Les débuts
Basile Moreau est né le 11 février 1799 à Laigné-en-Belin, petit village de la
Sarthe situé à quelques kilomètres
au sud du Mans. Il était le neuvième dans une
famille de quatorze enfants dont trois sont morts en bas âge. Ses parents, Louis
Moreau et Louise Pioger, étaient cultivateurs. Le père fut aussi marchand de
vin.
Le curé de Laigné discerna très tôt chez le jeune garçon les signes d’une
vocation particulière et il encouragea ses parents à lui faire entreprendre les
études qui le mèneraient à la prêtrise. En 1814, Basile entre donc au collège de
Château-Gontier et, en 1817, au Séminaire du Mans. Il est ordonné prêtre le 12
août 1821, à l’âge de 22 ans. L’évêque du Mans l’envoie ensuite à Paris parfaire
sa formation en théologie chez les Sulpiciens et s’imprégner de leur
spiritualité. Revenu au Mans en 1823, il est nommé professeur au Séminaire :
durant treize années il enseignera successivement la philosophie, le dogme et l’Ecriture
Sainte.
La fondation de
Sainte-Croix
Tout en remplissant sa tâche de formateur, le jeune prêtre, de nature active et
entreprenante, cherche à répondre à divers besoins pastoraux. En 1835, il
organise un groupe de prêtres auxiliaires pour prêcher des missions et des
retraites dans les paroisses. La même année, son évêque lui demande de prendre
la direction d’un institut de frères enseignants, les Frères de Saint Joseph,
fondé en 1820 par le curé de Ruillé-sur-Loir, Jacques Dujarié. Dans le but
d’assurer une collaboration permanente entre les deux groupes, Basile Moreau les
unit en 1837 en une seule communauté et leur donne la mission d’éduquer la
jeunesse et d’évangéliser les campagnes. L’Association prend naturellement le
nom de Sainte-Croix, la localité où elle est implantée. L’établissement
d’enseignement dirigé par les frères et les prêtres acquiert rapidement une
réputation qui s’étend bien au-delà de la ville du Mans.
Le 15 août 1840, Basile Moreau prononce les voeux de religion. Plusieurs de ses
disciples font de même. Le Père Moreau devient ainsi le fondateur et le
supérieur général d’une vraie famille religieuse. En même temps, Basile complète
la réalisation du projet qu’il avait en tête en adjoignant une branche féminine
à l’association des prêtres et des frères. En 1841, la venue à Sainte-Croix de
Léocadie Gascoin qui deviendra Mère Marie des Sept-Douleurs assurera une base
solide à la communauté des religieuses, les Marianites de Sainte-Croix. En même
temps, le Père Moreau donne à l’oeuvre de Sainte-Croix une dimension
missionnaire. Dès 1840, un petit groupe de religieux est envoyé en Algérie.
L’année suivante, un autre groupe part pour les Etats-Unis. En 1847, alors que
la communauté est en plein essor en France, les pères, les soeurs et les frères
arrivent au Canada. Six ans plus tard, Sainte-Croix prend en charge la Mission
du Bengale (aujourd’hui le Bangladesh). Dès 1869, la province des Marianites de
l’Indiana acquiert son autonomie et devint la Congrégation des Soeurs de la
Sainte-Croix et en 1883 ce sont les Marianites du Canada qui deviennent la
branche connue sous le nom des Soeurs de Sainte-Croix.
La vision du Père
Moreau: l'Esprit d’union
Ce qu’il cherche le plus à inculquer aux membres de cette famille est l’esprit
d’union. Il aime à redire « L’union fait la force et la désunion mène à la ruine
». Il désire cette union non seulement parce qu’il a à relever le défi de faire
vivre ensemble trois communautés, mais aussi parce que toute congrégation
religieuse, si elle veut survivre, doit imiter les premiers chrétiens qui
n’avaient « qu’un coeur et qu’une âme ». Dans cette ligne de pensée, il a
souvent donné en exemple la sainte famille de Nazareth, reflet sur terre de
l’union des trois personnes de la Sainte Trinité. Il écrit dans une de ses
premières lettres circulaires : «ne faisant avec lui (Jésus-Christ) qu’un même
corps animé du même esprit et vivant de la même vie, il dit que nous devons
demeurer unis en lui les uns aux autres de manière à ne faire qu’un, comme les
branches attachées au tronc, portées par la même racine et nourries de la même
sève, ne font avec lui qu’un seul et même arbre.» Pour cette raison aussi il a
consacré les prêtres au Coeur de Jésus, les frères à saint Joseph et les soeurs
au Coeur de Marie.
La divine Providence
En plus de l’esprit d’union et de collaboration mutuelle, Basile Moreau a voulu
inculquer chez les prêtres, frères et soeurs de Sainte-Croix, une ferme
confiance en la divine Providence. Se voyant comme un simple instrument dans les
mains de la divine Providence, il écrit : « L’oeuvre de Sainte-Croix n’est pas
l’oeuvre de l’homme mais bien l’oeuvre de Dieu même. … Voilà pourquoi je vous
conjure de vous renouveler dans l’esprit de votre vocation, qui est un esprit de
pauvreté, de chasteté et d’obéissance … Avec cela nous pourrons compter sur la
providence … Car elle se charge de pourvoir à toutes les nécessités de ceux
(celles) qui s’abandonnent à sa conduite en accomplissant tous leurs devoirs
…L’oeuvre de Sainte-Croix est son oeuvre, et par la même qu’elle n’a pas permis
sa ruine malgré les coups terribles que lui a portés l’ennemi de tout bien, elle
veut qu’elle subsiste et se développe de plus en plus. »
Le zèle apostolique
Lié à cette confiance en la Providence, le fondateur de Sainte-Croix voit se
développer parmi ses religieux et religieuses un esprit apostolique et un zèle
pour la mission. Dans son livre, Pédagogie chrétienne, publié en 1856, le Père
Moreau écrit: « On entend ici par zèle cette flamme d’ardent désir qu’on éprouve
de faire connaître, aimer et servir Dieu et par là de sauver des âmes.
L’activité est donc le caractère propre de cette vertu, et tout (apôtre) qui en
est animé remplit les devoirs de son état avec autant d’empressement et
d’affection que de courage et de persévérance … Son zèle est toujours guidé par
la charité ; il fait tout avec force et douceur ; avec force parce qu’il est
courageux et inébranlable au milieu des peines, des difficultés, des épreuves …
avec douceur parce qu’il est tendre et compatissant comme son divin modèle. »
L’approbation
ecclésiale
L’année 1857 est un sommet dans la vie et dans l’oeuvre du Père Moreau : le pape
Pie IX approuve officiellement la congrégation de Sainte-Croix, du moins celle
des pères et des frères, car la congrégation des Marianites de Sainte-Croix ne
recevra l’approbation romaine que dix ans plus tard. A cette occasion, une
grande célébration d’action de grâces se déroule dans l’église Notre-Dame de
Sainte-Croix.
Le décès du Fondateur
Mais commence une douloureuse période pour le fondateur. Dissensions à
l’intérieur de la congrégation, graves déboires financiers, accusations de
mauvaises administrations, l’amènent à offrir sa démission de supérieur général
au chapitre général de 1860 qui la refuse. Ce n’est qu’en 1866, après une
aggravation des difficultés et des injustices commises à son endroit que sa
démission sera acceptée par le pape.
Rejeté par la communauté qu’il avait fondée, le Père Moreau se retire, avec deux
de ses soeurs, dans une petite maison qui lui appartenait, tout à côté de
l’Institution de Sainte-Croix. Il passe ses dernières années à donner des
prédications dans les paroisses des environs du Mans. Il tombe malade le 1er
janvier 1873 et meurt vingt jours plus tard. Mère Marie des Sept Douleurs est
avec lui pendant ses dernières heures, témoignant de la fidélité des soeurs. La
communauté des Marianites, leur aumônier, quelques religieux, des membres du
clergé diocésain et quelques amis assistent aux funérailles du Père Moreau et à
son inhumation dans le cimetière de la communauté.
Ce n’est que 20 ans après sa mort que les supérieurs généraux cherchèrent à
ranimer la vénération de Basile Moreau et à susciter une dévotion à sa mémoire.
Cependant, les congrégations fondées par lui continuaient à se développer et à
s’étendre partout dans le monde.
Sainte-Croix
aujourd’hui
Aujourd’hui les religieux et les religieuses de Sainte-Croix oeuvrent comme
éducateurs de la foi dans des écoles et des universités ainsi que dans des
ministères importants comme la pastorale et les services sociaux. Sainte-Croix
est présent en France, dans les Amériques, en Afrique et en Asie. C’est par leur
engagement dans la vie consacrée, leur zèle pour la mission et la diversité des
engagements apostoliques, que les prêtres, frères et soeurs de Sainte-Croix
continuent de réaliser la vision du Père Basile Moreau.
La béatification
La cause de béatification du Père Basile Moreau introduite dans le diocèse du
Mans en 1948 ne fut présentée à Rome à la Congrégation pour la Cause des Saints
qu’en 1994. Le 12 avril 2003, le pape Jean-Paul II a reconnu la pratique
héroïque des vertus de Basile Moreau et lui a donné le titre de Vénérable. Deux
ans plus tard, le 28 avril 2006, Sa Sainteté, Pape Benoît XVI, a autorisé la
promulgation du décret du miracle attribué à l’intercession du vénérable
serviteur de Dieu, Basile Moreau.
Même si le nom de Congrégation de Sainte-Croix ne venait pas d’une dévotion
spéciale du Père Moreau pour la croix du Christ, la croix fut bien présente dans
sa vie et il n’a pas manqué d’utiliser cette appellation pour insister sur le
rôle de la croix dans la vie spirituelle de ses fils et ses filles. Il a même
donné comme devise à sa communauté ce verset d’une hymne liturgique : Salut, ô
croix, notre unique espérance.
Béatification, 15 septembre 2007,
Le Mans (France).
SOURCE :
http://www.vatican.va/ |