La guérison de l’homme est
le contenu de son meilleur magistère. Une évangélisation qui se
désintéresse du mal régnant, qui méprise sa présence chez l’homme, ne se
légitime pas comme authentique ; pour qu’on puisse proclamer la volonté
de Dieu de vaincre le mal, il faut démasquer son pouvoir et en libérer
ses victimes : Seulement ainsi on fait croyable la bonté de Dieu et son
compromis en faveur de l’homme. Il nous manque une proclamation de
l'évangile avec l'autorité qui procède d’annoncer le bon Dieu en luttant
contre le mal qui vit dans l’homme. C’est logique que la foule se
questionnât comment était-ce possible à un homme disposer de tels
pouvoirs. Nous aussi aujourd'hui nous étonnerions, d'avoir assisté à
quelque chose de pareil. Mais il ne s’agit pas de se surprendre
maintenant par quelque chose du passé et que nous n’avons pas pu voir,
mais nous demander qu’est-ce que pouvons-nous apprendre de ce récit :
dans quel sens peut une guérison d'un autre, et réalisée ça fait
longtemps, être une bonne nouvelle pour nous ? Qu’est-ce que peut nous
importer à nous, qui croyons à peine qu’ils existent ou aient existé des
possédés, la guérison d'un d'eux par les mains de Jésus ? Pour pouvoir
nous surprendre face à l'autorité de Jésus, il faudra croire que le mal
existe dans notre environnement et dans notre intimité, comme tout ce
monde-là qui a vu Jésus agir. Plus encore : Jésus nous enseigne à
l'affronter avec autorité là où il se cache. Il est vrai que pour nous
aujourd'hui le mal ne coïncide pas avec la maladie, soit-elle répugnante
ou imméritée qu’elle soit ; c’était cela que croyaient les hommes du
temps de Jésus. Notre manière de concevoir le mal est assez différente ;
mais, au bout du compte, le mal existe aussi pour nous et, à ce qu’il
paraît, il continue à être, en nous et dans notre monde, plus puissant
et plus efficace que le bien. Et ce qui est regrettable ce n'est pas que
le mal et la malice existent dans notre monde, le pire c’est que nous
nous sommes habitué à sa présence et à son efficacité. Et nous
coexistons avec lui, en soupirant, au maximum, à qu’il ne nous frappe
pas. En niant réalité au mal, des fois, nous nous illusionnons de
l'avoir vaincu. En le réduisant au silence, nous croyons le maintenir
loin de nous. Et dans le cas contraire, quand il ne nous reste plus que
reconnaître sa réalité, peut-être par avoir succombé sous son pouvoir ;
nous le trouvons chez les personnes que nous côtoient avec une plus
grande facilité que chez nous-mêmes. Il est moins pénible, plus
supportable, découvrir la méchanceté chez les autres. Et ceci est une
caractéristique, une « vertu » dirait-on, la tentation des bons, de tous
ceux qui se considèrent meilleurs seulement parce qu’ils n'arrivent pas
à être si mauvais que les autres…, ou parce qu’ils sont plus malicieux
que les autres et simulent mieux leurs maux. Ceux qui ainsi pensent
continuent à perdre l'occasion de se rencontrer avec Jésus, le
guérisseur de malades et libérateur de démoniaques. Parmi tant de monde
qui ce jour-là entendait Jésus et s'émerveillait de son enseignement,
seulement un malade, le possédé, sut le reconnaître comme le Saint de
Dieu : Tout un symbole de notre situation actuelle, au niveau
communautaire et personnel, dans l’église ! Nier le mal, ne pas oser
accepter sa présence et son domaine sur nous, nous donne une sensation
de « bien-être », de santé, mais cela jamais n’obtiendra nous guérir de
nos maux ni nous faire meilleurs. Il faut avoir le courage de confesser
notre mal à Jésus, comme le fit le possédé, en Lui demandant, par des
cris si cela est nécessaire, notre guérison. Sans avoir le courage de
nous présenter devant Lui dominés par le mal dont nous ne pouvons pas
nous délivrer par nos propres forces, nous n’arriverons pas à
reconnaître Jésus comme le Saint de Dieu, capable d'éliminer notre mal
dès la racine. Mais, comment se découvrir sous l’emprise du mal, comment
se sentir sous le poids de la propre méchanceté ? Entendons Jésus et son
évangile : Son autorité nous fera pressentir le mal qu'il y a encore
pour découvrir en nous ; nous percevrons donc la vitalité de Jésus, sa
capacité de nous redonner vie, dans la mesure où nous nous rapprochons
de Lui. Le sens du péché, que nous sommes tous en train de perdre un
peu, nous éloigne de Jésus; de même que se croire sain ne pousse
personne à chercher un médecin. Peut-être parce que, comme le démon du
possédé de l'évangile, nous soupçonnons qu'Il vient à nous incommoder, à
nous guérir, à nous compliquer la vie, et nous nous résistons à perdre
la paix que nous avons réussi avec nous-mêmes par avoir fait un pacte
avec nos maux. Prenons au sérieux la réalité de notre méchanceté, celle
qui habite dans nos cœurs et celle qui grandit dans notre milieu, et
nous sentirons, avec angoisse, le besoin de Jésus, d'être emmenés devant
Lui et de Lui demander même par des cris notre salut. Et si nous ne nous
sommes pas encore du tout convaincus de la réalité du mal et de sa force
redoutable, allons vers Jésus et écoutons-Le plus assidûment :
Prêtons-Lui une plus grande attention, donnons-Lui plus d’occasions pour
qu’Il nous découvre notre état ; Lui accorder un peu plus de temps et un
peu plus de nous-mêmes, nous permettra nous sentir mieux. Connaître de
plus près sa pensée et sa doctrine nous permettra Le sentir plus proche
et nous savoir récupérés ; ses exigences ne seront plus lourdes ni sa
proximité si redoutable. Mais il faudra L'écouter comme L’écoutèrent à
Capharnaüm : En s’émerveillant de tout ce qu’Il dit et du pouvoir avec
lequel Il agit. Malheureusement, et ici pouvons-nous, peut-être, trouver
la racine de nos maux, aujourd'hui les disciples de Jésus écoutent
n'importe lequel qui veille leur dire quelque chose, toute personne qui
leur promette quoi que c’est soit, tous moins Dieu, le seul qui a le
pouvoir de faire tout ce qu’Il dit et de promettre tout le bien que l’on
puisse s’imaginer. Écouter Dieu plus fréquemment et avec plus
d’attention nous remettrait de nos maux, de ceux que nous reconnaissons
sans trop de difficulté et de ceux qui nous habitent sans même pas le
soupçonner. Ne nous illusionnons pas de penser que le mal, le Mauvais,
n’existe pas ou qu’il est au-dehors de nous, chez l'autres; en tout ce
que nous faisons et en tout ce que nous ne réussissons pas à faire,
quoique nous le devions, se cache le mal dont Jésus vient à nous
libérer. Mettons-nous aujourd'hui, en vérité, devant Jésus, comme le
possédé de l'évangile, et confessons-Lui nos maux : Restons là jusqu'à
ce qu'Il s'aperçoive de notre présence, qu’Il se rende compte de notre
mal et qu’Il se décide à nous sauver. Toute notre attente pour notre
guérison, tous nos efforts et fatigues pour l'atteindre, à la fin,
auront mérité la peine et l'attente; si nous arrivons à entendre sa voix
souveraine : « Sort de cet homme », Jésus sera aussi pour nous le Saint
de Dieu. Ou est-ce que nous allons continuer, comme les gens de
Capharnaüm, à entendre Jésus sans nous sentir touchés par sa parole,
guéris par son pouvoir ? Cela ne vaut pas la peine. Mettons nos maux à
la vue de Jésus et il nous manifestera son pouvoir et sa miséricorde.
Juan José
Bartolomé :
Commentaire sur saint Marc 1,21-28
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