Lettres 1944

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— 1944 —

20 juillet

« Je vous sens à côté de moi... »

Ne pensez pas, mon bon Père Umberto, que mon silence soit un oubli. Je ne vous oublierai ni sur la terre ni au ciel. La cause de celui-ci, ce sont les “cadeaux” de Jésus. Si vous saviez combien je souffre... Mais la souffrance importe peu; ce qu’il faut c’est consoler Jésus. Il me suffit que sa grâce et sa force ne me fassent pas défaut pour résister à tout... Je n’ai pas oublié vos intentions de prière ni celles des novices de votre sainte maison Salésienne... Par charité, pardonnez-moi mes manquements. Je vous remercie de tout mon cœur et de toute mon âme pour tout ce que vous avez fait pour moi. Que Jésus vous récompense, vous comble de ses bienfaits et de son amour, car Lui seul connaît et sais le réconfort que vous m’avez apporté.

Je vous sens à côté de moi, et cela me procure du courage pour soutenir ma souffrance. Que Dieu soit béni. Je ne suis pas encore haïe de tout le monde...

6 septembre

« Je sens de fortes embrassades... »

Le chant, la nature et la mer m'obligent à me concentrer, à m'oublier.

Après une visite au très Saint-Sacrement, que je ne pus pas faire de jour, à cause de mes grandes souffrances et mon mal-à-l'aise, je ressentis tout d'un coup la même sensation que je ressens, habituellement, lorsque le Seigneur vient me parler: j'eus nettement l'impression qu'une vague venait de se déverser sur moi. Je me suis inclinée vers la gauche et Jésus me parla.

Quelques fois, avant même que le Seigneur me parle, je sens comme de fortes embrassades; d'autres fois je les sens à la fin. Une forte chaleur m'envahit, une chaleur si forte et brûlante que je ne sais même pas expliquer. D'autres fois encore, je sens les caresses du Seigneur. Je ne sais pas comment répondre à tant de bienfaits.

Je n'agis pas ainsi uniquement avec les âmes saintes. Je me communique aussi aux âmes pécheresses comme toi, pour leur donner confiance. Elles aussi elles peuvent aimer le Seigneur et arriver à la sainteté. Si je n’agissais pas ainsi, elles pourraient désespérer.

14 septembre

« Je suis pénétrée de douleur... »

(...) Nous vous avons tous beaucoup regretté. Il est bien vrai que tout ce qui est bon en ce bas monde passe vite. Ce que vous avez dit de Jésus, ou mieux, voulais-je dire, c’est Lui qui s’est servi de vous pour m’apporter lumière et soulagement. Je ne sais pas comment remercier Jésus et je ne sais rien vous dire, quelque chose de ce qui rempli mon âme. Merci! Que Jésus vous récompense pour tout...

Depuis trois jours que je suis sans Communion ; je me sens affamée à l’extrême. Je sens que ma vie s’en va, mon âme se meurt de faim...

Je n’ai plus rien écrit dans mon journal. Je suis aveugle, pénétrée par la douleur. Mais, malgré cela, je vous promets de faire le possible et de dicter quelque chose et d’essayer de me guérir, parce cela va de mal en pis. Jésus demande beaucoup et ce qu’il demande est bien pénible! Je lui donne tout et je ne lui donne rien, parce que je sens que je n’ai rien à lui donner...

21 septembre

« Tout disparaît comme la fumée... »

(...) J’aurais tant de choses à vous dire, mais je ne le peux pas. Je me sens très malade. Je charge Jésus et la Maman du Ciel de vous remercier pour tout ce que vous faites pour moi et pour les miens, parce que je n’ai pas de paroles adéquates pour le faire. Merci! Mais, plus que pour tout le reste, une remerciement infini pour avoir envoyé un prêtre me donner Jésus. Celui qui me donne Jésus me donne la vie, me donne toute la richesse du Ciel et de la terre. Je ne peux désirer rien d’autre.

Quelle envie j’ai de le posséder et quel grand désir de l’aimer! Mais, pauvre de moi, tout disparaît comme la fumée, sans que j’arrive à voir la trace de quelque chose. En souffrant autant, j’ai fini par ne plus rien ressentir. Je me meurs d’amour pour Jésus et je finis par ne pas l’aimer. Après tant d’efforts, je finis par ne plus croire en moi-même. O mon Dieu, quelle triste nuit !

J’ai de la peine pour tout ce que vous et vos confrères souffrez actuellement. J’ai envers vous beaucoup de charité et d’amour: c’est ce que veut Jésus qui procède de la même façon envers nous. C’est lui toujours le plus offensé. Pauvre Jésus! Il aime et n’est pas aimé...

9 octobre

« Si je pouvais écrire moi-même... »

(...) Je vous remercie pour les nouvelles que vous avez pu me donner sur Macieira. Vous pouvez imaginer combien je les ai appréciées. En ce qui concerne l’obéissance, je fais de mon mieux, mais, mon Père, si vous saviez ce qui se passe ici ! Si je pouvais écrire moi-même, je vous en dirais quelque chose ; mais comme je ne peux pas écrire, je reste là, gémissant et priant, passant des heures tristes et amères habitée par la peur d’offenser mon Jésus. Espérons qu’il me donne force et courage pour vous ouvrir mon âme, comme je le souhaite et en ai bien besoin, quand vous le jugerez opportun. Je vous demande, par charité, de bien vouloir prier pour moi. Si vous saviez comme je suis triste ! Apprenez-moi à aimer Jésus et la Maman du ciel ; je les prie pour qu’ils ne permettent pas que je les offense. S’il était besoin de renoncer au ciel [pour ne pas les offenser], je le ferais; je préfère l’enfer que d‘offenser Jésus. Je le leur ai dit encore cette nuit et je le leur demande du fond du cœur...

30 octobre

« Je ne suis plus seule... »

Révérends Pères salésiens : pour vous tous l’amour le plus brûlant de Jésus, de la Petite-Maman et toutes les richesses du ciel.

J’ai bien présentes toutes les intentions que vous m’avez recommandées et je vous fais participants de mes humbles prières et souffrances. C’est un devoir de gratitude de ma part, je ne fais que ce que je dois. Je me sens très heureuse et très riche de l’appui que j’ai de vos prières. O mon Dieu, je ne suis plus toute seule ! J’ai maintenant quelqu’un pour m’aider dans la montée de mon pénible calvaire ! De tout mon cœur et de toute mon âme je dis :

— Jésus et Petite-Maman récompensez-les et donnez-leur toutes les richesses du ciel; richesses de vertu, de grâces pour attirer par celles-ci les âmes au divin Cœur de Jésus. Je n’en peux plus. Toujours unis sur la terre et au ciel. Donnez-moi votre bénédiction et pardonnez celle qui vous demande des prières, beaucoup de prières.

Mes chers novices et salésiens de cette sainte maison ; j’aimerais écrire à chacun mais je ne le peux pas : les forces me manquent. Étant donné que je dois vous remercier pour les saintes prières qui vous avez faites pour moi, je le fais à vous tous en même temps.

Que Jésus et la Maman du ciel vous récompensent pour tant de charité. J’implore pour tous les bénédictions et les grâces du Seigneur.

Je désire ardemment que vous occupiez dans le divin Cœur de Jésus la place que vous occupez dans le mien car ainsi vous pourriez tout recevoir ; je vous ai tous au fond de mon cœur. C’est pour cela que je vous veux aussi tous dans le Cœur de Jésus et de Marie.

Un grand merci à tous ceux qui m’ont écrit. Vous pouvez être certains que Jésus vous donnera tout ce que vous désirez pour votre sanctification et pour le salut des âmes. Ayez confiance, ayez confiance ; Jésus sera toujours avec vous.

Comptez toujours sur moi sur la terre et après, dans le ciel où je vous attends.

17 novembre

« Quelle tempête je sentais au loin!... »

(...) Je vous écris quelques-unes des choses que j’ai dans l’âme. Depuis plusieurs jours, l’impression suivante me faisait souffrir: il me semblait que vous aviez reçu l’ordre de ne plus venir ici.

Quelle tempête je sentais au loin ! Si seulement je pouvais souffrir seule, sans attrister ma sœur... Maintenant que tout est connu, je vous demande la charité de me dire la vérité, car dans cet état, je souffre davantage. Soyez franc avec moi, par l’amour de Jésus et de la Maman du ciel, dans la certitude que j’aurai toujours pour cette Maison salésienne la plus grande affection. Ne pensez pas, mon bon Père, que j’arrête de prier et de souffrir pour tous. Oh, non ! Je serais une ingrate et je préférerais mourir. Je reconnais vous devoir beaucoup: ce ne sera qu’au ciel que vous connaîtrez le bien que vous avez fait à ma pauvre âme. Je n’ai jamais eu, dans ma vie spirituelle, et d’une façon continuelle, le soutien et les lumières nécessaires qui m’aident à parcourir mes sentiers si épineux. Pauvres hommes qui me volent le guide que le Ciel m’avait donné !... J’espère sincèrement que le Seigneur ne punira pas et qu’il ne demandera pas de comptes à aux personnes qui me font tant de mal... Je ne comprends plus...

Si je ne donnais pas à Jésus tout ce qu’il exige de moi, cela serait de leur faute, car ils m’ont volé celui qui m’apprenait à aimer Celui qui n’est pas aimé et m’aide à parcourir mon si douloureux calvaire.

Je ne peux m’appuyer que sur Jésus, seulement sur Lui, personne d’autre au monde...

Je lève mon regard vers le Ciel, je le fixe sur Jésus et sur la Maman chérie et ainsi je me sens forte pour recevoir le coup de la séparation de celui qui comprenait aussi bien mon âme.

Que m’arrivera-t-il encore ? Qu’il arrive ce qui doit arriver: j’ai pleinement confiance dans la force du Ciel.

Si l’on vous a interdit de m’écrire et de recevoir mes lettres, je vous prie, par les douleurs de la Maman du Ciel, de ne pas vous affliger: ne souffrez pas à cause de moi. Obéissons aveuglément. Jésus suppléera et usera envers moi de miséricorde. Par charité, ne m’oubliez pas. Nul ne peu nous interdire de prier l’un pour l’autre, ni d’aimer le Seigneur. Une certitude chose me reste: personne ne peut me voler Jésus. Ce n’est que le péché qui peut chasser de mon cœur les trois Personnes divines...

27 novembre

« Que Jésus vous paie... »

(...) Je suis intimidée et dubitative ; très incertaine si je dois ou non dicter ces quelques paroles. Cela fait déjà quelques jours que je pense le faire, mais les forces et le courage me manquaient. Aujourd’hui je ne peux pas faire autrement.

Si vous avez reçu des ordres contraires et que vous ne pourriez pas lire ma lettre, jetez-la au feu, ainsi elle disparaîtra pour toujours. Je ne veux pas, mon Père, être un instrument de souffrance pour personne. Que je souffre, vu que le Seigneur m’a destinée à la souffrance; que je souffre, car à cause de mes grandes misères je dois souffrir et réparer; que je souffre les plus grandes douleurs et amertumes pour consoler mon Jésus et lui gagner des âmes ; que je souffre tout, moi ; que je meure sous le poids des plus grandes humiliations, mais que Jésus ne souffre pas à cause de moi ; qu’il ne soit pas offensé par ma faute ni ceux à qui je dois beaucoup et qui ont tant fait pour moi.

Je ne veux être ingrate ni envers Jésus ni envers aucune créature. Mon bon Père, que Jésus vous paie tout ce que vous avez fait pour moi et tout le soin que vous avez pris de ma pauvre âme. Si vous saviez combien j’ai besoin de lumière! Si vous saviez dans quelle mer immense je suis plongée ! Oh, si le monde connaissait la douleur ! Si les hommes comprenaient ce que représente l’absence d’un directeur saint et sage au gouvernail d’une âme ! Les pauvres ! Ils ignorent cette vérité et cette nécessité et en plus ils continuent de se comporter de façon à tout m’enlever. Jésus, pardonnez-leur, car moi-même je leur pardonne...

Le Père António n’est pas venu. L’interdit est-il aussi valable pour les autres ? Que m’arrivera-t-il encore ?...

9 décembre

« J’ai continué à prier... »

(...) Grâce à Jésus et à la Petite-Maman, aujourd’hui je peux respirer, ainsi que ma sœur et ma famille. Qua le Seigneur soit loué !...

Je ne vous ai pas écrit comme je le souhaitais, parce que je ne le pouvais pas. Croyez, mon bon Père, que ce ne fut pas un oubli. Combien de fois j’ai pensé le faire, mais je n’en ai pas été capable ! Une grande crainte d’être la cause d’une plus grande souffrance pour vous, chose que je ne veux pas, prenait possession de moi, qui, pour plus d’efforts que je fisse, je n’étais pas capable de dicter la moindre parole. Cependant, j’ai continué à prier et à souffrir pour tous. Cette très douloureuse épreuve n’a pas ôté de mon cœur le très grand et saint respect que j’ai pour eux ; bien au contraire, elle l’a augmenté.

Le Seigneur m’a fait comprendre que la faute ne venait pas de leur supérieur. Il m’a même affirmé, au contraire, que celui-ci était innocent. Mais, même s’il ne l’était pas, ils ne devaient pas en souffrir, à cause de moi. Je serais restée toujours la même, et je n’aurais pas arrêté de prier pour lui.

Hier, combien de fois j’ai regardé la photo de votre chapelle pour “voir” si Jésus y était exposé et si je vous “voyais” en adoration. Je n’ai rien “vu”. Je vous ai accompagné en esprit; j’ai prié et souffert pour tous. Je vous ai confié à la Maman du Ciel pendant l’extase de l’après-midi et tout particulièrement ceux qui se sont présentés à la vêture et ont pris la médaille:

Petite-Maman, faites que ceux-là soient purs et que dorénavant ils ne souillent plus leurs âmes même par un seul péché véniel délibéré...

18 décembre

« Un feu brûle mon cœur... »

Un feu, parfois insupportable, brûle mon cœur et, parfois me monte jusqu’à la bouche; on dirait que l’on me brûle les lèvres. L’eau avec laquelle dans temps en temps je les rafraîchis, et que je crache ensuite, ne sert à rien. C’est le feu, le feu, toujours le feu.

20 décembre

« Le corps souffre beaucoup... »

(...) C’est la douleur qui vit; la douleur torturante de mon corps et de mon âme. Le corps souffre beaucoup, mais bien plus l’âme. Je n’en sais rien dire; je vous en donne à peine une petite idée : l’âme suffoque par le fait d’être autant opprimée et pressée. Mais fautes, mon ingratitude envers Jésus sont toujours devant moi; la crainte de me tromper et de tromper les autres; la peur de pécher pendant les luttes contre le démon est toujours devant moi, elle aussi... Quelle triste vie !

Je veux me vaincre. Je veux croire à la parole de Jésus, mais cela me coûte beaucoup ! Comment se fait-il que je ne me brûle pas au milieu d’aussi grandes flammes ?

Et maintenant, le nouveau tourment qui est celui de vouloir garder en moi ce que Jésus et la Petite-Maman m’a confié le 8. J’ai l’impression d’être tout le temps victime d’assauts. J’aimerais me cacher sous la terre, où personne ne le sut, pour que l’on ne me vole pas ce que le Ciel m’a donné et que je sens être une richesse sans pareille. Que Jésus soit avec moi !

Les jours passent et je n’ai toujours pas un prêtre qui me tranquillise, qui m’encourage dans mon chemin. Pauvre de moi! Je suis née pour cela. Fussé-je née pour aimer  mon Jésus et ma très chère Petite-Maman comme je le voudrais et comme Ils sont dignes d’être aimés !...

Il me semble n’être née que pour vivre morte. Je ne sais comment l’expliquer.

Le docteur et son épouse sont restés ici hier, pendant quelques heures, pour nous tenir compagnie et nous encourager. O combien je dois à mon saint médecin !...

   

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