Ce
Saint, que quelques-uns appellent aussi Robert, quitta le
monde pour se retirer dans le monastère
d'Orbais, dont il fut depuis
abbé. On l'arracha ensuite de sa solitude, pour lui confier le
gouvernement de l'église de Reims.
« Saint
Rieul — raconte Flodoard — eut pour successeur saint
Rigobert, son parent selon la chair, et né d'une illustre famille au
pays de Ribemont. Son père, nommé Constantin, était du même pays,
mais sa mère était originaire du Portien. Ce Rigobert fut homme de
saintes mœurs, et orné de grandes vertus. A son entrée à l'évêché,
il trouva beaucoup de choses à réparer et le fît avec succès. Il
réforma la règle des chanoines, leur assigna un entretien suffisant,
leur donna quelques terres, et leur forma un trésor commun pour
leurs nécessités. »
Le même historien
affirme que saint Rigobert « affecta des serfs au service des
chanoines, constitua les pauvres de Jésus-Christ héritiers de ses
biens, qui pouvaient monter à quarante arpents ou plus. Il établit
des colons
dans divers villages du diocèse, et régla leurs charges et
services. »
« Enfin — continue
Flodoard — il obtint du roi Dagobert
des lettres d'immunité pour son église, lui remontrant que sous tous
les rois Francs ses prédécesseurs, depuis le temps de saint Rémi et
du roi Clovis, par lui baptisé, elle avait toujours été libre et
exempte de toute servitude et charge publique. Le roi donc, voulant
ratifier ou renouveler ce privilège, de l'avis des seigneurs de son
conseil, et dans la même forme que les rois ses prédécesseurs,
ordonna que tous biens , villages et hommes appartenant à la sainte
église de Reims ou à celle de Saint-Rémi, situés ou demeurant tant
en Champagne, dans la ville ou les faubourgs de Reims, qu'en
Austrasie, Neustrie, Bourgogne, pays de Marseille, en Auvergne,
Touraine, Poitou, Limoges, et partout ailleurs dans ses pays et
royaumes, seraient à perpétuité exempts de toute charge ; qu'aucun
juge public n'osât entrer sur les terres de ces deux saintes églises
de Dieu, pour y faire séjour, ni y rendre aucun jugement, ou lever
aucune taxe ; enfin, qu'elles conserveraient à toujours les
immunités et privilèges à elles concédés par les rois ses
prédécesseurs. »
Il remplit les
devoirs de sa charge avec un zèle vraiment apostolique. Ayant été
injustement exilé sous Charles-Martel, il souffrit cette disgrâce
avec patience : mais Pépin,
frappé de tout ce que l'on disait de sa sainteté, procura son
rappel. Lorsque le Saint, revenu de son exil, vit son siège occupé
par Milon, il se retira au village de Gernicourt, à quatre ou cinq
lieues de Reims, où il mena une vie cachée dans les exercices de la
prière et de la pénitence. Il mourut vers l'an 740, et fut enterré
dans l'église de Saint-Pierre, qu'il avait fait bâtir à Gernicourt.
Dieu ne tarda pas à glorifier son serviteur par différents miracles
qui s'opérèrent à son tombeau. En 864, Hincmar transféra les
reliques de saint Rigobert à l'abbaye de Saint-Thierry, et neuf ans
après, à Saint-Denis de Reims. Foulques, successeur d'Hincmar, en
fit une troisième translation dans l'église de Notre-Dame. On les y
conserve encore dans une belle châsse. Il y a une portion de ces
reliques dans l'église de Saint-Denis de Reims, et une autre dans la
cathédrale de Paris, où est une chapelle dédiée à S. Rigobert. |