Saint Thomas de Cantorbéry, par son
courage indomptable à défendre les droits de l'Église, est devenu l'un des plus
célèbres évêques honorés du
nom
de saints et de martyrs. Dès sa jeunesse, il fut élevé aux plus hautes charges
de la magistrature; mais l'injustice des hommes détacha du monde ce cœur plein
de droiture et de sincérité, et il entra dans l'état ecclésiastique. Là encore,
son mérite l'éleva aux honneurs, et le roi Henri II le nomma son chancelier. Il
ne fit que croître en vertu, donnant le jour aux affaires et passant la
meilleure partie de la nuit en oraison. Il n'était que le distributeur de ses
immenses revenus: les familles ruinées, les malades abandonnés, les prisonniers,
les monastères pauvres, en avaient la meilleure part.
Le roi l'obligea d'accepter
l'archevêché de Cantorbéry. Thomas eut beau dire au prince, pour le dissuader,
qu'il s'en repentirait bientôt: celui-ci persista, et le chancelier reçut le
sacerdoce (car il n'était encore que diacre) et l'onction épiscopale. Sa
sainteté s'accrut en raison de la sublimité de ses fonctions. On ne le voyait
jamais dire la Sainte Messe, sinon les yeux baignés de larmes; en récitant le
Confiteor, il poussait autant de soupirs qu'il prononçait de mots. Il servait
les pauvres à table trois fois par jour; à la première table, il y avait treize
pauvres; à la seconde, douze; à la troisième, cent.
Thomas avait bien prévu: les
exigences injustes du roi obligèrent l'archevêque à défendre avec fermeté les
droits et les privilèges de l'Église. Henri II, mal conseillé et furieux de voir
un évêque lui résister, exerça contre Thomas une persécution à outrance. Le
pontife, abandonné par les évêques d'Angleterre, chercha un refuge en France. Il
rentra bientôt en son pays, avec la conviction arrêtée qu'il allait y chercher
la mort; mais il était prêt.
Un jour les émissaires du roi se
présentèrent dans l'église où Thomas priait; il refusa de fuir, et fut assommé
si brutalement, que sa tête se brisa et que sa cervelle se répandit sur le pavé
du sanctuaire. C'est à genoux qu'il reçut le coup de la mort. Il employa ce qui
lui restait de force pour dire: "Je meurs volontiers pour le nom de Jésus et
pour la défense de l'Église."
Abbé L. Jaud
Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950.
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