Lettres 1946

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— 1946 —

20 mars

Larmes de nostalgie...

Mon bon Père...

Cela ne me semble pas une réalité mais un rêve : recevoir une lettre de vous et pouvoir y répondre ! Pourrai-je le faire ? J’attends des ordres. En effet, je ne veux pas désobéir. J’écris, mais encore avec crainte. Le monde est si mauvais. Il est vrai que je n’ai commis aucun crime pour être traitée de la sorte. Mais il est vrai qu’il vaut mieux souffrir toute une vie innocente qu’un seul instant coupable. Combien belle est l’obéissance, et combien elle plaît à Jésus !

Votre lettre m’est arrivée le 13. Ce fut un cadeau de Jésus et de la Maman du ciel. Je l’ai beaucoup aimée, mais ce contentement ne m’appartenait pas, ce n’était pas le mien.

Involontairement j’ai versé des larmes : larmes de nostalgie, de paix et de résignation.

Cela fait aujourd’hui un mois que mon âme vous a vu partir et vous a accompagné avec une grande souffrance, sur la haute mer, lors de votre long et douloureux voyage. La vision était claire. Elle vous a accompagné jour et nuit. Jour après jour elle devenait plus faible ; entre le premier et le deux mars, elle a disparu. Mon âme cessa de vous voir, mais non point de vous sentir. Si seulement vous saviez comment il est ce sentiment ! Ou mieux, si je savais m’expliquer !...

La distance qui nous sépare nous a unis nos âmes plus fortement que jamais... De la même façon que je suis unie à Jésus et que je ne cesse pas de penser à Lui, de la même manière je suis unie à l’âme de mon Père spirituel et je me le rappelle toujours avec une profonde nostalgie : nostalgie qui de temps à autre me mène aux larmes ; et ce n’est qu’au prix d’un grand effort que je réussis à les cacher.

Quelquefois j’examine ma conscience: s’agit-il d’un attachement et d'une affection exagérée ? Non, ce ne l’est pas. Et je reste en paix. Jésus voit et Jésus le sait. Je n’échangerais pas l’amour de Jésus contre l’amour de mon Père et celui de toutes les créatures du monde entier. Jésus est le commencement et la fin de ma vie ; c’est sans doute Lui qui a ainsi uni nos âmes.

Quatre ans après notre dure et douloureuse séparation, quand je croyais ne plus pouvoir résister aux désirs et aux souhaits de vous voir revenir m’encourager et guider mon âme vers Jésus, un coup encore plus dur est arrivé. Un douloureux poignard a été enfoncé dans mon cœur: ce poignard ne sera plus enlevé, et la blessure de celui-ci ne se refermera pas avant que vous ne retourniez ici.

J’ai attendu jusqu’au dernier moment, convaincue que vous ne partiriez pas. Mais, que Jésus soit loué ! Toute la vie ne suffira pas, toute l’éternité ne suffira pas pour le remercier d’une aussi grande grâce: il est venu Lui-même me raffermir et m’apporter résignation. J’ai beaucoup pleuré, mais silencieuse, calme et sereine.

Le malin m’a tourmentée m’inspirant des doutes et en me montrant ma vie comme inutile, mais, avec la grâce de Dieu, j’ai tout vaincu et, ce me semble, sans offenser Jésus. Il sait très bien que s'il me manque, tout me manque. Il connaît l’abandon dans lequel je me trouve...

Le Père Umberto est bien mon ami et comprend très bien mon âme, mais très vite, lui aussi, a été interdit de venir.

Toutefois, bien qu'il me comprenne et m’ait soutenue dans des heures aussi tragiques, j’ai toujours senti que mon Père spirituel était la première et la dernière lumière de mon âme. Vous n’avez jamais cessé d’occuper dans mon cœur la même place; Jésus ne vous a pas enlevé de là. Vous étiez et êtes toujours le premier pour qui je prie. Et le Père Umberto, le pauvre, me disait :

Je ne veux en aucun cas m’ingérer dans les affaires d’autrui. Je ne veux que soutenir votre âme. Votre vrai directeur c’est le Père [Pinho].

Pauvre de moi, et pauvre Deolinda, si le Seigneur, tout au long de ces années ne nous avait envoyé un médecin aussi bon et saint! Personne ne voudrait se trouver dans sa situation. Il est notre ami, ami solide de la cause de Dieu; il est aussi votre ami, mon Père, un ami sincère...

Le Père Alberto lui aussi m’aime bien, et sais très bien pardonner les péchés. Que beaucoup de grâces et louanges soient rendues au Seigneur !...

A quand l’heureuse nouvelle de votre retour, avec la liberté de pouvoir prendre soin de mon âme jusqu’à la fin des fins ?...

   

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